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University of Ottawa
littp://www.archive.org/details/loeuvrecompletdeOOdela
UOEUVRE COMPLET
DE
EUGÈNE
DE^
L
;IX
PEINTURES DESSINS GRAVURES LITHOGRAPHIES
iSi3- i863
''!'•,
AUX DONATEURS GENEREUX
QUI ONT OEFERr A L'ADMIRATION PUBLIQUE
EN LES F'LAÇANT DANS LES MUSÉES DE LEUR PATRIE
LES ŒUVRES DE
EUGÈNE DELACROIX,
NOUS DÉDIONS RESPECTUEUSEMENT
CE LIVRE.
AUX DONATEURS DU MUSÉE DU I.OUVRF. :
ADOLPHE MOREAU PAUL DE LAAGE
MAURICE COTTIER HIS DE LA SALLE
JENNY LE GUILLOU.
AUX DONATEURS DES MUSÉES DE PROVINCE :
ALFRED BRUYAS CHARLES DIÉTERL!
HORACE DE CHOISEUL AUGUSTE BERLIN
LE GÉNÉRAL DELACROIX PHILIPPE ROUSSEAU.
AUX DONATEURS DES MUSÉES DE l'ÉTRANCER :
J. P.. PESCATORE
LA DUCHESSE COLONNA d'iSTRLV.
L'OEUVRE COMPLET DE
A^
EUGÈNE DELACROIX
PEINTURES DESSINS GRAVURES LITHOGRAPHIES
CATALOGUÉ ET REPRODUIT PAR
ALFRED ROBAUT
COMMENTÉ PAR
ERNEST CHESNEAU
OUVRAGE PUBLIÉ AVEC LA COLLABORATION DE
FERNAND CALMETTES
PARIS. CHARAVAY FRERES ÉDITEURS
4 rue de Furstenberg
i8S5
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NÙ
' D33 /?6
AVERTISSEMENT
DES ÉDITEURS
ECONSTiTL'ER Timposant ensemble de pensées, le monde superbe de formes
et de couleurs conçu par la haute et féconde intelligence, réalisé par le
pinceau magnifique de Eugène Delacroix : tel est Tobjei de ce livre. Les
auteurs ont voulu évoquer ce grand souvenir dans l'âme de tous les admi-
rateurs du maître; ils ont voulu fixer dans le présent comme en vue de l'avenir
cette vision si glorieuse pour notre école française au dix-neuvième siècle. Dans
cette intention on a dressé un Inventaire complet de ses peintures et de ses des-
sins, des gravures et des lithographies sorties de sa main et des reproductions gravées
et lithographiées d'après ses ouvrages. On a, pour cet inventaire, adopté l'ordre
chronologique, qui a paru le plus simple, le plus clair, le plus instructif. Une
table analytique et un index alphabétique faciliteront d'ailleurs toutes les recher-
ches. En effet, la constante préoccupation qui a présidé à ce long travail a été d'en
faire, non un livre d'apparat, mais un véritable manuel de l'œuvre de Delacroix,
une sorte de Dictionnaire que tout conservateur de bibliothèque ou de musée, le
collectionneur, le travailleur, Thistorien de l'art, le vendeur et l'acquéreur, pussent
interroger constamment, manier sans difficulté et ouvrir à tout instant avec la certi-
tude d'y trouver aussitôt le renseignement désiré.
Cet inventaire, si exact et si complet qu'il fût, manquerait d'un élenient d'infor-
mation essentiel, s'il ne donnait que des documents écrits, des mesures, des dates,
des noms de personnes et de lieux. Le moindre trait de plume ou de crayon, en
matière d'art plastique, parlera toiijours plus clairement aux yeux et à l'esprit que
les descriptions les plus précises et les plus éloquentes. Il fallait donc au texte du
catalogue ajouter le document par excellence, l'image. Il eût été facile de faire
exécuter une vingtaine de belles planches d'après les compositions principales, mais
cela n'eût pas rempli le but d'utilité pratique qu'on se proposait. Ce livre ne pouvait
être un Livre de vérité qu'à la condition de mettre sous les veux des amateurs la
meilleure partie de l'œuvre immense de Delacroix.
VI AVERTISSEMENT DES EDITEUR;
Mais comment réunir de nouveau tant J'ceuvres dispersées? Cette noble tâche,
toute de conscience et d'obstination généreuse, a été accomplie au prix de mille
ililTicultés dont on ne saurait se rendre compte, par un admirateur p;issionné du
maître, M. Alfred Robaut, qui a consacré plus de vingt ans de sa vie à rechercher ses
aaivrcs partout où il pouvait les rencontrer, en France et à FÉtranger, dans les mo-
numents publics et dans les musées, dans les collections privées, dans les ventes, etc.
Il en a relevé avec une exactitude scrupuleuse les dimensions, les provenances,
la signature, les détails de composition, de couleur et d'harmonie. Non content d'en
dresser ainsi le catalogue, il les a dessinées; et ses dessins, exécutés à la chambre
claire par une main expérimentée, qui possède à fond le caractère du talent de
Delacroix, sont d'une justesse absolue dans leurs petites dimensions. C'est dans ces
dimensions restreintes qu'il était précieux de les avoir pour soumettre au public, en
un seul volume et dans un format maniable, un ensemble si considérable de pro-
ductions. Sulilsant pour rappeler nettement la composition de chaque ouvrage, et
pour mettre en évidence les variantes entre les sujets plusieurs fois répétés, le procédé
en croquis de .M. Alfred Robaut ne prétend point aux mérites spéciaux de l'inter-
prétation par le burin ou l'cau-forte; sa seule prétention, pleinement justifiée, est
d'être exact et clair.
Mais un catalogue, même illustré — c'est-à-dire une suite de documents dressés sur
mi type uniforme — pouvait difHcilcmcni être présenté au public sans être accompagné
d'un commentaire qui éclairât le sens, l'intention, la portée de Pœuvre cataloguée
et répandit plus de lumière sur la vie com.me sur le talent de Eugène Delacroix.
Le soin de ce commentaire a été confié à l'un des maîtres de la critique moderne,
M. Ernest Chesneau.
Si heureuse que fût cette colla'boration, cùt-clle suffi à mettre en pleine, valeur
un tel ouvrage, dont l'exécution matérielle offrait des difficultés exceptionnelles?
L'introduction des vignettes dans le texte et l'extrême division de la matière typo-
graphique conipliquaient singulièrement la mise en pages et exigeaient une surveil- I
lance incessante autant que savante. Un homme de troùt, à la fois érudit et peintre, i
M. Fernand Calmcttes, qui s'est déjà distingué par la direction de grandes publi- i
cations de librairie, nous a prêté un concours assidu et dévoué.
Nous avons également trouve un collaborateur très actif en notre imprimeur }
M. Claude Motteroz, qui a su former un personnel d'élite et s'assurer, par sa science (
technique et son amour du beau, une des premières places parmi les typographes j
modernes. |
M. Charles Gillot, qui, par ses recherches constantes, a su rendre plus délicat et 1
pki5 pariait le procédé ^ic g;;;\;,re i'ivonié p-j.': >on p''i'e, a d'jur'é lOLis ses >oins à la ;
.WKRTIS.sF M r.NT 1)1~
I) I T F. U R S
icjiroJiiCîio'') des dessins de M. Alfred l^oh;uii. Nous lui adressons nos sincères
remerciements.
Nous devons encore exprimer notre reconnaissance à MM. les collectionneurs,
amateurs, artistes, conservateurs de musées, éditeurs et marchands, qui nous ont
ouvert leurs galeries ou prêté leitr concours, et nous ont aidés à connaître et à
reproduire des œuvres du maitrc ignorées. M. Maurice Tourneux, qui a bien voulu
relire nos épreuves, nous a fourni quelques renseignements très utiles.
Rendons entin l'hommage qui lui est dû à Tamateur si regretté, à Thistorien
consciencieux qui a ouvert la voie dans Tétude descriptive des œuvres de Delacroix.
M. Adolphe Moreau, qui avait appris de son père à connaître et à aimer les maîtres
modernes, a profité de sa haute situation de fortune et de son grand goût pour
réunir dans ses collections quelques-uns des plus beaux tableaux de Delacroix et
pour dresser Tinventaire des p^roduciions du même maître. Cet inventaire qui parut
en 1873, est sans conteste le point de départ de notre livre; mais, venant après
M. Moreau, aidés de son travail, les auteurs ont voulu éviter les critiques qui lui
avaient été adressées, adopter un plan plus simple, faciliter les reclierches par des
tables méthodiques, corriger des erreurs de détail et surtout combler des lacunes
sérieuses en décuplant le nombre des ouvrages décrits.
CHARAVAY FRÈRES.
NTRODUCTION
JSL.
iSTORiENS de l'art, comment nous défendrions-nous d'une e'motion
profonde au moment d'entrer en contact avec les hommes de
génie, d'en retracer la vie et d'étudier leurs œuvres? Cette
émotion, à tous ceux qui les approchèrent, la majesté de leurs
créations aussitôt l'imposa. A travers les siècles , elle s'est
transmise jusqu'à nous, toujours grandissante, augmentée du respect des
générations, dont chacune ajoutait une auréole élargie au précédent rayon-
nement de leur gloire.
Cependant, il 3' a des nuances intéressantes à noter dans le sentiment que
les grands maîtres nous inspirent. Les uns, génies parfaits, calmes, lumineux,
n'éveillent en nous, à l'appel de leur nom, que des idées sereines et limpides;
nous avons pour leur mémoire un culte mêlé de tendresse. Les noms de
]\lichel-Ange et de Rembrandt, de Léonard et d'Albert Diirer, celui de Beetho-
ven évoquent dans notre esprit l'image de génies plus inquiets, peut-être plus
troublés, à coup sûr plus troublants, tantôt s'éloignant d'un grand vol à de
bien plus hautes distances de l'homme et tantôt pénétrant au plus intime de
l'âme humaine. Il s'ajoute, en dépit de nous-mêmes, à notre admiration pour
eux, cette sorte d'attirante terreur qu'entraîne après soi le sublime et constant
attrait de l'inconnu.
Eugène Delacroix fait partie de cette illustre famille d'artistes mj'stérieux
sur lesquels i'enquêle reste à jamais ouverte. 11 appartient à ce groupe d'esprits
supérieurs que l'admirable philosophe R. W. Emerson nommait : les Re-
présentants de l'Humanité, Represcntatii'c Mcn. Mais en outre, il propose à
nos sympathies un titre plus impératif encore. Delacroix est la manifestation
suprême, dernière, et la plus haute en ce siècle du génie français dans l'art. 11
INTRODUCTION A
continue, en lui donnant un formidable coup d'aile, le mouvement de nos
chers maîtres français du dix-huitième siècle. Ils ont repris, ceux-ci, très large
enfin après cinquante ans d'oubli, de dédain, leur place au premier rang dans
l'histoire de notre art. C'est que leurs œuvres sont formées du plus pur rayon
de l'esprit national, c'est que nos petits maîtres (on dit aussi « les petits
maîtres du Nord » d'hommes dont quelques-uns furent grands), c'est que ces
hommes sont plus et mieux que des peintres, mieux que de simples V03^ants ;
ils ont les dons si précieux de leur race : l'intelligence, la clarté, la variété,
l'enjouement. En outre, ils ont su être sincères, sinon toujours vrais, et, sans
pédantisme, faire une prodigieuse dépense de talent.
Avant eux, quels sont les maîtres vraiment français? — Au seizième siècle
la tradition flamande essa3-e bien de se franciser avec les Clouef, mais
avec les frères Le Nain seulement apparaît la première lueur d'un art natio-
nal qui ne dut rien à la triple tradition de l'Antiquité, du Moyen Age ou
de la Renaissance.
Sauf ces exceptions, restées si obscures, l'Ecole se fait toute italienne, toute
florentine. Au di.\-septième siècle. Le Sueur seul est Français, et dans une
expression restreinte de son art, dans sa Vie de Saint Bruno ; tout le reste de
son ceuvre est romain, romain comme l'œuvre entier de Poussin, dont le trop'
prudent génie s'épuise à effacer en lui toute trace de sa nationalité. Si l'em-
preinte française résiste aux efforts du philosophe des Andelys, c'est à son
insu et com.me malgré lui. Les grandes renommées du dix-septième siècle
après Poussin : Le Brun, .Mignard, Jouvenet, se perdent dans l'imitation
emphatique, dans la convention lourde et pompeuse, dans le ballonnement,
dans le boursouflé où l'académisme infectieux des Bolonais avait conduit le
mouvement si original et si honnête, si noble et si humain de l'Italie renais-
sant à l'art.
De ces mains pomt maladroites, mais solennellement ennuyeuses, l'art tout à
coup monte aux mains de "VV'atteau, de Boucher, de Fragonard, de Chardin,
de Prud'hon, disons même de Greuze. Ils se succèdent l'un à l'autre, se par-
tagent le dernier siècle, et, en dépit des Lagrenée, qui se cramponnent à la tra-
dition immobilisée, glacée, ce sont eux, ces petits maîtres, qui fondent l'Ecole
française et qui sont les seules gloires de leur époque.
Us ont eu double méi-itc. Peintres, c'est-à-dire, au point de vue de la
L'ŒUVRE DE DELACROIK XI
technique, hommes de métier, ils sont revenus à l'étude directe des beautés
naturelles, saisies dans la pleine lumière du soleil; artistes, c'est-à-dire, au
point de vue de la conception, poètes, ils ont renoncé à la mythomanie du
grand siècle, ils ont relégué au magasin d'accessoires toute la friperie m3-tho-
logique, tous les mannequins héroïques, qui trompèrent tant de gens et firent,
pour un temps, considérer comme créateurs des metteurs en scène qui n'étaient
que d'habiles gens, des artisans de quelque adresse en marqueterie pitto-
resque.
Tant de fantaisie, d'éclat, d'imprévu, tant de songes ailés sous la brosse
de Watteau, tant de grâce chez Boucher, d'esprit chez Fragonard , tant
de finesse chez les Saint-Aubin, chez les vignettistes, tant de volupté chez
Clodion, tant de vérité, de pénétrante observation chez La Tour, tant de science
enfin et tant d'honnêteté, de force, de grandeur sous une apparente simplicité,
de tels miracles de couleur dans le talent de Chardin ne purent sauver l'École
française.
De la liberté conquise elle abusa jusqu'à la licence, et l'homme au
cothurne, le plus brutal et le plus froid des maîtres — car c'était un maître —
éteignit le soleil dans les arts, étouffa toute vie, tout ra3'on, toute vérité, toute
passion en peinture, et, par suite, dans toutes les manifestations plastiques. Rien
de ce qui exige du go'ùt n'échappa aux atteintes de la férule. Jusqu'au mobi-
lier, jusqu'à la mode, tout se fit pétrifiant d'ennui sous l'influence de David. Et
cependant une page, digne d'un plus grand que lui, dans l'œuvre de David,
son Marat assassiné^ ce .Marat, sinistre héros d'une belle peinture, aurait dû
suffire pour éclairer cette dure intelligence et l'amener à la seule théorie vraie
en fait d'art : la passion.
Car voilà ce qu'ils avaient et ce qu'ils étaient, ce qui les grandissait, les
exaltait, les faisait artistes, les artistes du dix-huitième siècle : ils cro3'aient à
quelque chose, ils croyaient au plaisir^ l'aimaient, voulaient le rendre et, sous
toutes les faces, le représenter, le communiquer; ils avaient une passion, celle
de la grâce élégante, de tout ce qui est aimable, charmant, fait pour plaire, la
passion de la femme, de tout ce qui la touche, l'accompagne, lui est séant, en-
cadre et fait ressortir les séductions de sa beauté. — Sans doute, un peuple
artiste peut avoir une passion plus noble, mais telle quelle cependant, il n'en
fallait pas davantage pour créer tout un art.
Et le plaisir lui-même, à bien y regarder, n'a-t-il donc pas sa noblesse, lui
aussi, et même sa moralité! L'art du plaisir est-il un art frivole? On l'a dit.
Mais, qui dit cela: Le très suspect puritanisme des races m^'stiques et icono-
clastes qui condamnent Part, même le plus élevé, comme un plaisir. Tous les
grands civilisateurs pourtant ont affirmé la grandiose importance des arts et
des enchantements qu'ils suscitent; ils ont préconisé l'utilité sociale et la né-
cessité humaine des jeux, des fêtes, du plaisir.
Dans les angoisses du combat pour l'existence, dans l'incertitude de l'équi-
libre social, diins l'amertume, dans l'étonnante et constante tristesse des
temps, ces délicatesses, ces gaietés, ces voluptés mettent un rayon de lumière
qui illumine les sévérités, les soucis et les ombres de l'heure présente. A mer-
veille, elles s'associent aux mouvements graves et puissants de la philosophie
des empires, comme aux profondes ironies de la politique.
Il V a chez l'homme une réelle noblesse k vouloir et à savoir orner de cette
façon l'aridité de son séjour terrestre, à en dissimuler les douleurs et les ter-
reurs sous un voile de magniticence qui les pare sans les faire oublier.
Des esprits étroits, d'assez pauvres moralistes, chagrins plutôt qu'austères,
dépourvus d'histoire et de philosophie, ont confondu cette faculté privilégiée,
ce pouvoir de haute origine, avec le très vulgaire besoin de s'étourdir. Ils l'ont
comparé à la soif de quelques malheureux pour les boissons enivrantes. Ils
n'ont pas compris que le plaisir est une des lois éternelles de la nature
humaine, pratiquée par tous les peuples et dans tous les âges, loi nécessaire,
loi d'équilibre moral, loi d'harmonie vraiment providentielle.
Le comte Joseph de .Maistre a osé réhabiliter le bourreau : quel penseur
osera donc écrire la réhabilitation du plaisir et dire enfin tout ce qu'il y a dans
le plaisir de sto'icisme et de grandeur? Ce n'est point ma tâche.
Ma tâche ici est plus modeste et j'y reviens.
I
« Il ne nous reste sur la vie des grands maîtres que peu de renseignements
auxquels l'histoire puisse se fier. Il est fâcheux que nous soyons si mal
servis dans le désir naturel de nous instruire de ce qu'ils ont été, de la vie
(KlXRE de DELACROIX Xlll
qu'ils ont menée, car !c plaisir de jouir de leurs ouvrages ne nous suffit pas :
nous voudrions faire connaissance avec leurs personnes, bien plus, avec leurs
bizarreries et leurs passions; nous aimerions au moins à les trouver des
hommes comme nous, dans la partie la plus vulgaire de la vie. Peut-être
est-ce un secret sentiment de jalousie qui nous fait désirer de les rapprocher
de nous, en les abaissant à notre niveau. Peut-être est-ce un sentiment de ce
genre qui a contribué à défigurer leur histoire, les montrant quelquefois sous
un jour trop défavorable; comme aussi une admiration excessive s'est plu
souvent à les exalter outre mesure.
a Presque toujours, les événements de leur vie ont été arrangés selon le
caractère qu'on leur supposait d'après leurs ouvrages. Tantôt ce sont des
apologies écrites par leurs élèves et leurs amis, tantôt ce ne sont qu'anecdotes
et traditions incertaines, recueillies par des hommes d'une époque postérieure
à celle où ils ont vécu.
'( On a peine à se figurer qu'ils étaient souvent des hommes simples,
s'ignorant presque eux-mêmes, échauffés à la vérité par une passion douce
pour leur art, dont ils faisaient l'occupation la plus chère de leur vie;
poussés plutôt par un désir d'exprimer les idées qui les remplissaient que de
jouer un rôle et de poursuivre un fantôme de réputation. En général, on ne
s'est occupé d'eux qu'après leur mort, ou après que leurs ouvrages, ayant jeté
beaucoup d'éclat, il était difficile de remonter aux événements qui avaient
entouré le berceau de leur renommée. On peut donc dire qu'ils ont reçu la
noblesse de leurs ouvrages, au rebours des gentilshommes, enfants souvent
dégénérés d'illustres pères. Cet éclat de leurs travaux, en rejaillissant sur leurs j
personnes, est venu trop tard pour adoucir l'amertume d'une vie si souvent j
pleine de traverses, et n'a presque jamais servi qu'à éclairer leurs derniers pas
dans une carrière pénible. » j
Ces regrets, qui sont en même temps des vœux quant à la façon dont il '
faudrait écrire la biographie des inaîtres, c'est un maître qui les a exprimés,
c'est Delacroix lui-même dans son Essai sur les artistes cclchres (ancienne
Revue de Paris, tome XI, page i38). Nous devons donc en tenir compte.
C'est pourquoi, et nous ne nous lasserons jamais de le faire, appelé à parler
une fois de plus de l'œuvre considérable d'un génie si complet, il nous a paru
intéressant de u remonter aux événements qui ont entouré le berceau de sa
XIV INTRODUCTION A
renommée », de rechercher la genèse de son talent, de retracer, poi:r em-
ployer le mot si juste de Gœthe, ses « années d'apprentissage. «
Les historiens de Eugène Delacroix ne le prennent habituellement qu'en
1^22, à ce premier Salon ot^i il exposa. Dante et Vifffile. Arrêtons-nous d'abord
aux neuf années qui précèdent : i8i3-i822.
\Delacroix (Ferdinand -Victor-Eugène) est né le 7 floréal un Yl (2(5 avril
1708), à Charenton-Saint-Maurice, aux portes de Paris. Son père, alors mi-
nistre de la République Française auprès de la République Batave, ancien
avocat au parlement, avait été secrétaire de Turgot, puis député de la Marne
h la Convention; plus tard, il fit partie du Conseil des Anciens, fut ambassa-
deur en Hollande, préfet des Bouches-du-Rhùne, après le iS brumaire, et enfin
de la Gironde. Il mourut à Bordeaux en i8o5. — Sa mère, une demoiselle
Œben, était d'une famille d'artisans-artistes, fille de l'ébéniste Œben, lui-
même élève de BouUe, et qui réparait les œuvres de son maître. Il sculpta
des bordures d'estampes pour la grande marquise. Madame de Pompadour;
cela seul est un brevet de maîtrise.
Le plus lointain souvenir que l'on ait sur Eugène Delacroix a été conservé
par Alexandre Dumas père dans un de ces récits où son invention de roman-
cier n'était point chiche d'ornements imaginaires ajoutés à un fond de vérité.
« La jeunesse de Delacroix, dit-il, fut un accident éternel. A trois ans, il avait
été pendu, brûlé, noj'é, empoisonné, étranglé.» Le docteur ^'éron, dans ses
Méi7ioires d'un Bourg-eois de Paris, répète l'anecdote pour lui avoir été
confirmée par le maître, à qui il aurait dit à ce sujet : " La Providence
voulait que vous fissiez le Massacre de Sci'o et vous réservait un siège à
l'Institut. )^ On retrouve la trace des mêmes faits dans les Notes de Léon
Riesener publiées par M. Philippe Burty.
Il nous reste sur l'enfance de Delacroix d'autres témoignages où apparaît sa
personnalité. M. Edouard Rodriguos, un beau et excellent vieillard, bien
connu du monde musical, et mort récemment, racontait à i\I. Alfred Robaut,
qui nous l'a rapporté, comment il Pavait connu. « J'étais bien jeune, quand
je vis Eugène Delacroix pour la première fois, disait M. Rodrigues. J'avais
dix ans, et lui, sept. C'était chez un de ses oncles, ami de mon père. «Vo3'ons,
Eugène, travailles-tu bien?» lui dit son oncle. < Oh! oui, tiens, je vais te
réciter la dernière fable que j'ai -Dorise. »
L'ŒUVRE DE DELACROIX XX'
Fi il se mit à débiter avec (eu ces quelques vers :
Un bloc de marbre e'tait si beau
Qu'un statuaire en fit l'emplette.
Qu'en fera, dit-il, mon ciseau?
Sera-t-il dieu, table ou cuvette?
Il sera dieu; même je veux
Qu'il ait en sa main un tonnerre.
Tremblez, humains
Il paraît que ces derniers mots surtout furent prononcés d'une façon si
énergique, déclamés avec un accent si terrible, qu'on ne pouvait croire qu'ils
sortissent de la bouche d'un enfant. Son jeune ami en fut frappé au point de
ne jamais l'oublier. Déjà il avait le feu, la passion, la faculté de s'assimiler et
d'exprimer, qui fait les grands artistes dramatiques. Ne faut-il pas voir là
l'origine du penchant que Delacroix eut toujours pour le théâtre comme pour
le roman d'action et qui lui inspira tant d'oeuvres admirables, notamment les
scènes de Faust ^ de Gœ/- de Berlichingen. d'Hamlei, du Co7'saire, de Lai'a,
du Giaour, d'h'anhoè'? Evidemment il n'arrivait à cette justesse si expressive
du geste, à une mimique si caractéristique du mouvement, que par la spon-
tanéité avec laquelle il évoquait le personnage du poète, entrait dans son rôle,
se le jouait à lui-même, comme il le comprenait et comme il eût voulu qu'on
l'eût représenté. Formuler ainsi un type original et lui donner !a vie, est
le don le plus précieux du comédien. Delacroix l'avait.
On sait aussi, par Riesener, par ^l. Moreau, qu'il eut très jeune un goût
déclaré pour la musique, il le conserva toute sa vie. Ses lettres en font foi. Ce
goût eut même chez lui, pendant quelque temps, l'ardeur d'une vocation qui ne
céda qu'à l'entraînement d'une vocation plus forte. En 1824. à l'époque du
Massacre de Scio, il n'avait pas encore abandonné son instrument favori, le
violon, sur lequel il se plaisait à retrouver les mélodies des No:{:^e, de Tancrède,
de Don Juan, entendues la veille. Auditeur assidu des concerts du Conservatoire,
plus tard il ne manque pas une soirée d'Halévy, de Berlioz; il est l'anii de
Franchomme, d'AUard, de Prudent, de Batta, de Delsarte, de Valentin Alcan,
ce grand maître ignoré, de Chopin surtout dont, à diverses reprises, il fit le
XVI !NTR0DUC'I"10N A
portrait. L'émotion musicale inspire le peintre. "Il nous souvient à ce propos,»
dit M. Moreau. u qu'un jour du mois d'août i856, visitant avec Delacroix ses
fresques de Saint-Sulpice. encore enveloppées de leur chemise de planches, il
nous montrait avec complaisance cet ange magnifique qui, dans le tableau de
VHéliodore, frappe le profanateur de sa verge vengeresse. Le morceau venait à
peine d'être achevé et le maître attribuait sa réussite exceptionnelle à cet état
indéfinissable de la pensée dans lequel l'avaient plongé les sons de l'orgue jouant
le Dies ira'. Et à l'appui de cette observation, il se plaisait à nous citer un se-
cond exemple de la sensation éprouvée et du résultat obtenu, à propos de sa
Dcsci-'iite de Croix de l'église Saint-Denis du Saint-Sacrement ; là c'étaient les
chants religieux du mois de iNLarie qui. au dire du maître, avaient favorablement
influé sur l'exécution de son œuvre et lui avaient inspiré notamment cette pose
si douloureusement abandonnée de la Madeleine évanouie. »
C'est au Lycée Impérial Louis le Grand'; que Delacroix iit ses études universi-
taires. Il y eut pour condisciples le docteur Yéron et aussi Philarète Chasles,
cet esprit éminent, si large et si varié, que ses contemporains n'ont pas classé à
son véritable rang, très au-dessus des doctrinaires et des pédants pseudo-spiri-
tualistes. Philarète Chasles a, dans ses Mémoires, tracé du Delacroix d'alors
un portrait étrangement vivant et à coup sûr ressemblant.
« ...J'étais au lycée avec ce garçon olivâtre de front, à l'œil qui fulgurait, à la
face mobile, aux joues creusées de bonne heure, à la bouche délicatement mo-
queuse. Il était mince, élégant de taille, et ses cheveux noirs, abondants et cré-
pus, trahissaient une éclosion méridionale... Eugène Delacroix couvrait ses
cahiers de dessins et de bonshommes. Le vrai talent est chose tellement innée et
spontanée que, dès sa huitième ou neuvième année, cet artiste merveilleux repro-
duisait les attitudes, inventait des raccourcis, dessinait et variait tous les
contours, poursuivant et torturant, multipliant la forme sous tous les aspects
avec une obstination semblable à de la fureur... Tout était véhément chez
Delacroix, même son amitié, qu'il m'a conservée jusqu'à la mort... "
C'est Delacroix en i8i5. Il était encore au lycée. Déjà, connaissant le peintre
Guérin, il allait voir chez ce'ui-ci ses tableaux du Salon et se proposait de passer
quelque temps dans son atelier, quand <' il ne serait plus à ce lycée, pour avoir
au moins un petittalent d'amateur. » ^Lettre du zb août i8i5.) Les premières
impressior.s pittoresques lui vinrent, d'après Riesener.des .Viîr(rr5 du Corrège,
l.'O.UVRK DE DELACROIX XVII
qui nous turent enlevés précisément en cette année iSi3. Beaucoup plus jeune,
il assistait fort ému à l'exécution du médaillon de son père par un sculpteur
italien, et ce n'est pas une hypothèse gratuite que d'attribuer une égale influence
à la vue d'une peinture de Goya qu'il eut constamment sous les yeux pendant
toute sa jeunesse, et même beaucoup plus tard. Je parle du portrait de M. Guil-
lemardet, ami et collègue de son père à la Convention, et qui avait signé
comme témoin à son acte de naissance. Les fils de ce Guillemardet restèrent
les plus intimes amis de Delacroi.x. Le portrait est aujourd'hui au Louvre.
« Dès sa huitième année, il couvrait ses cahiers de dessins et de bonshommes.»
dit encore Philarète Chasles. On en connaît même d'une date antérieure. Sur
un petit almanach de 1804, décrit par M. Burty, on rencontre des dessins enfan-
tins à la mine de plomb, une marguerite, un profil de jeune homme, deux
urnes, deux bonshommes debout.
En 181 3, il dessine pour son camarade de collège, Blondel, le frontispice d'un
petit album qu'il accompagne d'une soixantaine de vers (i) où l'imagination res-
sort déjà dans toute sa tendre souplesse. Si les vers sont malhabiles, les idées
sont charmantes et pleines de cœur. Deux amis embrassent des carrières
opposées. Lui, Delacroix, étudie les poètes anciens et se dirige vers les lettres
et les arts. Ce qu'il veut surtout, c'est « rester simple » et « ne pas s'éloigner
de la nature ». Son ami, au contraire, suivra la carrière des sciences :
Le sentier que lu suis est plus âpre et plus rude.
Et il exprime la crainte que la diversité d'études ne refroidisse leur amitié :
Don du ciel, aimable amitié,"
Je crois pouvoir compter encore
Sur celui que choisit mon cœur.
Combien je bénirais ton heureuse puissance.
Si tes efforts pouvaient combler mon espérance
Et d'un feu presque éteint ranimer la tiédeur!
Dès 1S14, il fait un premier essai de gravure sur un fond de casserole: un
bossu, un profil de « Bonaparte », un officier bien campé sur un cheval au galop.
Cela est encore un peu puéril, mais un burin de la même année est déjà très
(1) Voir au supplément (n° 1458) la composition qui accompagne ces vers.
X\"!Ii !NT?;;jnUCT10N A
supérieur. Dans les bLincs. sur ki pianchc, retrouvcecn quelque tiroir, d'un en-
tête de lettre ofricielle de la préfecture des Bouches-du-Rhône, il grave divers
motifs : un moine assistant un coudamné, une tète d'homme à cheveux longs,
que ie prendrais volontiers cour un portrait de Murât, et surtout un buste d'of-
tîcier portant cuirasse, écharpe et bâton de commandement, dans le goût des
cavaliers de Rubens et de '\'an Dyck A la sûreté du trait, ce dessin me paraît
exécuté d'après une ancienne gravure. De là date sans doute l'habitude qu'il
prit et conserva -< de faire c'naque iour des croquis en quelques traits d'après des
gravures dont il s'attachait à rendre le caractère le plus saillant. Rubens lui en
avait donné l'idée. Il avait lu quelque part que ce fut à ce: exercice journalier,
pendant le tem.ps qu'il passa en Italie, qu'il acquit une grande facilite, ainsi
qu'à des études profondes d'anatcmie. Celles que Delacroix a faites lui-même
et qu'il m'a données dans ce but sont extrêmement remarquables. » Ce détail
nous est fourni par M. Lassalle-Bordes dans certaines Notes comtnuniquées à
M. Philippe Burty, où l'ancien praticien de Delacroix a parlé de son maître
en des termes difficiles à qualifier, et qui n'ont fait de tort qu'à lui-même.
En iSi6, Delacroix entre chez Guerin, le peintre de Marcus Se.xtiis, qui
travaillait alors à son tableau de Euce et Didoii. Il s'y lia avec Géricault, déjà
célèbre pour avoir exposé Y Officier de chasseurs à cheval l.i'"^!2) et le Cuirassier
blesse 1814), mais qui venait encore à l'atelier pour y peindre le modèle vivant,
li entre alors dans la féconde période des études sévères, fortement discipli-
nées, dessinant sans cesse, d'un libre crayon, par le relief et le modelé, d'après
l'antique, d'après les maîtres italiens, au musée du Louvre; participant, sans
succès d'ailleurs, aux concours d'esquisse de l'École des Beaux- Arts, de 1818
à iS^e; préoccupé de Raphaël; copiant en maître l'Enfant-Jésus de la Belle
Jar\ii!!ière[cene copie atteignit en vente publique, en 188 1, le prix de 3,700 fr.);
peignant d'après nature et la figure et le cheval-, multipliant les portraits de ses
maîtresses, de ses amis, de ses parents; composant et achevant sur la demande
d'un ami. pour Fcgiise d'Orcemor.r. une Vierge des moissons toute imprégnée
de rapliaélisme; et entre tencs, comme un repos d'esprit, collaborant par la
caricature aux journaux satiriques de la Restauration : au Xain jaune et surtout
au 3//7-o/r; acceptant iSai d'exccuter au lieu et place de son ami Géricault,
déjà malade, une Vic^-se du SacrJ-Cccur pour un couvent de Nantes, prépa-
rant enfin le Dan-e e! l'irir:'c qui "e mit aussitôt hors de pair.
l.(KUVKF. 1)1-: DF,I.ACRO!\ Xl\
II —
Le Dante et ]''irgile, exposé au Salon de 1822, fait époque dans l'histoire de
recelé. Gérard, Gros, les deux maîtres écoutés de tous en ce temps-là, cxpiimè-
rent franchement leur sympathie pour le jeune talent qui se révélait tout à coup
et dans une direction si opposée à la leur. Gros dit : « c'est du Rubens châtié. »
Gérard dira bientôt : « il court sur les toits », mais inspire M. Thiers, le criti-
que du CoiisiitatiouJiel, qui le premier affirme l'avenir du jeune artiste.
Assurément ce début est éclatant, et Delacroix est déjà bien affranchi des
timidités et des disciplines excessives de l'époque : mais, visiblement, il estsous le
joug de son admiration pour Géricault, qu'il avait vu heure par heure exécutant
le Radeau de la Méduse dont certaines colorations se retrouvent dans le Dante.
— C'est deux ans après, en 1S24, par le Massacre de Sciu, que se révèle dans
tuute son originalité le génie de Delacroix. En face de cette scène de terreur et
de désolation, si émouvante et si vraie, il est important néanmoins de constater
que le peintre s'inspirait de lui-même, de sa propre émotion, de son imagina-
tion ardente. Il n'avait pas vu la Grèce, il n'avait pas assisté à ces com^bats dont
il retraçait la poignante image avec une vraisemblance que le spectacle de la
réalité peut-être lui eût enlevée. Nulle de ses œuvres ne le passionne autant. Il
y travaille deux grandes années « et cependant, « nous dit M. Moreau, « dans les
derniers mois qui précédèrent l'ouverture de TExposiiion, Delacroix dut redou-
bler de travail et d'efforts pour arriver à temps : tantôt il fait avec Emilie Robert,
son modèle favori, des séances de cinq heures pour achever le beau torse de la
femme traînée par le Giaour à la queue de son cheval; tantôt, mécontent tout à
la fois de la couleur et du dessin de ce cheval, d'abord peint en entier d'inspi-
ration, il va tout exprès à la poste aux chevaux avec Champmartin, puis au
manège avec Scheffer. demander à la nature cet accent suprême de vérité inu-
tilement cherché jusque-là. >. Et puis, toujours pressé par le temps, il confie à
ses amis Fielding et Soulier le soin d'ébaucher diverses parties du ciel, certains
coins de l'horizon, que néanmoins il lui faudra reprendre lui-même à la der-
nière minute.
Au sujet de ce tableau, M. F. 'N'illot, qui a bien connu Delacroix, a signalé
dans une revue obscure un fait capital qu'il faut rappeler. En cette année 1824,
un Français avait acheté des tableaux du grand paysagiste anglais John Cons-
table, dans l'inteniion de les ripporrer i Par:> a: d"en faire l'objet d'une spécu-
lation. Ils figurèrent au Salon. De".;croix. -ui avait été à même de voir ces
paysages avant l'exposition, frappé ie leur éclat e: de leur texture, rentre dans
son atelier, reprend son Massacre se Scio presque terminé, empâte ses lumiè-
res, introduit de riches demi-teintes, donne par des glacis de la transparence
aux ombres, fait circuler le sang e: palpiter îa chair. D'un seul coup d'ceil, il
avait surpris un des plus grands secrets de la puissance de Constable, secretqui
ue s'enseigne pas dans les écoles et çae :rop de professeurs ignorent eux-mêmes :
c'est que, dans la nature, une teinte qui semble uniforme est formée de la
réunion d'une foule de teintes diverses, perceptibles seulement pour l'œil qui
sait voir. — Cette leçon, Delacroix s'en était trouvé trop bien pour l'oublier
jamais. C'est d'elle qu'il conclut, soy?ns-en sûrs, à son procédé de modelé par
hachures.
En 1827, bravant les critiques passionnées qu'avait soulevées le Mass:icre de
Scio, Delacroix expose douze toiles. notamn::e.nt le Marina Faliero, celui de
tous ses tableaux de chevalet qu'il préférait et qui est, avec VÉvéque de Liège,
dont nous parlerons tout à l'heure, l'expression la plus exacte de l'art romanti-
que, la Mort de Sardar.apale. qu'il appelait son ^"\''aterloo, œuvre incomplète
d'ailleurs, avec des parties admirables, et le Chris' au jardin des Oliviers, qui
esta l'église Saint- Pau!-Saint-Lou:s. au Marais.
Au Salon de i83i, Delacroix reparait avec trois ouvrages: \t Richelieu disant
sa misse, qui a été brûlé dans l'incenile du Palais-Royal en 1848, la Liberté
guidant le peuple, et un chef-d'œu\Te. le ^Lissacre de l'évêque de Liège.
Je m'arrêterai longuement à ce dernier tableau qui résume tout le génie du
romantisme, sa passion pour ie moyen âge. l'intelligence qu'il en avait, et qui
montre la magnifique virtuosité de la 'crosse du maître à cette heure.
On sait que le motif est emprunté au r:man de Walter Scott, Quentin
Dunvard : « Guillaume de La IMark. surnommé le Sanglier des Ardennes,
aidé des Liégeois révoltés, s'empare du c'nàteau de l'évêque de Liège. Au milieu
d'une orgie, dans la grande salie et placé sur le trcne pontifical, il se fait amener
l'évêque, revêtu par dérision de ses ha'r-its sacres, et le laisse égorger en sa pré-
sence. " Exécuté en 18-27, ^^ tableau n'a été rxp:;é que cinq fois : au Salon de
1 83 1, aux Expositions universelles de Paris .;>rr et de Londres (i 862), à l'E.x-
position d'Alsace-Lorraine ■1S74 . e: chez M. Georges Petit (1884I. Jamais le
LŒUXRP: de DELACROIX XXI
grand artiste n'a poussé plus loin que dans cette œuvre la magie de la brosse,
il n'a jamais appliqué plus sûrement son merveilleux instinct de composition.
Dans la salle immense en hauteur et en profondeur, sous les gigantesques
trouées qui s'enfoncent dans une ombre sans limites, l'orgie se déroule en
ligne serpentine autour delà nappe chargée de mets, de lumières, de cristaux
et d'orfèvreries. L'évêque, paré de sa chasuble d'or, est amené par une foule
hurlante, en face du Sanglier des Ardennes. Ademi-dressé de l'autre côté de
la table, pesant de tout le poids de l'ivresse et de sa lourde armure sur ses
deux pomgs armés d'énormes gantelets, Guillaume de La .'\ïark donne l'ordre
d'assassiner le prélat. Déjà un boucher, les bras nus, tire son coutelas, le
meurtre sera consommé tout à l'heure; et la victime, pourtant, indifférente à
son propre sort, ne voit, ne fixe avec épouvante que les vases sacrés, profanés
par l'attouchement sacrilège des soudards et des filles; ses vieilles mains,
tremblantes d'horreur, se dressent vers le ciel. Les convives indifférents ou
railleurs se retournent, s'accoudent, se hissent sur les escabeaux, l'un d'eux
met un pied sur la nappe pour mieux voir; ils rompent ainsi, par la variété de
leurs attitudes, la monotonie de la ligne régulière. Du milieu des ténèbres
jaillissent quelques feux lointains, mystérieux, flammes vacillantes accrochées
aux fûts des hauts piliers, et çà et là quelques éclairs lumineux : la croix in-
cendiée parle feu d'une torche, le luisant pailleté de la crosse, la mître dorée,
couverte de pierres précieuses, que deux bras rouges de vin, en attendant
qu'ils se rougissent de sang, tiennent suspendue au-dessus de la tête du prélat.
-Mais le torrent de lumière part de la nappe éblouissante. Sur elle se détache
la silhouette élégante des hommes d'armes; c'est elle qui renvoie au visage de
Guillaume et des échevins de la ville, assis à ses côtés, l'éclat des fiam.beaux,
des plats d'or et des cristaux scintillants.
Delacroix, nous apprend yi. '^'illot, éprouva de grandes difficultés à réaliser
l'effet de la scène tel qu'il l'avait conçu. Aussi abandonna-t-il, à plusieurs
reprises, une œuvre qui ne le satisfaisait pas. Enfin, il s'}' remit définitive-
ment; l'homme debout vu de dos, à gauche, le préoccupait beaucoup, et il le
recommença sept ou huit fois. Quanta la nappe blanche, c'était suivant lui
le point capital du tableau. Un soir, en dessinant chez son ami, il lui dit :
« Demain, j'attaque cette maudite nappe qui sera pour moi Austerlitz ou
Waterloo. Venez à mon atelier à la fin de la journée. " M. A'illot fut exact au
XXII IXTIÎODUCTIOX A
rendez-vous. Delacroix , vécu d'une courte blouse de flanelle rouge, la palette
à la main, lui ouvrit, et, dès la porte, lui dit avec un sourire d'une fmesse inex-
primable, en pinçant les lèvres et en hochant la tête : « Eh bien! mon cher,
c'est Austerlitz ; vous allez voir cela. » En effet, la nappe blanche flamboyait
et illuminait la sanglante orgie. « Je suis sauvé, ajouta Delacroix; le reste ne
m'inquiète plus; je vais me mettre à l'architecture, je changerai ma disposition
première et m'inspirerai, pour la charpente de la voûte, des croquis que j'ai
faits au Palais de Justice de Rouen. »
Dans la pense'e de Delacroix, VErêqne de Liège devait surtout être vu à la
lumière de la lampe, éclairé par un réflecteur. C'est un artifice sans doute et
Ton peut trouver qu'en somme la plus belle lumière, celle des galeries publi-
ques, est la lumière du jour. Cependant nous avons vu le tableau dans les
conditions où Delacroix lui-même avait disposé cet éclairage factice. L'eftet
ainsi est vraiment saisissant, il tient du prestige dioramatique, rehaussé par
la hautaine énergie d'une création magistrale: c'est l'illusion d'une réalité
supérieure.
Eugène Delacroix, il est coutumier du fait, a introduit dans cette œuvre
admirable une expression tragique, il y a imprimé un aspect de grandeur
solennelle qui élève le tableau de chevalet aux proportions du tableau
d'histoire. Qu'importent les dimensions ! Le poète, en l'artiste, a compris, le
peintre communique le sentiment de la sanglante dureté du moyen âge. C'est,
dans cette page merveilleuse, la part de l'esprit. La part des yeux n'est pas
moins étonnante. L'exécution rappelle les plus beaux morceaux que l'on
pourrait citer des maîtres les plus divers. Non qu'il y ait in-iitation, mais
pour déiinir une telle virtuosité, il nous faut évoquer les noms des plus
opposés : Rembrandt, pour la puissance mystérieuse de la haute architec-
ture; Rubens, pour le prodigieux emportement de la facture dans le groupe
de l'évêque ; les Flamands, pour la finesse spirituelle des indications de
lumière sur les armes, les objets luisants, brillants, accrochant au passage un
éclair ou un reflet; Chardin lui-même, non comme procédé technique,
mais pour l'analogie du rendu de certains objets: telle coupe, telle pièce d'or-
fèvrerie, sans couleur propre, sans ton local, n'ayant de couleur que celle des
teintes environnantes, réfléchies dans une extraordinaire et savante mêlée de
reflets et de contre-reflets à l'infini entre-croisés et multipliés; Delacroix
L(1-;U\'HK LU:. L)1-:L.\CR()!.\ XXll
lout seul ennn, pour l'a! t e-xquis a\ec lequel il jeuc des notes échnamcs et
voilées tour à tour, et les rappels harmonieux de ses rouges pe'netrants et
hardis. Quelle belle application de cette théorie de Delacroix disantque : " S'il
faut ébaucher avec un balai, on doit terminer avec une aiguille, o
Décoré en 1(S3j, sans doute pour son tableau de la Libcrlé^Ccxr son talent
e'tait toujours furieusement contesté, Delacroix désormais ne manque pour
ainsi dire plus une Exposition. En ]832, il fait le voyage du Maroc et en rap-
porte les éléments de cet admirable joyau : les Femmes d\AIge)\ pour le Salon
de 1834. où i! expose aussi la Bataille de Nancj- ci l'Amende Hoiio}\7bh%dor)t
il avait emprunté le cadre, comme celui de VÉi'iqne de Liège, à l'admirable
salle des Pas-Perdus du Palais de Justice de Rouen, pendant une de ses excur-
sions (i8?i) à son cher pays de Valmont, près de Fécamp, " séjour de paix et
d'oubli du monde entier » (i). A ce même Salon, les bons juges d'alors refu-
sèrent la superbe i^cv/co ;?/;•(? de cavaliers maures, que Delacroix estimait assez
pourtant pour en faire lui-même une reproduction à l'eau-forte.
Rappeler le; principales œuvres exposées successivement, c'est dénombrer
les victoires du maître : iSSb^lc Prisonnier de Cliillon, pour ]e duc d'Orléans
(on refuse Hamlefy^ — i836, son premier Saint Sébastien; — iSSy, la Ba-
taille deTaillebourg^ pour A'ersailles;— iS3S, la Mcde'e, de Lille: les Coni'ul-
sionnaires; — 1839, Cléopalre ; Hamlet, la scène du cimetière avec Horatio
et les fossoj'eurs:, — 1840, le Trajan. de Rouen; — 1841, ]& Prise de Cons-
tantinuple par les Croisés^ pour le Musée de Versailles; la Barque de Don
A'a;/, léguée au Louvre par 'SI. Ad. Moreau.et la Noce Juive. Quel éblouisse-
ment! — 1845, le Marc-Aiir'ele,àt Lyon; la Sortie du Sultan Abd-el-Rhaman^
du Musée de Toulouse, et la Sibylle dont Rachel posa le mouvement; —
184(5, VEnVerement de Rébecca; Roméo et Juliette., cette aurore exquise: Mar-
guerite à l'Eglise; — 1847,1e Christ eu croix; Musiciens juifs; — i8q8,C7/7-?.^/
au tombeau; Mort de Valentiri; Mort de Lara; Comédiens arabes., du Musée
de Tours ; — 1 84Q, des Fleurs et des Fruits; une variante des Femmes d'Alger;
(i) Dans la plus ancienne lettre que l'on connaisse de Delacroix, adressée le 10 janvier
1814 à sonami Félix Louvet, le fils de l'auteur de Faublas, il donne des détails sur l'habi-
tation d'un de ses cousins, propriétaire, à Valmont, d'une ancienne abbaye de bénédictins,
qui lui a inspiré une foule d'idées romantiques. Ce mot, à cette date, sous la plume du futur
chef du mouvement romantique, n'est-il pas curieux à noter?
^^I^' INTRODUCTION A
Othello et Desdémone; V Arabe Syrien et son cheval, uneparle incomparable; —
iS5o-5i, La-are; le Giaoïir; Macbeth; le Bon Samaritain, si doux, si tendre;
— 1853-57, Saint Etienne; les Disciples d'Enunaus; Pirates enlevant une
femme; — 1859, son dernier Salon, où il semble réunir comme dans un
dernier et magnifique effort huit chefs-d'œuvre : la Montée au Calvaire; le
Christ au tombeau; Saint Sébastien; Ovide che:; les Scjthes; Herminie et
les Bergers; ïEnlèvement de Rébecca; Hamlet tuant Polonius; les Bords
du fleuve Sebou.
Je n'ai pas mentionné ici l'Exposition universelle de i853, où nous retrou-
vons un choix de trente-cinq tableaux empruntés aux musées, aux églises, aux
collections particulières. Ce fut un triomphe sans précédent, le triomphe de l'art
vivant sur Fart embaumé de l'école académique. Je ne me suis pas encore
arrête, mais j'y arrive, à ses admirables peintures décoratives : au Salon du Roi
et à la Bibliothèque de la Chambres des députés, à la Bibliothèque du Palais
du Luxembourg, à la Galerie d'Apollon du Louvre, à la chapelle des Saints-
Anges de l'église Saint-Sulpice, au Salon d'Hercule ou de la A7/'.vde l'ancien
Hôtel-de-Ville, brûlé en 1871. Dans cet œuvre décoratif immense, Delacroix
tour à tour fait passer sous nos yeux tous les drames qui s'agitent dans l'àme
hilînaine et dans la nature, et les revêt d'un somptueux vêtement de formes
et de couleurs, varié à l'infini, avec une fécondité que rien n'épuise ni ne lasse,
la fécondité sereine du génie.
On ne peut imaginer la somme énorme d'études, de préparations, de projets
de compositions qu'il prodigua dans ces travaux gigantesques. On connaît un
dessin du char d'Apollon pour le plafond du Louvre (voir page xxv). Ne restàt-
il du maître que ce croquis où il a fixé en quelques coups de crayon le vertige
du mouvement, cela suffirait pour révéler le génie absolum.ent original du
maître français. Jamais l'art d'aucune époque n'a exprimé avec une égale
puissance l'emportement d'allure des coursiers héroïques que la Fable attelait
au char d'Apollon. Avec quelle facilité d'invention pittoresque le grand artiste
a varié l'attitude des nobles animaux: deux d'entre eux sont lancés à l'allure du
trot tellement allongé, que les deux autres, pour les suivre, s'enlèvent au
galop. La différence du mouvement engendrcles plus curieuses combinaisons
de lignes décoratives. Malgré le prestige de la couleur dans l'œuvre achevée,
nous considérons l'étude de ce dessin, dont les moindres hachures ont un
L'ŒUVRE DE DELACROIX
XXV
XXVI INTRODUCTION A
sens si nettement intelligible, comme plus instructif encore que la peinture
elle-même.
A régal de tous les grands maîtres des écoles d'Italie, Eugène Delacroix a
eu, au degré le plus élevé, le génie de la décoration. Je ne parle pas ici de l'art
de remplir par des compositions ingénieuses certaines surfaces données par
l'architecture et d'un périmètre souvent bizarre. Cet art, Delacroix a montré
dans les pendentifs en forme d'hexagone irrégulier, à la Bibliothèque de la
Chambre des députés, à quel point il en était maître. Je parle des combinai-
sons purement décoratives où les accessoires et l'ornement jouent le rôle prin-
cipal. On peut voir dans le Salon du Roi ou des Fleuves^ de cette même
Chambre des députés, quelles prodigieuses ressources d'invention Delacroix
a mises en œuvre dans ce travail admirable, trop peu connu, et quelle rare
conscience il apportait à l'exécution des grandes pages décoratives qui lui
furent confiées! Chargé de peindre le motif central du plafond de la Galerie
d'Apollon au Louvre: Apollon vainqueur du serpeni Python, tx. voulant main-
tenir la plus parfaite unité entre son œuvre propre et le milieu destiné à la
recevoir, il commença par dessiner l'ordonnance architecturale de la compo-
sition de Le Brun, où son plafond allait s^encadrer, composition magnifique
d'ailleurs, dont l'éclat et les complications fastueuses ont déterminé les formes
mouvementées et les colorations puissantes auxquelles s'est arrêtée la volonté
réfléchie du maître.
Vingt fois, dans la décoration de la Bibliothèque de la Chambre des députés,
Eugène Delacroix a su remplir, avec la plus rare abondance d'invention, le
cadre exceptionnel que présentait chacun des pendentifs des cinq petites cou-
poles. La base étroite de l'hexagone irrégulier offrait de singulières difficultés
au développement de la composition qui, cependant, devaitêtre assise dans le
sens de la largeur. Delacroix, le plus grand génie décoratif du di.x-neuvième
siècle, en a triomphé, sans jamais se répéter, avec un bonheur d'imagination
toujours renouvelé. Les vingt pendentifs exécutés peuvent être vus et étudiés
sur place; niais que de projets qui, non réalisés, ont été retrouvés dans les
cartons du maître après sa mort! Il en est un : Jeunes Jîlles de Sparte s'excr-
çant à la Utile. Rien ne saurait exprimer la noblesse et la grâce touchante de
ces exercices charmants, l'élégance des mouvements, l'aisance des attitudes,
la souplesse et la force de ces jeunes corps, la science de la construction, la
LŒLVRi: DE DELACROIX XXV II
beauté des emmanchements. Cela rappelle, dans une forme d'art plus haute,
Tadmirahle sentiment du tableau qui appartenait cà feu M. Maurice Cottier :
Jeune tigre jouant avec sa mcre.
Mais ce qui nous arrête tout spe'cialement au point de vue de la composi-
tion, c'est la grandeur des groupes considérés isolémenî. et l'aspect décoratif
de l'ensemble comprise la façon d'un bas-relief. Il n'y a pas un détail dans
cet ensemble immense qui ne fournirait matière à de précieuses études. J'en
cite un exemple. Chacune des cinq coupoles de la Bibliothèque de la Chambre
des députés est divisée en quatre parties reliées à leur intersection par une
bande d'ornements. Le centre de chaque bande est occupé par un mascaron
différent. M. Fabius Brest a recueilli le dessin de l'un d'eux dans les débris
de l'atelier du maître qui furent vendus surplace après la Vente posthume. —
Elle était pourtant bien digne de figurer aux solennelles enchères de l'hôtel
Drouot, cette superbe tête de jeune femme au regard profond, aux traits
calmes, purs et si nobles! Quel beau modèlecelaferaitpour nos écoles de dessin!
Et si simple! Le ton chaud du papier goudron fournit une dem.i-teinte vi-
goureuse auprès des ombres obtenues par un lavis de sépia rehaussé d'huile,
tandis que les hachures, largement tracées, accentuent le caractère de la forme
et lui donnent un relief saisissant. Delacroix est ici sculpteur autant que
peintre. A raison de la place que la lumière réelle occupe dans la distribution
architecturale de la Bibliothèque de la Chambre des députés, il a fait venir en
ce motif la lumière fictive par-dessous-, — c'est ainsi que sont éclairés au
théâtre les visages des comédiens. Ce renversement de la lumière, qui con-
tredit aux habitudes du regard, ajoute un attrait de curiosité à l'effet puissant
du modelé en cette simple tête décorative. De tels exemples de perfection se
rencontrent rarement. Quelle réponse écrasante au préjugé qui, contrairement
à l'évidence, a si longtemps affirmé que cet admirable coloriste ne savait pas
dessiner !
— III —
Malgré les chiffres très élevés et de nature à faire illusion que, depuis quel-
ques années, les peintures de Eugène Delacroix atteignent dans les grandes
XXVIII INTRODUCTION A
ventes de Thôtel Drouoî, il ne peut échappera Tobscrvateur attentif que le
public, j'entends le public des amateurs, reste rebelle au génie du maître.
Ses œuvres de chevalet ne se fixent point dans les collections. Nous les voyons,
à des intervalles peu éloignés, de nouveau présentées à l'enchère, provoquer
sous le coup de marteau du commissaire-priseur de longs retentissem.ents de
pièces d'or, d'épais froissements de papier de soie à vignette bleue, puis rentrer
pour un temps dans l'onibre de quelque galerie privée, mais pour un temps
fort court. Il est inutile, je pense, de citer des œuvres et des nom.s; chacun les a
dans l'esprit. Il y a là un fait brutal, inique, déplorable, contre lequel nous
protesterions en vain et qu'il vaut m.ieux tenter d'expliquer.
Eugène Delacroix, que l'admiration passionnée de quelques-uns a fait si
légitimement illustre, n'a point et, à vrai dire, n'a jamais eu de public autre
que celui des artistes. Entre le public et lui, la mésintelligence, je dirais
volontiers l'inintelligence, date de 1822, de son début, du Dante et Virgile,
et dure encore. Si M. Thiers, à cette date, écrit dans le Constitutionnel quel-
ques paroles sympathiques et prophétiques, c'est qu'elles lui ont été soufflées
par un peintre, par le baron Gérard, esprit ouvert, indépendant, dont le salon
était alors aussi recherché que le talent et dont les moindres mots faisaient
autorité, surtout pour M. Thiers, très jeune encore et fort assidu à faire sa
cour au « premier peintre du roi ». Gérarddemeura toujours fidèle à Delacroix.
Deux ans plus tard, en 1S24, il parlait avec éloges de l'auteur du Massacre
de Scia, sauf cette seule réserve: >< Il court sur les toits. » Et qui le croirait, le
peintre de VAinoitr et Psj-ché avait un goût tout particulier pour les lithogra-
phies de Faust, notamment pour la scène de la taverne. Par quels courants
mystérieux se forme le jugement des hommes, même celui des meilleurs ?
Dans la bienveillance de Gérard pour le jeune artiste, n'entrait-il pas une part,
fût-elle minime, de l'influence exercée par Gœthe, qui avait très hautement
loué cette interprétation de son Faust (i)': N'oublions pas, en effet, qu'il
existait un lien commun entre Gœthe et Gérard, je veux dire le baron de
Humboldt, uni d'amitié avec l'un et avec l'autre également. On sait, d'autre
;i) n S'il me faut avouer que M. Delacroix a surpassé les tableaux que je m'étais faits des
scènes écrites par moi-même, à plus forte raison les lecteurs trouveront-ils toutes ces com-
positions pleines de vie et allant bien au delà des images qu'ils se sont crie'es. » [Entretiens
de Gœthe et A' Eckennann.)
rPA'X'RE DE HE LACROIX XXIX
p.iri. que Girodet. lui aussi, fcliciui Delacroix t.L.i les figures de ia mère déjà
morte et de l'enfant renversé du Massaa-e. Il n'y trouvait à reprendre qu'un
œil un peu dc'paysé dans le visage de la mère. Sur l'invitation de Delacroix,
Girodet ayant à plusieurs reprises essayé de rapatrier cet œil égaré et n'y
réussissant qu'au détriment de l'expression si émouvante de la figure : « Laissez
donc cette incorrection, finit-il par dire, elle est nécessaire « (i).
En présence de Delacroix, l'opinion se partage aujourd'hui en trois groupes :
1° Les admirateurs convaincus, fervents, qui jouissent par affinité d'âme de
toutes les créations de son génie et raisonnent en même temps, motivent,
expliquent leur admiration pour son talent de dessinateur et de peintre. —
2° Ceux qui l'admirent de confiance, par contenance. — 3" Le grand nombre
enfin qui, ne comprenant pas, respectueusement se tait. — Nous avons gagné
cela. Autrefois, je parle de vingt-cinq ans, au Salon de iS5q, où Delacroix
fut si grand, ce dernier groupe formait des attroupements ironiques, scan-
dalisés, scandaleux plutôt, devrions-nous dire, devant VOj'îde chc:[ les
Scythes et VEnlèremciit de Rébecca ^ ces chefs-d'œuvre.— Quelques-uns
encore lui refusent non seulement le génie, mais simplement le talent, le
vulgaire talent, et par condescendance lui reconnaissent certains dons de
coloriste (2). Ceux-là, l'urbanité m'interdit de les qualifier. Mais il est inté-
ressant d'analvser les causes de ce persistant malentendu entre le public
français et un tel artiste.
Une des raisons pour lesquelles Delacroix n'a pas été compris en France,
c'est qu'il est venu aussitôt après David et qu'il avait retrouvé l'art du grand
dessin qui ne s'elTraie d'aucune difficulté de mouvement, d'aucune hardiesse
de geste et d'expression. Le dessin des ensembles et des grandes lignes,
importé par l'école des Carrache, s'était m.aintenu en France, malgré les
erreurs du goût et les défaillances de la main, jusqu'à la fin du dix-huitième
siècle. Dans ses réformes, David, pour modifier l'esprit, modifia aussi la
(i) C'est là une variante au récit du même épisode donné par Théophile Silvestre dans son
Histoire des artisies vivants. Je tiens ma version de M. Frédéric Villot, dès cette époque
ami de Delacroix, et qui a raconté, dans un article fort ignoré sur Constable, de précieux
détails que nous lui avons empruntés, précisément sur l'exécution du J\/a55i7cre ie Scîo.
(2) On sait avec quelle amertume Delacroix parlait de sa réputation de coloriste, exclusive
de tout autre mérite. Voir mes Peintres et Statuaires romantiques : Eugène Delacroix.
XXX INTRODUCTION A '
lettre, remplaça le style lâché par la rhétorique, l'élégance tourmentée par la
raideur, l'extravagance du mouvement par l'inertie, la vie turbulente par
l'immobilité du marbre voisine de la mort. Il fut pédant par horreur de ta
corruption, se fit Boileau en haine de l'Astrée. Les moyens de l'art sont la
fiction et non l'illusion. Entre l'artiste et le spectateur, il doit exister un accord
préalable, une entente commune, inconsciente, établie par l'habitude, par le
milieu, par l'éducation, et parfaitem.ent nommée convention, qui permet au
premier de montrer, au second de reconnaître sur une surface plane le relief
des corps ou la perspective profonde de terrains fuyant jusqu'à l'horizon.
Chez les peuples spontanément artistes, comme ceux de l'Italie au seizième
siècle, cette convention est universellement connue. L'art peut y varier ses
procédés, ses formules, ses méthodes; toujours on le comprend, chaque trans-
formation, chaque extension appliquée aux signes représentatifs rencontre
aussitôt un regard intelligent. En France, non.
La lente éducation de l'œil par l'image, qui de toutes parts vient au devant
de chacun, — dans la rue, par l'estampe à la vitrine du marchand, au
foyer, par le journal ou le livre illustrés, et surtout par les visites de
désœuvrement ou d'usage mondain aux E.xpositions (car des musées il n'y a
pas à parler, qui y va, sauf les artistes et les touristes :} — cette éducation col-
lective impose à tous une certaine fiction esthétique, la convention régnante,
celle de l'école à la mode. La somme d'attention dont le public est capable
dès lors est épuisée. Se présente-t-il une fiction nouvelle, jusqu'à ce qu'à son
tour elle s'impose par la durée, elle est déclarée fausse, ridicule, poursuivie
d'inintelligents quolibets, on lui refuse le droit d'exister. Dès lors on s'explique
combien la routine fut déconcertée, lorsque Delacroix vint bouleverser les
idées reçues, montrer un dessin et un coloris en contradiction déclarée avec
le coloris et le dessin que depuis un tiers de siècle, depuis le Serment des |
Iloraces. on avait adopté comme la formule belle par excellence. Développer
toutes les richesses, les somptueuses complications d'une science que l'école
de David avait oubliée, méprisée ; remplacer par un vaste déploiement des
ressources ainsi perdues, désormais renouvelées, rajeunies, accrues par des
dons de génie, les procédés indigents qui constituaient la fiction adoptée,
n'était-ce pas troubler en véritable fâcheux notre paresse d'esprit ?
I Pour humiliante qu'elle soit, ne reculons pas devant h confession de nos
i i
L'ŒU\'RE DE DELACROIX XXXI
l
lacunes. La France n'aime point l'art pour l'art lui-même, elle n'aime dans 1
l'art que le sujet, le motif, l'anecdote, c'est-à-dire le prétexte de l'art. Elle est •
à peu près dénuée du sens plastique et pittoresque, comme en poésie du sens |
lyrique, et ne veut pas l'avouer. De là tant d'admirations qui portent à faux, j
tant d'engouements éphémères, parce qu'il manque aux talents qui en sont j
l'objet, les qualités de fond, les qualités éternelles sur lesquelles repose la i
durée de l'œuvre d'art. Les mieux doués, parmi ceux qui forment le public i
des Expositions, ne paraissent pas soupçonner qu'il estnécessaire d'exercer, de
cultiver ses sens, pour atteindre à la pleine jouissance des plaisirs intellectuelb |
dont les sens ne sont que les organes sans doute, mais les organes essentiels.
On ne se doute pas assez qu'il faut avoir le regard juste pour comprendre et |
juger, je veux dire goûter la peinture, la statuaire ou l'architecture, autant que
l'oreille juste pour goûter la musique. Suivant jusqu'au bout la comparaison \
qui est rigoureuse, ajoutons que le regard comme l'oreille, même natu-
rellement justes, ont besoin d'une éducation progressive pour pénétrer dans
toutes leurs délicatesses l'art des sons et l'art des couleurs. Tel percera de
prime-saut l'esprit de surface d'Auber ou d'Horace Vernet qui, sans études,
tout au moins sans de longues fréquentations, n'arrivera jamais à pénétrer les
profondeurs de Beethoven et de Rembrandt.
En 1824, l'art officiel en était encore, en France, à l'austérité factice et à la
froide correction de l'école de David. (L'enseignement, de nos jours, s'en dégage
à peine, et point par la bonne porte.) On refusa de commencer la nouvelle
éducation devenue indispensable pour entrer dans l'intelligence des procédés
employés par Eugène Delacroix. Tout en ce pays, dans les habitudes esthé-
tiques et dans le sang de la race, protestait contre l'originalité du peintre. Son
génie était en contradiction formelle avec le génie national. — Le génie fran-
çais a placé son idéal dans les clartés sereines de la raison. Par ses côtés moins
élevés, il est négatif, pratique, utilitaire ; il n'est nullement poète, artiste fort
peu. C'est que sans doute l'art et la poésie appartiennent trop au sentiment, à
la passion, à un ordre de sensations raffinées, pour s'allier aisément à l'analyse
et au raisonnement. Aussi, en art, notre goût est-il raisonneur et abstrait. Ce
qui l'arrête, l'occupe et le charme, c'est l'intérêt du sujet, et encore, dans
certaines conditions auxquelles je reviendrai tout à l'heure. La couleur, le
plus puissant, le plus énergique des moyens pittoresques, n'exerce sur lui
XXXII INTRODUCTION A
aucune action. Il en a laissé les joies et les grandeurs aux peuples encoi'e
enfants, étrangers aux phénomènes de la spéculation, aux peuples de l'Orient
et du Midi. L'art de la France, c'est la parole, peut-être entre tous les arts le
plus grand. Mais notre esprit logicien reste fermé aux jouissances purement
esthétiques. Aussi ne faut-il pas s'étonner que la patrie de Nicolas Poussin, de
Descartes et de Bossuet, qui pour tout poème épique a la Henrtade^ soit
privée du sens qui lui permettrait d'entrer en communication parfaite avec
l'art de Delacroix.
Succéder à David, posséder le don de la couleur et du mouvement, déjà les
conditions étaient mauvaises pour réussir. Cela seul eût suffi à compromettre
le succès de Eugène Delacroix. Mais, en outre, il se dégage de son œuvre une
influence particulière, qui devait achever de dresser entre le peintre et le
public un dernier obstacle que celui-ci jamais ne franchirait. Bien qu'il eût
l'esprit remarquablement clair et froid, Delacroix avait l'âme passionnée et de
plus troublée autant que pas une en ce siècle. Or comme l'âme de l'artiste est
au moins de moitié dans ses créations, il en est résulté qu'en tous les ouvrages
de Delacroix il règne une sorte de souffrance cruelle qui agit péniblement sur
le spectateur. Le maitre heurte donc ainsi le fond du caractère national, rail-
leur, léger, sceptique et qui veut qu'on l'amuse. Car voilà qui est fort misérable
et triste à dire, non seulement le public français fait passer le sujet dans l'art
avant l'art même, ainsi que nous l'avons constaté; mais de plus, en matière
de sujets, il n'aime que le sujet gai. Yo\'ez, auprès des contemporains de
Delacroix, la fortune de Gavarni, et comparez à l'infortune de Daumier, ce
colosse qui fait encore peur au « bourgeois ». Et que d'exemples encore on
pourrait citer ! Quel est le poète national ? Béranger. Quel est l'historien
national? 'SI. Thiers. N'est-ce pas écrasant? Qui ne connaît l'estampe,
d'après Landseer, je crois, représentant une scène d'inondation.' Une
chienne avec ses petits a été emportée par les eaux. Sur la niche, qui flotte à la
dérive, la lice hurle au perdu. L'éditeur, la gravure achevée, n'en vendit pas
dix épreuves pendant des années. On admirait, mais c'était trop triste. Subi-
tement éclairé, un jour, le marchand fait ajouter sur la planche, à l'horizon,
une toute petite barque, montée par deux hommes, nageant à force de rames
vers l'épave encore vivante. Les chiens seront sauvés! A partir de ce moment,
p:;r le seul fait de ccttcaddition en apparence inoignifiantc, l'estampe fit fureur,
«F.rVHK Di; Dl.LACiîOIX
N X X I I I
i-m^
■A\HÈ\\
XXXIV INTRODUCTION A
j il \- a de ceLiprès d'un demi-siècIc, et se vend toujours. Dans une vente récente,
{ en i!^82. on a revu les Conviilsionnaires de Tanger^ un des chefs-d'œuvre
j parmi les tableaux de chevalet de Delacroix: le jour de l'exposition, devant ce
j spectacle de la férocité où se peut porter le mysticisme oriental, l'impression
du public était à peu près unanime : « Cela est fort beau, c'est possible, mais
ce n'est pas gai, et je n'aimerais pas de vivre avec ce spectacle sous les yeux.»
Et en réalité, cela est beau, cela est grand, mais celaest tragique (i).
On peut en dire autant de l'œuvre entier du maître. Je l'ai écrit ailleurs,
" Lutte et passion, en ces termes se résume, étudié dans son esprit, l'ceuvre de
Delacroix. Le titre de chacun de ses ouvrages pourrait commencer par le mot
lutte ou le contenir. Le drame occupait l'âme de l'artiste. Toute concep-
tion chez lui était violente. Il n'y a que peu d'images de repos, peu de
sérénité dans son œuvre; à peine citerait-on parmi ses tableaux: Ovide che:^
les Scytiics^ et là, quelle tristesse amère ! ou Roméo et Juliette s'étreignant
dans un dernier baiser sous les lueurs vermeilles de l'aurore; et ici, quelle
ardeur de passion ! « Donc, nulle sérénité ! Delacroix mit dans son art le drame
constant qui s'agitait en son âme. Il ne connut pas la paix intérieure des
tempéraments adipeux, lymphatiques et sanguins; par contre, nul ne connut,
ne pratiqua et ne traduisit comme lui ce qu'un poète lyrique, JM. Théodore
de Banville, a nommé « l'attirante séduction de la douleur ». Il était né sombre,
hautain, ironique. Aussi que retrouve-t-on de préférence dans ses compo-
sitions ? La haine ou plutôt le principe toujours actif de l'incessante destruction,
la force terrassant la faiblesse, avant Darwin, le combat pour l'existence, ou le
combat pour la volupté du combat, mais le combat toujours. Rappelez-vous :
le <( Quatrième chant de V Enfer », le Massacre de Scio, Attila. Poitiers, Nancy,
Tailleboitrg^ l'Entrée des Croisés à Constantinople, la Liberté, Macbeth^
Hùinlet, dont nous reproduisons une scène page xxxm, Médée, Ugolin, Le
Tasse, V Enlèvement de Rébecca, Gœt- de Berlichingen , le Naufrage de
(i) Ajoutons au dénombrement des causes qui entravèrent la popularité de Delacroix que
de son vivant, c'est-à-dire aux beaux jours de la gravure de cor-imerce, pas une de ses com-
positions ne fut gravée comm.ercialement. Les éditeurs d'estampes réservaient leur publicité
pour Horace Vernet et Paul Delaroche. Les artistes graveurs, d'autre part, sortis de l'Ecole
des Beaux-.\rts, partageaient l'horreur de leurs professeurs pour le maître et n'étaient pas
de taille, en outre, à graver ses œuvres, dont l'interprétation par le burin exige un effort
d'inteilizence au-dessus de !a courante banalité.
L-Œi:VRE Dl£ DELACROIX XXXV
^on Ju.jn_ Cl UHU son Or/.;;/ - a part la Aoce J.ive el les Musiciens arah's
-ses Tigres dévorant une proie, ses Lions combattant, les Serpents stir
la défensive. Voilé par la vivante magie de la couleur, par Temportement
du dessin, par la suprême distinction du goût avec lequel le mélodrame est
évite sous 1 enchanteresse parure de l'art, au fond de cet ceuvrc in.mense
.1 coule un Heuvc de sang. Le bourgeois n'aime pas cela (,^
— n-
Si naturellement la pente de son humeur portait Delacroi.x aux conceptions
tragiques, qu ,1 n'a pu y échapper, même dans les sujets religieux, quels sont
ses motiis de prédilection } Les angoisses du Christ au Jardin des Oliviers les
angoisses des apôtres pendant la tempête, les angoisses des saintes femmes
pansant le corps percé de flèches de saint Sébastien, les angoisses des chré-
t.cns relevant^ le corps lapidé de saint Etienne, celles du bon Samaritain,
cel esde la mère tenant sur ses genoux sacrés le corps exsangue du crucifié
celles aussi de la crucifixion et de la descente de croix. Chargé de décorer une
chapelle a leghse Saint-Sulpice, celle des Saints-Anges, reprendra-t-ii un
sujet de douceur, qui l'avait déjà occupé, Taôu- et l'Auge? Non, il choisira
rois motifs de lutte: La lui te de Jacob avec l'Ange; Héliodore chassé dri
ten,ple, sur les parois latérales de la chapelle; et, au plafond, 5^;-;;/ A//c/../
terrassant h démon. Cette trilogie des vengeances angéliques est la dernière
œuvre de kugene Delacroix, la dernière grande pensée du peintre
;< On l'atiendait avec quelque impatience à cette épreuve, disons-nous plus
cm, volontiers croyait-on que l'intensité de la vie, la furie du mouven.ent dans
la)t ne s obtenaient que par une sorte de fièvi-e d'imagination conduisant les
hasards de la main : fougue, désordre, improvisation passaient pour svno-
nymes. Orici Delacroix, pour la première fois, allait avoir à triompher d'un
procède qui interdit tout hasard, ne permet point d'improviser, car il n'autorise
aucun repentir. C'était bien peu connaître cet admirable talent, tout de réflexion
que de douter de lui. On peut dire, en effet, d'une façon absolue, que Delacroix
n a jamais r,en abandonné à la fortune de la brosse. Ses œuvres sont toujours
(0 Et c'est aussi pourquoi l'Angleterre ne l'acceptera n
jamais.
le résultat de conceptions longtemps mûries dans sa pensée et de longues pré-
parations. Recherches de composition sans cesse renouvelées, corrigées, amé-
liorées, études de gestes, de mouvement, d'expressions variées à l'infini : tout
dans la technique de Eugène Delacroix est sage, savant et prudent. Jamais il n'a
tracé une ligne sans d'avance en avoir calculé, mesuré Teftet. Que lui impor-
tait donc le procédé lent de la peinture à la cire ? Jusque-là ses grandes décora-
tions monumentales avaient été exécutées sur toile et marouflées. Il avait pu en
voir la fragilité, sans la soupçonner pourtant aussi grande qu'elle nous a été
révélée depuis par la restauration, devenue nécessaire en 1869, du plafond
d'Apollon, au Louvre, et par celle, qui date d'hier, des coupoles du Palais légis.
latif et du Luxembourg. Je suppose donc, sans aucun scrupule, que Delacroix,
très jaloux de la postérité, accueillit avec une secrète joie l'occasion de fixer sa
pensée dans un procédé qui assurait à celle-ci la durée. Et en effet la patiente
volonté du maître bien aisément assouplit le moyen qui devait s'opposer à la
fougue de sa main et lui communiquer la flamme de son génie résolu. »
Dans notre analyse de la trilogie, nous constatons que la moins parfaite des
trois parties est le plafond. « La surface n'est pas suffisamment remplie, le
rocher qui porte le groupe de saint Michel et du démon semble d'une dimen-
sion démesurée, sans proportion avec l'exiguïté des figures. Quant au démon
lui-même, il rappelle vraiment par trop le diable légendaire, cornu, griffu, velu,
le nez en bec d'aigle, le sourcil en accent circonflexe sous sa couronne d'or. A
la composition définitivement adoptée, je préfère de beaucoup, dans sa donnée
générale, celle dont il existe un fort beau dessin où les figures, bien plus impor-
tantes, remplissent davantage la surface à décorer. Apparemment Delacroix
aura craint de trop surcharger le plafond en augmentant le nombre des per-
sonnages ou en les grandissant. » Si peu d'illusion du réel que l'on veuille
demander aux arts du dessin, l'esprit admet difficilement, il est vrai, les entas-
sements de corps ou de matières inertes se superposant à l'endroit où les yeux
sont accoutumés à rencontrer l'espace infini. C'est pourquoi l'art du décora-
teur exige une science très étendue. La représentation de sujets réels, histori-
qLies ou religieux, disposée horizontalement à dix mètres du sol, est tout à
fait en contradiction avec les règles élémentaires du bon sens. C'est la, et là
! seulement, que l'allégorie païenne ou catholique peut trouver sa raison d'être
dans l'art décoratif. Les dieux ei lc.> démises de l'Olympe, les anges du ciel
I.ŒUVRF. i)K DLll.ACKOlX N .\ \ \ ! I
chrétien agissent dans l'espace-, que nous les rencontrions du regard, au-dessus
de nos têtes, c'est une rencontre à laquelle la loi ou la convention religieuse
apporte la suffisante justification d'une vraisemblance mystique. Les théâtres
antiques et même certains temples dans l'ancienne Grèce n'étaient point
couverts. Dans les conditions atmosphériques où nous sommes placés, l'archi-
tecture doit aviser à nous défendre contre le froid et les pluies par des combles
à pans droits, des plafonds, des voûtes ou des coupoles. Le plafond corres-
pond à des besoins de préservation sous nos cieux moins cléments, il est une
nécessité. Il n'est pas moins vrai cependant que ce mode de clôture interpo-
sant une muraille, si nécessaire qu'elle soit, entre l'homme et les nuées, ne
satisfait nullement et même contrarie l'appétit de nos sens et de notre imagi-
nation pour les vastes espaces. Le plafond est un système de défense; il n'est
pas une jouissance. Il est une nécessité, avons-nous dit, il n'est pas une
beauté. L'architecte a donc dû se préoccuper des moyens de satisfaire tout à
la fois au vœu de l'imagination et au.x exigences du climat. Il y est arrivé.
Comment? En employant les magiques ressources de la peinture. A l'aide de
ces procédés merveilleux qui trouent artificiellement les surfaces solides et
leur substituent l'illusion des perspectives infinies, il a crevé le plafond qu'il
venait de poser au-dessus de nos têtes. Par ce moyen, il réussit à observer et
à concilier les deux lois que je rappelais tout à l'heure : loi de conservation et
loi esthétique. Il nous garantit contre les intempéries des saisons et trouve en
même temps un élément de beauté décorative qu'il ne s'agit plus que d'appli-
quer avec intelligence. Les temples antiques , avons-nous dit, s'ouvraient
.' sous le ciel «^snb Jovc, selon l'expression latine. C'est le ciel en effet et ce
qui se passe dans le ciel que le peintre, devenu le collaborateur de l'architecte,
devra nous montrer.
Si, par une fiction consentie, on enlève ça et là quelques morceaux des voû-
tes et de la toiture d'une église catholique, il faut que nos regards rencontrent
en se levant vers les hauteurs du monument le développement de quelqu'une
des grandes scènes que la Foi place dans le paradis. Le caractère de l'édifice
que le peintre est chargé de décorer lui imposera nécessairement le caractère
et les motifs de la décoration. Cela va sans dire. Mais ce qui est moins unani-
mement reconnu, ce que nous voyons même le plus souvent méconnu, c'est ce
principe, à mes yeux fondamental, en vertu duquel l'artiste ne saurait peindre
X \ X V I i i I N T R O D U CT I O N A
dans un plafoiid autre chose que l'espace céleste. Malgré l'autorité des artistes
illustres qui se son: prêtes à un tel contre-sens, il est absolument illogique et
partant ridicule de poser au plafond des peintures faites d'une part pour être
vues verticalement, et. d'autre part, représentant des terrains, des fleuves,
des arbres, des monuments. Raphaël a commis cette faute à la Faniésine : ce
n'est pas une excuse. Je sais bien que toute l'Ecole française en ce siècle s'en
est autorisée. Cette considération ne me trouble pas le moins du monde, et je
ne vois jamais au Louvre les plafonds d'Ingres, d'Alau.x, de Léon Cogniet, de
Devéria. sans ce sentiment de malaise et d'irritation que cause un spectacle
absurde. Eugène Delacroix lui-même, si grand décorateur, n'a pas complè-
tement évite le péril dans son admirable plafond de la galerie d'Apollon.
Toute la partie centrale de l'œuvre occupée par l'Apollon exterminateur des
monstres est un chef-d'œuvre de lumière, de mouvement, de couleur et de
logique. Mais j'ai toujours peur que la nymphe couchée au premier plan ne
glisse sur la pente des roches et ne tombe au milieu de la galerie, ce qui serait
bien fàc'neux. non seulement parce qu'elle endommagerait son beau corps,
mais parce que aussi dans sa chute elle briserait les vitrines où sont renfermées
ces merveilles incomparables : les gemmes et les joyaux de la couronne de
France.
La peinture des plaionds ne permet que l'ornement proprement dit (des
caissons, des rosaces, etc.) ou la représentation de l'espace et des scènes que
peut y rêver notre imagination mise en éveil par le milieu, par la destination
de réditice. Dans ce dernier cas.^ il faut que le plafond rappelle les cons-
tructions hypèîhres de l'antiquité et que la peinture y pratique d'immenses
ouvertures sur le ciel. A de rares exceptions près, les scènes, les groupes que
le peintre suspendra dans le vide sans limites seront toujours des motifs allégo-
riques. Toujours ils de\ront être composés, se multiplier, s'enchaîner confor-
mément aux lois de la perspective verticale.
Ce ne sont pas là des lois nouvelles. Le Corrège, à Parme, les trouva et les
1 appliqua avec le bon sens et l'audace na'ive du génie. De ce qu'à Florence
i quelques successeurs du maître, \'asari, F. Zuccaro, pédants et impuissants,
I ont ouvert la porte à toutes les extravagances de la « perspective curieuse »,
i conime on i'appe'ait, le principe n'en est pas moins juste et, en France même,
Mignird au ^'.-.'.-J-.-Gràce. à Saint-Cloud et à Versailles, a prouvé sans
I.(ZUVRE Di: DELACROIX XXXJX
t,cn;e rr:;,s avec u-lc,;: ou^ ,a ncrs]- active xuuca'c pLUi iViiiicr avtc le bon
goût. La D/^.'u' de Prud'hon au Louvre est un motif de plafond très accepta-
ble; le plafond du Salon de la Paix, à l'Hôtcl-de- Ville, malgré les ruines des
premiers plans, était dans les mêmes conditions. Dans ses autres peintures
décoratives, au Luxembourg, au Palais-Bourbon, Delacroix a observe la loi de
légèreté aérienne avec une aisance d'autant plus grande que la disposition circu-
laire à base cylindrique des hémicycles et de la coupole lui permit de donner
aux figures une assise horizontale solide, et de ménager au zénith les clartés
et les transparences de la voûte céleste. Les terrains trop apparents, et les
eaux qui s'écoulent, rendent déjà, dans les peintures de la galerie d'Apollon,
la vraisemblance inadmissible; il en faut dire autant du saint Michel de Saint-
Sulpice.
Eugène Delacroix, quand il lui appartenait de s'en affranchir, asuivi les erre-
ments de ses prédécesseurs. Ne voyons-nous pas Le Brun accrocher la tente de
Darius à des arbres plantés dans les plafonds de "\'ersailles! Au Louvre, que de
contre-sens de ce genre? Des foules, des batailles, les pyramides d'Egypte sus-
pendues comme une menace imminente pour le visiteur! Evidemment, l'orne-
mentation des plafonds exige une réforme radicale ou plutôt un retour aux lois
décoratives que des peintres inférieurs, un Le Mo3'ne, un !Mignard et Boucher
lui-même n'ont jamais enfreintes. La chute des vices de Paul Véronèse est un
exemple illustre du nombre de figures que, dans cet ordre d'idées, le peintre
peut mettre en niouvement, tout en restant dans la mesure de la logique et du
bon sens.
Il faut conclure. Je demande la permission de reproduire ici quelques lignes
d'une étude que je publiais au lendemain de la mort du maître (14 août i8h3).
Je n'ai rien à changer de ce que je disais alors :
« L'œuvre de Eugène Delacroix contient la sensation, l'émotion constante,
l'émotion aiguë qui conduit en un instant le spectateur par toutes les phases
de l'activité intellectuelle surexcitée. L'idée fixe du maître, si je ne me trompe
pas, a été de rendre pour ainsi dire palpables, visibles au moyen des couleurs
et des formes, les combats qui s'agitent au secret des âmes. Que lui importe le
sujet! C'est affaire au coloriste, chez lui, que de le traiter en grand artiste.
Qu'il emprunte le décor du drame aux livres saints ou à l'antiquité grecque,
à la Rome des empereurs ou à l'Italie du moyen âge, aux conceptions des
XL INTRODUCTION
poètes anglais ou au génie germanique, le décor n'est que l'accessoire, il vient
au dernier rang de ses préoccupations. Ce qui l'inquiète, c'est que l'on saisisse
clairement la note passionnée qu'il a voulu rendre, c'est qu'on ne se méprenne
point à son sentiment, c'est que, maintenant comme dans deux siècles ceux
qui contempleront de ses tableaux frissonnent du même frisson que lui-même
à l'heure où il accomplit son œuvre. Fût-on disposé à lui demander compte de
n'avoir pas représenté le di.\.-neuvième siècle, qu'il pourrait répondre : « Je
« suis par le droit de postérité, par le droit de l'esprit, contemporain des
« âges les plus reculés. J'ai peint mes contemporains de tous les siècles;
u j'ai peint l'homme, son cœur, son âme, sa vie secrète, pourquoi vous
« arrêter à l'épiderme, à la guenille du costume? » Et il ne ferait que reven-
diquer les libertés légitimes des peintres de l'idée. La nécessité du réel imposée
à la représentation des mœurs modernes pouvait gêner son expression : il a
préféré parcourir le monde antique et l'ère chrétienne dans toute leur
étendue; il les a parcourus avec la hautaine supériorité d'un maître, d'un
Beethoven faisant sortir du clavier, des notes les plus graves aux plus hautes
notes, des trésors d'harmonie, de sensations et d'expression. Voilà pourquoi
Delacroix aura raison de l'avenir, il a traduit absolument l'homme en vivifiant
son texte de toutes les richesses acquises par l'esprit moderne. »
Au début de cette introduction, je disais que Delacroix a continué le mou-
vement français de nos chers maîtres du dix-huitième siècle. Oui,.sans doute,
mais, d'un dernier mot, il faut établir une distinction entre leur art et le sien.
L'art du dix-huitième siècle montra la grâce amoureuse et le vol élégant du
moineau de Lesbie, celui de Delacroix déploie la grandeur d'envergure et l'im-
posante majesté du vol de l'aigle.
ERNEST CHESNEAU.
FIN DE L'INTRODUCTION
SIGNATURES DE
EUGÈNE DELACROIX
CERTE>, il s'en faut de teaucoup que Delacroix ait adopté une signature uniforme pour
ses ouvrages peints, dessinés, gravés ou litliograpliiés. 11 y a même apporté assez de variété
pour qu'on trouve quelque intérêt à en voir reproduits les principaux spécimens. Sur
beaucoup de ses grandes toiles, il a tracé son nom en lettres capitales, mais la Liberté, le
Massacre de Scio, la Barque de Dante et d'autres œuvres encore, sont signées en caractères italiques.
Il a même em.ployé parfois certaines formes de lettres contournées et capricieuses, qui portent évi-
demment la marque de la fantaisie romantique.
Année lisiû — N' 2b .Xnnce iS3i — N° 355
EUG-DE LA CROIX £UG DELACROSK
ANN-lSlC) p^ {531
.\nnée iS55-.ï:n - N° 4^^ ■^■'"" "^^^ " ^'° ''"^
EU&.DELftCROtX \ f\ ,
F. !834 [;^Y^(J^^^
Année .S3î> - N" 668 Année .S39 - N° 6SS
EXiCDELACR^OIX £.j, /) eA^^o.-J6 .
1858
XLl!
SIGNATURES DE DELACROIX
Ces: surtout dans les premières années que Delacroix a signé presque régulièrement ses tableaux
en capitales; plus tarJ il donna moins d'importance à une formalité qui n'avait plus désormais de
raison d'être, alors que son génie, maître de lui, imprimait à chacune de ses œuvres la marque
d'une personnalité bien distincte.
Anni; iS-jS — N' 1040
Année 1849 — N" 10-4
Année iSSi — N° nQi
Année iS5- — N' i3i5
Année iiô3 — N' 1450
% ^
357 — N" i3i5 Année iiô3
Les aquareiles, les dessins, les gravures et les lithographies sont généralement signés en écriture
courante, bâtarde ou italique. Une simple autographie, cependant, a reçu les honneurs de la
capitale. Delacroix ne suit que Tinspiration du moment et signe même soit en rébus, avec un
chiffre, une note et une croi.-:, soit en manière de fantaisie italienne : Eue. D£lle ou Della sous-
entendu CROCE. Pour quelques lithographies il se contente de ses initiales, et pour un grand nombre
il ne signe pas du tout, comme pour la suite du Faust n"' l'iz à 25 1), le Chev-tl sauvage terrassé
par un tigre (n» 2S8), Le lion [n' 3oq! et Le tigre (n- ?io) qui comptent cependant parmi ses plus
belles compositions. Pour les études"sur nature qu'il ne signait que rarement, il h.-cait volontiers
son souvenir par une date et le nom du pays^oà il avait copié le motif; nous en produisons quelques
exemples. On verra aussi qu'il aimait les dédicaces.
Anni5e 1824 — N'" 96
^'JziSzi
.\nnés 1S2S — N» 2S9
Année 1 333 — N' 490
Année 1S43 — N» Sij?
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/S 4 3
SIGNATURES DE DELACROIX
X L I II i
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l-t^it^
o^l.d U.^td'^r'tA^
£iji^xAj^uA^^
Année 1S41 — N» So5
Année iSJi — N" iiSo
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Année ib':^ — N» 1200
■L^ a.
Année iS55 — N« 12S0
Année iS5S — N" i.î66
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Année iSr- — X»
Cti^f-^L^t^vUl^ i^cep, O.-^
Année iS5S — N" 1370
Mr^^§
'OC^'^^L^^^y^
Année iSJo — N" iSg
X L 1 \'
SIGNATURES DE DELACROIX
A 1.1 suite des signatur;.-», nous donnons comme document autographique la reproduction d'une
des innombrables pages que le maître a couvertes à la fois de notes et de croquis. C'est un sou-
venir rapporté du voyage que Delacroix lit au Maroc, en i832, avec son ami le comte de Mornay.
J^^ f ayt-UJi-z f ^' y ■'■- — -
t
Peu d'artistes plus que Delacroix se sont imposé la tâche souvent pénible de fixer au passage, soit par
la pensée soit par le dessin, leurs impressions journalières. Nous aurons l'occasion au cours de ce
l'vrc de citer beaucoup de ces notes fugitives qui contiennent souvent en quelques mots le résum.e
.. -ran.ls principe, d'esthétique.
PORTRAITS DE
EUGÈNE DELACROIX
N' ous plaçons ici. ii titre de préface, deux portraits écrits, l'un par Th. Gautier, qui
peint hdélement le Dtlacroi.x. de i83o, l'autre par Al. Dumas, qui retrace avec
verve la physionomie du maître, arrivé presque au terme de sa longue carrière
artistique. Le premier de ces portraits fut écrit, de souvenir, en iS6f : le voici :
«Delacroix, que nous rencontrâmes pour la première fois quelque temps après iS3o,
était alors un jeune homme élégant et frêle, qu'on ne pouvait oublier quand on l'avait vu. Son
teint d'une pâleur olivâtre, ses abondants cheveux noirs qu'il a gardés tels jusqu'à la fin de sa
vie, ses yeux fauves à l'expression féline, couverts d'épais sourcils dont la pointe intérieure
remontait, ses lèvres fines et minces, un peu bridées sur des dents magnifiques et ombrées de
légères moustaches, son menton volontaire et puissant, accusé par un méplat robuste, lui
composaient une physionomie d'une beauté farouche, étrange, exotique, presque inquiétante.
On eût dit un maha-rajah de l'Inde, ayant reçu à Calcutta une parfaite éducation de gentle-
man et venant se promener en habit européen à travers la civilisation parisienne. Cette tète
nerveuse, expressive, mobile, pétillait d'esprit, de génie et de passion. On trouvait que
Delacroix ressemblait ii lord Byron, et pour faire mieux sentir cette ressemblance, Devéria.
dans une même médaille, dessinait leurs profils accolés. Les succès refusés au peintre,
r.homme du monde -Delacroix le fut toujours) les obtenait sans conteste. Personne n'était
plus séduisant que lui lorsqu'il voulait s'en donner la peine. Il savait adoucir le caractère
féroce de son masque par un sourire plein d'urbanité. Il était moelleux, velouté, câlin
comme un de ces tigres dont il excelle à rendre la grâce souple et formidable, et, dans les
salons, tout.le monde disait : « Quel dommage qu'un homme si charmant fasse de semblable
peinture! » — Le second portrait ne dilTére" du premier que par la forme qui distingue les
deux écrivains. Au lieu d'images savantes, de psychologie profonde, le lecteur trouvera
une improvisation brillante, mais il y reconnaîtra cependant le Delacroix des anciens
jours, le même homme, n'ayant point perdu, malgré vingt années de luttes et de souflrances,
son originalité native ; o Delacroix est de la tai'lle de Vcrnet. presque aussi mince que lui,
très propre, très élégant, très coquet. 11 a cinquante-cinq ans, les cheveux, les favoris et les
moustaches noirs comme à trente: les cheveux ondulent naturellement, les poils de la barbe
sont rares, la moustache est un peu hérissée et ressemble ;i deux pincées de tabac à fum.er ;
le front est large, bombé, terminé à sa base par deux sourcils épais, recouvrant des yeux
petits, qui etincellent pleins de flamme entre deux longues paupières noires ; la peau est
brune, bistrée, mobile, se plissant comm.e celle du lion i" les lèvres sont épaisses, sensuelles,
promptes au sourire, et en souriant découvrent des dents blanches comme des perles. Tous
ses mouvements sont vifs, rapides, accentués; sa parole peint, ses gestes parlent ; son esprit
est subtil, discuteur, prompt à la répartie; il aime la lutte et s'y déploie ctincelant d'aperçus
nouveaux, justes, brillants: à côté d'un talent hasardeux, plein de caprices, rempli d'écarts,
il est sage, sobre de paradoxes, classique même; on dirait que la nature, qui tend a tout
équilibrer, le place comme un habile cocher, bride en main, pour retenir ces deux chevaux
fougueux, l'un l'Im-aeination, l'autre la Fantaisie. » — D'autres portraits écrits se trouvent
soit par fraements, sbit plus complets, dans les diverses études que ses contemporains ont
XL\'I
PORTRAITS DE DELACROIX
,8-24
consacrées à Dilacroix et à son œuvre. Nous avons choisi ceux qui nous ont paru re'sumer
le mieux le vrai caractère de sa physionomie. — De bonnes photographies ont été exécutées .^d
vivum par .M.M.Victor Laisné, Carjat, Léger et Bergeron, Pierre Petit. Quelques-unes nous
rappellent fidèlement les traits de ce noble visage, sur lequel le labeur de la pensée et la fièvre
des passions supérieures avaient impri.mé leurs glorieux stigmates. Nous avons fait reproduire
en héliogravure, par l'excellent procédé de .M. Fillon. outre un portrait du maître par lui-
même, un profil superbe d'mtelligence, de finesse et d'énergie; nous n'omettrons pas, en cette
circonstance, de remercier .M. Pierre Petit qui, avec son obligeance coutumière, a misa notre
disposition le cliché original. — Mais avant de commencer la nomenclature des portraits
peints, dessinés ou gravés, nous avons encore à rappeler ceux que Delacroix a exécutés
d'après lui-même et que nous avons décrits, chacun à leur date, dans la suite de l'œuvre.
1° — i8i3. — Dessin. — H. o'"o6o, L. o'^oSj. (Voir le n° 14.58.)
2" — iSiQ. — Dessin à l'estompe. — H. o^tôj, L. o™io8. (Voir le n° 20.)
3° — 1821. — Toile. — H. o'"40, L. o'^Si. CVoir le n° 40.)
4° — 1823. — Toile. — H. o-^SS, L. o"'27. (Voir le n" 69.)
5° — 1829. — Toile. — H. o™5i, L. o="64. (Voir le n° 295.)
6° — i832. — Croquis. — H. o™i i, L. C"! r. (Voir le n° 372.)
7° — 18.12. — Croquis. — H. C"! i, L. o"^! i. (Voir le n° 397.)
8" — i8ôo. — Toile. — H. 0^66, -L. o"^54. (Voir le n° 141 1.)
N° 9 : Portrait attribué à Géricault, vers 1820
Dessin à la mine de plomb. — Dimensions inconnues. — Vente de ieu Achille Devéria
(9 avril i858). n° 142 du catalogue. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est un portrait en pied dont nous n'avons pu, malheureusement, retrouver la trace. Le
procès-verbal de la vente Devéria désigne comme acquéreur .M. Binder, qui possède des
œuvres importantes de Géricault; mais la collection de cet amateur a été soigneusement
explorée par M. Charles Clément, qui a consacré un travail important à la noble figure de
Geri;ault et a très savamment décrit son œuvre. Il a affirmé n'avoir jamais eu connaissance
du portrait en pied qui fait l'objet du présent numéro. — On sait que Delacroix a posé
pour un des naufragés de la Méduse, celui qui figure nu et vu de dos, le bras gauche
étendu, abattu en avant, dans l'admirable tableau du Louvre.
N" 10 : Buste peint par Steuben, avant 1824
on ne se tro
; Toile. • — H. o'"68, L. o'"54. — Non catalogué par ^L Moreau.
C'est M. Dauvin, marchand d'estampes, qui nous a fait connaître cette
toile, en octobre 1875, et nous en a fourni l'attribution. Il tenait ces détails
de madame Steuben, à qui l'œuvre appartenait encore. A n'en pas douter,
' c'est bien le portrait du peintre jeune, à la moustache naissante, njais
déjà sérieux, esprit résolu, partagé entre la méditation et l'action et qui
- écrira quelques années plus tard : V J'ai vu que la solitude, pas plus que" la
distraction, ne pouvait être l'état constant d'un homme qui veut jouir
;■ de tout l'açrément possible. 11 faut entremêler l'une et l'autre de manière
à ce qu'elles se succèdent et qu'il s'ensuive le désir de l'état dans lequel
uve pas. Il faut donc toujours désirer quelque chose ou respérer._ Quand on peut
on. aésire, on a toute la somme de bonheur accordée à notre machine piiisante. «
iS3i
PORTRAITS DE DELACROIX
X L\' 1 1
N" II : Médailion sculpté par David d'Angers en 1824
>g|g;-.. Bronze. — Diamètre, o'"io5. — Gravé par le procédé Achille Collas
'j^^A F^"'^ ""^ ^^"^ '^^ '''^"' vingt-cinq portraits contemporains. — Non catalo-
'^S'^j ^1 8"^*^ P''-'' ^^- Moreau.
^^^^^vy Celte œuvre fait partie d'une suite que modela David d"Aneers.Eile est datée « 1 824.»
^-^"^--^ (On trouve des^ épreuves au prix de cinq francs chez^M. Thiéhauh, fondeur.)
— La gravure, exécutée à la mê.rae dimension par le procédé Collas, porte les mêmes
légendes : à gauche : <■ Eugène Delacroix; » h droite : <. pictor », en bas: « David, 1824. »
N° 12 : Delacroix à vingt-six ans, par A. Colin (1824)
Dessin. — H. o"i 22, L. 0^^090. — Gravé à l'eau-forie par Paul Colin, dans
les mêmes dimensions, pour le catalogue de la vente des œuvres de son
père (1876). — Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix, coiffé d'un bonnet à rebords, est vu de profil et éclairé de dos. La
tête se trouve enveloppée d'ombre. Le maître, en veste de travail, lient d'un
geste à peine indiqué, une palette et un appuie-main. Le dessin n'a pas passé
à la vente d'Alexandre Colin {i février 1S76). Nous ne le connaissons que par l'eau-lorte.
N° 13 : Profil dessiné par Tony Johannot en 1850
Dessin sur bois d"après le médaillon de David d'Angers.' — Gravé sur
bois dans les dimensions de : H. o'"22 pour VHistolre d'un roi de
Bohême et de ses sept châteaux. — Non catalogué par M. Moreau.
L'Histoire du roi de Bohême et de ses sept châteaux, qu'ont rendue pré-
cieuse aux bibliophiles romantiques les fantaisies dont Tony Johannot a
parsemé le texte, est l'œuvre de Charles Nodier qui cite, page 44, les noms
de Delacroix et de Byron. C'est cette citation qu'accompagne la médaille reproduite ici.
N° 14 : Buste peint par le baron de Schwiter en 183 1
Toile. — H.o'='54, L. o"65. — Appartient à M. le baron de Schwiter.
— Signé et daté au bas à droite : « i83i ». — Non catalogué par
M. Moreau.
Joli portrait aux lèvres carminées, peint par un ami dévoué et tout disposé
à voir en beau son modèle; notre vignette, d'ailleurs, ne rend pas très
bien la ressemblance. Le baron de Schwiter se souvient que ce portrait
fut terminé la veille du départ de Delacroix pour le Maroc. L'amitié qui
unit Delacroix au baron Schwiter dura jusqu'à la mort du maître, qui ne
se livrait pas facilement, mais qui ne se reprenait plus quand il s'était
donné une fois. Il fut fidèle aux amis comme aux souvenirs de sa jeunesse.
X LV H I
PORTRAITS DE DELACROIX
i834
N° I ) : Portrait peint par Dedreux-Dorcy, vers 183 1
Toile. — H. o'"54, L. o"'65 environ. — Adjugé à la Vente posthume de Dedreux-
Dorcy, le 20 mars 1S75 : i 17 tV. à M. Benoit, rue du Jour.
Ce portrait, que nous n'avons pas vu, a, paraît-il, une certaine analogie avec celui que
peignit le baron de Schwiter en la même année. (Voir le numéro précédent.)
N° 16 : Mi-corps dessiné par Jean Gigoiix en 1832
Lithographie. — H. o"'iSo, L. o'"i5o. — Publié dans le journal
V Artiste, en i832. — Signé au bas à droite: J. Gigoux. — Catalogue
A. Moreau, p. 3.
(i M. Jehan Gigoux maniait le crayon lithographique avec la dernière habi-
> leté. Dans ce portrait, annoncé par iM. Gigoux comme lithographie
^, tid'après nature », Delacroix est un jeune homme brun, au visage grave, au
-'" regard mélancolique, à la bouche large, ombrée par une fine moustache
noire. Il est assis sur une chaise, la main d.'-oite dans la poche du pan-
talon; la redingote dessine la taille. Des mèches noires et drues retombent
sur le front. >> (Philippe Burty.)
igemment
N° 17 : Tête dessinée par madame Villot en 183}
Croquis au crayon. — In-octavo. — Appartenait à M. Riesener. —
Signé : « Pauline. » — Non catalogué par M. Moreau.
C'est sans doute à une époque de bal costumé, et alors que Delaerois prenait
conseil de son ami Frédéric Villot. que madame Villot aura fait ce croquis. Nous
. savons qu'à cette même époque, Delacroix se proposait d'assister, en costume
A d'officier arabe, h un bal que donnait le duc d'Orléans, quand, le jour venu,
■' il fut pris d'une violente migraine. Avec le secours de sa bonne Jenny et d'un
ami, il s'habilla et se mit en voiture, mais en arrivant, ressentit un tel malaise, qu'il peine
il put paraître; il n'aimait pas il faire mauvaise figure.
N^' 18 : Tête dessinée par F. Villot vers 1834
Dessin. — In-octavo. — Appartenait à M. Riesener. — Non catalogué
par M. Moreau.
En cette attitude penchée et mélancolique, avec cet air de Christ au Jardin
des Oliviers, Delacroix ressemble, non point à sa nature_ physique, mais à sa
' ::^. nature morale, ii la fois inspirée et anxieuse, toute de génie et de sensibilité
• ' maladive. Il a peint la douleur aussi fortement qu'il l'a ressentie, et s'il a
donné tant dintérct trafique h ses plus belles œuvres, à son Cr.risl au Golgotka, 'à son
M.xrf.-re de s^:nt Etienne, ccsî qu'il v réiiandait toute la tristesiîde ses plus mau-.ais jours.
m^
IS43
PORTRAITS DE DELACROIX
X 1. 1 X
i\"
i(y ; oL';.ie perûL p.u' Com:ar:is vers 183
]0
Toile. — H. o">45, L. o"'3ô. — Appartient à M. de Courval-Pirnn.
qui le tient do M. Piron. — Non catalogué par M. Moreau.
« Le peintre Philippe Comairas était un dilettante en fait d'art plutôt qu'un
producteur. I! aimait les aspects pittoresques des phénomènes extérieurs,
il goûtait vivement les beautés des maîtres, mais il redoutait les fatigues de
rexécuiion et la lutte , très dure en effet, qui suit les douceurs de Li con-
ception, le moment où il unit l'action au rêve. Son éloignement pour le
travail était devenu proverbial pour ses amis. Pendant toute sa jeunesse, il
flâna de galerie en galerie, d'atelier en atelier. » Il devint ainsi l'ami de
toute la phalange artistique de iSSo, et fut lié d'amitié sérieuse avec Delacroix.
[^M
N° 20 : Portrait charge publié en 1839
Lithographie. — H. o'='3oo, L. o'^-23o. — Paru dans le Charivari
du 29 mars i83g. — Catalogue A.. Moreau, pp. 3 et 4.
On lit au bas de ce portrait : c. Eugène Delacroix, pinceau riche et sau-
, vage — Sait donner de la vie à ses moindres tableaux; — .Mais il faut
l'empêcher de peindre à son image, — Car ses succès alors seraient beau-
coup moins beaux.» Delacroix est en train de peindre sa Médée, qu'il
produ:s;itau Salon de iS3S et qui fut publiée à la même époque dans le
C/;ari'v<7rz' (voir le n" 66S). On ne peut refuser à cette caricature un
certain cachet de vérité, et dans l'exagération même du corps si fluet et
si mince, apparaît la distinction qui caractérisait le maitre en toute sa
personne. La tête est celle d'un rapin vulgaire, mais le geste de la main
nt la touche est assurément bien saisi.
N^
Portrait peint par Champmartin en 1840
Toile. — Dimensions inconnues. — Salon de 1840-. — Non catalogué par ^L .Vioreau.
Ce portrait fut exposé, sous le même n" 236, avec ceux de Henriquel Dupont, Saint-Clair,
Botta. Léon Cogniet, Emile Deschamps, Ricourt, Fedel, Jules Janin et Fouquet.
N" 22 : Portrait gravé en 1843
Eau-forte. — H. o"'o65, L. o^ooo. — Signée Forbe. — Publié dans
la Galerie des contemporains illustres [i 8:^3). — Cat. A. Moreau, p. 4.
Ce visage vulsaire ne nous rappelle, par aucun de ses traits essentiels, le cau-
^Sj^^l^^V seur subtil, l'e'crivain distingue, le peintre supérieur qui, pendant cinquante
f/7^^^s^ i f \ans. anima son siècle du souïfle de son génie. Est-ce bien là celui qui disait :
'-'-!: />/\ « Et cependant, il n'vapas a reculer. Dlmicandum, c'est une belle devise que
' ' j'arbore par force et un peu par tempérament. J'y joins celle-ci : Renovare
ammos..., mourons, mais après avoir vécu. »
PORTRAITS DE DELACROIX
[848
N°' 23. 24 : Deux portraits (1843 -1844)
1° Lithographie. — H.o"ii3, L. o^ioj. — Publié dans la Galerie de la
Presse, de la Littérature et des Beaux-Arts , chez Aubert, galerie
\'éro-Dodat. — Car. A. Moreau, p. 4.5.
2^ Gravure sur bois. — H. o'^'opo, L. o"'ojo. — Publié par l'Illustra-
tion, numéro du 2 mars 1S44, accompagnant an article intitulé: Salon
de 1S44. Visite dans les ateliers. — Catalogue A. Moreau, pp. 4 et 5.
Par la incture simple et facile en même temps que souple et délicate, la litho-
graphie nous semble révéler la main de Menut Alophe. C'est d'après cette lithographie que
notre viqnette a été exécutée, mais elle convient également à la gravure sur bois qui oft're le
même type. Les traits du visage ont une grande fermeté; ils laissent cependant apparaître un
peu trop cette rudesse de conformaricn, que le maître mettait tan: de soin à dissimuler et que
l'on retrouve identique dans le masque de Talleyrand.
N° 2^- : Caricature dessinée par Bertall en 1844
Gravure sur bois d'après le dessin de Bertall. — In-octavo. — • Publié,
en 1S-L4, dans le Panthéon du Diable à Paris. — Non catalogué par
^L Moreau.
On voit, représentés ici. la plupart des peintres modernes dans diverses
attitudes. Au milieu de la page sont les deux grands champions du jour,
Eugène Delacroix et Jean-.\uguste-Dominique Ingres. Le premier tient
gauche une vessie de couleurs; près de lui on lit sur un écriteau attache à un
pinceau debout : i. La ligne est un mythe La nuit, tous les chats sont gris. «Le second tient
dans la main gauche son porte-cravon, auquel est fiché un cartouche portant ces mots : a 11
n'y a de gris que le gris et M. Ing.-es est son prophète. '>
dans la main
N" 26 : Tète dessinée en 1848
l'exam:
conjec;
robusti
La !ég
l'amiiTl
catoire
lepein
Oeorgi
incons
Dessin ovale. — H. o™i^5. L. o'"! lo. — On lit au bas ; «Amicus amico.
G5. » — Offert par Delacroix avec dédicace autographe à Jenny Le
GuiUou, et légué par elle à AL Riesener, à qui il appartenait encore
en 1878. — Exposition universelle de 1878, numéro 822 du catalogue
des portraits nationaux Henry Jouin. — Gravé sur zinc, pour l'Art.,
numéro du 16 juin 1878. — Non catalogué par M. Moreau.
Nous avions d'abord cru que ce portrait était l'œuvre de Gavarni, mais
m de l'excellent fac-simiié qu'en a donné l'Art, nous a fait rejeter cette première
ure. Les mots : <. .Amicus amico » sont écrits d'une plume vigoureuse, en lettres
a très éloignées des caracte.-ês menus et réguliers qui distinguent l'écriture de Gavarni.
inde noas"^ rappelle bien rias la main de^George Sand, qui crayonnait volontiers, et
; qui unit l'illustre rom.;r.cière à Delacroix justiiîcrait bien mieux, la formule dédi-
Cette formule s'expliquerriii mal de la part de Gavarni, qui n'aim lit pas en Delacroix
tre et qui ne devait pas irrspirer beaucoup de sympathie à l'homme. D'autre part,
SanJ. qui a pris quelq-jrrjis au sérieux le sexe 'de son pseudonyme, aurait pu sans
quence Signer au masc..;.:..
1 83-
PORTRAITS DE DELACROIX
LI
N'
27 : Cancatiire par Bertall parue en 1849
-.- _ Gravure_ î-ur bois d'après le dessin de Beit;)!!. — H. o"'2io,
_ _:_/"• 1 '-^"^ ' L. o'"2i5. — Publié par le Journal pour rire, en 1849, sous ce
^7rr;j7i;]7G"»'-\ ^'''''■' • " f^'-TU^l'^]"e des Ans. Duel à outrance entre .\1. Inqrcs,
llJt^-^-'.ïî, '„■>:; le Thiers de la ligne et M. Delacroix, le Proudhon de la couleur.))
— Non catalogué par M. Moreau.
On lit au bas : «Il n'y a point de quartier à espérer. Si M . Ingres triomphe,
% la couleur sera proscrite sur toute la ligne, et l'insurgé qu'on trouverait
;":' muni de la moindre vessie sera livré aux derniers supplices. Si Delacroix
'^"-a est vainqueur, on interdira la ligne avec tant de rigueur que les gens
surpris h pêcher à la ligne sous" le Pont-Neuf seront immédiatement
passés par les armes. Quelques personnes ont bien osé parler de fusion entre la ligne et la
couleur, mais ce projet de fusion a paru si ridicule et «-i extravagant, que nous n'eri parlons
ici que pour mémoire.» Sur le pot à couleur que tient Delacroix" à l'arçon de la selle, on lit :
« La ligne est une couleur.» Sur le caparaçon du cheval : « Rafaël est un rafale et un réac...»
« .... La nuit, seulement, tous les chats sont gris» ; sur lebouclierque porte Ingres : cRubens
est un rouge '..... 11 n'y a de gris que le gris et M. Ingres est son prophète.»
N'' 28 : Eau-forte par Bracquemond (18^2)
Eau-forte. — H. o'"o8o, L. o'"o6o. — Gravé d'après la photographie de
Carjat. — Signé d'un B. — Inédit. — Cat. A. Moreau, p. 9.
Vers i852, Théophile Silvestre pria M. Bracquemond de lui graver ce portrait,
et il ne lui laissait que quelques heures pour l'exécution d'un travail aussi délicat.
Peu après, l'artiste apprit de l'écrivain que son œuvre ne paraîtrait pas dans
l'Histoire des Artistes vivaKls, parce qu'elle éiait traitée « dans un sentiment trop linéaire.»
Elle est cependant empreinte d'une noble énergie.
NO
29
L'atelier de Eugène Delacroix en 18^2
Gravure sur bois. — H. o"200, L. o"'235, à pans
coupés. — Publié par l'Illustration du 2 5 septembre
iS.^2. — Cat. A. Moreau, p. 134.
Ce dessin nous montre l'intérieur de l'atelier occupé par
le maître, rue Notre-Dame de Lorette. n° 24. Delacroix
est représenté debout, la palette à la main, causant avec
un visiteur, près de sa boite à couleurs entr'ouverte. Au
second plan, un jeune collégien qui examine les œuvres
pendues aux murailles, et plus loin à gauche un quatrième
personnage. Les murs sont couverts de plâtres moulés sur
*-^^* i.*^^^^^^^^^-"^--- l'antique.'et d'œuvres plus ou moins anciennes du maître,
'g'. <*i^.»^21i£®s^^Kg>rS j- parmi lesquelles on distingue l'esquisse du plafond de la
paierie d'Apoiion ivoir le n» iiio, ta Mort de Marc-Aurèle (voir les n^^ 924 et 926), et
bien d'autres encore que l'exiguïté de la gravure ne permet pas de distinguer. 11 y avait
entre autres; La rue de Tomber. Desdémone maudite, le Maréchal ferrant, etc.
LH
PORTRAITS DE DELACROIX
i854
N" jo : Composition par Eugène Lami. vers i8^'
Aquarelle. -
M. Moreau.
Appartenait , en i8;
M. Hartmann. — Non catalogué par
Cette charmante aquarelle, qui a figuré à l'une des Expositions du Cercle de l'Union artis-
tique, en 1S75, représente un salon de Paris où M. Eugène Lami a groupé, un peu arbi-
trairement, Delacroix, Musset. Mérimée, Auber, Gounod, etc. Les aeux premiers étaient
debout près d'une cheminée.
N°* 31, 7^ : Portrait gravé sur bois en 1854
gîpv 1° Gravure sur bois. — H. o'"i55, L. o"'i3o. — Gravé par Dujardin
,^^'%-_ «^t publié par Vlllustration, en 1854. — Réimprimé en 1864 dans la
.;^^^^ brochure intitulée : « Eugène Delacroix à l'Exposition du boulevard
'\^-<\lJ-?^\ des Italiens, par H. de la iMadelène. » — Cat. A. Moreau, pp. 5 et 6.
_ ; :■>' ^■'■y'^ 2" Ce même portrait (retourné) a été utilisé en i85d pour un autre
'^^'y^\,^i.- numéro de Vlllustration. — Non catalogué par M. Moreau.
'^^^''^\p}0^^ Nommé membre du jury des récompenses au Salon, Delacroix décline
^ '^"^ ' ^'"' cet honneur. Il n'est pas mauvais de remettre sous les yeux du lecteur, en
ce temps de compétitions effrénées , les motifs du refus : « Monsieur le Directeur, je vous
prie de vouloir bien faire agréer à M. le Ministre de l'Intérieur le motif qui m'oblige à me
récuser en qualité de juré, dans la commission des récompenses. .le me trouve moi-même au
nombre des exposants : j'ai pensé que cette raison me 'permettrait de décliner la charge aussi
délicate qu'honorable que M. le Ministre voulait bien me confier, et pour laquelle j'ose le
prier de recevoir mes respectueux remerciements. » [Lettres, édition Burty.)
N" 1 3 : Mi-corps gravé par Alphonse Masson en i8^'4
Eau-forte et roulette. — H.o"'i55, L. o^'iiS. — Gravé d'après
une photographie et publié avec le fac-similé de sa signature,
dans V Histoire des peintres vivants, de Théophile Silvestre. —
Cat. A. Moreau, p. 5.
En face de cette tète dont le regard songeur plonge avec mélancolie
dans le néant des choses, nous nous souvenons de ces quelques lignes,
que le maître écrivait à son ami Soulier, en iS."-!) :
<i Dans l'insomnie, dans la maladie, dans certains moments de solitude,
quand le but de tout cela s'offre nettement dans si nudité, il faut à
l'homme doué d'imagination un certain courage pour ne pas aller au
devant du fantôme et embrasser le squelette. Quelle ditTérence dans nos
idées exercent quelques années seulement ! Je trouve que tous les livres ne sont que jieux
communs. Ce qu'ils disent sur l'amour, sur l'amitié, roule sur une demi-douzaine d'idées
banales qu'on a eues il y a mille ans. Il n'y en pas un qui ait jamais peint, à mon avis, le
désenchantement ou plutôt le désespoir de 'l'âge mûr et de la vieillesse. .le parie que tu n'as
jamais vu dans les livres ce que tu sens là-dessus comme tu le sens.. L'homrne passe sa vie
dans les convulsions de l'inquiétude et dans la léthargie de l'er.aa;.» '/.^.'.'rcj, édition Burty.)
PORTRAITS iJK 1) K L AC i< O 1 X
N" j4 : Mi-corps grave p:ir Alphonse Masson en 18^4
E3u-forte et roulette. — H. o'"i95. L. o'^'if,-. — Gravé d";iprcs
une photographie pour VHistoire des peintres vivants, de Théo-
phile Silvestre. — Cat. A. Moreau, p. ii.
Ce portrait n'a pas paru dans le livre de Théophile Silvestre; il n'a été
tiré qu'à un petit nombre d'épreuves volantes et il peut être ainsi consi-
déré comme inédit. D'ailleurs, sous ce visage afiadi, diminué par la
suppression des principaux reliefs qui en marquent le grand caractère,
on a peine à reconnaître le grand penseur et le laborieux ouvrier qui,
précisément h cette époque, venait d'achever les plus belles épopées
décoratives dont puisse s'honorer notre siècle. "Théophile Silvestre,
l'ami des bons et des mauvais jours, le lidéle admirateur, l'infatigable
génie méconnu, ne voulut point laisser paraître cette image alïaiblie de l'artiste
ification duquel il avait dépensé son cœur et son mtelligence.
N'' 3 5 : Portrait charge dessiné par Eugène Giraud en 1856
^5
."V
r
qu ilsva
certains
Dessin rehaussé à l'aquarelle. — Di.mensions approximatives : H. o"'6o,
L. o'"70. (La tête e.st à peu près grandeurnature, elle mesure en H. o'"i4). —
Non catalogué par M. Moreau.
.M. Eug. Lami en a fait deux copies, il en conserve une dans son atelier, il a offert
l'autre à .\1. Haro. — Eugène Giraud a fait ainsi, pendant vingt ans, aux soirées du
Louvre, tous les vendredis de carême, le portrait charge de l'un des invités du comte
de Nieuwerkerke. Le collier de commandeur, confe'ré à Delacroix en i855, est
indiqué, et c'est même à propos de celte distinction que le portrait fut exécuté. De-
lacroix, peut-être par tradition de famille, avait toujours eu certaine propension
vers les fonctions officielles. En 1849, ■' avait fait des démarches pour obtenir la
direction des Gobelins : en i855, il rêva la direction des Beaux-Arts, mais renonça
bientôt à cette prétention. Il était chevalier de la Légion d'honneur depuis i83i et
officier depuis 1846. Il aimait les honneurs, en homirie qui les mérite et qui sait ce
lent aux yeux du vulgaire; if les rechercha sincèrement et ne fit point, comme
artistes, profession de les mépriser après les avoir obtenus.
N° 36 : Portrait anonyme publié en i8)6
Gravure sur acier. — H. o"'o85, L. o'"o72. — Publié en tèie de la
biographie de Delacroix, par Eugène de Mirecourt, deuxième série
des Contemporains. — Non catalogué par M. Moreau.
Le maître est vu de flice, assis devant une table et portant un porte-crayon.
tri VV-J': j-- Au-dessous du trait carré, on lit à gauche ; <i Publié par G. Havard »; au
M ^^^S.^'^y^-- niilieu : « Eugène Delacroix »; à droite : « Impr. de Mangeon, 67, rue Salnt-
0^éi=?-=^»»^#-=^ Jacques, Paris. » Ce portrait ne peut avoir plus de prétention que la biogra-
phie qu'il accompagne. C'est une vignette sans valeur réelle servant de
frontispice à un livre de crédit fort médiocre. N'insistons point sur de pareils ouvrages que
nous signalons au public par simple acquit de notre conscience d'iconographe.
t-l\' PORTRAITS DE DELACROIX P. i8û3
N-^ 37 : Panthéon Nadar (1856)
Lithographie. — Format in-douze. — Non catalogué par M. Morcau.
Ce portrait, exécuté d'après d'anciennes lithographies, fait partie du cortège des célébrite's
publiées sous le titre ; Panthéon N.tdar, vers i8?6. Il occupe, dans la planche format
grand monde, la droite du deuxième rang à partir du bas et porte le n" 78.
N" 38 : Miniature peinte par madame Herbelin en 18^7
Ivoire. — Dimensions inconnues. — Salon de iSSj. — Non catalogué par l\\. Moreau.
Ce portrait fut exposé sous le même no iSSg, avec ceux de Rosa Bonheur, Alexandre
Dumas fils. Dauzats, etc. Nous ignorons ce qu'il est devenu.
N° )9 : Mi-corps dessiné par Heim en 1858
^Ç^ Dessin au crayon rehaussé de blanc. — In-folio. — Signé au bas sous
%^ Is jambe droite et daté : « Heim, i85S. » Delacroix en costume de
.."■•\"V'-"\ membre de l'Institut. — Appartient au musée du Louvre. — Non
Tv V'v'TÏv catalogué par M. Morsau.
Ij^ilj'^T^i- Exécuté alors que Heim était dans un âge très avancé, le portrait n'est
■^^?^*^^~^^ P'"*^ parmi les meilleurs de la belle suite que ce peintre nous a laissée. Il
l'^-T^- .^ri'".— -4 ' manque de fermeté. On sait que dans 1-js premiers jours de janvier iSSy,
- 'iJ.ï=i*^! i Delacroix se présenta une fois de plus à l'Institut et fut élu. De nombreux
passages de sa correspondance à cette époque montrent à quels sentiments
il obéissait en persévérant avec une telle persistance a poser sa candidature
si souvent, si longtemps déçue. Il était mù non pas par une étroite ambition, mais par le
noble désir de marquer sa place parmi les meilleurs de son temps, d'aîTirmer son mérite
devant tous ceux qui jugent la \aleur de l'homme aux broderies de son habit, de donner, en
un mot, la sanction sociale à son génie.
N" 40 : Gravure sur bois, posthume (1863)
ali5(s Gravure sur bois. — H. o"M6o. L. o^iiS. — Publié par le Monde
t'^% -i illustré, n° du 23 août iSôlî. On lit au bas : « Eugène Delacroi.K,
.%iif^-\ membre de l'Institut, commandeur delà Légion d'honneur, mort à
'v^S > Paris le i4aoiit i8ô3. » — Cat. A. Moreau, p. 7.
.• ■ ?, " Ce portrait accompagnait, dans \e Monde illustré, un article nécrologique
;' ..^-'i de M. Charles Yriarteet l'extrait des mémoires consacrépar Alexandre Dumas
■:■]■) V'"xl\) j à DeLicroix. Il a été utilisé pour le journal Éckos de Paris du ?.9 août i863,
■ '{'"tv^-^ ■-'' pour VAlinanach des scènes illustrées de l'année i8ô3 et pour VAlmanach de
-•• '^' la Litiérature. Il présente une asse;; vague ressemblance avec le type du
iîi-and artiste; mais c'est là tout son mérite. On m peut d'ailleurs demander à des poriraits
CiS journaux le même caractère, le même s'ylu qu'aux œuvres peintes eu gravées.
PORTRAITS DE DELACROIX
LV
K° 4î : Composition pobihume (1803)
Non catalogué par
Toile. — Grandeur nature.
M. Moreau.
-M. Fantin-Latour peignit cette composition peu de
temps après !a mort de Delacroix. C'est un groupe
d'admirateurs: les trois peintres Louis Cordier,
\^ ^J^M Alphonse Legros et Whistler, 1 humoriste Chanip-
,^ ^S^^ tieury. le peintre Edouard Manet, l'aqualbrtiste Brac-
■-< -,''^- ?-/'=-?( quemond, l'animalier de Balleroy, le poète Charles
'" --^S-^â Baudelaire, le critique Edmond Duranty, tous réunis
- "^^^, devant le portrait du maître, peint en ton de camaïeu,
assez semblable à celui de la photographie qui a servi
de modèle. N'omettons pas de citer enfin l'auteur de la toile, le portraitiste délicat, Fantin-
Latour, qui apparaît h gauche en manches de chemise.
N" 42 : Gravure sur bois, posthume (1863)
Gravure sur bois. — H. ©"'iS?, L. û"'iio. — Gravé sur bois par
Gusman, d'après un dessin de H. Rousseau. — Cat. A. Moreau, p. 7.
Peut-être est-ce dans la philosophie quelque peu spleenétique du maître
qu'il faut chercher l'explication du nombre immense de ses travaux . Nous
VV'^U:'ÀÎ^-:. - '■ lisons, en eflet, dans une lettre à M. Soulier : « Le vide de la vie, l'inu-
>5i'É. 'i'.'»''' ' tilité lie nos souhaits et de nos regrets ne t'est pas, hélas! plus pesant qu'à
moi. Tu parles de la solitude, il n'en est guère de plus pesante que la
mienne. Je n'ai plus même pour m'éiourdir les distractions vulgaires du
monde. Com.me je suis habituellement souffrant, j'y ai entièrement renoncé,
et je passe bien souvent ma soirée au coin de mon feu. Les illusions s'en
vont une à une, une seule me reste, ou plutôt ce n'est pas une illusion,
c'est un plaisir réel, c'est le seul où l'amertume du regret ne se mêle pas: c'est le travail.
Mais enlîn c'est ma seule passion; puisse-t-elle survivre longtemps à toutes les autres! Malgré
l'inconstance de ma santé, je travaille, et peut-être à cause d'elle; car, comme elle m'est un
prétexte suffisant pour me dispenser des sottes obligations du monde, je donne à la peinture
tout le temps e;ue je dépensais si follement et si inutilement. » iLcItres, édition Burty.)
N° 43 : Gravure sur bois, posthume (1863)
/^ Gravure sur bois. — H. ù-^iSo, L. o">i70. — Publié par VUnivers
x".^ illustré, n° du 27 août i863.— Non catalogué par M. Moreau.
xHi^^îv Ce portrait, qui a été reproduit dans le Musée français-aiif^lais, accovn'^-A-
'-'■ ' ^nait, dans YUr.ivers illustré, un fragment extrait de l'œuvre de George Sand.
paru dans Vllluslration en
geste, tout au moins à
et tous trois procèdent
certainement d'un mê.me original, une photographie sans le moindre doute.
Ce sont également des photographies qui ont servi de modèle, directement ou indirectement,
à la plupart des portraits qui furent publiés après la mort du grand artiste.
*,_„"T4^!/rv\\ C'est le même, en sens inverse, que celui qui a paru
\^W^^^î-- ^'^'-\ ('*'°''" ^^ n" Ji). Il ressemble également, comme
V/ y^^T^'' celui qu'a publié Théophile Silvestre Jvcir le n" 33),
LV[
PORTRAITS DE DELACROIX
1 864
N° 44 : Gravure sur bois, posthume (186
^^\, Gravure sur bois. — H. o™i40. L. o"ii5. — Publié dans l'Illustra-
^'*'^*^ ?/oH anglaise^ numéro du 29 août i863. — On lit au bas: « The late
S; "'-^^ Eusénc Delacroix. « — Cat. A. Moreau, p. 8.
i^T^M:^^ '' Après ma mort, il ne itra. fait aucune reproduction de mes traies, soit par le
'/^{ W^j.-"^ moulage, soit par dessin ou photographie: je le détends expressément, u
^f('hif>AfA<< Cette clause formelle, consignée par Delacroix dans son testament, n'était
'''"•■ ' qu'une coquetterie d'homme de génie, que la loi devait être impuissante à faire
respecter. Certes, bien des reproductions imparfaites, telles que celle dont nous donnons ici
le croquis, ont altéré l'intelligente physionomie du maître, mais la publicité des traits est
une des fatalités qui s'attachent aux grands hommes. N'est-ce pas ainsi qu'on paie sa gloire?
N" 45 : Gravure sur bois, posthume (i86^)
Gravure sur bois. — H. 0^104, L. o'"090. — Gravé par Gérard d'après
un dessin de Parent. — Publié dans le Musée des Familles et dans
VAlmanach du Musée des Familles. — On lit au bas : « Eugène Dela-
croix. (Le i3 août i8ô3, s'est éteint, à l'âge de 65 ans, l'un des plus
grands peintres de cette époque. 1» Ce portrait a paru dans les Beaux-
Arts illustrés, numéro du 28 août 1876.
Delacroix était né le 23 avril 179S. Il avait donc connu la vie et ses souf-
frances pendant soixante-cinq ans, trois mois et quinze jours.
N° 46 : Eau- forte posthume (1864)
Eau-forte. — H. o"'f lo, L. ©'"loo. — Gravé par Jean Gigoux d'après
son dessin. — Publié dans la Ga-ette des Beaux-Arts, numéro du
i"^' janvier 1864, accompagnant un article de Charles Blanc. — Cat.
A. Moreau, p. S.
M. Jean Gigoux, qui fut un ami et un admirateur de Eugène Delacroix, possède
dans sa belle collection de dessins une suite assez nombreuse d'études toutes
relatives aux belles peintures du Palais-Bourbon.
N" 47 : Buste posthume (1864)
Bronze. — Grandeur natui'e. — Commandé à M. Carrier-BcUcase, le 12 avril 1864.
— Salon de i865. — Non catalogué par M. Moreau.
Ce buste a été payé, pour le coulage, sept cents francs par la Société nationale J.s Beaux-
Arts, à M. Thiébaut. fondeur. M. CarVier-Belleuse n'a point accepté d'honoraires. Sur le
socle est écrit ; ^ A la mémoire d'ii!ugène Delacroix. 1 1 Soci.iré des Beau.'':-Artj. l'î aoûi: io5')+.»
Il était placé au milieu des salles "de l'Exposition posthume, bouievard des Italiens, 21",.
IS64
PORTRAITS DE DELACROIX
LVII
N" ^8 ; Médûilion posthume (1064)
..^.^^«i ^ Bronze. — Diamètre, o"'?o. — Modelé par Auguste Preault et tiré à deux
■/-■"•^w^îQv^"^ A exemplaires seulement, dont l'un appartient "à .M. Paul Dutilleux. —
\- è^0U' Auîographié par A. Rohaut, dans les dimensions de: Diamètre, o"Moo,
\^^^'^ pour la seconde livraison des Fac-similés de dessins et croquis oris^iiiaux
^^^-"^ de Delacroix (iS55). — Gravé à l'eau-forte par Gaucherel, dans les
dimensions de : Diamètre : ©'"qS. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 49 : Dessin du médaillon précédent (1864)
Dessin à la plume. — Diamètre : C^io. — Exécuté d"après son médaillon, par
Préault, qui a écrit au bas : « Je ne suis pas pour le fini, je suis pour Tinfini. » Publié
dans l'Autogfaphe. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 50 : Gravure sur bois, posthume (1864)
^M
■s^^Q,
^S^^^^i Gravure sur bois. — Intérieur ovale, encadré de
3?ir^?-^''^^< ' feuilles de chêne et de laurier, avec banderolles et car-
:.- ^"^^^louches : H. o"'o65, L. o'^ôo. — La planche entière :
H.o"'5oo, L. 0^280. — Publié dansle Journal illustré,
":.: numéro du 25 décembre 1864. — Cat. A. Moreau, p. 8.
^-'* ' . ^' '- '. Ce portrait, qui occupe le milieu d'une grande page, est le
v.^^-^^^^'' -_:;_■" ,,^V.-^,.,; \-J_-^„ centre d'une composition décorative où se trouvent réunies
-ir" ~"^ ■>='=^^^^-=- — *-"-^*'—^-- (jj, certaines œuvres de Delacroix: Dante et Virgile aux
enfers., la i\'oce juive. Il fut publié à l'occasion de l'Exposition posthume. Cette image très
médiocre ressemble plus à une caricature qu'à une œuvre sérieuse. Elle est bien faite pour
justifier la crainte du maître à la pensée que ses traits seraient déshonorés après sa mort.
N° 5 1 : Lithographie posthume (vers 1864)
j<^^^,. Lithographie ovale. — H. o"'i38, L. o'^M i5. — Reproduction d'une
-"5te2C^-è\ photographie de Pierre Petit, par Gomez; planche inédite. —
■rz^.' . -|^^.^ Qqx. a. Moreau, p. g.
'I;?"-^ La physionomie de Delacroix exprimait plus de finesse que de bonhomie,
..;flrj^57' pl^s de mobilité que de strén'ité. Sous une courtoisie apprise, toute
if.^,_-;2"; d'éducation et de nécessité sociale, il cachait mal une brusquerie d'impres-
""fe-ijj sion, une ardeur des sens, une véhémence de passions, qui vivifiaient la
^v flamme de son regard. Ici, tout au contraire, la face est lourde, l'œil atone,
'■o^i'ij~>- le nez épais, c'est une tête vulgaire. Il faut bien le dire, le visage du maître
tait peu à la traduction plastique et la tâche des interprètes était assez malaisée. Delacroix,
se jugeait lui-même en artiste, savait cela et n'y restait pas indifférent.
LVIII PORTRAITS DE DELACROIX P. iS65
N° 52 : Gravure sur bois, posthume (1864)
Gravure sur bois. — H. o'"oSo, L. o'^ooo. — Publie par le journal
l'Autographe, numéro du i^'' mars 1864. — Cat. A. Morcau, p. g.
Cette gravure accompagnait un article biographique qu'illustrait en même
temps le fac-similé' d'un dessin provenant de la Vente posthume (Hercule et
Cacus, n" I 1 14'. Le mythe était bien choisi pour symboliser l'œuvre morale
du maître. Lui ausfi â lutté cont.-e la force aveugle et brutaie; mais il n'a
pu, comme l'antique héros dont il a glorifié les travaux bieniaisanis, vaincre
l'ennemi sans cesse renaissant. Il n'a pu non plus trouver, après la lutte,
peint si noblement dans son Hercule au pied des colonnes.
N° )'} : E:m-forte posthume (1864)
Eau-forte. — H. o'"i20, L. o"oSo. — Gravé par Schutzenberger pour
le frontispice d'une brochure in-douze d'Amédée Cantaloube, intitulée :
« Eugène Delacroix, rhonime et Fartiste. Dentu, 18G4. » — Cat.
"ï J'iiv^,', A. Moreau, p. 9.
-,- , :3-;_.;-=i^^ La brochure de M. Amédée Cantaloube fut publiée à l'occasion de l'Exposition
•^/>'X\J'^^^-'' posthume formée par les soins de M. Martinet, directeur administrateur de la
^-"^f-'Sir.-rS^ Société nationale des Beaux-.'\rt5. Ouverte le i3 août 1SÔ4, pour l'anniversaire
de la mort du maître, cette Exposition fut, nous l'avons du. un triomphe décisif.
N° ^4 : Gravure sur bois, posthume (vers 1865)
Gravure sur bois. — H. o'^ogS, L. ù'"075. — Gravé par Maria Chenu,
d'après un dessin de G. Perrichon. — Cat. A. Moreau, p. lo.
/T.
^^
gularite de ses traits et enviait le beau pr
il n'eût pas consenti h changer sa laideur intelligente pour une beauté sans expression.
N° 55 : Gnivure sur bois, posthume (î86))
Gravure sur bois. — In-douze. — Publié dans ÏAhnanach des gloires
nationales de iS65 ; d'après un Dessin de Jouffroy. — Non catalogué
par NL Moreau.
Après le Panthéon des Illustrations françaises, voici VAlnianacIi des gloires
nationales. Le succès incontesté de l'exposition de ses œuvres vengeait Eugène
Delacroix de toutes les injustices dont avait souffert son génie, et. mieux que
L io.-.r où l'Institut lui .ivalî ouvert .^es portes, i! cntrr.it dans rim:T>or:ahté.
Mais ii était mort meurtri, et ie triomphe arrivait trop tard.
i865
PORTRAITS DE DELACROIX
LIX
N" )6 : Gravure sur bois, poslhume (iB6^')
bm
M
porains; deux
Gravure sur bois.— H. o'"i86. L. o'^' 147. — Gravé par L. SL-rif.kolT,
d'aprésun dessin de Henri Rousseau, sur phoiograpiiie de Carjat.
— Publié dans le Magasin pittoresque, numéro de décembre iS55.
— Cat. A. Morcau, p. 10.
Le portrait, de forme ovale, est entouré d'un cadre carré; les écoinçons
renferment, en haut, des couronnes de chêne et de laurier, et en bas,
tine palette et des attributs de peinture. Un article biographique l'ac-
compagne. La couronne et les palmes, c'est le signe de la "gloire, la seule
récompense que le noble artiste avait demandée en vain "à ses contem-
; plus tôt, elle aurait consolé son cœur brisé et ravivé ses forces épuisées.
N" 57 : Lithogniphie posthume (1865)
- . Lithographie. — H. o"2?o, L. o'"iqo. — Dessiné sur pierre par
G. Fuhr, d'après une photographie de Pierre Petit, et signé au bas à
', gauche. — Imprimé par Lemercier en 1865-07, pour être inséré dans
^- la livraison du Panthéon des Illustrations françaises au dix-neuvième
l siècle, consacrée à Delacroix (Victor Frond, directeur).
; La photographie qui a servi à cette lithographie est aussi celle que nous
avons utilisée pour ia gravure de l'un de nos portraits publiés hors texte.
C'est l'une de celles qui reflètent le mieux le visage du maître. Eugène Dc-
'■ V lacroix qui, par une clause de son testament, interdit la reproduction de ses
traits après sa mort, fut de son vivant très soucieux de laisser sa fidèle image h la postérité.
11 donnait volontiers son avis aux artistes qui gravaient son portrait; ainsi, dans une lettre
à Théophile Siivestre, qui faisait exécuter, pour VHisioire des Ariisles vivauti, les portraits
décrits plus haut, sous les n"^ 33 et 34, se plaint-il vivement que son visage soit alourdi.
?^.
N° )8 : Buste posthume (1865)
Marbre. — H. o^Soo. — Exécuté par Antoine Etex. — Salon de
i865. — Exposé de nouveau en 1876, en plâtre teinté du ton de
terre cuite. — Non catalogué par M. Moreau.
La tête est de grandeur nature; l'habit est celui de membre de l'Institut.
Sur le bandeau uni, form.é par la saillie de la poitrine, on lit : « Eugène
Delacroix n. Delacroix était très frileux et s'enveloppait le cou d'un cache-
nez, même à l'atelier: le sculpteur a conserve, malgré l'habit d'apparat,
ce trait des haoitudes du grand artiste. — Le grand nombre des portraits
du maître que nous avons vu publier, en 1S64, témoigne de l'immense
K-i popularité qui accueillit son nom, dés que la mort eut rappelé ses con-
tem.porains au sentiment de la justice. Cette vogue ne fut point passagère,
et les hommes de notre âge applaudissent encore au retour d'opinion qui se produisit, il y a
vingt ans, en faveur du peintre superbe dont l'oeuvre non seulement domine tout son siècle,
mais encore occupe une place d'honneur parmi les oeuvres de tous les temps.
N° 59 : Eau-forte posthume (187^)
LMPELACfïOl
Eugène Delacroi
Eau-tbrte. — Cadre intérieur ovale : H. o'"io5, L. o"'o8 i . — Cadre
grisé extérieur carré: H. o'"i4!, L. C^oog. — Gravé par Emile Boilvin
d'après une photographie et publié ea tète de l'ouvrage de M. A. Mo-
reau : « E. Delacroix et son œuvre, etc. » (1873.)
On lit sur le fond, à gauche : E. Boilvin; au bas ds la marge grisée:
<i Eugène IDelacroix " et sur la marge extérieure, à gauche: j Jouaust éd. »;
à droite : « Imp. A. Salmon. « — Le visage est vu presque de face.
La photographie qui a servi d'original a cette eau-forte est devenue rare.
Elle est d'ailleurs parmi les meilleures de celles qui furent e.'cécutées d'après
dont elle rend bien la finesse et la vivacité.
N° 60 : Gravure sur bois, posthume (1873)
ik Gravure sur bois. — Diamètre : 0^04 1. — Dessiné d'après la photogra-
ÎA phie de Pierre Petit. — Publié dans l'ouvrage de M. A. Moreau :
^JE. Delacroix et son œuvre {i8y3].
'.;V^\-^^ Nous connaissons plusieurs états de cette gravure, dont M. A. Moreau a sur-
■CbCiîi*' veillé tout spécialement l'exécution ; il voulait une image digne du maître dont
il admirait si passionnément le génie et dont il allait vulgariser l'œuvre. Le résultat, cette
fois, ne répondit malheureusement pas à ses soins.
N" 61 : Eau-forte posthume (vers 1876)
Eau-forte,
d
o'"o37, L. o'"o36. — Tiré seulement à quinze exemplaires, au bas
'une planche (troisième état) représentant la Noce juive, gravée par Henri Le
t signée Chaplin (voir le n^ 6S7). — Non catalogué par M. Moreau.
N° 61 ; Fantaisie posthume (1878)
Dessin à la plume, ovale. — Gravé sur zinc à la dimension de :
H. o"M33, L. o'"077, pour le journal La Question, numéro du
24 mars 1878. — Non catalogué par M. Moreau.
On lit en tête de cette page fantaisiste: « Journal de la torture. — La
question artistique. « Le médaillon de Eugène Delacroix, signé : .A.. T.
(Adrien Tournachon), est accolé à celui de Ingres. Ils sont relies par une
branche de laurier et adossés à une colonne brisée sur laquelle sont gravés
les noms de Michel-Ange, Raph.iél, Titien, Léonard, Rubens. Le soleil
qui luit à gauche, derrière un peuplier verdoyant , projette encore ses
ravons sur les deux maîtres, tandis' que sur la droite des arbres dénudés,
symbole de la mort, abrii^.-.t d'3u;ros médaillons de a Chose et Ma-
chin artistes à tous crins ». — Allusion non équivoque a la triste situation de l'arc moderne.
1 883
PORTRAITS DE DELACROIX
LXI
N" 6j : Lithographie posthume (1881)
Lithographie. — H. o"';40, L. o"'ii<j; la tète seule mesure o"Vi65. — Interprétée
d'après itne photographie de Pierre Petit, par Lessore. —Tiré seulement à cinquante
exemplaires. — Non catalogué par M. .Morcau.
Le type est analogue à celui du n" iSji.
N° 64 : Lithographie posthume (1881)
Lithographie ovale. — H. o"'258, L. o"'2i-; la tète seule mesure o"'ioS. — Inter-
prétée d'après une photographie par Achille Sirouy. — Salon de i8Si.
Ce portrait ressemble à la belle eau-forte grave'e par Bracquemond (voir le n° 28). Il est d'une
facture très puissante, mais les modelés des demi-tons sont peut-être trop accentués, et le
visage porte les traces d'une fatigue qu'il n'avait qu'aux jours de fièvre morale et de malaise
physique. L'œuvre n'en est pas moins celle d'un artiste très consciencieux, très habile et
très amoureux de son sujet. M. Sirouy est l'un des interprètes les plus ardents et les plus
autorisés de l'œuvre de Delacroix (voir les n"' 198,353,462.1118, 1214).
N" 6^ : Statue posthume (1883)
Pierre. — Grandeur nature. — Exécutée par Ernest Guilbert, en i8S3.
f ',^-^ Bien qu'il fût né à Cliarenion-Saint-Maurice, Eugène Delacroix a été accueilli
'k'-cL '^^•^^ ^"^ chœur des Parisiens illustres qui dressent leurs profils sous les niches du
v'"'^ '--Xv nouvel Hôtel-de-Vil!e. Sa statue est placée au premier étage du pavillon sud-est,
\^' ^<^c"est-a-dire en façade sur le quai. Il tient de la main droite un pinceau et de
I ( ■*'■ la cauche sa palette, ses brosses et un linge d'essuie. A ses pieds sont divers
m "
[■r., ",..(< urtiis ic (,iiu;:ui ucb l'diiiiciib luubiici qui dressent leurs prot
■'■)- ■■•X^, nouvel Hôtel-de-Vil!e. Sa statue est placée au premier étage du pavillon sud-est,
" ' " ' " "■ " " i. Il tien
palette, ses brosses et un hnge dessuie. A ses pieds sont divers
attributs du peintre, tels qu'un pot à couleurs, des portefeuilles de dessins , etc.
Comme toutes celles qui font partie de la mèm.e décoration, cette statue a été payée
quatre mille francs. Ce n'est pas la seule que Paris doit élever au grand artiste.
Bientôt, par les soins d'un comité, ardent h poursuivre la réalisation de ses vœux, nous
verrons s'élever l'image du maître sur l'une des places de la grande cité qu'il a contribué à
rendre plus glorieuse par la puissance de son génie. Souhaitons que le nouveau monument
soit, par son ampleur décorative, digne de l'artiste dont il devra perpétuer la mémoire.
m
N" 66 : Masque posthume (1883)
.■1''^'% Plâtre et bronze. — H. o"'022, L. o'"i6. — Exécuté par Zacharie Astruc.
l^r^ ~ Salons de 1882 et de i883. — Non catalogué par M. Moreau.
ij^ ,2^; f C'est sur le socle d'une statue de jeune homme, appelé par son auteur : « Le
'^1^^ marchand de masques » que se trouve cette effigie de Delacroix, à côté de celles de
^■^ Barbey d'Aurevillv, Balzac, de Banville, Berlioz, Carpcaux, Corot, Dumas, Faure,
Gambetta, Gouncd, Hugo. 'M. Zacharie Astruc, qui a connu Delacroix, a très heureusement
utilisé, dans la remarquable exécution de ce masque, les photographies qui nous restent.
LXII
PORTRAITS DE DELACROIX
iS65
N" 6-j : Tombeau de Eugène Delacroix au cimetière de l'Est
Pierre de Volvic et granit. —
H. 2">ôo, L. 3"'3o.— M. Dar-
cy, architecte. — Gravé sur
zinc (perspective et détails)
par P. Lorain, pour la Galette
des architectes et du bâtiment,
iS65, t. III, p. 3o7, dans les
dimensions de : H. o^'ig, L.
o'"25. — Gravé sur cuivre (élé-
vation et coupe) par Soudain,
pour V Architecture funéraire
de César Daly, première section
B, pi. III, dans les dimensions
de : H. o"'325, L. o^siS. —
Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix avait dit en son testa-
ment : 0 Mon tombeau sera au cimetière du Pére-Lachaise, sur la hauteur, dans un endroit
un peu écarté. II n'y sera placé ni emblème, ni buste, ni statue; mon tombeau sera copié tris
exactement sur l'antique, ou Vignole, ou Palladio, avuc des saillies très prononcées, contrai-
rement à tout ce qui se fait aujourd'hui en architecture. » Pour se conformer h cette volonté
précise, l'exécuteur testamentaire, M. Piron, de concert avec quelques amis du maître,
choisit pour type le sarcophage de L. Cornélius Scipio Barbatus, découvert en 17S0 sur la
voie Appia. Est-il utile de rappeler que ce sarcophage se compose d'une chambre cubique sur
laquelle vient s'asseoir, comme un couvercle, une table ou chevet d'ordre dorique, munie
d'accotoirs aux volutes saillantes. L'ornementation, très sévère, ne comporte qu'une rangée
de denticules et des métopes décorées de rosaces entre les triglyphes. M. Darcy, architecte
distingué, membre de la Commission des monuments historiques, fut chargé d'exécuter la
copie du modèle antique, en la conformant toutefois aux exigences des lois modernes en
même temps qu'à certaines conditions pratiques, capables d'en assurer la conservation. La
partie supérieure, assise sur un soubassement de granit, est taillée dans deux blocs délave de
■Volvic; elle porte cette simple inscription : Eugène Del.acroix; mais elle n'est point, à
l'exemple du sarcophage antique, creusée en forme de chambre mortuaire. L'hygiène miO-
derne veut qu'on enfouisse les morts, et c'est à plus de trois pieds sous terre que fut
pratiqué le caveau. Une plate-forme d'isolement fut établie sur la face antérieure au bord
du chemin et garnie d'une balustrade de bronze d'un style très pur, que M. Darcy a su très
heureusement harmoniser avec le caractère du sarcophage latin. — M. Piron mourut avant
l'achèvement de cette tombe, et ce fut M. le baron Rivet qui eut l'honneur d'en présider la
consécration. La cérémonie eut lieu le 22 mai iS65, à neuf heures et demie du matin. —
Pour arriver jusqu'au monument, qu'on trouvera dans la quarante-neuvième section, pre-
mière division, on doit d'abord gravir la grande avenue qui conduit à la chapelle, puis
remonter l'avenue Feuillant jusqu'au chemm de la Cave, à l'extrémité duquel est l'allée qui
a pris le nom du maître. C'est là que ses admirateurs et ses amis viennent, à chaque anni-
versaire, saluer, en son Immortalité naissante, le glorieux artiste dont nous vénérons la mé-
moire.— A quelques pas du tombeau, et presque sous son ombre, une simple dalle recouvre
Ic-s restes de Jenny Le GuiUou. Deux lettres, J. G., indiquent seules la place où dort la
fidèle servante, qui, pendant vingt-huit ans, veilla sur la santé débile et garda la demeure
du maître.
";N des P0.flTRA!T3
L'OEUVRE DE
EUGÈNE DELACROIX
M DCCC XIII — M DCCC LXIII
EUGENE DELACROIX
A LAISSÉ
NEUF MILLE CENT QUARANTE ŒUVRES ENVIRON
AU NOMBRE DESQUELLES
SONT
HUIT CENT CINQUANTE TROIS PEINTURES
QUINZE CENT VINGT CINQ PASTELS
AQUARELLES OU LA\'IS
SIX MILLE SIX CENT VINGT NEUF DESSINS
VINGT QUATRE GRAVURES
CENT NEUF LITHOGRAPHIES
ET PLUS DE
SOIXANTE ALBUMS
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L'OEUVRE DE
EUGÈNE DELACROIX
Année
N° I : Croquis
Eau-forte. — Hauteur o'^oS, Largeur o'"85. — Appartient
à madame veuve Pierret. — Héliogravé pour le Catalogue
A. Moreau. — Catalogue A. Moreau, page i5.
Au centre, le portrait en buste du premier Consul; h droite, un
cavalier, surmonté du mot Buonaparle, et un buste d'officier; à
gauche, une tête d'homme chauve; un singe en costume d'in-
croyable avec cette légende : le Bossu. — Eugène Delacroix
exe'cuta, sur un fond de casserole, cette planche qui est son premier essai de gravure à
l'eau-forte et dont il n'existe qu'une épreuve.
N° 2 : Croquis
ï^
Burin. — H. o"i35, L. o'"i46. — Appar-
tient à madame veuve Pierret. — Héliogravé
pour le Catalogue A. Moreau. — Cat. A. Mo-
reau, p. i6.
Sur cette planche, qui est un en-tête de lettre
officielle. Delacroix a gravé le portrait d'un offi-
cier, portant la cuirasse, l'écharpe et le bâton de
commandement, un moine assistant un condamné
à ses derniers moments, une tête d'homme aux
cheveux bouclés, peut-éire un portrait de Murât.
Auprès de la tigure formant le centre de la plan-
che sont écrits les mots Eug. Delacroix et Au-
rore. Epreuve unique.
Nous attachons h ces croquis du début le simple intérêt de curiosité que présentent les
premiers griffonnages d'un homme appelé à devenir un si grand artiste.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l8l6
Année i8ï6
N " j : Chasse à courre
r3^^ Aquatinte. — H. o-^oo;, L. o'"225. — Catalogue A. Mo-
"v;- j reau, p. i6.
Au milieu d'une allée, à la lisière J'un bois, diux veneurs
sautent une barrière. Monté sur un cheval noir qui vient de
passer l'obstacle, le cavalier de droite, vèta d'un habit clair,
se détache sur la masse sombre du feuillage. Son compagnon,
pressé de rejoindre la meute qui galope au fond, dans la
3 plaine, frappe à coups de cravache son cheval blanc. M. Au-
guste, prix de Rome pour la sculpture, en iSio, grand ami
de Géricault, de Horace Vernet et de Eugène Delacroix, avait fait un desssin d'après lequel
cette planche fut exécutée. Les quatre marges de l'unique épreuve de cette chasse portent
des essais d'aquatinte. Delacroix, en eti'et, fut longtemps préoccupé des procédés de gravure.
N" 4 : Troupes anglaises
^nciturts publier.
Eau-forte. — H. o"-204, L. o"-i 65. — A la Bibliothèque
nationale, une épreuve coloriée. — Héliogravé pour le Cata-
logue A. Moreau. — ■ Cat. A. Moreau, p. 20.
Un fantassin de l'armée anglaise s'avance au milieu d'une plaine.
Des mouchoirs et des bas achèvent de séc'ner, accrochés à côté de
souliers et d'un jupon, au canon du fusil qu'il porte sur l'épaule
gauc'ne; un pain est piqué à la baïonnette. Sur le dos, au-dessous du
sac, et sur la poitrine, le soldat a suspendu de petits tonneaux. De la
main droite, il_tient une petite fille, auprès de laquelle marche une
femme chargée d'un jeune enfant et d'un chaudron. Dans le lointain,
on aperçoit un camp et un fourgon caché par un pli de terrain.
Souvenir et curieuse satire de l'invasion, innocente réplique aux
même époque en Angleterre contre la France.
N°
Les trois Nains littéraires
. L.
io5.
■142. — Eau-forte par Pierre Adam.
Dessin. — H. o"'2o5
Cat. A. Moreau, p.
Un .■^inçre, debout, tjn pied sur le bord d'une tombe ouverte derrière
lui, l'autre sur le couvercle de pierre, où se lit l'inscription : Ci-gît le
Naiu jaune, serre entre ses brus une lonsue plume, une marotte et de
^ -^ ■ 1 _• ">-i:r j. 1...- .1,
y^rB^ nombreux papiers, que deux autres singes s'effurcent de lui arracher pour
faite à l'occasion do l'un des nom-
i'cpoque de lu Restauration.
jeter dans le sépulcre.
!:]iL^ Cette caricature aura sans doute été
;;ux procès du A^ri'i! Jaune, journal satirique célèbre à
iSi'
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" 6 : Artistes dr:im;iLiques en voyage
aux mœurs au jour. ci;t;e pièce a été exécutée pou
Lithographie. — H. o'''266, L.O'"404.
— Cat. A. Moreau, p. 6-.
Quatre hommes et deux femmes sont
montés dans une voiture que traînent
deux haridelles conduites par un postil-
lon casqué et cuirassé. Ils sont assis au
milieu des décors et des accessoires de
théâtre dont le chariot est chargé. L'un
d'eux apprend un rôle; il est irrévé-
rencieusement assis sur les œuvres de
Voltaire, de Crébillon et de Racine.
Trois ^personnages chargés de palettes,
de boîtes à couleurs, d'appuie-main. de
pinceaux et d'une échelle suivent la voi-
ture h pied. Souvenir de quelque lecture
du Roiuaii comique de Scarron adapté
r le journal le Miroir.
Année iSi'y
N"" j : Vésuvienne
Lithographie (?j — Attiche {:j — Cat. A. Moreau, p. j'5.
Nous conservons l'attribution du Catalogue Moreau, malgré les doutes qu'elle nous inspire,
les Vésuvieiings étant un groupe de femmes socialistes de Ta révolution de 1848.
N° 8 : Les Voltigeurs de Coblentz
Lithographie. — Cat. A. Moreau, p. j3.
Le titre fourni par M. Piron, adopté par M. Moreau. est VoIi!£;eursdeLouisXIV,qiie
nous modifions pour éviter toute méprise (Voir n° o).
N° 9 : Les Voltigeurs de Coblentz
Lithographie. — Cat. A. Moreau, p. j3.
Dans son livre : Eugène Delacroix; sa vie et ses œuvres. .M. Piron dit : i- Je me rappelic
qu'il avait fait, étant très jeune, deux caricatures pour le journal le Nain jaune, qui
traitaient de ce qu'on appelait, en 1S14, les voltigeurs de Louis XIV. » Nous avons vai-
nement cherché ces deux pièces dans la coilection du .\aiii jaune. Mécontent de ces
planches, l'artiste aura fait etfacer la pierre après un tirage de quelques épreuves.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1S17
N° 10 : UAmbassadeur de Perse
Lithographie. — H.
Cataloî'ue A. Moreau
80, L. o'"i90. — Héliogravure pour le
Cat. A. Moreau, p. 27.
Nirza-Aboul-Hassan-Khan est debout, tenant de la main droite son
sabre un peu au-dessous de la garde, tandis que la main gauche, charge'e
de bagues, est appuyée sur la hanche; il regarde vers la droite. L'am-
bassadeur est coiffe d'un turban et vêtu d'une double robe_ somptueu-
sement brodée, qu'un manteau recouvre en partie. Des poignards sont
passés à sa ceinture. Deux Persans causent au fond.
On remarquera, à cette date, l'attrait que les personnages et les
costumes de l'Orient exercent déjà sur Eugène Delacroix. Il ne laissse
jamais échapper une occasion de dessiner une figure exotique. J'ai ra-
conté ailleurs (voir /'.4;-/ et les Artistes modernes] le singulier concours
de dessin auquel, bien plus tard, en présence de Sainte-Beuve et de A. Peteiin, se prêta
Delacroix dans un salon où l'on avait fait venir un jeune Chinois qui servit de modèle.
K' Il : L'Esclave favorite de l'ambassadeur de Perse
période s
Lithographie. — H. o'^25o, L. o^iSS.— Héliogravure pour le
catalogue A. Moreau. — Cat. A. Moreau, pp. 27 et 85.
La favorite est représentée debout, les pieds nus à côté de ses
I babouches, sur un riche tapis d'Orient. Elle est vue de profil, tournée
' vers la gauche, les bras chargés de bracelets et croises sur la poitrine;
une sorte de couronne garnie'de perles est posée sur la tète, les cheveux
tombent sur les épaules. Elle porte d'énormes boucles d'oreilles et un
long collier. Une grande écharpe l'enveloppe et couvre presque tous
ses autres vêtements.
Dans cette lithographie, comme dans la précédente, il est intéressant
de constater la simplicité de la composition, l'absence de mouvement
qui témoignent ici de la naïveté du jeune artiste. Il est alors visiblement
ivère et laborieuse de son éducation.
N° 12 : Némésis
de la Vente posthume
êsis de
soir?
Toile. — H. C'-^S, L. o'^Zo. — N"
200 fr. au comte Grymala.
N'est-ce pas cette composition qui, plus tard, inspira la Ne'n:
thélemy : Cri de guerre, datée du 4 août iS'3i, 5 heures du
Némésis, laisse là ces ministres pyg.-nées.
Prends ton sublime vol, plane sur nos armées.
Mêle ta voix de fer à l'ouragan qui tonne,
Et puis, comme autrefois . ,
Crie avec les Gaulois : <■ .\natheme aux Germains: ..
Cet:e belle
deur du îJcs
iposition porte déjà Tei-nrireinte apparente du génie de Delacroix
ipétuosité du raouve.aient.
iSiS L'ŒLn'RE DE DELACROIX
■)
Elisabeth
Toile. — H. o''5o, L. o"'40. — Non signé ni daté. — Appanc-nait à madame
veuve Leblond. — Cat. A. Moreau, p. 227.
De face, elle soutient sa tète avec la main droite. Les cheveux avancent sur le front en
grosses coques. La tête et la poitrine sont achevées, la main et les vêtements sont légèrement
indiquc's. — Buste grandeur nature.
N" 14 : Rose
Toile. — H. o'"58, L. o'"43. — Non signé ni daté. — Cat. A. Moreau, p. 228.
Le modèle semble dormir, la tête appuyée sur un oreiller. Buste, grandc-ur nature.
Est-ce d'Elisabeth ou de Rose que Delacroix faisait, en cette même année iSjj, le portrait h
la plume que voici : n Les jolis yeux! Limpides comme de belles perles, et fins et doux
comme un velours. Pardon de l'image, qui n'est qu'une bêiise. Le nez est assez original, la
narine est retroussée fièrement et s'enfle de temps en temps à Tunisson des prunelles
qui se dilatent et se remuent. La bouche est d'une élégance charmante. Mais le triomphe de
cette tête, c'est dans son contour. La joue, le petit double menton, la manière dont tout cela
se porte sur le col vaut des autels. Oh! la singulière petite femme! » A M. Pierrci. du 11
décembre 1817 [Lettres de Eug. Delacroix publiées par M. Ph. Burty).
N° 1 5 : Académie
Toile. — H. o'''43, L. o"'32. — Vente post'nume, n> 200. — Acheté 235 fr. par feu
Eelly et 200 fr. par M. Brame à la vente Belly.
M. René-Paul Huet conserve également une autre académie fort belle achetée à la Vente
posthume par son père, Tillustre paysagiste romantique, qui fut un des amis du maître.
Année 1818
N" 16 : Jésus amené devant Caïplie
[ -: \ ^ - 1 Toile. — H. o"'20, L- o'"34. — Concours d'esquisse à TEcoIe des
iviyi^iJrfîîè. Beaux-Arts.
y^^M^2:^ E" prcseiice du premier sujet religieux traite par Eugène^ Delacroix,
.<!rt~r5gsg?-a qyg l'Ancien et le Nouveau Testament devaient si souvent inspirer et d'une
façon si puissante, nous n'hésitons pas k reconnaître que cette peinture est
d'une grande faiblesse. C'est tout à fait une œuvre d'élève. La composition, en largeur, met
en scène quinze figures. On y retrouve pourtant la trace des procédés de Eugène Dela-
croix, qui y sont reconnaissables dans toutes les parties.
LŒUVRE DE DELACROIX
l8l8
■N° 17 : Le Cri public après le souftlet
Lithographie. — H. o'"2i7, L. o"'29. — Non signée.
Nous avons vauiement fouillé la collection des journaux
satiriques de la Restauration pour y trouver trace de l'épisode
auquel se rapporte la caricature de Eugène Delacroix. Nous sup-
posons que le jeune artiste aura, dans le goût du temps, fait allu-
sion à quelque aventure dont M. de Saint-Cricq fut le héros
malheureux. Ce n'est pas le moindre tort de l'allégorie en général
et de l'allégorie politique en particulier que d'être absolument in-
déchiffrable aussitôt que les menus faits qui l'inspirent sont ou-
bliés, et l'on sait combien l'oubli de cette sorte d'événements est
rapide. Ici, l'on reconnaît le comte d'Artois agenouillé et s'effor-
çant, il l'aide d'un cric, d'empêcher un personnage de la cour
d'être écrasé par un énorme soufHetsur lequel le Tempset une fi'-
gure symbolique dont le sens m'échappe pèsent de tout leur effort.
La scène se passe à la porte d'une prison d'où sort un personnage
difficile il dctinir, bourgeois du temps ou laquais, portant une lettre ou un journal à la main.
— Cette pièce douteuse n'est pas mentionnée dans le Catalogue A. Moreau et nous n'en
avons jamais vu qu'une épreuve achetée, en 1S76, au marchand Dauvin, par M. JNIoignon.
N" 18 ; Petite fille nue
___^,^,_^^___--._.,-^ Toile. — H. o'"64, L.o'"8o. — 'Vente Constant Dmilieux, 1874,
^Çîrr^Tr"^?..^^ ;>:**:; n" 2 du catalogue : 2,000 fr. — Lithographie par Alfred Robaut
È^J _ -~: ", ~ '".:-.t dans les dimensions de o'"o88 sur o'"i I S.
Sv"./ . ■ -- ^<>ï$ Quand Delacroix peignit cette figure d'étude, il était encore dans
'^' ' _i^ ~_^,'.-r^'1^:^ l'atelier de Guérin, le peintre du Marcits Se.vtiis. C'est dans cet alelier
^.~ ^Z^-^l^_:-^^^ qu'il rencontra Géricault et se Ha d'amitié avec lui; quoique celui-ci
^~' :-- ^nçT^^^c-;^^^ eût déjà exposé VOfficier de Chasseurs et le Cuirassier blessé
quatre ans auparavant, il revenait encore chez Guérin de temps en
temps pour peindre d'après le modèle vivant. On y remarque déjà le procédé du modelé
par hachures, qui est devenu comme la signature du maître.
N°
Dames romaines
Tûile. — H. o^-^'iz , L. o"'40. — Concours d'esquisse à
FÉcoIe des Beaux-Arts. — - Appartient à U. Chenavard.
« Dames romaines se dépouillant de leurs bijoux en faveur de la
patrie.
nation complète du motif traité par les
comoense en ces con-
cours de l'Ecole des Bcau\-.-\rts, auxquels, pourtant, il ne renonça qu'en 1S21
i8i9
UŒUVRE DE DELACROIX
IN 20
Ponrait de Eugène Delacroix
Dessin. — H. 0^167, L. o"'io8.
de roriginal, par M. Frédéric Villot.
Gravé dans les dinicnsions
Cat. A. Moreau, p. 5.
Ce portrait, où le jeune artiste s'est représenté en buste et de face,
vivenient cdniré à gauche et le côté droit du visage perdu dans rombre.'
a été exécuté à l'estompe, sous la lumière d'une lampe.
La planche de .M. Villot, achetée à la vente de cet amateur par l'édi-
teur A. Quantin, a été tirée en bistre et les épreuves placées en tête de
la première édition in-8'' des Lettres de Eugène Delacroi.w réunies par
M. Philippe Barty. Il a été fait pour cette édition un tirage de cinquante
épreuves avant la lettre. Les épreuves r.ncienncs sont presque toutes frap-
sec du monocramme de M. Frédéric \'illot.
N"" 2 1 : Portrait d'un officier turc
Dessin à la sépia. — Gravé à la manière noire, vers 1846, par
M. Frédéric Villot, dans les dimensions de o^'ogo sur o"'o75. —
Cat. A. Moreau, p. 99.
Le personnage en buste, presque de face, est vêtu d'une robe à larges
plis et coiffé d'un vaste turban. — Sur la planche gravée par M. Villot,
Louis Marvy a gravé un paysage. Vendu après la mort de M. Villot, le
cuivre dont il n'avait tiré que six épreuves, a été acheté par le marchand
'.^'/;-î*^ d'estampes Mriheu, qui en a fait tirer de nouvelles épreuves.
• ■> / -i'f .'■I' ^^' Frédéric Villot. dont le nom commence h figurer dans ce livre et v
^'^ — '^T'""-'^'' reparaîtra souvent, fut un ami de l'intimité de Eugène Delacroix. Amateur
éminent, M. Villot s'essavait, non sans talent, à tous les procédés de peinture et de gravure.
Il a de la sorte reproduit soit h l'aquarelle, soit à l'cau-forte et à la manière noire, certaines
œuvres de son ami. Il a même ciselé dans l'or une bague dont Eu^. Delacroix avait composé
le dessin pour madame \'iilot et précieusement conservée par son iils.
Année 1819
N° 22 : Jésus devant Pilate
^^^s' =irif I Toile. — H. o'"240 , L. o"'355
W^^ii f' ^^,~ .-^^ — \ M. Alfred Robaut. — Sisné au bas et
tts^î^ii^^^ J^-^.: Jl ,, , - , ■■.■"■..■
— Appartient
lauche.
Malgré la symétrie très intentionnelle de la composition, on
trouve encore dans cette esquisse la grande curiosité du mou-
vement déjà si remarquable dans la i\enicsis. Quarante ans plus
tard, Delacroix recommandait avec instance la recherche du
mouvement à un jeune peintre, M. Alphonse de Neuville. iMais
ce qui est surtout remarquable dans cette superbe esquisse, c'est
la grandeur et la noblesse de l'expression dans une extrême variété dattitudes écrites avec
une rare finesse jusque dans les parties d'ombre, dans le goût de l'école auquel le jeune
artiste se croyait encore tenu de sacrifier.
«i?«S«
L'ŒUVRE DE DELACROIX
KS19
N°
3
Scène d'intérieur
Aquatinte. — H. 0^189 , L. o"i3i. — Cat. A. Moreau, p. 17.
Nous ne trouvons de trace de cette pièce que dans le livre de M. Moreau, qui la décrit
ainsi ; n Une femme, les épaules couvertes d'une mante, se tient debout devant une autre
femme; celle-ci, assise, a sur ses genoux un petit enfant demi-nu qui se détourne en riant. ■>
N° 24 : L'Enfant Jésus, d'après Raphaël
Toile. — ■ H. o'"-'6o, L. o'^So. — N" i5- de la Vente posthume. —Cat. A. Moreau,
p. 319.
Adjugé au prix de 5, 000 francs à M. Sourigues. — N" 23 de la vente de cet amateur
en 18S1, où cette adniira'ole copie fut achetée 5,700 francs par M. Haro.
N° 25
La Vierge des Moissons
et les fonds, cepenJa
Toile. — H. i™25 , L. o"'74. — Appartient à Téglise
d'Orcemont, arrondissement de Rambouillet (Seine-et-Oise ).
— Cat. A. Moreau, p. 219.
Ce tableau, exécuté dans le courant de l'été iSig, sur la demande
d'un ami, a été donné par l'artiste à l'humble église de cette com-
mune. Il y est placé dans la nef, à gauche, au-dessus du petit autel
de la Vierge et dissimulé par une statue en bois peint, flanquée de
deux grands cierges. Si l'on n'était pas prévenu qu'on va voir une
peinture de Delacroix, qui a signé cette toile en bas, à droite sur
trois lignes :
EUG. — DE L.V CROIX '
A>JN. — 1S19
.•ET. — 2 1 —
on passerait volontiers devant sans s'arrêter.En effet le jeune artiste,
:j1 alors âgé de vingt et un ans, n'a pas osé s'affranchir de la tradition.
Il apréîéré Interpréterune composition de Raphaël. — Les accessoires
int, accusent bien la manière de Eugène Delacroix.
N° 26 ; Même sujet
Toile. — H. o"'4i, L. o"'37. — Esquisse du tableau précédent.
Cette esquisse n'a pas été raoJiliée dans l'exécution déiinitive de la grande composition.
N° 27 : Même sujet
Papier. -- H. o"'3:j , L. o'-' iz. — Variante légcrc — .Appartient ù NL Choquet.
Il existe aussi une aquarelle de o'-'i^ ^\xv C'iS et possédée par le ménic amateur.
iSi9 LŒUVRE DE DELACROIX
N'^ 28 : Même sujet
Papier. — H. o--'oS6 , L. o"'o58. — Vente posthuine. — Ap-
panient à M. Robaut.
Toutes ces compositions ont e'té visiblement exécutées sous la préoc-
cupation des Vierges de Raphaël. Et c'est à cette intention qu'il fît la
copie [x. n" 241 de l'Enfant Jésus de la Belle Jardinière. On raconte
,- ^. j^Zl ' ^ '^^ propos une anecdote qui mente d'erre rapportée. Cette copie resta
S-rî7.i^-^''' ' : pendant quelques semaines dans l'atelier de M. Haro, chargé de la
restaurer. M. Ingres, familier de la maison, Vy vit et fut frappé de sa
beauté. 11 se montrait intrigué d'en connaître l'auteur. Comme on savait
__^ _ _ -, ^ ^ quelle était sou horreur pour le talent de Delacroix, on le laissa chercher
i^^^^^^^^^c" d'abord, et, sur son insistance, enfin on le lui nomma: « Le misérable!
^ ' ~^ s'écrie-t-il. Et il fait sa peinture! » Les anecdotes de ce genre sont nom-
breuses da.-;s la vie des deux peintres dont l'anîagouisme est resté célèbre.
La mort de ^L .Alfred Bruyas, le généreux amateur qui légua sa magnifique collection au
musée de Montpellier, a privé le public du très important catalogue de cette galerie, qtj'il
avait rédigé avec la collaboration de Théophile Silvestre, mort, lui aussi. — Le premier
volume si intéressant de ce catalogue a été imprimé, mais n'est pas dans le commerce. Nous
en détachons un extrait des agendas de Eugène Delacroix sur Raphaël : « Rapkaél — Admi-
rable balancement de lignes. Sans doute c''est à cela qu'il doit sa plus grande beauté. Har-
diesses, incorrections que lui fuit faire le besoin d'obéir h. son style et à l'habitude de sa
main... Le Jugement de Paris de Raphaël, dans une épreuve affreuse.ment usée, m'apparaît
sous un jour nouveau depuis que j'ai admiré son admirable entente des lignes... »
N" 29 : Étude d'enfant
Dessin aux deux crayons. — H. o'^'43, L. o"'2j. — Provient de
la vente posthume et appartient à ^L Alfred Robaut.
Tout en reconnaissant, comme nous l'avons fait plus haut (v. n° 28),
que Eugène Delacroix a composé la Vierge des moissons sous l'empire de
Raphaël, nous devons dire aussi cependant qu'il fit, en vue de ce tableau,
des études nombreuses et très sévères d'après le niodcle vixant. — Le
dessin aux deux crayons que nous reproduisons ici, est une étude de
l'Enfcnt Jésus qui figure dans la composition. Le jeune artiste avait fait
poser une petite fille" n'avant pas, sans doute, de jeune garçon à sa dispo-
sition. Très beau dessin, d'ailleurs, d'une exquise élégance d'attitude et de
geste, et très achevé, malgré la grande simplicité du moyen.
N" 30 : Cheval au pâturage
' Toile. — H. C"! 5, L. o'"2i.
La première étude de cheval peinte par Delacroix d'après nature.
Déjà le tvpe élégant et fin de l'animal appartient à la race de prédi-
lection de l'artiste. Il a fait aussi sans doute quelques études de chevaux
de travail; M. René-Paul Huet en possède une fort belle. Mais il n'y
apportait point la même curiosité constante que Géricault, dont l'in-
fluence pourtant est très sensible en cette sorte d'œuvres.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1S20
Année 1820
N°3i-: La Consultation
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Lithographie. — H. o^'rgo. L. o"'247. — Ventes
Parguez, 22 avril i36i : 35 fr.; — Demolombe, 2 février
i863: i5 fr. — Vente posthume Delacroix, février 1864:
7 fr. (cinq épreuves'; Langlois, juin 1868: i fr. jS; Villot,
décembre 1875 : i5 fr. — Cat. A. Moreau, p. 68.
.Auprès d'un agonisant couché dans un grand lit à rideaux,
quatre médecins, réunis en consultation, sont assis en cercle
et dans les attitudes les plus grotesques, au milieu de la
chambre. Ils discutent avec énergie. L'un d'eux surtout, placé
de profil, a droite, et dont les cheveux se hérissent, fait de grands gestes pour convaincre un
de ses confrères, assis en face de lui, le chapeau sur la tête et la canne entre les jambes.
Derrière ce dernier, la Mort accroupie, symbolisée par un squelette, aiguise sa faux sous les
yeux du malade. — Cette satire, ni signée ni datée, lithographiée chez Motte, parut en
mars 1S20, dans le journal le Miroir. Il existe de cette pièce des épreuves en couleur dont
le coloris a certainement été indiqué par le maître lui-même.
Année 1021
N° 32 : Portrait de L.-P. Louvel
Lithographie. — H. 0^170, L. o''i4o. — Ala Bibliothèque
nationale.
Louis-Pierre Louvel, e.mployé à la sellerie du roi, né à Paris
en 17S3, assassina le i3 février 1820, à la sortie de l'Opéra, le
duc de Berry, hls du comte d'Artois depuis Charles X. Condamné
I à mort par la Cour des pairs, Louvel fut exécuté le 7 juin.
' En quelles circonstances Delacroix, un an après l'attentat, fut-il
conduit à faire ce portrait? Sans doute il c^da à quelque obsession
de sa pensée. Ce regard de fanatique tenta la prodigieuse activité
d'esprit de l'artiste qui fut l'un des plus grands travailleurs de ce
siècle. Le travail était chez lui autre chose que cette pénible corvée
don: Gros, par exemple, un grand artiste pourtant, calculait la du-
rée montre en main. Delacroix travaillait avec passion et sans trêve autre que celle de la
maladie, de la fièvre. Le travail était la vie même de cette organisation ardente à toute
jouissance, parce qu'il était pour elle l'occasion de jouissances perpétuelles.
Peut-être aussi ce portrait lui fut-il demandé par quelque éditeur. Quoi qu'en dise Delacroix
dans une lettre à M. Pierret ;du 3o août iS2-i\ il n'était rien moins qu'entendu en affaires, et
les ed'.teurs le savaient bien, qui oubliaient'de le rémunérer et parfois même signaient ses
planches d'un autre nom que le sien.
lS2I
UŒUYRE DE DELACROIX
l3
N-
T)
Pierres gravées et médailles antiques
^ .\ VI -1, Feuille de croquis à la plume. ■ — H. o"'25o, L. o'"3i5. — Reproduit
^.'^ %ji "^'r mais iuédit eu _/iic-5/);z;7e de même dimension par A. Robaut dans
" "."^L sa publication de Dessins et C7-oqins originaux, i865. — Provient de
^Vf^N^-- -''^" des albums du maître et appartient à M. Philippe Buriy.
(^y-^^'C^^^. Jusqu'aux miettes même tombées de la table de Eugène Delacroix, tout ce
•<^' J =S'-4ii que sn main a touché est digne d'être recueilli et mérite d'être étudié. Nulle
, ^ï» Q>. * part le procédé de synthèse particulier à ce puissant dessinateur n'est aussi
r ei- saisissant que dans ces feuilles de croquis d"après l'antique. Non seule-
ment il détermine d'un accent rapide et ferme tout le caractère d'une tête; mais on ne
saurait trop admirer l'admirable décision de cette plume qui, d'un seul trait, fixe toute l'ana-
'tomie d'un mouvement, comm.e dans la première tête à gaucho de la troisième rangée.
N" 34 : Moine en prière
Dessin à la mine de plomb. — H. o"Mo6, L. o''"igo. —
"Vente Villot, 1 1 février i865: 55 fr. — Gravé à Teau-forte par
F. Villot en 1843. — Cat. A. Moreau, pp. 96, 297.
Etendu à l'intérieur d'une grotte, les mains jointes dans un
mouvement d'extase, l'anachorète baise un crucifix posé sur le sol, à
quelque distance d'une tête de mort. Pour s'isoler dans la prière, il
a tourné le dos à la lumière et rabattu son capuchon sur ses yeux.
N° -^y. Vierge du Sacré-Cœur
Toile. — • H. i™3o, L. i^jo — Au couvent des Dames du Sacre-
Cœur à Nantes (?) — Cat. A. Moreau, p. 220.
L'œuvre ne porte pas de signature. Elle avait été commandée par le
comte de Forbin à Géricault qui, malade, en abandonna l'exécution à son
ami. L'Etat paya cette toile i,3oo francs.
J^ ■■^'■»!_?,; VS<^ Nous avons eu quelque peine à obtenir des renseignements précis sur le
^fi^ ~i! 4?^ lieu où se trouve actuellement ce tableau. Aucune des Dam.es du Sacré-
'îyT^'-. : ' 'iirj Cœur ne le connaissait, n'avait souvenir de l'avoir vu. Il n'était non plus
''/<SS'; '-Sir-i Cœur ne le connaissait, n'avait souvenir de l'avoir vu. Il n'était non pk
/iÏT'" ^■^i;^»J dans aucune autre église de Nantes. D'une nouvelle enquête, il résulterait que
'['^^»V ;j^p \j5^ l'œuvre est restée dans une ancienne chapelle dépendantj ii est vrai, du cou-
.>-fT?-.' -.- i^i^^ vent du Sacré-Cœur, mais depuis longtemps abandonnée. N'y aurait-il pas
lieu de la dei)lacer et de lui donner asile dans la chapelle cctueile du couvent f Pour ne rien
déguiser de la vérité sur ce point, jedois dire que les recherches faites à notre sollicitation par
divers habitants de Nantes n'ont abouti qu'à des o«- i;/. et que personne n'a pu voir le tableau.
N'' 36
Vierge du Sacré-Cœur
Toile. — H. o'"4i, L. o"27. — N" 1 33 de la 'Vente posthume : 420 francs à
M. Isamberi. — Racheté depuis par M. Haro. — Cat. A. Moreau, p. 3 18.
C'est d'après cette tcile que nous reproduisons le tableau de Nantes. ('V. la gravure du n° 35.)
N° }7' : Deux Anges
Toile. — H.
Verdier.
L. o™24. — Appartient à M. le Docteur
Etude pour le groupe d'angci placé à la gauche de !a tîgure prin-
cipale dans la Vierge du Sacré-Cœur de Nantes (v. n^ 35).
Le 21 fe'vrier, Delacroix écrit à son ami, M. Soulier : « Je travaille
à mon tableau depuis le commencement du mois de janvier. Il com-
mence à se débrouiller, mais rinspiration me manque. Point de flam-
beau qui, du premier coup, ait jeté une vive lumière sur la route que
j'ai à suivre. Je fais, je détais, je recommence et tout cela n'est point ce que je cherche
encore. Il faut dire que la fièvre, qui m'avait quitté, m'a repris et m"a laisse beaucoup
moins de temps pour le travail. »
N° ^,8
Vierge Consolatrice des Affligés
_ ■ _ , , Croquis lavis d'une première composition avec variantes du
'f/t^.:^'^^^ ^ tableau de Nantes (voir n'^ 35 et 3ô\ — Appartient à M. Choquct.
c i'7^'.-:'>., :~~l Cette composition n'est point l'esquisse du tableau de Nantes, mais la
7 , . '>'~;-><" première pensée, très modifiée depuis, de ce tableau. Les variantes, en
; \' ;, '--5' effet, sont considérables. La Vierge, ici, n'est plus assise sur des nuages,_
-i-'j elley apparaît à mi-corps, le buste penché en avant. L'artiste a modifié
, "'*' dans un sens tout opposé le groupe des figures du premier plan qui,
.'•\i". . dans le premier pro|et, sont entières, et réduites au buste dans la çom-
- '">y^., position définitive. Celle-ci a gagné ii cette double inversion un équilibre
.__ c'.xi^M' J'^fis les rapports de proportion qui faisait évidemment défaut à l'en-
,,>-■--'"" -^-iTy^J^ semble que nous reproduisons. Nous rétablissons aussi le titre exact du
■"^' -- ' -^■^■-^-- - sujet, qui n'est pointc.Notre-Dame-des-Sept-Douleurs », dont les attributs
devraient être un cceur percé de sept glaives. Tout ici, dans l'attitude de la \'ierge comme
dans celle des figures suppliantes ou désolées, indique clairement la trente-cinquième invo-
cation des Litanies de la Vie-ge : Consol.iiri.va/fHctorum.
N" J9 : Croquis d'après des maîtres italiens
Croquis à la plume. — H.o'"365, L. o™23o. — Autographié en fac-
similé de même dimension.
Delacroix travaillait sans relâche, avec une égale et constante _passion.
Depuis ks créations de l'art antique, depuis les œuvres des maîtres des
grandes écoles jusqu'aux moindres accidents de la vie et du mouvement
dans l'homme et dans la nature, toute forme vue était aussitôt pour lui ^ une
trfig^c^ forme dessinée. Croquis ou pensées, au crayon ou à la plume, sans relâche,
f/'^fj m il traçait sur des albums, sur des feuilles volantes ou sur des papiers h dessin,
^f (^ des notes de toute sorte. Un rapprochement, une remarque,_ une réflexion,
' ^' une forme, un mouvement traversait son esprit, et aussitôt il griffonnait à
la hâte, sur le premier papier venu sous sa main quelques mots ou quelques traits rapides et
vifs que souvent il n'aura plus revus.
On remarquera que la feuille reproduite ici e;t chai-gée de croquis en sens inverse.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
ib
N"' 40 : Porrr;nt de Eufrcne Dei;icroix
fll'ii':'' •i---'-^A:'.", '■' '! Toile. — H. o"'_[o, L. o'"3i. — Non signé ni daté. — Vente
il . ,-■ i Carrier, 5 mai 1875 : 5o fr. — Appartient à M. A. Robaut.
En ce porirnit. qui est le plus ancien des portraits peints de Eugène
Delacroix, l'artiste s'est représenté en pied, vêtu d'un élégant costume
dans le goùi de Vclazquez. Derrière la toiie. sur le chàfsis, E. Dela-
croix avait écrit au crayon (.Raveswood.), sans doute pour Ra\ens\vood,
le nom de l'amant de Lucie de Lammermoor. Delacroix avait donné
ce portrait h Carrier au moment où il venait de l'achever. — Non
catalogué lors de la vente posthume de ce dernier, qui d'ailleurs passa
inaperçue, ce portrait fut adjugé à un marchand au prix de 5o francs
et racheté, le lendemain même, à un prix beaucoup plus élevé par
M. Robaut. — Nous ne laisserons pas échapper l'occasion qui nous
c-st offertt: ici de rendre hommage à la mémoire d'Hippolyte Carrier, miniaturiste distingué,
homme d'un goût fin, sûr, qui "fut Tami des romantiques et parlait d'eux avec une chaleur
commuuicative. Nouslui devons dvs renseignements sur ses contemporains.
N" AI : La Favorite
:^5:nr7 Aquarelle. — H. o'''i8, L. o"'i4.
■"' iSûfr.
Siané.
Vente Sakakine,
Tous les regards étaient, à cette date, tournés vers l'Orient. La lutte
de la Grèce contre la Turquie passionnait la jeunesse. Tous les arts s'en
inspiraient. Cette charmante aquarelle ainsi que le numéro 46, sont les
premières traces que nous rencontrons dans l'œuvre de Delacroix de ce
mouvement des esprits, qui devait lui inspirer un peu plus tard la glo-
rification de la Grèce sur les ruines de Missolonghi.
En présence d'une telle variété de sujets et d'études de toute sorte, on
demeure confonda. On se rend compte decette supériorité acquise au prix
de l'incessante réalisation de tout ce qui présentait à ses yeux ou à sa
pensée un caractère esthétique. On sait maintenant que nul n'a plus dessiné que Delacroix;
)e pourrais dire dès maintenant que nul n"a mieux dessiné.
N° 42 : Un bonhomme de lettres en méditation
Lithographie. — H. o-^'i/S, L. o'''22i. — Ni signé ni daté.
— Cat. A. Moreau, p. 70.
Caricrjure contre les écrivains de la presse monarchique et
catholique. On jouait alors une pièce intitulée : le F.iu.v Bon-
homme. De là l'entrée du mot (.bonhomme » dans la polémique
contre l'ancien régime. Z,e Aliroi:- du 27 juin 1S21 termine ainsi
l'explication de la lithographie : « Ne nous fatiguons pas,
lecteur, a chercher une ressemblance particulière dans les traits
généraux. Le personnage que vous avez sous les yeux est un
être idéal. Composé de détails empruntés aux uns et aux
autresj ce bonhomme est le type de la sottise, comme la \^énus de Zeuxis est celui de la
beauté. » Les accessoires caractéristiques sont l'éteignoir, la robe de chambre, la perruque
i6
L'ŒUVr<E DE DELACROIX
1821
à la hrigadière, l'épee en crois avec un paranluie, uns bouteille d'eau miraculeuse, des livres
bien pensants, et, au mur, le portrait de Marlborough. Dans l'article, il est fait allusion à
Chateaub'riand et à des personnages désignés sous les nom.3 de marcjuis de Crochepatte,
M. de Clopineau (Talleyrand \ Frère La Crescelle (probablement I.acretelle jeune, rallié à
la Restauration), etc., etc. — Voir la lettre du 24 janvier 1SÔ2, adressée à M. Ph. Burtv, qui
l'avait interrogé au sujet d'un certain Portrait de M. Jérôme iV. année i825). Nous repro-
duisons le passage de cette lettre relatif au Bonhomme de lettres. <• La caricature du Bon-
homme de lettres n'est pas non plus de ma main. Je ne sçais >ic) quel accident a empêché
de tirer mon dessin : il a été reproduit, mais maladroitement, par un de mes amis qui dessi-
nait à peine. J'ai fait antérieurem.ent un ou deux dessins pour ètVe gravés dans le Xaiu Jjune.
mais ils ont été arrangés au gré du directeur du journal. Tout cela est bien obscur et ne
mérite pas de tixer l'attention. Il existe, je me le rappelle, un certain combat du Constitu-
tionnel contre la Quotidienne qui est une affreuse lithographie de n:-.a façon et je ne scais si
cela a paru. » (V. n" 45.)
N" 4} : Le Grand -Opéra
Sans date ni signature.
Lithographie. — H. o''''20o, L. o''-i4
— Catalogue A. Moreau, p. 67.
Cette caricature a paru dans le journal le Miroir, numéro du 26
juillet 1821. C'est donc bien à tort qu'on y veut voir une charge du grand
Vestris, qui s'appelait lui-même le diou de la danse. Le célèbre danseur
avait quitté le théâtre en 1781 et était mort en 180S- Si le personnage
vieux, laid, couronné de roses, forcé de s'aider de balais en guise de bé-
quilles pour prendre du parcours, qui figure ici est Vestris, ce serait
donc Marie-Auguste, fils naturel du précédent et qui dansait encore k
l'Opéra en iSr8, âgé de cinquante-huit ans. Comme, à cette date, il jouait
le rôle de l'Amour dans le ballet de Psyché, les contemporains l'avaient
surnommé le Père l'Amonr. t. Nous ne savons pas, disait' .'<? Sliroir, si le Grand-Opéra se
vouera un peu plus au culte de Polymnie dès qu'il sera installé dans son local; mais, comrne
jusqu'à ce jour, il n'a guère voulu sacrifier qu'à Terpsichore. nous le présentons au public
appuyé sur ses b-iUets. »
N° 44 : Le Théâtre-Italien
Lithographie. — H. o"'2oo , L. o""i40. — Sans date ni signature.
— Cat. A. Moreau, p. ôj.
Comme la précédente, cette caricature a para dans le journal le Mi-
roir, celle-ci à la date du i3 août 1821. Elles sortent l'une et l'autre des
presses lithographiques de C. Motte. On sait que Delacroix était pas-
sionné ce musique, il ne s'est pas abandonné ici à son humeur satii|i-
que. Pour svmboliser le Théâtre-Italien, il choisit Rossini jeune, déjà
glorieux, emplissant la scène de son génie, co.-nme il l'occupe en cette
image par l'attitude plaisante du grand écart. De? poches du maestro
sortent de nombreuses partitions, et ce chacune de ses mains il soutient
un de ses opéras; à gauche, le Barbier de Sévills; à droite, Othello;
sa plus récente création s'échappe de son cerveau. A cette date, 182 r,
c'est Mathilde de Sabran. Le Miroir reproche à son collaborateur (> M. Lacroix », de
n'avoir pa; signé c cette nouvelle atircssion des détracteurs do l'ancien régime musical », et
l831
L'ŒUVRE DE DELACROIX
17
N" 45 : Duel polémique entre dame Qiiotidieniie
et messire Journal de Paris
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leur universel, en bonnet de coton et assis sous un dais
Lithographie. — H. o"'-20o , L. o"'296. — Sans dote ni
signature. — Cat. A. Moreau, p. 68.
Cette caricature a paru dans le journal le Miroir du 20 sep-
tembre 1821. Le champion de la Quotidienne, monté sur Ros-
sinante, coiffé de l'armet de don Quichotte, vêtu d'un costume
troubadour de <. Jeanne d'Arc », est armé d'une lance et d'une
plume de paon. Son adversaire a enfourché l'âne de Sancho
Pança. Il est coiffé d'un pot surmonté d'une girouLlte et est
armé d'une plume d'oie et d'une fourchette. Les journaux du
temps sont témoins du duel qui a pour juge du camp le Aloni-
N" 46 : Cavalier turc au coup de feu
Toile. — H. o'"28, L. o^ai. — N"^ 79 de la Vente posthume,
35o fr. — Appartient à M. le Docteur Horteloup.
Les « cavaliers turcs » sont nombreux dans l'œuvre du maître ; celui-ci
est le premier. On pourrait, pour le distinguer des autres, l'appeler le
Cavalier turc au coup de feu. Il est d'une allure superbe d'ailleurs et il
semble que les plus beaux cavaliers turcs de Decamps soient inspirés de
celui-ci. Delacroix professait, d'ailleurs, une grande et sincère estime pour
le talent de cet artiste. Sollicité par M. Moreau père d'écrire pour la
Revue des Deux -Mondes un article sur Decamps, il s'excusa de ne point
le faire et ajouta : « Je crois que sa perte est trop récente (iSûo) non seu-
lement pour qu'il puisse être )ugé complètement, mais aussi pour qu'un jugement ait tout
l'intérêt qu'il pourrait avoir plus tard. — Permettez-moi d'ajouter que ce grand artiste a eu
de son vivant la bonne fortune d'être goûté sans conteste du public et des artistes; pas une
voix ne s'est élevée contre tous les genres de succès qu'il méritait et qu'il a obtenus. »
N° 47 : Une Mulâtresse
Toile. — H. G"' 80, L. o'"64. — Alusée de Montpellier.
Cette figure peinte, de grandeur nature jusqu'aux genoux, fait partie de la collection
léguée à la ville de Montpellier par M. Alfred Bruyas. Cet amateur eminent avait entrepris,
avec le concours de Théophile Silvestre, la rédaction et même l'impression d'un catalogue
infiniment précieux de sa galerie. La mort successive des deux collaborateurs est venue inter-
rompre leur œuvre commune. Le premier volume de ce catalogue seul a été imprimé, mais
n'a pas été mis dans le comm.erce de librairie. Les bonnes feuilles appartiennent à la muni-
cipalité de Montpellier. — Pour la première fois que nous rencontrons une peinture de la
collection Bruyas, nous ne pouvons nous abstenir de rendre hommage à cet amateur d'un
goût si sîir et d'un caractère si généreux. Nous avons déjà emprunté à son catalogue une
pensée de Delacroix sur Raphaël. Ajoutons-y celle-ci sur Michel-Ange : <i Pense au grand
Michel-Ange; nourris-toi de ses grandes et sévères beautés! »
i8
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1822
Année 1822
N° 48 : Waverley
rdvèque d
Durward,
s^-^O Dessin au crayon noir estompé. — H. o'''285 , L. o"'2ro. — Non
.-. catalogué par M. Moreau. — Vente du 14 décembre 1S74 à l'hôtel
;, Drouot: 40 francs.
_ - Nous sommes tout près de conside'rer nous-r.ième comme excessif le scru-
_ -S; pule de conscience qui nous fait cataloguer ici ce très médiocre dessin dont
"_'.■' l'attribution nous paraît fort contestable. En tout cas faudrait-il le reporter
-a une date antérieure, et Walter Scott a-t-il mieu.N. inspiré Eugène
Delacroix qu'en ce premier essai. Nous retrouverons plus loin : l'Ermite de
^^ — ;-_ Copman'nurst,Front-de-bœufet le Juif,Front-de-bœufet laSorcière,laniortde
2 Liège, la Fiancée de Lammermoor, Ivanhoë, l'Enlèvement de Rebecca, Quentin
Redgauntlet, Richard Cœur-de-Lion.
N^
49
Dante et Virgile
-X^ 5^1
s-^^i~-V-^ Toile. — H. i™So, L. 2'"40. — Au musée du
Louvre. — Gravé à l'eau-forte, par Bouruet :
o'"i85 sur o"*225; par d'Henrict : o'''2i5 sur
0^279; lithographie par Célcstin Nanteuil
0^^482 sur o™65o. Nombreuses gravures sur
, bois pour publications illustrées, notamment
^ r Illustration et YHistoire des peintres de toutes
les écoles. — Cat. A. Moreau, pp. 89, 116, i32,
1 39, 167, 1S8 et 206.
Le titre complet de cette admirable composition qui
fut l'œuvre de début de Eugène Delacroix au Salon de
1S22 est celui-ci: « Dante et Virgile conduits par
Phlégias, traversant le lac qui entoure les murailles de la ville infernale de Dite. Des
coupables s'attachent à la barque et s'efforcent d'y entrer. Dante reconnaît parmi eu.x des
Florentins. » On sait quel fut le succès. Immense. Delacroix avait exécuté ce tableau en
quelques semaines. Il écrit, en effet, le i3 avril 1S21, à son ami Ch. Soulier; «... Je sors
d'un travail de chien qui me prend tous mes instants depuis deux mois et demi. J'ai fait
dans cet espace de temps un tableau assez considérable qui va figurer au Salon. Je tenais
beaucoup à m'y voir cette année, et c'est un coup de fortune que je tente. » — Le Salon
n'eut lieu qu'en 1S22. Le tableau fut acheté par l'Etat <io!(fe cents frênes.
N"' 50 : Dante et Virgile
Toile. — H. o"'25 , L. o''34. — Réduction du précédent avec une légère suppression.
Appartient à -NL Charles Narrey, à qui il a été légué par M. Alphonse Royer. qui l'avait lui-
même reçu de Eugène Delacroix.
-C-
1822
L'ŒUVRE DE DELACROIX
19
.. ,i
N° ^ I : Portrait du général Charles Delacroix
^ --^ V. 'S -^ - - ^^»f
Toile. — H. o™3q , L. o'"20. — Appartient à la famille
de NL Léon Riesener à qui Eugène Delacroix Tavait
légué par testament. — Cat. A. Moreau, p. 228.
Le général, tête nue, en veste de coutil blanc, le col de che-
mise largement rabattu, est nonchalamment couché sur le
gazon de son jardin, dans ce bien de famille, nous dit
i\l. Moreau, qu'on appelait le Louroux et dont on aperçoit la
maison basse dans le fond du tableau. Delacroix y séjourna
en 1822 (voir lettre du iS août à M. Pierret, édition Burty)
et y fit alors ce portrait. A ce propos, nous donnons ici la
généalogie du peintre :
Claude Delacroix, régisseur du comte de Belval, et sa femme
Marguente-Louise Flizc, décédés à Givry. en Argonne, eurent
huit enfants dont l'aîné, Charles Delacroix, avocat au Par-
lement, ancien premier commis du contrôle des finances,
préfet a Bordeaux et à Marseille, puis ministre des Affaires
étrangères, eut lui-même quatre enfants : 1" Henriette, de-
venue madame Je Vcrnmae: 2'^ Charles, général, aide de camp du prmce Eugène, dont nous
reproduisons le portrait ; 'i^ Henri, mort engagé volontaire à Friedland;4» Eugène Delacroix.
~%(^:-=<
N° 52 : Académie
tous les élèves
Dessin au crayon noir rehaussé de blanc. — H. o™6o , L. o™45.
— Appartient à M. Alfred Robaut depuis la Vente posthume.
Cette académie est datée au verso : « 1822, 3" trimestre, 23 septembre. —
M. Meynier, professeur. — E. Delacroix, élève de M. Guérin. — Place
72. » bans les Notes sur Delacroix que Léon Riesener a fournies à
M. Ph. Burtv, nous trouvons le passage suivant : « Ce fut mon père qui
lui conseilla l'atelier de M. Guérin. Delacroix venait de perdre sa mère.
11 avait perdu son père beaucoup avant... Arrivant à l'atelier, bien élevé,
il se lia avec Scheffer, Champmartin, les principaux élèves de Guérin. Le
talent ne se développe pas inopinément; Delacroix m'a parlé de l'intluence
qu'un certain Champion avait eue sur le talent de Géricault lui-même et
de l'atelier Guérin. »
N°
53
Grec en embuscade
Aquarelle. — H. o"'20, L. o™26. — Signé au bas, à droite.
— Vente hôtel Drouot, avril 1881. — Non catalogué par
M. Moreau.
Cette aquarelle, comme la précédente, comme tant d'autres com-
positions de l'année 1823, met en lumière ce que j'appellerai les
procédés d'entraînement de Eugène Delacroix; on y voit claire-
ment par quelle succession d'efforts il préparait ses grandes com-
positions, comment il créait peu à peu le milieu ambiant dans
lequel devait se développer en une floraison magnifique sa pensée pittoresque.
A
v-.^.f^'^ f A r-,.r^>
•V.^»^'^
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1822
J
N° 54 : Épisode des guerres entre les Turcs et les Grecs
^
Aquarelle,
vrier 1 880
— H. o"'20 , L. o'"24. — Vente Boulanger, fé-
195 francs. — Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix préludait alors au Massacre de Scio, qui devait être la
grande œuvre du Salon de 1824. Le i5 septembre il écrit à son ami
Charles Soulier qui était alors à Naples : « ... J'ai moi-même
quelques petites choses à te demander. Je me propose défaire pour
le Salon prochain un tableau dont je prendrai le suiet dans les
guerres récentes des Turcs et des Grecs. Je crois que dans les
circonstances, si d'ailleurs il y a quelque mérite dans l'exécution,
ce sera un moyen de me faire distinguer. Je voudrais' donc que tu m'adressasses quelques
sites de ton pays de Naples, quelques esquisses pochées de sites marins ou de montagnes
bien pittoresques. Je ne doute pas que ■cela ne m'inspire pour le lieu de la scène. »
N° ^ 5 : Lisette
Vente à l'hôtel Drouot en mai
Toile. — H. o"'25, L. o"'33.
1879.
Delacroix nerveux, fiévreux, bilieux, a toujours aimé le spectacle de
la santé chez la femme. Une lettre du iS aoiit à M. Pierret en témoigne
sous une forme amusante. Elle est datée du Louroux, propriété de
son frère le général: « Je t'écris à une toise et demie de distance de la
plus charmante Lisette que tu puisses imaginer. Que les beautés de la
ville sont loin de cela! Ces bras fermes et colorés par le grand air
sont purs comme du bronze... Dis à notre ami Félix iGuillemardetI que malgré son anti-
pathie pour les bas bleus, je crois qu'il rendrait les armes à Lisette. Et, du reste, ce n'est
pas la seule ; toutes ces paysannes me paraissent superbes. Elles ont des tètes et des formes
de Raphaël et sont bien loin de cette fadeur blafarde de nos Parisiennes. Mais, hélas! malgré
quelques larcins, nos affaires ont bien de la peine à avancer auprès de ma Zerline. — Sœr
Amor! » (Edition Burty). Zerline, bas bleus, Lisette, il s'agit ici d'une servante.
N° 56
Le déménagement de dame Censure
Lithographie. — H. o'"i95 , L. o'"355.
ni daté. — Cat. A. Moreau, p. 70.
— N
1 signe.
Caricature politique pour le journal Le Miroir, publiée le 1 1
février 1S22. D'un édifice dont la porte grillée est surmontée
de l'écriteau Maison à louer s'éloigne une charrette traînée
par un âne et dans laquelle s'opère le déménagement du per-
sonnel et du mobilier de la censure. Un diable cornu, ailé,
griffu, conduit l'attelage qui n'en peut mais. Sur le chariot
sont entassés, dans l'ordre suivant, un pain de sucre, une chaise, une masure, d'Outre-Zèle,
Cadet-Roussel, un vieillard, une lourde oie, un anonyme. L'anonyme, c'est le diable. Les
autres figurations ont la prétention de rappeler les noms des censeurs. Il est clair, par
exemple, que la lourde oie qui pèse sur l'arrière-train de l'ànon est une allusion àM.de Lour-
doueix. Àmsi des autres. — Des ciseaux ailés s'échappent des fenêtres de la maison à louer.
l822
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N° 57 : La Leçon de Voltige
Lithographie. — H. o"'2o3 , L. o"'3oo.
ni daté. — Cat. A. Moreau, p. 69.
Ni
f'.^^'vio Dans un cirque forain, un marquis, un chevalier et d'autres
^.^ personnages ridicules galopent en cercle et portent des ban-
k nières sur lesquelles on lit : Vasselage, XIV» siècle, Coutume
4 de Gascogne, Droits du Seigneur, Capitaineries, etc. La plu-
^^ part des cavaliers sont désarçonnés. Au centre se tient un
général à cheval assisté d'un écuyer debout auprès de lui. Le
général porte un étendard avec ces mots : Gloire, Honneur,
Patrie. — Cette caricature politique, dont les légendes seules
rendent l'ironie saisissable, a paru dans le journal Le Miroir, du 8 mars 1822.
N" 58 : Les Écrevisses à Longchamp
Lithographie. — H. o"'20o , L. o"'3o7. — Ni signé,
ni daté. — Cat. A. Moreau, p. 69.
Cette caricature politique, parue le 4 avril 1822 dans le
journal Le Miroir, représente la promenade de Longchamp
qui avait lieu le Vendredi saint dans l'avenue des Champs-
Elysées. Le groupe principal se compose d'anciens émigrés
en perruque et l'épéeen verrouil ou en costume troubadour, et
d'une marquise à paniers et poudrée, portant un chapeau
chinois en guise d'ombrelle. Ils sont tous montés sur une
écrevisse qui nécessairement marche à reculons. Une autre
écrevisse porte une chaise en façon de trône où siège un pain de sucre. Dans l'esprit de
la caricature du temps, le pain de sucre désignait suffisamment le roi Charles X. A gauche, deux
personnages au pied d'un arbre sifflent le cortège.
N° 59 : Gare derrière ! ! !
Lithographie. — H. o"'24o , L. o'"3io. — Ni signé
ni daté. — Cat. A. Moreau, p. 69.
Caricature politique publiée par le journal Le Miroir, du 3o
mai 1822. Une sorte de Croquemitaine ridicule en costume
de général, coiffé sens devant derrière d'un chapeau à plumet
flétri et tenant un bâton de commandement au poing gauche,
s'escrime d'un cimeterre tout ébréché contre des quartiers de
roc dispersés à ses pieds sur le sol. La malice fort pauvre de
cette caricature consiste dans ce fait qu'en développant le
bras, le matamore va frapper la montagne en forme de pain
de sucre qu'il est chargé de défendre et derrière laquelle se
dissimulent des personnages effarés. — Nous avons déjà
vu que Delacroix n'avait, à juste titre, qu'une fort médiocre estime pour ces péchés de jeu-
nesse. Mais en matière de catalogue et d'inventaire, on n'a le droit de rien omettre. Par ces
faiblesses mêmes qui les rapprochent de nous, les grands artistes sont plus humains.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1823
Année 1828
N°6o : Portrait de Thaïes Fielding
Toile. — H. o'"32, L. o"'24. — N» 75 de la Vente posthume : 390 fr.
à M. Piron. — ■ Vente Piron après décès, 21 avril i865 : io5 francs
à M. le baron Rivet. — Cat. A. Moreau, pp. 229 et 3i3.
Thaïes Fielding, aquarelliste anglais, se lia d'intime amitié avec Delacroix
pendant un séjour assez long qu'il fit h Paris à cette époque." Delacroix vécut
quelque temps avec Fi'.-lding, raconte L. Riesener dans ses Notes publiées par
M. Burtv. (I Pour faire du calélematin,on ajoutait de l'eau et un peu de café
sur le marc de la veille dans l'unique bouilloire, jusqu'à ce qu'on fût forcé
de la vider, De temps en temps, on avait un gigot en provision dans l'ar-
moire, auquel on coupait des tranches pour les rôtir dans la cheminée. Mais un jour les
deux amis partageant ce déjeuner se fâchèrent. Fielding disait très sérieusement qu'il des-
cendait du roi Bruce. Delacroix l'appelait 0 sire ». Mais Fielding ne pouvait sur ce sujet
admettre la plaisanterie et se fâcha pour toujours. » Pour toujours est de trop, car Delacroix
s'afflige en 1823 du départ du 0 bon Thaïes » et quand notre maître à son tour ira à Londres
en 1825, c'est avec les Fielding qu'il passera le meilleur de son temps.
N° 61 : Portrait d'enfant
Toil
H.
20, L.
Appartient à M. Soulier fils.
Ebauche intéressante où la tète seule et les cheveux sont à peu près terminés.
Ce portrait passe à tort pour celui d'un enfant de Thaïes Fielding. — Fils
d'un père et d'une mère artistes (le père était peintre de portraits, la mère
peignait à l'aquarelle des fleurs, des animaux), les Anglais Fielding étaient
quatre frères : Théodore, Copley, Thaïes et Nathan, tous artistes, aqua-
rellistes de talent, quoique d'un mérite inégal; le plus célèbre est Copley
■ 787-1 85 5). Thaïes seul vint en France. Il n'était pas marié. Thaïes mourut
de quarante-quatre ans.
N° 62 : Portrait de M. Soulier
dan
Aquarelle.— H. o"'ii5, L. o'"85o.
M. Soulier fut comme MM. Pierret, Piron, Guillemardet, un ami de la
première heure. A propos d'une lettre du 10 décembre 181 8, qui fut
adressée à M. Soulier par Delacroix, M. Ph. Burty ajoute : « M. Soulier
le connaissait depuis 1816. 11 lui avait enseigné l'aquarelle, procédé de
peinture alors presque inconnu en France et que lui-même avait appris, en
Angleterre, de son ami Copley Fielding. » 11 était alors surnuméraire et
secrétaire de l'intendant du Domaine extraordinaire. Horace Raisson, homme
de lettres, journaliste, et qui fut l'un des collaborateurs de Balzac, était
au de M. Soulier; c'est Raisson qui lui amena Eugène Delacroix.
i823
L'ŒUVRE DE DELACROIX
23
N° 6j : Portrait en pied de M. Soulier
Sépia.
fils.
H. o"26o, L. o-oiSS. — Appartient à M. Paul Soulier
dit qu'il était dans le
En manches de chemise et gilet blanc, les jambes croisées, le modèle,
assis sur un tabouret de paille devant une table de bois blanc sur la-
quelle est posé un pupitre à musique, chante en s'accompagnant d'une
guitare. Dans le fond, une autre guitare suspendue au mur et un cha-
peau de haute forme sur une seconde table. — Cet intérieur est sans
doute celui que M. Soulier occupait alors. « l'humble chambrette, la
plus haute de la place Vendôme, à l'hôtel du Domaine extraordinaire,»
où Delacroix, Raisson et Soulier enluminaient " en s'amusant » le
bois et le fer de dessins de machines destines à être joints à des brevets
d'invention. C'était Horace Raisson qui avait eu l'idée de cet enlumi-
nage poum faire gagner quelques sols» h ses camarades. Nous avons
mèriie bureau que AL Soulier et lui avait amené Eugène Delacroix.
N°64 : Portrait en buste de M. Pierret
Toile. — H. o™26, L. o"'20. — Non signé ni daté. — Appar-
partient à madame veuve Pierret. — Cat. A. Moreau, p. 228.
Portrait admirable de simplicité savante et de caractère. Le visage,
de face, entièrement rasé, a fourni au peintre une belle étude de mo-
delé délicat et fin. Les cheveux sont ramenés en mèche épaisse sur
le front. Le regard est doux sous les lunettes, le nez ferme, la bouche
d'un beau dessin. Largement ouvert, l'habit laisse voir une haute
cravate noire et un gilet de nankin à collet droit.
M. Pierret était un ami d'enfance de Eugène Delacroix. La première
des cinquante lettres publiées par M. Philippe Burty, et que le maître
lui adressa, est datée du i i décembre 1817. Il mourut en 1854. Ma-
dame veuve Pierret a toujours mis la plus grande obligeance h com-
muniquer les documents restés entre ses mains à tous ceux qui se
sont occupés de Delacroix. Nous lui en adressons ici nos plus vifs remercîments.
N°65 : Portrait en buste de M. Leblond
Dessin à la mine de plomb. — H. o""!?, L. o"'ii. — Non signé ni
daté. — Appartenait à madame veuve Leblond. — Cal. A. Moreau,
p. 228.
Ce profil, un peu tourné vers la droite, avec l'œil largement ouvert, est
intéressant surtout parce qu'il consacre le souvenir d'un homme qui fut,
avec MM. Pierret, Henri Hugues, Félix Guillemardet, Champmartin,
Piron, Soulier, Riesener, Comairas, Leliévre et, plus tard, M. Villot, des
'^>siC'''"X plus anciens et constants amis de Eugène Delacroix. Son nom revient fré-
" quemment dans la correspondance du maître avec les termes de la plus
sincère affection. Il a dû lui-même recevoir bien des lettres de son illustre ami; il n'y en a pas
une seule dans l'édition de M. Burty, qui n'aura pu en avoir communication.
24
L'ŒUVRE DE DELACROIX
[823
N° 66 : Orpheline au cimetière
Toile. — H. o'"65,L. o"'54. — Salon de 1824. — Non signé ni date.
— Appartient au docteur Gebaûer, héritier de madame veuve
Leblond.
Assis de face, la tête penchée en arrière et tournée à droite, le modèle
a les yeux levés vers le ciel, le cou et le haut de la poitrine découverts,
la main droite posée sur les genoux.
Cette puissante étude a été faite au moment où Delacroix préparait
"a grande composition du Massacre de Scio; elle rappelle le mouve-
ment de la vieille femme grecqueagenouillée auprès du corps de sa fdle
morte, dans ce tableau. Le maître y attachait une certaine importance,
car il l'exposa au Salon de 1824. C'est à cette intention, assurément,
paysage, un cimetière de campagne, pour motiver l'expression de la figure.
Jeune fille debout dans un cimetière
Toile. ^ H. on^4i, L. o^Sj. — Vente X'-% i'"'' mai 1874:
1,100 fr. — Non catalogué par M. A. Moreau.
L'orpheline est debout, le bras droit plié, la main il la ceinture; de la
main gauche pendante, elle tient un léger bouquet de fleurs. Elle
avance parmi les tombes éparses du petit cimetière d'un village dont
on aper..oit dans le fond le modeste clocher parmi de molles verdures.
Le paysage monte par de douces collines jusqu'à l'horizon.
Nous pensons que Delacroix aura voulu traiter en soi le sujet qu'il
avait, une première fois, adapté par occasion à une étude taite
d'abord à toute autre intention. -- Voir le numéro précédent. —
Combien n'est-il pas intéressant, grâce aux rapprochements amenés
par l'ordre chronologique que nous avons adopté, de pénétrer, comme
nous le faisons ici, dans l'intimité des conceptions d'un maitre, de
voir l'idée première accidentellement enfantée se développer et revêtir une forme définitive.
N" 68 : Portrait de M. X.
Dessin mine de plomb. — H. o"'i6o, L. o"'i25. — N" 32i de la
Vente posthume. — Appartient à M. A. Robaut.
Dans son très précieux livre sur l'œuvre de Eugène Delacroix, M. Ad.
Moreau a consacré toute une partie aux « Portraits peints et dessinés»
par le maître, o En dressant la liste chronologique de tous ceux dont
nous avons pu retrouver la trace et constater l'authenticité, dit-il, nous
pensons avoir accompli un travail curieux à plus d'un titre. « Rien de
plus juste. C'est là, en effet, un côté du génie de Delacroix fort
peu connu. Quoiqu'il ait peint et dessiné un grand nombre de portraits,
surtout dans sa jeunesse, comme ils étaient destinés à des amis très
intimes, ils sont, pour la plupart, restés ignorés du public. Nul plus
que lui, pourtant, n'aurait pu dire avec notre admirable La Tour parlant de ses modèles :
0 Ils croient que je ne saisis que les traits de leur visage, mais je descends au fond d'eux-
mêmes à leur insu et je les remporte tout entiers. »
[823
L'ŒUVRE DE DELACROIX
2S
N°69
Portrait de Eugène Delacroix
de Scio
Toile. — H. om35, L. o"'27. — Lithographie par Alfred Robaut : omio5
sur o'"o82. — Vente Constant Dutilleux, 1874 : 2,7 5o tr — Appartient à
M. le baron de Beurnonville. — Non catalogué par M. A. Moreau.
Ce portrait est l'un des premiers que le maître ait peints d'après lui-même.
Celui qui est entré au Louvre en 1872, après la mort de Jenny Le Guillou, an-
cienne servante de Delacroix, est de 1829. On reconnaît l'époque du Massacre
i puissance dans les lumières, la transparence dans les ombres sont les mêmes.
N" 70 : Portrait de Juliette Pierret enfant
Toile. — H. o"'22, L.
madame veuve Pierret.
20. — Non signé ni daté. — Appartient à
Souvenir d'intime amitié donné par Eugène Delacroix à son camarade d'en-
fance le plus cher et qui l'avait puissamment soutenu de son admiration. Il
lui écrivait en octobre 1820 : 0 Pourquoi es-tu le seul qui, en dépassant
énormément ce que mes plus forts accès de vanité m'aient pu inspirer, m'as
pourtant un peu remis h mon rang?... Ton sufiVage tout seul dans une ba-
lance emportera tous les autres réunis dans l'autre. Puisque, le premier, tu
m'as dit que tu sentais quelque chose dans ce que je fais, il est juste que tu
aies ta récompense du bien que tu m'as fait et du courage que tu m'as donné. »
N-71,72
Deux études de chevaux
10 Cheval rouan. — Toile. — H. o">3o, L. o'"40.
— Vente posthume : 620 fr.
2- Cheval dans une écurie. — Toile. — H. o™3i,
L. o">40.- — Vente posthume : 400 francs à M. Bornot.
La robe du cheval, en notre étude n» 2, est bai-cerise:
d'une traînée de pinceau, le maître a posé sur le sol un
ton de paille, pour indiquer la litière de l'écurie.
N° 7} : Relais de quatre chevaux
Toile. — H. 0-24, L. 0"'3i. — N» 2o5 de la Vente posthume :
435 francs à M. Delille.
Cette magnifique étude ne sortit jamais de l'atelier de Delacroix. Si
elle avait été connue, elle lui eût concilié sans doute le bon vouloir
d'un autre peintre également passionné pour le cheval, qui Jev^i't
être un peu plus tard l'artiste non le plus illustre, mais le plus célèbre
de l'Ecole française, Horace Vernet, dont l'antipathie a 1 égard de
Delacroix était déclarée et se manifesta, notamment en 1849, dans
les élections à l'Académie. Voir la lettre du 29 août à L. Riesener (édition Burty).
26
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1823
N° 74 : Cheval de charrue
Chevalier et Pi^fre
Toile. — H. o"44, L. C^Sô. — N" 204 de la Vente posthume :
450 fr. — Appartient à madame la baronne Rivet.
n Le baron Charles Rivet, dit M. Burty, qui, de nos jours, a attaché son
nom à la fondation de la troisième République, demeura un des fidèles
amis de cœur de Delacroix. Celui-ci, dans un premier testament que lui
fit déchirer sa gouvernante, Jenny LeGuillou, l'avait désigné comme son
légataire universel. C'était un homme de grand sens et de mœurs aimables.»
Il avait été aussi l'ami et le camarade d'atelier de Bonington. Delacroix
lui légua en mourant un tableau inachevé de Bonington, précisément,
et une petite toile du même portant deux sujets en grisaille.
N-
7 ^ , 76 : Etudes de chevaux à 1 écurie
1° Cheval blanc. — Toile. — H. o™45,
L. o'"54. — Vente posthume: i,o8o fr.
2" Deux chevaux. — Toiie. H. o"3i,
L. o'"40. — Vente posthume : 480 francs
à M. Bornot, cousin de Delacroix. —
Appartenait à feu M. Gavet, gendre de
M. Bornot.
Delacroix tenait beaucoup à la première de
ces deux études, et il l'avait accrochée dans sa salle à manger.
N°'77, 78 : Deux costumes d'Orient
Toiles. — Mêmes dimensions : H. o^SS, L. o'"24. — Non
signé ni daté. — N" 188 de la Vente posthume. — Appartient
à M. Mercier.
Les deux figures sont debout'; l'une est vue de dos, l'autre de face.
Nous retrouverons quelque chose du grand mouvement ondulé de
la draperie de l'homme vu de dos dans le costume du Giaour pour le
" I I ■ I la arapene ue 1 iioiuiiic vuuc uus uana it ^woLuiin- wu vji^^iv^ui ^-v.*. x.-
magnifique Combat du Giaour et du Pacha, appartenant à madame Mahler, et si peu connu.
N''' 79, 80 : Deux études d'officiers grecs
Toiles. —1° H. o'"25, L. 0"'i8. — Appartient à M. le baron de Schwiter. —
2° Même sujet : H. o"'4o, L. o"'3o. — Vente Richard Wallace, 1877 : 280 fr.
— Cat. A. Moreau, p. 269.
La première de ces deux toiles est une charmante esquisse précieusement conservée
par M. le baron de Schwiter, qui fut l'un des amis auxquels le maître confia par
testament le soin de classer tous ses dessins après sa mort. C'est elle que nous reproduisons.
i823
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N°8i : Grec blessé
Atjuarelle. — H. o™022, L. o'"oi6. — Lithographie par M.Jean
Gigoux dans les mêmes dimensions. — Cat. A. Moreau, p. i25.
Groupe de deux figures en costume grec, compose' d'un soldat assis,
blessé, le bras droit en écharpe et tenant de la main gauche un verre
que la femme debout auprès de lui vient de remplir. Dans le fond, un
autre blessé avance en s'appuvant également sur une femme. — Il n'y
a d'autre trace de cette aquarelle que la lithographie de Gigoux repro-
duite ici. — C'est là encore une de ces études par lesquelles le maître
se préparait au Massacre de Scio. On reconnaît déjà dans l'attitude des
femmes toute l'exquise tendresse que Delacroix impose aux Saintes
Femmes près du Crucifié ou de saint Sébastien. Personne n'a su comme
lui exprimer la profonde passion de la charité chez la femme. Il n'est point de sentiment
humain qu'il n'ait connu et fait passer dans son œuvre.
N° 82 : Costume de Calcutta
Toile. — H. o'"45, L. C^S/. — N" 184 de la Vente posthume :
65o fr. — Appartient à M. Ph. Burty. — Cat. A. Moreau, p. 32i.
Le personnage, aux longues moustaches noires finement effilées et relevées
en croc, le cou nu, vêtu d'un costume de couleur bleu foncé à parements
jaunes et plastron rouge, coiffé d'un chapeau à larges bords, est assis de
trois quarts, tourné à gauche, les bras retombants et les jambes croisées
l'une sur l'autre. Sur le fond neutre s'enlève en clair une draperie posée
sur le dossier d'une chaise.
1;=3 Aujourd'hui que le romantisme a rompu toutes les entraves qui retenaient
' l'école française enchaînée aux colorations pâles des plâtres académiques,
cela paraît tout simple qu'uri artiste se plaise à étudier les détails pittoresques d'un costume
exotique. Mais n'oublions point que nous sommes ici en 1823, au temps des Ajax insultant
les dieux, et qu'alors, 0 Rien que la mort ne pouvait expier son forfait, a
N°8} : Académie de femme
Toile. — H. o™8i, L. o"65. — N° 200 de la Vente posthume. —
Appartient à M. Jehan Duseigneur fils, après avoir appartenu
successivement à Téminent critique d'art Théophile Thoré et à
M. Paul Lacroi.x.
Delacroix, qui a fait un certain nombre d'académies de femme, fut le
plus chaste des peintres. Il faut que le nu s'impose par le caractère du
sujet pour qu'il l'introduise dans ses compositions. Quand il le rencontre,
iHaawH jB^aB.-v' i '^ '^ traite en maître, comme dans les peintures décoratives du Salon du
.^^^'^^^ — ' roi. dans V Orphée du Corps législatif et dans la Mort de Sardanapale;
'^^s^J^=^-_r=A mais il ne le cherche point. Nul n'est plus éloigné que lui des motifs
^'-"1 de pure volupté. Quand l'amour passe dans son œuvre — et il y passe
bien rarement — il le conçoit dans les ironies de Faust ou dans les
rayonnements de Juliette et Roméo ; songénie plarîe toujours au-dessus des ardeurs lascives.
28
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1824
N°' 84, 8^ : Deux costumes souliotes
Toiles. — 1° H. o"'4o, L. o"26; 2" H. o™4o, L. o™3i — N"^ 177 et
178 de la Vente posthume. — Le 11° 177 Vente posthume : 58o fr., à
M. Petit. — Cat. A. Morcau, p. 320.
Ces études de costumes souliotes furent faites en vue du Massacre de Scio.
Mais Delacroix ne pouvait se défendre de mettre en mouvement même les
objets inanimés qui posaient devant lui. Il a donné à celui que nous repro-
duisons l'attitude de la danse; c'est le n" 178 de la Vente posthume. Dans le
n'' 177, le personnage, vu de face comme ici, a le pied posé sur une pierre.
' J Les costumes et les armes sont d'une grande somptuosité et d'une coloration
éclatante qui contrastent heureusement avec les tons blancs de la fustanelle.
N" 86 : Nègre à cheval
Lithographie. — H. o™i64, L. o"'2ro. — Vente posthume,
trois épreuves : 32 francs.
Les jambes et les bras nus, coiffé en arrière d'une petite calotte
de forme conique, vêtu d'une veste sans manches et d'un jupon
blanc, le nègre monte un cheval de race anglaise vu de profil et
marchant au pas relevé vers la droite, au milieu d'une vaste
-«"^ plaine. L'animal, en simple tapis de selle sans surfaix apparent,
, çi_r-T^ est bridé; les branches du mors sont visibles et l'on aperçoit
,i^ sj-^gj un gland de soie floche attaché à la sous-gorge. La tète du cava-
lier paraît petite, mais on ne considérera que la justesse et l'ai-
sance du mouvement.
La lithographie n'est pas signée en toutes lettres, elle l'est seulement des initiales E. D.
Année 1824
Delacroix et
N° 87 : Milton soigné par ses filles
Toile. — H. o™oo, L. o"'oo(?) — Salon de 1827. — Au duc de
Fitz-James.- — Cat. A. Moreau, p. 170.
Ce tableau, peint en 1824, exposé à la Société des Amis des Arts,
puis au Salon de 1S27, fut acheté par M. le duc de Fitz-James et
passa en Angleterre. Nous en donnons une idée, pensons-nous, en
reproduisant un croquis à la plume de o"M75 suro"'iqo de la collec-
tion Riesener. — Si M. Moreau ne lui assignait expressément la date
1S24, nous aurions reporté l'exécution de ce tableau après le voyage
de Londres, qui est de l'année i825. C'est à partir de ce moment,
en effet, que le grand courant passionné des poètes anglais, Shakes-
peare, Byron et aussi Walter Scott, pénétre dans l'âme de Eugène
y dépose le germe des plus hautes concuptions romantiques.
iS24
L'ŒUVRE DE DELACROIX
29
N° 88 : Le Tasse dans la Maison des Fous
Toile. — H. o"'4g, L. o™6o. — Signé, non daté. —
Salon de 1839. — Exposition universelle de i855. —
Vente A. Dumas fils, i865 : 14,000 francs. — Vente
Khalil bey, 1868 : lô.Soo francs. — Vente Carlin,
1872 : 40,000 francs. — Gravé à Peau-forte par L. Fla-
meng. • — Lithographie en sens inverse par Mouilleron,
pour la publication Le Mont Carmel et les chrétiens
d'Orient (1844). — Gravé sur bois dans le vrai sens pour
le Monde illustré (num. du 11 janvier 1868). — Cat. A.
Moreau, pp. 92,118,119,144,160, 191,257,287,323.
Les fous regardent curieusement le poète assis et qui détourne
sa tête pensive appuyée sur la main gauche. Dans le fond, un gardien fait claquer son fouet.
— Cet admirable tableau fut, d'après M. Moreau, exposé au Salon de iSSg. Il ne figure pas
au livret, mais ce n'est pas une raison négative pour cette époque. Il existe plusieurs varian-
tes du même motif. — L'œuvre, à peu près achevée à cette date [1824), fut, comme les Natche^,
mterrompue par le Massacre de Scio et revue et signée seulement en 1825 pour M. Formé.
— Voirie numéro suivant et aux années 1825 et 1S27.
N° 89 : Le Tasse en prison
Dessin. — Gravé à Teau-forte par A. Devéria. — H. o"'i79,
L o"i i5. — Fragment du précédent. — Cat. A. Moreau, p. 92.
C est la figure isolée du poète dans le tableau précédent, avec de sensibles
différences dans le costume et dans l'ajustement du manteau qui recouvre
ICI lavant-bras droit. — Dès 1S19, Delacroix se montre bien vivement
préoccupé de ce noble sujet. « N'est-ce pas que cette vie du Tasse est bien
mteressante? écrit-il à M. Pierret. Que cet homme a été malheureux!
Qu on est rempli d'indignation contre ces indignes protecteurs qui l'op-
primaient sous prétexte de le garantir de ses ennemis et qui le privaient
de ses chers manuscrits! Que de pleurs de rage et d'indignation il a dû
\erser en voyant que pour les lui enlever plus sûrement, on l'accusait de
folie et d'impuissance! Qu'il a dû de fois user sa tète a. ses barreaux en
pensant à la bassesse des hommes. » (Lettres, publication Burty.)
N° 90 : Etude d'intérieur
Aquarelle. — H. o'"i55, L. o™2io. — Vente posthume : 5o francs.
— Vente Constant Dutilleux : 3 10 francs à M. Burguières. — Litho-
graphie à la plume et cliché pour le catalogue delà vente parAlf. Ro-
baut : o'"78 sur o'" i o5 .
Ce n'est pas là un sujet bien intéressant, diront ceux qui demandent il la
peinture des anecdotes et des histoires. Non, assurément; mais, outre les
qualités pittoresques de cette charmante aquarelle, est-il possible de rencontrer une plus
lidèle expression de l'intimité d'un ménage de garçon?
3o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1824
N°9i : Massacre de Scio
Toile. —H. 4"'22, L. 3"'57. — Salon de 1 824. ■
Acheté par l'Etat : 6,000 francs. — Exposition
universelle de i855. — Gravé à Teau-forte par
Masson. — Lithographie par Blanchard. — Gravé
sur bois pour Ylllustratinn et pour l'Histoire
des Peintres. — Appartient au musée du Louvre.
— Cat. A. Moreau, pp. gS, 117, 142, 160, 167.
Le titre exact du tableau est : Scènes des massacres
de Scio. La peinture était achevée, déposée au Lou-
vre où se faisaient alors les expositions annuelles,
quand Delacroix vit les tableaux de Constable qu'un
spéculateur français avait envoyés au Salon. 11 fut
tellement frappé de l'admirable facture de l'illustre
paysagiste qu'il obtint de faire descendre son tableau
dans la salle des Cariatides et là le reprit et, en quatre
lours, le transforma complètement (voir la notice de
M. Villot sur John Constable). M. Lassalle-Bordes,
qui fut un des praticiens du maître, prétend que
celui-ci retoucha de nouveau le tableau en 1847, au
moment où il terminait la coupole du Luxembourg.
(1 II trouvait que les tons avaient poussé au jaune. » Après le Massacre de Scio, M. de
La Rochefoucauld, alors directeur général des beaux-arts, aurait, d'après les Notes de
L. Riesener, fait appeler Eugène Delà^croix, non pour lui commander des travaux, mais pour
lui recommander a de dessiner d'après la bosse «.
Delacroix ne connaissait pas la Grèce, où il n'avait jamais voyagé, lorsqu'il a peint le Mas-
sacre de Scio; cela ne l'a pas empêché de tirer de son sujet un grand effet de vraisemblance
poétique qui s'élève jusqu'à la terreur. La santé de la main a rendu fidèlement la fièvre de
la pensée qui agitait tous les esprits en 1824 au seul nom de la Grèce. La peste, la corrup-
tion, la mort physique et la mort du cœur se partagent l'attention troublée par cette horrible
scène de destruction, où la vieillesse s'hébête de folie, où l'enfance affamée s'attache aux
seins taris d'un cadavre, où la mâle vigueur s'écoule en flots de sang par de béantes bles-
sures, où la beauté virginale est livrée dans sa pure nudité aux meurtrissures d'un cheval
furieux. 0 Ces scènes horribles, dont nul ménagement académique ne dissimule la hideur,
a dit Théophile Gautier, ce dessin fiévreux et convulsif, cette couleur violente, cette furie
de brosse soulevaient l'indignation des classiques dont la perruque frémissait comme celle de
Haeadel, et enthousiasmaient les jeunes peintres par leur hardiesse étrange et leur nouveauté
que rien ne faisait pressentir. Aujourd'hui, le Massacre de Scio est devenu classique à son
tour; on le copie, on l'étudié, on l'admire. « C'est l'Orient et sa cruauté dans l'homme et
dans la nature : la peste et le meurtre.
N°^ 92, 93 : Etudes pour le Massacre de Scio
Toile. — H. c^qS, L. i"'3o. — Salon de 1824. —Vente du 1 1 mai 1876, à l'hôtel
Drouot : 3,65o francs à M. Auguste Vacquerie. — Cat. A. Moreau, p. 167.
La plus importante est une étude du groupe de la mère couchée, morte, et de l'enfant. II en
existe une autre réduction de o"'4o sur o"'5o qui a successivement appartenu à MM. Jeanron,
Niel, Martin, Burty, Barbcdienne, Charly.
1824
L'ŒUVRE DE DELACROIX
3i
N° 94 : Tête de vieille femme pour le Massacre de Scio
Aquarelle. — H. o"'!/, L. o™i4. — Appartient à M. A. Robaut
depuis la Vente posthume.
Cette admirable étude, d'une puissance de relief extraordinaire, d'une
expression saisissante, avec ses yeux glauques ourlés de rouge et sa bouche
édentée, tordue par l'âge, cette tête si curieusement encapuchonnée a
été visiblement faite d'après nature comme une .préparation pour la
vieille femme du Massacre de Scio, dont il y a aussi une étude peinte.
La vue de cette admirable aquarelle me remet en mémoire un passage
de la très remarquable étude de Henri de la Madeleine : « Que de sottises
n'a-t-on pas dites et " redites sur le dessin de Delacroix? Vicieux, extra-
vagant, caricatural, informe, c'était une horreur pour les calligraphes.
effet, comprendre les admirateurs des Favarger ou des Vital dans ce dessin
prompt comme la parole même, né d'une inspiration impérieuse. »
N° 95 : Tête de femme pour le Massacre de Scio
Toile. — H.o"'42,L.o™34. — Au docteur Gebauer. — Cat.A.Moreau,p.i68
Cette étude, conforme à l'exécution définitive, est celle de la femme grecque
accroupie au premier plan à droite, la poitrine découverte, auprès de la mère
couchée morte et dont l'enfant cherche à prendre le sein. Nous renvoyons
l'amateur curieux de pénétrer le secret des procédés intellectuels d'Eugène
Delacroix h la toile que nous avons reproduite sous le n" 66. Ce rapproche-
ment montre avec quelle certitude de conception et d'exécution il trans-
formait la réalité étroite fournie par le modèle vivant. C'est le mouvement de
l'Orpheline de 1823 qui est devenu celui de la mère de 1824.
N° 96 : Cavalier grec blessé
Aquarelle. — H. 0^19, L. o™23. — Signé, daté.
Cette aquarelle, vernie et encadrée sans marge, fait l'eflet d'une pein-
ture à l'huile. On lit au bas, h gauche : « Eug. Delacroix h son ami
Th. Fielding, novembre 1824. » — Ce morceau précieux appartenait
à M. Guillaume, de Bruxelles, en 1874, et a passé depuis entre les
mains de M. Arthur Stevens et de M. F. Petit. — D'après la tradition.
Thaïes Fielding aurait collaboré h l'exécution du ciel dans IcMassacre
de Scio, mais j^ai dit comment Delacroix, par des reprises successives
en 1824 et en 1847, ne laissa rien subsister de ce premier travail.
N° 97 : Mademoiselle La.
Toile. — H. o"^6o, L. o™4o. — Non signé ni daté. — Cat. A. Moreau, p. 229.
Cette demoiselle La..., représentée en buste, vêtue d'une robe de couleur foncée serrée à la
taille par une large ceinture à haute boucle, est, pensons-nous, un modèle du nom de Laurc.
N° 9^ • Aline la mulâtresse
Toile. — H . o'"6o, L. o"'48 — Signé à droite à hauteur de l'épaule:
Eug. Delacroix. — Appartient au docteur Gebaûer. — Cat.
A. Moreau, p. 229.
Le modèle, vu presque de face, est coiffé d'un vaste turban bleu. La
robe grise, très ouverte, est fixée au corsage de dessous par une large
broche de forme carrée, dorée et ornée de pierres de couleur. Un châle
rouge descend des épaules pour envelopper les bras. — Malgré l'indica-
tion du Catalogue A. Moreau, cette étude est signée en toutes lettres.
Nous rectifions aussi les dimensions. — M. Moreau catalogue également
une variante de cette étude, non signée ni datée, dans les dimensions de
non 22), variante qui, peut-être même, n'est pas de la main de Delacroix.
N° 99 : Aline la mulâtresse
^"^
Toile. — H. o™320, L. o"'235. — N" igS de la Vente posthume :
3So francs à M. le baron Rivet. — Cat. A. Moreau, p. 32 1.
Cette toile n'est pas une variante des précédentes, c'est une étude entiè-
I rement nouvelle. Le modèle, presque de face, est tourné dans le sens
I opposé (ici à droite). Il n'y a plus ni broche, ni châle, ni turban, et le
nu de la poitrine est beaucoup plus accusé. Curieux de tout ce qui pou-
vait lui offrir un élément nouveau décoloration, Delacroix étudiait alors
le jeu particulier de la lumière absorbée, et non plus réfléchie, par la
peau dans les races où la nature a varié, comme un fondeur merveilleux,
toutes les patines du bronze.
--'' 11 existe encore d'autres études de femme en buste vêtu, non signées ni
datées d'ailleurs, et de dimensions variées, généralement de o™73 sur o™6o ou de o™35 sur
o"'22. L'une des plus intéressantes figure sous le numéro 97.
.^
-'^M
N° 100 : Scène de « Don Juan
'i Toile. — H. o'"54, L. o"'44. — Signé. — Salon de i838. —
Appartient à M. Marmontel. — Cat. A. Moreau, p. 177.
C'est une scène du dernier acte, celle du souper. Don Juan répond
par des railleries aux larmes de dona Elvire qui le supplie d'ab-
jurer son impiété, quand Leporello annonce l'arrivée du Comman-
deur. En entendant les pas lourds de la statue, don Juan, d'un
air de défi, se soulève à demi sur son fauteuil. La porte s'ouvre,
et Leporello recule avec des gestes de terreur effarée. — Ce tableau,
int dans une gamme de tons un peu sombre, ne fut exposé qu'en
iS38. A cette époque, Delacroix terminait le salon du Roi à la
-^ Chambre des députés; il tenait cependant à ce que son nom figurât
au livret du Salon. C'est alors qu'il se sera décidé à envoyer ce
tableau peint en 1824 et qui opposait une note sévère aux splen-
deurs de la Médée et des Couvulsionnaires. Quelle variété de génie chez le peintre qui
pouvait exposer la même année trois ouvrages d'un caractère si différent!
i824
L'ŒUVRE DE DELACROIX
33
N° loi : Cheval effrayé par Torage
Aquarelle. —
de Schwiter.
H. o™235, L. oni32o. — Appartient à M. le baron
M. le baron Je Schwiter futundes meilleurs amis de Eugène Delacroix,
qui lui légua, en mourant, un tableau de Watteau, un de Chardin et
un grand paysage inachevé de Thaïes Fielding et le désigna pour
concourir au classement de ses dessins. Il avait reçu cette précieuse
aquarelle d'un si beau mouvement, en échange d'une collection d'em-
preintes de médailles que Delacroix a maintes fois dessinées. Voir années 1824 et 1S25.
N° 102 : Cheval arabe
Sépia. — H. o'"i9,L. o'"23. — Appartenaità mad. Leblond.
L'admirable observateur que Delacroix! Tout homme qui aura
partagé la vie d'un camp de cavalerie demeurera frappé, comme
nous le sommes en face de ce dessin, du développement extraor-
dinaire de cette faculté chez le maître. Bridé, sellé, harnaché,
l'animal s'est détaché du piquet. Avec quelle gaieté d'enfant mutin,
quelle innocente malice, il s'échappe d'un trot léger pour le plaisir
de faire courir son gardien, ici, un Arabe ! Il n'y met pas de
méchanceté, l'aimable animal; tout à l'heure, il se laissera reprendre, remettre au piquet.
N° 103 : Scène du Sabbat
Toile. — H. o"'3i, L. o'^Sg. — N" 142 de la Vente posthume :
410 francs à M. Haro.
C'est une simple ébauche, intéressante surtout par la belle disposition de
la ligne diagonale qui, des masses de rochers placés a gauche, s'élève vers
les hautes ruines en forme de falaises qui dressent leurs cimes dans le
vaste ciel et vers lesquelles s'élance, comme à l'assaut, la bande des sor-
ciers, larves, lémures, afrites, goules, lamies, psylles, brucolaques et
autres esprits nocturnes.
N° 104 : La fiancée de Lammermoor
Aquarelle. — H. o"'i85, L. o'"265. — Vente Villot, iSjS :
45 francs. —Appartient à M. Marquet de Vasselot, statuaire.
a On entra dans l'appartement, et la première chose qu'on vit fut le
corps de Bucklaw étendu derrière la porte et nageant dans son sang. «
C'est une des dernières scènes du roman de Walter Scott, une indi-
cation plutôt qu'une œuvre définitive. Delacroix reviendra plus tard,
en 1827, au même roman et choisira un autre motif. — A la vente
Villot, du 6 décembre iSyS, cette aquarelle fut réunie à un dessm à
la mine de plomb d'après Géricault; le prix de 45 francs porte sur ce lot de deux pièces.
H
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1824
N" 10) : Portrait en pied de M. Soulier
Toile. — H. i'"42, L. r
tient à M. Soulier tils.
'10. — Ni signé ni daté — Appar-
Peinture inachevée. La tête et la main droite seules sont termi-
nées ou à peu près; le reste n"est qu'indiqué, quoique la toile soit
couverte partout. — L'œuvre a été peinte dans l'atelier de De-
lacroix dont on reconnaît les propres meubles. Le maître eut
toujours le désir, qu'il ne réalisa pas, d'achever ce portrait. On le
rendit au modèle à la mort de Delacroix. — M. Soulier, le teint
pâle, les cheveux châtain foncé, vêtu de drap bleu sombre, est assis
de face, les jambes croisées, la main gauche appuyée sur un livre
posé à plat sur sei genoux. Le fauteuil et le canapé, les mêmes
que dans le portrait de M. F. Villot, sont en bois d'acajou et re-
couverts d'étoffe verte. Dans le fond, une draperie rouge et la
fameuse guitare que nous avons déjà vue dans un précédent por-
trait de M.. Soulier. — Ajoutons, pour compléter les renseigne-
à donnes sur cet excellent ami de Delacroix, que M. Soulier avait étudié l'aqua-
l'atelier de Copley Fielding, à Londres, et que c'est par lui et chez lui, dans la
de la place Vendôme, que Delacroix connut Thaïes Fielding. (Voir n^^Go à 63.)
N° 106 : Le modèle Rose
Toile. — H.o™32, L. o"'48. — Au docteur Gebaûer.
D'une lettre sans date à M. Pierret (M. Burty dit « vers i 823 », nous
nous crovons dès lors autorisé à adopter 1824), nous détachons,
malgré là dernière ligne un peu libre, les lignes suivantes qui se
rapportent manifestement h notre étude : 0 ... Je suis fâché de ne
t'avoir pas vu, mon petit ami. Mais, du moins, fais-moi le plaisir de
m'en dédommager en venant demain travailler avec moi. J'aurai
modèle depuis sept heures du matin, rue de Sèvres, n° 11... J'avais tâché de déterminer
Félix (Guillemardet, qui faisait son droit) à venir nous tenir compagnie demain. Mais il m'a
dit que le régime dotal l'emporterait sur le fessier de mademoiselle Rose pour cette fois. «
croi
N° 107 : Scène d'adieux
tf'*-" Aquarelle. — H. o"M5o, L. o"'io5. — Appartient à M. Haro.
f^rîjii^ Les amants, au moment de se séparer, se tiennent étroitement embrassés
'~~'^tJ^' dans l'allée verdoyante d'un parc. — Encore un projet abandonné (Voir
' n" 1 1 4). <( Si je ne suis pas agité comme le serpent dans la main de la Pytho-
nisse, je suis froid: il faut le reconnaître et s'y soumettre. Tout ce que j'ai
fait de bien a été fait ainsi. » (Extrait des agendas de Eugène Delacroix, dans
le catalogue imprimé et non livré au public de la magnifique collection
léguée par M. Alfred Bruyas au musée de Montpellier. Ce catalogue avait
été rédigé par le donateur avec la collaboration infiniment précieuse de
Théophile Silvestre). — La scène n'est pas à ce point particularisée qu'il y
ait le moindre intérêt à nommer ces amants. Cela importe peu, car Dela-
X ne s'y est arrêté que pour indiquer le mouvement d'un groupe de deux figures.
N° io8 : Les Natchez
Toile. — H. o"'90, L. i^^ie. — Signé à droite. — Salon de
i835. — Vente Paturle, 28 février 1872: 19,000 francs à
M. Febvre. — Gravé à Feau-forte : 0^097 sur o"' 128 par
Bracquemond pour le catalogue de cette vente. — Cat. A.
Moreau, pp. 8g, 160, 175, 252.
Inutile de dire que le sujet est emprunté à Chateaubriand. Fuyant
le massacre de leur tjibu, les deux jeunes sauvages remontent le
cours du Meschacebé. Pendant le voyage, la jeune femme a été
prise des douleurs de l'enfantement. Les Natchez ont quitté leur
pirogue; le père, agenouillé sur le sable, tient dans ses bras le nouveau-né que la mère,
assise sur le sol, regarde avec tendresse. — L'exécution du Massacre de Scio interrompit
celle des Natchez. Ce dernier tableau était déjà fort avancé h cette date. Cependant, il ne
parut qu'au Salon de i835. Mis en loterie à Lyon, au profit d'une œuvre de bienfai-
sance, en iSjS, par M. Rivet, préfet du Rhône et ami du maître, il fut gagné par M. Pa-
turle. Il avait été payé 1,200 francs à l'artiste, qui écrivit à M. Rivet, après le tirage de la
loterie^ : « Que j'aurais désiré que mon triste tableau, s'il vous a plu le moins du monde,
vous tût échu! Je crains bien qu'il ne se présente de sitôt sous ma main un sujet aussi
conciliant, si je puis parler ainsi. Mes inclinations tragiques me dominent toujours et les
Grâces me sourient rarement... »
N°^ 109, no, III, 1 12 : Feuilles de croquis d'après l'antique.
I " Médailles et
monnaies. — Des-
sin à la plume.
— H. o'"i95, L.
o"3oo. — Appar-
tient à M. Burty. — Publié en fac-similé dans V Autographe
au Salon, n^imévo du 10 juin 1864.
2» Fragments étrusques. — Dessin au crayon. — H. o"^i3o, L. o"'20o. — Mêmes indi-
cations complémentaires que ci-dessous.
3" Médailles. — Dessin à la plume. — H. o™ioo, L. 0^170. — Lithographie de
mêmes dimensions par Alfred Robaut, dans la troisième série de ses « Fac-similés de
croquis et dessins originaux de Eug. Delacroix, 1 865, chez l'auteur » Planche tirée
à dix épreuves seulement, non publiée.
4° Médaille de Syracuse. — Dessin à la mine de plomb. — Diamètre o"'o6o. — •
Mêmes indications, sauf le chiffre du tirage qui est de i5o et le numéro delà série, qui
est la première. La médaille orne la couverture de cette série.
Delacroix avait étudié l'antique avec la passion qu'il apportait à toute chose. Nous l'avons
vu (n" loi) échanger une aquarelle importante contre une collection d'empreintes de médailles,
celles-là mêmes assurément d'après lesquelles les croquis que nous donnons ici furent
exécutés. Médailles, pierres gravées, trépieds, carquois, figures d'ornement, animaux symbo-
liques, tètes casquées, etc., ce que Delacroix recherche dans ces dessins au trait, c'est le type
essentiel de l'objet, ce qui caractérise cet objet, en éliminant l'accident et jusqu'au détail
pittoresque. De là cette grandeur.
36
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1824
N° 113 : Mort de Caton
nous fait 1
conserve 1'
Toile. — H. o™6o, L. o"'44. ■ — Lithographie par J. Laurens :
o'"23 suro"'i7. — Appartient au musée de Montpellier, galerie
Bruyas.
C'est une académie que Delacroix a reprise et complétée en lui don-
nant l'intérêt d'une composition. On se demande si le maître n'eut pas
alors la pensée de se mesurer avec Louis David, qui exposait précisé-
ment au Salon de 1824 une figure académique dans une attitude ana-
logue. Cette académie de David était très célèbre dans les ateliers. Il
l'avait peinte en 1779, pendant son pensionnat de Rome. Elle servit
longtemps de modèle à ses élèves avec une autre académie d'homme vu
de dos. Cette dernière était connue sous le nom d'Hector; la première,
qui est au Louvre, sous le nom de Patrocle. Le Caton de Delacroix
|effet d'une réminiscence très intentionnelle du Patrocle. Malgré tout, l'œuvre
allure tendue des morceaux académiques.
N° 1 14 : Camp romain
Aquarelle. — H.
bas à gauche. —
\illot.
D"'i55, L. o-^
Appartient
Î95. — Signé au
à M. Georges
C est là un des innombrables projets, moins que
i.ela, une des innombrables pensées qui traversèrent
le cerveau de Eugène Delacroix en son incessante
activité, pensée non réalisée cette fois. Aura-t-il
manqué d'obstination? 0 Sorti d'un travail, » a-t-il
écrit quelque part, 0 impossible de s'y remettre. 11 y
a une croûte à rompre pour s'y remettre de cœur,
quelque chose comme un terrain rebelle qui repousse le soc et la houe. Mais après un
peu d'obstination, cette rigueur s'évanouit. Tout à coup, il est prodigue de fleurs et de fruits,
on ne peut suffire à les cueillir. «
N° 1 1 5 : Portrait d'Abel Widmer
Toile ovale. — H. o™6o, L. o"'5o. — Appartient à M. Arosa.
— Cat. A. Moreau, p. 23o.
En 1824, puis en 1825, et de 1828 à 1834, avec une lacune en i83i,
Delacroix fit, au prix de cent francs, pour son ami M. Goubau, chef
d'institution, le portrait à l'huile, en buste, des élèves lauréats au con-
cours général. M. Goubau est le fondateur du collège Chaptal. Dans le
principe, la pension portait le titre de Institution Saint-Victor et était
située rue Chantereine, devenue rue de la Victoire. C'est en i S3o
qu'elle fut transférée rue Blanche, où elle devint collège Chaptal, au-
jourd'hui boulevard des BatignoUes. Le lauréat de 1824 s'appelait Abel
Widmer. Redingote bleu foncé, gilet montant, col et cravate blanche
Widmer mourut très jeune, vers i833.
i825
L'ŒUVRE DE DELACROIX
Année 1826
N° 116 : Desdemona et Emilia
Appartient à M. Soulier fils. —Non
Toile. — H. o"'24, L. o"'
catalogué par M. Moreau.
C'est la dernière scène du quatrième acte d'Othello, dans l'appartement de
Desdemona. Othello, Lodovico et les gens de leur suite sont sortis. Emilia
commence de défaire sa maîtresse, la romance du Saule est chante'e.
La conversation s'engage sur l'infidélité des femmes. « desdemona.
Oh! ces hommes! ces hommes! ... Crois-tu en conscience, dis-moi cela,
Emilia, qu'il y ait des femmes qui offensent leur mari d'un si gros outrage.
— ÈMiLiA. Il y en a de telles, cela n'est pas douteux... — desdemona. Je
ne crois pas qu'il existe une telle femme. — emilia. Oui, il en existe par
douzaines, et autant encore par-dessus le marché qu'il en faudrait pour
peupler le monde pour lequel elles auraient joué....» Suit le grand monologue d'Emilia qui
se termine par ces mots : « Ainsi donc, que nos maris nous traitent bien, ou bien qu'ils
sachent que nos péchés, ce sont leurs péchés qui nous les enseignent, » et auquel l'innocente,
la triste Desdemona coupe court par ces mots : « Bonne nuit, bonne nuit; que le ciel
m'accorde des mœurs qui me permettent non de tirer le mal du mal, mais de me corriger
par le mal! » Elles sortent. Le drame approche, la fin tragique qui arrêtera Delacroix plus tard
en 1848 et en i85o.
N° 117 : Macbeth consultant les sorcières
Lithographie. — H. o'"322, L. o"'25o. — Premier e'tat. "Ventes
de la Combe, i863 : 72 francs; Dubois, 1866 : 3o francs. —
Deuxième état. Vente Parguez, 1861 : 25 francs. — Troisième
état. Vente posthume 1864 (cinq épreuves) : 5i francs; Ventes
Burty, Paris, décembre 1874: 3o francs; Burtv, Londres, 1876:
20 francs ;Villot, 1875 (mauvaise épreuve): 16 francs; Sensier,
décembre 1877 : 10 francs. — Quatrième état. Vente Soleil,
janvier 1872: 7 fr. — Cinquième état. Vente Langlais, 1868,
(deux épreuves): 3 fr. 5o. — Cat. A. Moreau, pp. 40, 41.
Le premier état, dont il n'a été tiré que six épreuves, ne porte ni signa-
ture ni lettre, les bords ne sont pas rectifiés. — Dans le deuxième
état, certains clairs ont été ajoutés à la pointe avec la signature à
gauche. 0 E. Delacroix », sans lettre, bords rectifiés. — Troisième état. Au bas à droite,
« Lith. de G. Engelmann »; au milieu, 0 Toil and trouble, fire burn, and cauldron bubble»
(c'est le refrain des sorcières dans la scène de la caverne qui ouvre le quatrième acte de
« Macbeth : » « Double, double toil and trouble, etc Redoublons de travail et de
peine; brûle, feu ; bouillonne, chaudron) ». — Quatrième état, non signalé par M. Moreau ;
Le nom de G. Engelmann effacé; il ne reste que les mots « Lith. de » (épreuve de la Vente
Soleil). — Cinquième état. En bas à droite : « Imp. Bertauts, R. Rodier, Paris »; au milieu :
(I Macbeth » et le texte de Shakespeare.
38
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1825
N° 118 : Macbeth consultant les sorcières
Xoile. — H. o"'32, L. o'"25. — Sans changements. — Appartient à M. Albert Hccht.
Macbeth debout en costume écossais a pénétré dans la caverne ténébreuse où les trois sor-
cières se tiennent accroupies autour d'un chaudron bouillant, et les interroge : « Je vous en
conjure, par la science que vous possédez, quelle que soit la manière dont vous l'avez ac-
quise, répondez-moi. » — Admirable interprétation de cette admirable scène!
Dans l'exécution de cette toile étrange, Eugène Delacroix, se souvenant du procédé litho-
graphique qu'il avait adopté pour l'exécution du numéro précédent, a travaillé en rnaints
endroits la pâte avec une pointe ou le manche d'une brosse, de même qu'il avait traité la
pierre à coups de grattoir.
N°
119
Portrait de M. Jérôme
Dessin ou sépia. — H. o™i29, L. o™85o. — Gravé à l'aquatinte,
par Hocquart. — Cat. A. Moreau, pp. io5, 106.
Eugène Delacroix interrogé par M. Burty au sujet du dessin, lui répond
le 24 janvier 1862 : « Je n'ai aucun souvenir de AL Jérôme, ni d'avoir
rien fait qui ait trait à cela. » M. Burty ajoute cependant : a Quoi qu'en
dise Delacroix, la gravure qui parut en tête du Manuscrit de feu M. Jé-
rôme (Paris, 1825, un vol. in-b", fatras politico-économique, publié par
François de Nantes), dut être gravée d'après une sépia de lui.» C'est par
suite d'un lapsus que M. Burty a écrit François de Nantes, il s'agit ici
de François de Neufchâteau, écrivain et homme d'État, né h SafFais
(Meurthê), en ijSo, mort en 1828, membre de l'Institut, classe des
Lettres, en 1797; poète et auteur dramatique médiocre qui publia, de
1810 à 1828, plusieurs ouvrages sur l'agronomie. — Nous reproduisons
la lettre de l'aquatinte : En haut, au milieu : « Ceci est le véritable portrait de feu Monsieur
Jérôme »; en bas, à gauche: « Delacroix del. »; à droite : « Hocquart jeune, sculp.»; au milieu :
« 'Venez avec moi dans le pays des loups, peut-être y trouverez-vous quelque chose à ap-
prendre. »
N° 120 : Portrait de Désiré Pellerin
Toile. — H. o"^6o, L. o"'5o. — Signé au bas à gauche. — A appar-
tenu à MM. Rigaut et Alfred Rehaut, aujourd'hui dans la collection
de M. de Beurnonville. — Cat. A. Moreau, p. 23o.
Désiré Pellerin était un élève de l'Institution Saint-'Victor dirigée par
M. Goubau, ami de Eugène Delacroix. Nous avons dit (voir noiiS, année
1824I dans quelles conditions le peintre déjà célèbre fit pendant sept ans
ks portraits des élèves de cette pension qui remportaient des prix au
Concours général. Le lauréat de 1S25 pour le second prix de Géographie,
Liasse de sixième, était Désiré Pellerin. C'est bien un type de jeune
piocheur tout d ins sa physionomie, ces cheveux incultes que le passage habituel de la main
a redresses, It Iront puissant, le regard de ces yeux bleu foncé, la bouche ferme révèlent
l'énergie et la constance de la volonté. Habit noir-bleu, gilet jaune à raies brunes, gants gris-
ardoise. Comme Abel Widmer, le lauréat du second prix de Mathématiques élémentaires
en 1824, et qui survécut dix ans à peine h son succès. Désiré Pellerin mourut jeune, en 1837.
N° 1 2 1 : Portrait de Mademoiselle Claire Pierret
Toile. — H. o'"39, L. o^S i .
à madame veuve Pierret.
Non signé ni daté. — Appartient
C'est à M. J.-B. Pierret que Delacroix, pendant son séjour h Londres, aux
mois de mai, juin, juillet et août 1825, écrit le plus souvent et avec le
plus d'eftusion. Ces lettres sont charmantes et l'on y voit poindre le
germe de ses grandes et prochaines compositions shakespeuriennes. Telle
est, par exemple, celle du 27 juin : n J'ai vu Richard III^ joué par Kean
qui est un très grand acteur, quoi qu'en dise l'ami Duponchel qui l'ap-
pelle le Philippe de l'Angleterre (Philippe était un célèbre auteur de
mélodrame). Je ne saurais être de son avis. Young ne me plaît pas
autant. Je l'ai vu dans plusieurs pièces, entre autres la Tempête qu'on a remise à la scène.
On a changé le commencement de Richard : au lieu de la mort de Clarence, ils ont mis la
mort de Henri VI, qui est aussi de Shakespeare; mais dans la deuxième partie de Henri VI,
Richard, qui n'est encore que Glocester, vient dans sa prison et l'assassine à coups d'épée. Ce
moment a été terriblement rendu par Kean, ainsi que mille autres dont je ne manquerai pas
de te rebattre les oreilles. J'ai vu aussi Othello par lui. Les expressions d'admiration
manquent pour le génie de Shakespeare qui a inventé Othello et lago. Je suis obligé à
mon grand regret de manquer une représentation demain où Young doit jouer le rôle
de lago avec Kean dans Othello. Quoique à des théâtres différents, ils se réunissent pour
un bénéfice. Je pense voir aussi Hamlet. » Et au mois d'août : n Je suis inconsolable d'avoir
manqué Hamlet, par Young. » Il le vit plus tard et y trouva son propre Hamlet.
N° 122 : Portrait de Fabbé Martial Marcet
Litliographie. — H. o'"i3o,
Vente Sensier : 7 francs.
L. 125. — ^ Vente Parsuez : 6 francs. —
Le jeune ecclésiastique est représenté en buste, en soutane et rabat, tête nue et
de trois quarts. La légende de la lithographie relevée par M. Moreau manque
de clarté. Nous la reproduisons en signalant le vague que la présence de deux
noms d'artistes fait planer sur l'authenticité de l'attribution : « En bas, à
gauche: « Devéria d'après nature »; à droite : « Eug. Delacroix u; au milieu :
« Lith. de Langlumé et G", — M. Martial IVIarcet ».
N° I2J : Portrait de M. Pierret
Toile.— H. o™32, L. o"'24. — N° yj de la Vente postliume : 600 francs
à M. Bornot. — Cat. A. Moreau, pp. 23o, 3i3.
Le vieil ami de Eugène Delacroix, dont nous avons déjà vu le portrait plusieurs
fois, est représenté ici, assis les jambes croisées, le coude gauche appuyé sur
une table. Il est coiffé d'un large turban et revêtu d'un costume turc composé
d'une tunique vert foncé, rehaussée de passementeries d'or et d'une ceinture
d'un ton violet neutre. La table sur laquelle il est accoudé est d'un ton violet
. rougeàtre. — Cette belle étude de costume pour laquelle posa M. Pierret,
n'est pas signée. Elle resta dans l'atelier de l'artiste jusqu'à sa mort. Delacroix l'a souvent
consultée, notamment pour le Turc à la Selle (1828) et pour le Turc assis (184G).
40
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1825
N° 124 : Portrait de M. Washington
Toile. — H. o"'46, L. o'"35. — N° 76 de la Vente posthume. — Appartient à ma-
dame Pastré de Regny. — Cat. A. Moreau, p. 23o.
M. Washington était également un ami de Delacroix qui l'a représenté debout, en costume
grec, et tenant un fusil à la main.
N - 1 2 5 : Portrait de M. Soulier
Toile. — H. o™45, L. o"'38. — Non signé. — Cat. A. Moreau, p. 23o.
Il est représenté debout, une main dans le gilet, l'autre cachée derrière le dos.
N° 126 : Pâtre romain
anciens et modernes.
Toile de 6. — Peinten 1825 pour M. Du Sommerard. — Salon
de 1827. — Lithographie par Mouilleron: o"^i5~ sur o'"i98. —
Le premier état de cette lithographie portait en bas à gauche :
« Cabinet de M. Dugléré. » — Cat. A. Moreau, pp. i33 et 169.
Le pâtre, couvert d'une peau de mouton, tête nue, agenouillé au bord
d'une mare, se penche pour y tremper ses lèvres. — La lithographie
de Mouilleron a paru sous le titre : da Mort du Brigand » dans la
publication del'imprimeur-lithographc Bertauts, intitulée: <■ Les Artistes
' L'homme peut bien être un brigand, mais il ne meurt pas, il boit.
N° 127 : Mendiant anglais
^^ Aquarelle. — H. o"'2o5, L. o'"i40. — Vente Villot, i865 : 3o5 fr.
— Gravé de mêmes dimensions à Teau forte, par M. F. Villot. —
Cat. A. Moreau, p. 108.
Étude sinistre de la misère londonnienne. * Je me suis cruellement ennuyé
pendant les premiers jours, » écrit-il de Londres, le 6 janvier 1825 ; « j'ai
été sur le point de repartir sans cérémonie. Cela vient de ce que je ne
faisais que voir de côté et d'autre sans autre fruit que me fatiguer. Depuis
que je me suis mis à travailler, je me plais ici. Je suis très flâneur à la
vérité, mais pas badaud... Les chevaux, les voitures, les trottoirs, les parcs,
la Tamise, les bateaux de la "Tamise, les bords de la Tamise, Richmond et Greensvich, tout
cela demanderait des volumes de lettres. »
N° 128 : Deux chevaux de ferme anglais
Panneau. — H. o'"oo, L. o"'oo (?) — Salon de 1827. — Cat. A. Moreau, p. 1Ô9.
i825
L'ŒUVRE DE DELACROIX
41
N" 129 : Cheval de ferme rouan vineux
Aquarelle. — Vente Villot, i865 : 45 francs. — Cat. A. Moreau, p. 293.
Etude faite en Angleterre. Le cheval, dit M. Moreau, est harnaché et représenté fuyant, vu
de croupe.
N"' 130, i}i : Combats de chevaux
1° Toile. — H. o'"27, L. o'"32. —
Signé, daté. — N° 82 de la Vente
posthume : i,6o5 francs à M. Van
Cuyck, 7 février 1867 : 750 francs.—
Cat. A. Moreau, p. 3i3.
2° Toile. — H. o"'35, L. o'"45. —
Signé, daté. — N° 82 de la Vente
posthume : 2,400 francs à M. Delille.
— Non catalogué par M. Moreau.
Superbes études de mouvement que l'artiste retrouvera, consultera dix ans plus tard au
moment de la Bataille de Tailleboiirg, où il y a une si furieuse mêlée de chevaux et qu'il
a reprises plusieurs fois, notamment la première pour divers Combats du Giaour et du
Pacha et surtout pour le Choc de cavaliers, dont la peinture fut refusée au Salon
de 1834. (Voir aux années iS33etiS45.)
N°' 1 3 2, I ^ ^ : Tombeaux d'Adrien et de Nicolas d'Estouteville
;;i,ît
^B
I
Sépias. — 1° H.o"M8, L. 0^26.
— 2° H. o"^i8, L. o'"23. —
Partie du n° 597 de la Vente
posthume, à M. Bornot.
Ces dessins ont été faits dans les
ruines de l'abbaye de Valmont,
près de Fécamp, qui appartiennent
à M. Bornot, cousin de Delacroix,
et où il allait souvent dans sa jeunesse. Léon Riésener, dans ses Notes, parle de ce pays
et des séjours qu'il y fit avec Delacroix. « A Valmont, en Normandie, nous avons passé
quelques vacances. Tantôt il était tout feu pour le travail et faisait des aquarelles délicieuses
qui ont été vues à sa vente; tantôt ne pouvant s'y mettre, il se mettait à mouler avec passion
les figurines qui ornent les tombeaux des moines d'Estouteville, fondateurs de l'abbaye de
Valmont. Nous travaillions à ces moulages quelquefois après dîner, malgré les observations
du domestique du propriétaire absent, car l'église servait de bûcher. C'était dans l'arrière-
saison. L'eau gelait. Le toit de l'église était à jour. Les rayons de la lune y pénétraient et
étincelaient dans les feuillages couverts de rosée qui poussaient dans la nef Nous nous
donnions l'un après l'autre le spectacle des ombres immenses que nous projetions avec art
sous les colonnades des bas-côtés. » [Lettres, édition Burty.) Delacroix écrit aussi en 1S29,
qu'il moula « certaines petites figures qui ornent les tombeaux et sont d'un très beau style. »
42
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1825
N° 134 : Le Chevalier
Aquarelle. — H. o"M 5o, L. o^r 10. — Appartient à madame veuve
Pierret. — Non catalogué par M. Moreau.
N'est-ce pas ici encore un souvenir de l'abbaye de Valmont? Non que
nous supposions que Delacroix ait copié cette figure sur place. Mais
n'aura-t-il pas été tenté de rendre la vie à quelqu'un de ces seigneurs
d'Estouteville dont la grande allure en la rigidité de leur tombeau l'avait
vivement frappé? Il aura disjoint ces mains réunies pour l'éternité dans
_ __ ^ 1^ prière et rendu, pour la durée d'un mince papier taché de couleur,
' la vie, le mouvement, la fière tournure des mœurs héroïques au châtelain
de Valmont. Le trait sculptural, la solennité de la pose font penser à la statue du Comman-
deur de Don Juan. C'est une statue, mais une statue prête à s'animer.
N° I ] ^ : Le Tasse dans La maison des fous
substitué un crucifix à la petite baie du fond.
Dessin. — H. o'"i8o, L. o™225. — Signé au bas à gauche
et daté 1825. — Exposition posthume de Tœuvre de Eugène
Delacroix au boulevard des Italiens. — Lithographie par
A Devéria : o'"i44sur o"'i70. — Gravé sur bois pour
L Univers illustré du 10 septembre 1864. • — Appar-
tient à M. Paul Meurice. — Cat. A. Moreau, p. 144.
Cette composition présente de nombreuses différences avec
celle de 1823. Les fous debout qui harcèlent le poète sont de
plus petites proportions et le maître a ajouté iine figure de
plus, celle du fou accroupi qui, par une affreuse ironie, simule
1 action d'écrire. Dans la muraille du même côté, il a ouvert
une fenêtre grillée où apparaît une figure de folle, enfin, il a
N° 136: Tarn O'Shanter
Toile. — H. 0^26, L. o,3o. -- Signé en bas à droite. — Peint
en 1825 pour madame Dalton. — Salon de i83i. — Vente B...,
3o mars i855 : 8o5 francs. — Vente marquis de L..., 4 février
i865 : 2,3oo francs. — Vente Khalil-Bey, 16 février 1868, à
M. Verdier: 3, 750 francs. — Photolithogra'phié par M. G. Arosa:
o'"94o sur o'^i 18. — Lithographie dans le sens opposé par Mouil-
lerbn : 0^245 suro™3o5. — Cat. A. Moreau, p. 172,248.
Sujet tiré d'une ballade écossaise de Burns. — La lithographie de Mouilleron est intitulée
oLa Course effrénée» et porte en haut, à gauche : 0 Souvenirs d'artistes u;h droite, le nombre
559 : en bas à gauche : « Eug. Delacroix pinx^. — La Course effrénée «; au milieu : c< Imp.
Bertauts Paris»; adroite: «"A. Mouilleron, Paris». Le tirage est fait sur papier bleuté.
M. Moreau, aux deux pages de son livre où il parle de ce sujet, donne deux dates différentes:
1825 et 1827. — Le tableau n'étant pas daté, nous adoptons la première, car M. Moreau dit
expressément que la peinture fut exécutée en 1825 pour madame Dalton. (Voir à 1827.)
N° 137 : Odette et Charles VI
.■^">
, , Toile. — H. 0^343, L. o'"265. — Signé au bas à
>^^ droite. • — Lithographie par Maurin, de mêmes di-
/ mensions. — Appartient à M. Dumas-Descombes.
— Cat. A. Moreau, p. 116.
>;'■ } '^ . ^ .
Ce tableau peint en 1825 porte encore derrière le châssis
le nom de M. F. Leblond, pour qui il a été peint. Le possesseur
actuel le tient de son oncle M. Dumas-Descombes.
La lithographie porte en bas a gauche : c Delacroix pt. », à droite:
(I Maurin del. »; au milieu: 0 Lith. de Villain », letitre etun timbre
sec ovale avec les mots 0 Sazerac et Duvalv autour d'une lyre. Mal-
heureusement cette lithographie, oui a l'avantage de représenter le
tableau dans son vrai sens, a complètement altéré l'expression du
page qui enlève l'épée des mains du roi, et surtout le personnage
d'Odette dont la tète est tournée davantage dans le sens du trois
quarts, ainsi que nous la rétablissons par un croquis complémentaire. La différence est telle-
ment marquée qu'on supposerait volontiers que Delacroix a modifié cette partie du tableau
après l'exécution de la lithographie. Le Charles VI du compositeur Halévy est de 1843;
l'œuvre de Eugène Delacroix est donc antérieure de dix-huit années.
N° 138 : Don Quichotte dans sa librairie
Toile.— H. o'"40, L. o^Si.— Signé, non daté.— Vente Du Som-
merard, 12 décembre 1843: 100 francs.— Vente Durand- Rud,
28 janvier 1854: 400 francs. ^ Vente Bouruet-Aubertot, 22 février
i86q : 6,85o francs. — Vente Frémyn, 6 avril iSjS : 6,200 francs.
— Cat. A. Moreau, p. 243.
Ce tableau commencé le 6 avril 1824, puis interrompu, n'a été terminé
qu'en 1823. Il est très coloré, très étudié dans le rendu des détails de
nature morte, tels que les reliures des livres de chevalerie sur lesquels
médite don Quichotte tout de noir vêtu et coiffé d'un bonnet de nuit.
Toute la lumière du tableau est concentrée autour des deux petits vases posés sur la table.
N° 139 : Le duc de Bourgogne montre sa maîtresse
au duc d'Orléans
Toile. — H. o"'oo, L. o^oo (?)— A appartenu au prince Napoléon.
— Ventes 6 mars 1843 : 3oo francs; 25 janvier 1864: 1,200 francs.
— Cat. A. Moreau, p. 264.
Nous reproduisons une partie de ce tableau d'après une eau-forte de
M. Frédéric Villot. Dans la composition complète, le duc de Bourgogne
est agenouillé sur un coussin; on voit dans le fond un dressoir charge d'orfèvrerie.
M. Villot a fait, en 1829, une copie de ce tableau; elle était chez le pnnce Napoléon a cote
de l'original et on l'attribuait à tort à Decamps.
44
L'ŒUVRE DE DELACROIX
[825
N° 140 : Odalisque
Toile. — H. o'"370, L. o"'445. — Non signé. — N° 69
de la Vente posthume : 705 francs à M. Baroilhet. —
\ ente Baroilhet, 16 mars 1872: i,o5o francs. — Vente
_ _ Dassonville, mars 1879: 5oo francs. — Cat. A. Moreau,
jîl^r^ P 3i3.
Ce n'est qu'une esquisse. Le modèle vu de face, couché sur le
i.oté droit, a la tète renversée sur des coussins; la main droite
s approche d'un narghilé posé à terre. Dans le fond une tenture
t-t une échappée de paysage. On reconnaît dans cette étude
le type physiologique de la temme robuste, forte, aux ampleurs
massnes que Delai.roi\ a gcncrakment introduite dans ses compositions héroïques. L'attitude
ICI et le narghilé qui ont tau baptiser cette toile l'Odalisque ne sont en réalité qu'accessoires,
un simple prétexte pour une superbe étude de nu.
N° 141 : Archers de la garde écossaise
Aquarelle. — H. o^iS, L. o'"20. — ■ Appartient à
M. Soulier fils. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est une ébauche, mais saisissante par la beauté du geste et
du mouvement, inspirée h coup sûr par le chapitre V du
Quentin Duryvard de Walter Scott, n Ce corps célèbre qu'on
' nommait les archers de la garde écossaise avait été formé par
Charles VI avec plus de raison qu'on ne peut en alléguer
généralement pour entourer un trône d'une troupe de soldats
mercenaires. Les dissensions qui avaient arraché à ce mo-
narque plus de la moitié de son royaume et la fidélité douteuse et chancelante de la noblesse
qui défendait encore sa cause rendaient imprudent et impolitique de confier h ses sujets
le soin de sa sûreté personnelle. Les Ecossais étaient les ennemis héréditaires de l'Angleterre,
les anciens amis, à ce qu'il semblait, les alliés naturels de la France. Ils étaient pauvres,
courageux et fidèles. La population surabondante de l'Ecosse, le pays de l'Europe qui
voyait partir le plus grand nombre de hardis aventuriers, fournissait toujours de quoi
recruter leurs rangs. Leurs prétentions à une antique noblesse leur donnaient en outre le'
droit d'approcher de la personne d'un monarque de plus près que toute autre troupe. »
N° 142 : Bonaparte
Aquarelle. — Diamètre o"^075. — Don de Jenny à M. Alfred Robaut. —
Non catalogué par M. Moreau.
Nous avons dit plus haut comment Jenny « dont les soins passionnés et jaloux, dit
M. Burty, ont prolongé le souffle frêle, toujours menacé » de Delacroix, avait
possédé bien des œuvres de son maître. Voici l'article du testament qui la
concerne : n Je lègue ii Jeanne-.Marie Le Guillou une somme de cinquante mille
francs (So.ooo fr.i, plus ce qui sera h sa convenance dans mon mobilier enunmotce
qu'il lui plaira de choisir pour se composer le mobilier d'un petit appartement convenable.»
i825
L'ŒUVRE DE DELACROIX
45
N° 143 : Tête de jeune garçon
PasteL — H. o^Sg, L. 0^29. — A appartenu à Jenny Le Guilloii
qui en fit don à Constant Dutilleux. — Non catalogué par M. Moreau.
M. Philippe Burty nous a dit dans sa précieuse édition des Lettres de Dela-
croix, comment la gouvernante de Delacroix était entrée en possession d'un
certain nombre d'ouvrages de son maître : « Jenny ou Jeanne Le Guillou ,
, ^^ dont le rôle auprès de Delacroix pourrait être dénaturé injubîement, n'était
s^ pas une nature vulgaire. C'était une paysanne des environs de Brest, douée
d'instincts délicats. Quelquefois dans l'atelier elle disait spontanément en
face d'un croquis ou d'une peinture : 0 Monsieur, je trouve cela très bien. —
« Cette Jenny s'y connaît, s'écriait Delacroix ravi! Eh bien, Jeanne, je vous le donne! » Et
il écrivait son nom au revers. De là à renouveler l'anecdote de Molière, la distance est
grande. — Malheureusement, vers la fin, malade, soupçonneuse, elle fit le vide autour de
son maître qui ne pouvait se passer de ses soins. »
N°' 144, 145, 146, 147, 148: Cinq feuilles de médailles
i" Lithographie. — Six
médailles. — H. o'^iqo,
L. o'"26o. — Signé en bas
j\ > yj «ffitt-KF \ ''» <yr»-'" «5K«ii^ Bv.:^^ ''^ milieu : « Eug. Dela-
(-#' A Kr^P ^^^^<,'^rh. ^^rf^^'.^T^^'-Toix, 1825.» — Vente de
^ ' La Combe (i"^'' état) : 10 fr.
— Cat. A. Moreau, p. 38.
^" Lithographie — Quatre médailles. — H.
o" 182, L o" 00 — Signé à gauche : " Eug.
Delacroix i8''i — Vente de La Combe (pre-
mier ettt) 10 francs. — Vente posthume (même
état) i3 francs — Cat. A. Moreau, p. 39.
\'^?'J ^° Lithographie — Neuf médailles. — H.
^^^^ o"'2io L o" 3oo — Signé en bas et au milieu:
Eug Delacroix, 1825 ». — Vente de La
Combe (premier état) : 10 francs. — Cat.
A. Moreau, p. 39.
4° Lithographie. — Sept médailles. — H. 0^282, L. o'"240. — Signé en bas à gauche :
«Eug. Delacroix, 1825.» — Cat. A. Moreau, p. 3g. (Il existe de cette planche
un état antérieur non signalé par M. Moreau et dans lequel la médaille dite de Syra-
cuse occupe la place prise ici par la médaille au hibou.)
5° Lithographie. — Douze médailles. — H. 0^240, L. o'"3o5. — Signé en bas et au
milieu : « Eug. Delacroix, 1825. » — Vente de La Combe (premier état), 43 francs. —
Vente posthume (deuxième état), 16 francs. — Cat. A. Moreau, pp. 39, 40.
A l'exception de notre n° 2, le premier état de ces lithographies ne porte pas de nom d'impri-
meur; le deuxième état porte au bas à droite: <i Lith. de G. Engelmann »; le troisième état
à droite, tantôt en haut, tantôt en bas : 0 Imp. Bertauts, Paris u, et h gauche : « Publié par
l'artiste. » — Le troisième état de notre n" 2 porte en bas à droite : « Imp. Bertauts, R. Ro-
dier, Paris ». (La série des cinq planches atteint généralement le prix de i5 à 25 francs.)
46
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1825
N° 149 : Thésée vainqueur du centaure Euryte
Lithographie. — H. 0^140, L. o™ 170. — Ni signé, ni date. — Vente
de La Combe, 2 février 1 863 : 2 1 francs. —Vente Villot, décembre 1 876 :
10 francs. — Cat. A. Moreau, p. 28.
Cette lithographie fut exécutée par Delacroix en 1825, h son retour de
Londres, d'après le dessin qu'il avait fait au British Muséum d'une des métopes
du Parthénon. Thésée saisit aux cheveux, de la main gauche, le centaure Euryte qu'il vient
de frapper et qui porte la main à sa blessure. C'est par inadvertance que M. Moreau
intitule cette rarissime lithographie : « Thésée domptant le Minotaure.»
N° 150 : Dix médailles antiques
Lithographie. — H,
Vente Parguez, 186
épreuve) : 8 francs.
o'"i8o, L. o™22o. — Ni signé, ni daté. —
I : 5o francs. — Vente Dubois ( la même
— Cat. A. Moreau, p. 38.
La plus importante de ces dix médailles représente une Victoire
allée, debout et en pied. Dans l'espace demeuré libre, malgré la
'i |u\taposition des médailles, Delacroix a dessiné ici un large motif
d ornement, ailleurs une sorte d'oiseau héraldique et auprès de ce
dernier ces mots; a Third lithographie essay (Troisième essai de
lithographie) «qui permet de supposer que ce dessin a été fait après
le voyage à Londres, qui est^de la même année iSaS, sinon à Londres même. — 11 n'y a
qu'un état de cette lithographie, fort rare d'ailleurs, mais dont nous avons vu cependant une
épreuve chez M. Moignon et une autre chez M. Engelmann.
N°' 1(1,152: Deux feuilles de médailles antiques
1° Gravure en bois. — Dix-sept médailles.
^ — H. o"M2o, L. o™i75. — Cat. A. Mo-
^ reau, p. i 34.
2° Gravure en bois. — Trois médailles.
— H. o"'6o, L. o"'9o. — Cat. A. Moreau, p. 134.
La plupart des médailles groupées dans notre n" i figurent
déjà dansles lithographies originales. (Voir n°* i3q à 143). Cette
reproduction porte au bas et au milieu l'inscription suivante :
« Interpré tation de Médailles, pierres gravées en camées antiques, tirées du caljinet du duc de
Blacas. » — Le n» 2 a été publié dans la Gjjette des Beaux-Arts, tome XVI, 1='' janvier 18G4.
En bas sur la médaille de gauche représentant un homme couché, on lit : « M. Deschamps, se».
En définissant le dessin de Prud'hon, Delacroix a donné l'exacte définition de sa propre ma-
nière de dessiner et de peindre : « Prud'hon, dit-il, est peintre d'abord, c'est-à-dire que sur
un champ auquel il donne avant tout la profondeur, il dispose des groupes entourés d'air et de
lumière. 11 s'attaque h la plus grande difficulté de son art, qui est d'obtenir la saillie. Ce qui
caractérise l'antique, c'est l'ampleur savante des formes combinées avec le sentiment de la vie,
c'est la largeur des pians et la grâce de l'ensemble.»
i826
L'ŒUVRE DE DELACROIX
47
Année 1826
1 54 : L'Empereur Justinien composant ses Institutes
1° Toile. • — H. 3"'70, L. 2'"75. — Signé, daté, 1826. — Détruit.
— Exposition universelle de i855. — Cat. A, Moreau, pp. 188 et 209.
2° Aquarelle. — H. o'"22, L. o"'i6. — Vente A. de la Fizelière,
8 novembre 1878. — Appartient à M. A. Robaut.
Le tableau, qui décorait l'un des grands panneaux de la salle des se'anccs de
la section de l'Intérieur, au Conseil d'État, a été brûlé dans l'incendie de
ce palais, en 1871. De toutes les compositions que ce motif a inspirées à Dela-
croix, celle qui se rapproche le plus du tableau est l'aquarelle ayant appartenu à
M. Albert de la Fizelière et que nous reproduisons ici.
N°' 15^, 156, 1^7, 1 58 : Études et variantes du Justinien
1° Croquis plume. —
H. o'"29, L. o'"27. —
N''46 des fac-similés
de M. Alf. Robaut,
avec une ligne auto-
i^raphe.
2° Toile.— H. o">32,
L. o'"24. — Vente
Carrier, 1875, à M. Robaut. — Esquisse très co-
lorée; la draperie du fond est jaune.
3° Toile. — H. o'"55, L. o"^^6. — N° 53 de la Vente posthume: 56o francs au
paysagiste Corot. — Appartient à M. Robaut. — Esquisse; la draperie du fond est
rouge. — Cat. A Moreau, p. 304, 3ii.
4° Toile. — H. o"'29, L. o'"2o. — Appartient à M. Ph. Burty. — Esquisse.
« Tout le Bas-Empire,» aditTh. Gautier,(!est résumé dans la figurede Justinien; aux larges dra-
peries antiques commencent à succéder les brocarts constellés de pierreries, le luxe asiatique de
Constantinople ; quelque chose de subtil et d'efféminé se glisse dans la majesté impériale, »
N° 1 59 : Le docteur Faust
Toile. — H. o'"48, L. o"'40. — Signé. ^ Salon de 1827. — Lithographie par Eug. Dela-
croix (Voir année 1827). — Ventes Hôtel Drouot, 26 février i853 : 680 francs; 22 mars
1869: 7,600 francs. — Cat. A. Moreau, pp. 54, 170, 247.
Il serait superflu de décrire ce tableau dont nous reproduisons plus loin la lithographie ori-
ginale. Il fut exécuté pour l'imprimeur Motte et vendu par celui-ci à l'un des frères Devéria.
48
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1826
N" 1 60 : Le doge Marino Faliero condamné à mort
Toile. — H. i"'45, L. i^M 5. — Salon de 1827. — Expo-
sition universelle de i855. — Gravé à Teau-forte par
L. Flameng dans les dimensions de o'"240 sur o^iSg.
— A fait partie des collections Isaac Péreire et Sir Richard
Wallace. — Cat. A. Moreau, pp. 94, 168, 189.
Le corps du doge Marino Faliero, condamné à mort pour
avoir conspiré contre la République de Venise, gît décapité
au bas de l'escalier du palais ducal. — M. Lassalle-Bordes,
dans les notes qu'il a communiquées à M. Burty. dit : <i Je
voulus savoir quel était celui de ses tableaux auquel il donnait
la préférence. 11 me répondit que celui pour lequel il avait
tou]ours eu un faible était la Décapitation du doge Marino
Faliero à l'escalier des Géants.» Rien de plus vraisemblable.
En effet, Delacroix ne manque jamais h le citer dans ses
lettres de candidature à l'Académie des Beaux-Arts. Delacroix
l'acheva en avril 1826. (Voir la lettre du 21 avril à M. Soulier,
édition Burty. I Après lavoir exposé au Salon de 1827, il l'envoya à Londres. « Tu sauras,
écrit-il encore à son ami Soulier, en mars 1828, que mon tableau de Marino Faliero est à
British Gallery et que les journaux anglais en ont fait des éloges magnifiques.» Cela le
consolait un peu de l'échec de son Sardanapale h Paris, la même année. Vendu primitivement
1 ,Soo francs, le Marino Faliero fut plus tard racheté par lui 3, 000 francs. S'il passait en vente
publique aujourd'hui, ce dernier prix serait décuplé deux ou trois fois.
N° 161 : Même sujet
Papier. — H. o'"35, L. o"'27. — Esquisse du numéro précédent. — Vente F. Villot,
1 1 février i865 : 420 francs.
Il a passé également à la vente posthume quelques études de tête, croquis à la plume sur
papier de sous-main.
N" 162 : Aspasie la Mauresque
Toile. — H. o"'27, L. 0^22. — Non signé. — A appartenu à
M. L. Riesener. — Vente F. Villot, i865: 141 francs. — Ap-
partient à M. Rouan. — Cat. A. Moreau, p. 2? i .
Delacroix a repris par trois fois cet intéressant modèle en cette même
année 1826. L'un des portraits où la Mauresque est représentée de
grandeur nature jusqu'aux genoux, mesure imoo sur o"70. Le second,
dont les dimensions sont de o^So sur o'^ab, la montre avec les cheveux
relevés, enroulés au sommet de la tète et retenus par un peigne de haute
forme. Le troisième, que nous reproduisons, a appartenu à M. Frédéric
Villot, puis à M. Léon Riesener. Le modèle ici est vu de face, la poitrine
largement découverte ; la tète, inclinée à sa droite, couronnée de che-
veux noirs comme du jais et disposés en bandeaux négligés, se détache sur un fond rouge. .
1826
L'ŒUVRE DE DELACROIX
49
N° i6p Portrait du duc de Blacas
•^ Lithographie. — H. o'"i4o, L. o'"i65. — Vente posthume
'premier état) : 8 fr. — Vente Villot (même état): 21 francs. —
/ Gat. A. Moreau, p. 29.
Blacas (Pierre-Louis-Jean-Casimir) de la famille des Blacas d'Aulps
duVar, né en 1770, avait émigré k vingt ans et était revenu servir
^ quelque temps en Vendée sous le drapeau royaliste. Il s'attacha à la
fortune du comte de Lille, Louis XVIII. A la Restauration de
1814, il fut nommé ministre de la maison du roi et pendant son
ministère créa le Musée égyptien du Louvre. Après avoir rempli
diverses ambassades, il suivit le roi Charles X en exil. Grand
amateur des arts, collectionneur d'antiquités, associé libre des
Académies des Inscriptions et des Beaux-Arts; il fut le protecteur
zélé de Champollionle jeune. On voit que le duc de Blacas n'était pas le premier venu.
N° 164 : Un roulier à l'auberge
Lithographie. — H. o^igô, L. o'"i45. — Signé. — Cat. A. Mo-
reau, p. 322.
Le trait carré qui délimite notre reproduction n'existe pas dans l'ori-
ginal. Cet original est signé dans le bas d'un monogramme
formé d'un L majuscule à gauche et d'une croix h droite. Assis en
plein air dans une cour d'auberge, auprès d'une table chargée d'un
pot et d'un verre, le roulier, coitTé d'un bonnet de coton, vêtu d'une
blouse longue et de hautes guêtres, fait le geste d'appeler quelque
servante. Sur une feuille de papier à demi roulée et tombée à terre,
on lit le mot « Passavant. » Derrière lui on voit l'arrière-train d'un
camion chargé et recouvert d'une bâche. — On a pu croire, à en juger
seulement d'après ses grandes compositions, que Delacroix reculait
devant les manifestations de la vie moderne; notre lithographie
prouve au contraire que son génie n'était réfractaire à aucune des formes du réel et de l'actuel.
Il est difficile d'imagmer rien de plus vrai, de plus caractéristique, de plus expressif. A coup
sûr, Charlet, que Delacroix prisait si haut, Charlet n'eût pas fait mieux.
M. le baron de Schwiter a affirmé à M. Robaut qu'il n'a pas l'épreuve le Roulier, dont parle
M. Moreau. C'est sansdoute chez M. Leblond que celui-ci aura vu l'épreuve en question; —
M. Leblond possédait en effet la série complète et presque l'historique de cette planche.
Il avait de ce sujet ;
1° Le dessin, crayon et sépia, signé au bas à gauche : o"20O sur o'"oi4 .
2° Deux épreuves en noir de la lithographie qui en est la copie intégrale avec addition, sur la
bâche de la charrette, des lettres OP (retournéesjN" i,et sur le sol à droite, une lettre de voiture
du roulier, avec le mot « Passavant. « Comme signature il y a au bas, à gauche, un L et à droite
une croix, à droite et au bas seulement un trait carré : o^'igS, o'"i40.
3" Une épreuve coloriée de cette planche, blouse bleue, culotte de peau jaune et raies rouges
sur le bonnet de coton.
Cette épreuve, qui a été rognée fortement, d'un centimètre environ en haut et en bas et d'un
5o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1826
demi-centimètre à droite, ne mesure plus, par suite de cette mutilation, que o°i8osur o"i36.
40 Deux épreuves très intéressantes de cette même planche à l'état inachevé et ne donnant que
la partie supérieure jusqu'à la naissance des jambes.
A la fraîcheur du crayon, qui diffère ici complètement des épreuves précédentes, il est aisé de
voir que Delacroix s'est décidé à la terminer, après qu'on a fait subir a la pierre l'opération
nécessaire, qui consiste à la dépréparer pour aciduler de nouveau après les retouches et ajoutés.
De même qu'au dessin (n" i) on ne voit ni lettres, ni numéro sur la charrette.
La vignette mesure en cet état o'" 142 sur o™i44, et le râteau dépression a écrasé le
^rain du papier sur o^^iSo sur 0™i68.
Enfin sur l'une de ces deux épreuves, Delacroix a esquissé au crayon lithographique, en bas a
gauche, la feuille de papier roulée avec le mot 0 Passavant» écrit h l'envers, comme il se proposait
de le faire sur sa pierre pour l'avoir définitivement h l'endroit sur le tirage.
C'est cette même épreuve que Delacroix a eue sous les yeux pour reprendre sa pierre.
L'épreuve inachevée n" 4 a reçu aussi quelques coups de crayon lithographique sur la figure,
notamment à l'œil gauche et sur la lèvre supérieure.
On ne connaît pas d'autres épreuves que celles indiquées ci-dessus, qui sont par conséquent
de la plus grande rareté.
N° 16^' : Le roulier à la cuisine
(fe\\ Dessin mine de plomb. — H. o"23, L. 025.
M. Huet. — Non catalogué par M. Moreau.
Appartient à
■< On remarque dans ce dessin la solidité et lasimplicité de la compo-
'1 sition. Le roulier, son fouet passé dans le bras droit, la pipe à la
;• bouche et assis à califourchon sur une chaise, écoute le récit que fait
", un homme coiffé d'un haut bonnet et familièrement assis sur un
■1 baquet retourné. Dans le fond une vieille femme prête aussi l'oreille
et sur le devant une jeune fille approche du feu un vase en terre;
- un chien lévrier nonchalamment couché paraît se chauffer. Les
attitudes sont indiquées avec tant de naturel qu'on prend à cette scène le plus vif intérêt.
N°' 166, 167 : Le soir d'une bataille
I Toile. — H. o'"44, L. o'"55. — Signé
1 droite. — Gravé à Teau-forte par Mar-
itial pour le catalogue de la vente La Ro-
; i.heb.:o"'i24 sur o"" 148. — Vente posthume,
. 17 février 1864 : 3, 100 francs. — Ventes
P Demidoff, 1868: 5,800; de La Rocheb.,
fW^^^^^^^l is- ( 00, Hôtel Drouot, 1875 : 2,400. — Cat. A. Moreau,
^•^ -^ ^=^-^^ pp q5^ 283, 3i2 _
2° Sépia. — Etude pour le numéro précédent.
Dans le numéro i , un cuirassier, tête nue, blessé, se soulève entre deux cadavres de chevaux
et interroge du regard le champ de bataille abandonné, éclairé par les dernières lueurs du
soleil couchant. Admirable tableau d'un effet moral saisissant; en outre, merveilleux
morceau de peinture. Le cheval gris à crinière blanche, couché au premier plan, avec une
large blessure au flanc, est un chef-d'œuvre d'exécution brillante, libre, souple, d'une saveur
exquise et d'une adresse incomparable.
N°' i68, 169 : Mort de Sardanapale — Esquisses
1° Toile. — H. o"78, L. o'"gj.
Non signé. — Esquisse du ta-
bleau de 1827. — Appartient à
madame la baronne Rivet. —
^ Gat. A. Moreau, page 170.
? 2° Croquis plume et crayon. —
H. o"'28, L. o"'4o. — Non
signé. — Première pensée du
tableau de 1827. —Vente Saucède, 14 février 1879 :
i3ofr. — Non catalogué par M. Moreau.
En se reportant à l'année 1827, on remarquera les nom-
breuses variantes que le maître a introduites dans la composition détinitive de ce tableau
qui devait être pour lui l'occasion de tant de blessures d'amour-propre.
N° 170
Le comte Palatiano
Toile. — H. o"4i, L. o"'33. — Salon de 1827. — Gravé à la
manière noire par Frédéric Villot, dans les dimensions de o'"2io
sur o'"i4o. — Cat. A. Moreau, pp. 9g, 168, 23 i.
Le modèle est représenté debout dans le costume de Palikare, si cher
à Delacroix. La tête seule au-dessous de la coiffure mesure ©""oSS sur
o™026. On distingue dans le fond deux figures vaguement indiquées. —
M. Villot qui a gravé ce tableau en avait fait aussi une copie de petites
dimensions qui appartient à son fils. Dans la gravure la composition est
retournée, M. Villot ayant tracé son dessin sur le cuivre dans le sens de
l'original. Constamment, au cours de l'année 182J, c'est-à-dire aux ap-
proches du Salon de 1824, où il allait exposer le Massacre de Scio, nous
voyons Eugène Delacroix multiplier les études de costumes grecs. Il
fallait que la fièvre de l'hellénisme l'eût bien profondément atteint, puisque deux ans
après le Massacre, il a conservé la passion pittoresque des vestes brodées et des fustanelles.
N° 171
L'Aveugle de Jéricho
Toile. - — H. o'"87, L. o'"56. — Non signé. — N° 1 1 1 de la vente pos-
thume : 1,400 francs à M. Dauzats. — Vente du marquis du Lau, 5
mai 1869 : 2,o85 francs à M. F. Bischoffsheim. — Cat. A. Moreau, p. 3i6.
Même en ce croquis de très petites dimensions que nous en donnons, l'Aveugle
de Jéricho, qui n'est pourtant qu'une simple étude d'académie, nous apparaît
comme une des plus nobles inventions du maître. La grandeur du style ne
doit rien ici aux conventions d'école; comme toujours chez Delacroix elle
résulte de l'admirable justesse de l'observation et donne la synthèse d'une
expression; dans cette toile, cette expression est celle de la cécité qui se
manifeste dans la douloureuse hésitation de ses pas incertains.
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52
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1826
N° 172 : Jeune Turc caressant un cheval
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Toile. — H. o"'3 i , L. o'"40. — Non signé ni daté. — Salon
de 1827. — Appartient au Musée de la ville de Luxem-
bourg jGrand-duché de Luxembourg^ par legs de M. J.-P.
Pescatore de Paris. — Photographié par Braun. — Cat.
A. Moreau, p. 169.
Malgré l'extrême simplicité du motif, ce tableau est à coup
sûr un des plus charmants que l'étude du cheval ait inspirés
a Eugène Delacroix. L'animal, de noble race, très doux, est
surpris et fixé par l'artiste, non seulement dans l'exquise
beauté de ses formes, dans la naturelle aisance de son mou-
vement, mais aussi dans son intelligente et tendre intimité avec son cavalier habituel.
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N° 17^ : Turc assis
Toile. — H. o'"45o, L. o"'375. — Non signé. — Appartient à
M. P. Tesse. — Non catalogué par M. Moreau.
(I Si vous n'êtes pas assez habile pour faire le croquis d'un homme qui se
jette par la fenêtre, pendant le temps qu'il met à tomber du quatrième
étage sur le sol, vous ne pourrez jamais produire de grandes machines.»
C'est Delacroix qui a écrit cette note sur un de ses carnets et il a bien
prouvé dans l'œuvre que nous reproduisons, son habileté à saisir les
mouvements rapides, car le personnage qu'elle représente n'est déjà plus
assis et n'est pas encore debout. Il s'ajoute à cette pièce un autre intérêt,
on croit que le maître a fait ici le libre portrait du chanteur Baroilhet qui
n'était pas seulement un grand artiste lyrique, mais fut toute sa vie un
amateurpassionné de peinture. Baroilhet, né en i8o5, mourut en 187 1.
N° 1 74 : Nature morte
Toile. — H. o^So, L. i'"oo. — Signé, non daté.
— Salon de 1827. — Exposition d'Alsace-Lorraine
au Palais- Bourbon, en 1874. ■ — Appartient à
M. Ad. Moreau. — Cat. A. Moreau, p. 169.
Ce tableau a été peint à Beffes, en 182Ô, pour le général
de Coètlosquet, dit M. A. Moreau qui le décrit ainsi :
(I Des homards, un faisan doré, un lièvre, un fusil et un
carnier au premier plan ; au fond, un paysage avec des
cavaliers en habit rouge. »
Les natures mortes d'animaux ne sont point nombreuses
dans l'œuvre de Delacroix. Il était cependant singuliè-
rement sensible à leur beauté pittoresque. Après une
visite au Jardin des Plantes, il achète un agenda et
l'étrenne par une description de ce qu'il vient de voir. Ne
pouvant la reproduire ici, nous renvoyons à notre volume Peintres et statuaires romantiques.
1826
L'ŒUVRE DE DELACROIX
53
N° 17) : Odalisque
Toile. — H. 0^24, L. o'"34. — Non signé. — N° 72 de la vente
posthume : 410 fr. à M. Haro. — Non catalogué par M. A. Mo-
reau.
On ne confondra pas cette Odalisque avec celle qui figurait à la vente
posthume sous le n» 69. Cette dernière est l'esquisse du tableau qui a
été lithographie par Debacq (voir année i825|. La figure ici n'est
point drapée, les bras sont relevés et la composition est vide d'accessoires.
N° 176 : Le Christ au Jardin des Oliviers
Toile. — H. 2'"94, L. 3'"62. — Salon de 1827. — Exposi-
tion universelle de i855. — Exposition universelle de 1878,
pavillon de la Ville de Paris. — A l'église Saint- Paul-
Saint-Louis de Paris (rue Saint-Antoine)." — Lithographie
par Hip. Poterlet. — Cat. A. Moreau, pp. 124, 168, 220.
Nous ne saurions sincèrement mettre ce tableau au rang des
autres sujets religieux de Eugène Delacroix. C'est une peinture
opaque, lourde, noire, que l'humidité de l'église a sans doute
rendue plus sombre encore qu'elle ne l'était primitivement.
Cependant l'artiste a longuement et fréquemment cherché l'attitude du Christ agonisant au
Jardin des Oliviers, comme on peut le voir par les nombreuses études que nous reproduisons.
C. Dutilleux avait vingt ans lorsqu'il écrivit en 1827, au sujet de ce tableau: « Je voudrais un
peu plus de majesté dans le Christ, mais les anges sont composés comme par Raphaël.»
Le Christ au Jardin des Oliviers a inspiré des compositions que. malgré leur peu de mérite,
nous mentionnons par excès de scrupule. C'est d'abord une lithographie signée .A.B. (.\uguste
Bouquet), haute de 0^148, large de o'" 193, parue dans le n" i 91 du journal La Caricature, et
représentant « l'Agonie de la Liberté ». Ensuite, il a été fait d'après le même tableau une mau-
vaise lithographie, exécutée dans les dimensions de o"23o sur o"i320,pourun titre de Chemin
de croix édité sur papier de couleur par Basset, rue Saint-Jacques, 64.
N°* 177, 178 : Le Christ au Jardin des Oliviers
1° Aquarelle. — H. o"2o5, L. o"'28o.
— Collections du docteur Baude et
de Alphonse Royer. — Appartient à
M. Charles Narrey.
2° Pastel. — H. o'"25, L. o"'34. —
Appartient à M. Haro.
Un autre pastel du même sujet a été exécuté en 1847 et offert
par Delacroix a madame Roche « en souvenir de ses bontés».
Il la prie < de lui donner une place dans son oratoire » (voir
correspondance, édition Burtyi. Nous le plaçons ici pour
cpuiser le sujet, mais nous aurons soin de le rappeler à
l'année 1847. L envoi d ailleurs ne parvint a destination qu'en i85o.
34
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1826
N°^ 179, 180, 181, 182, 183 : Le Christ au Jardin des Oliviers
?4'?;VL/^
1° Croquis mine de
plomb. — H. o"25,
5 L. o™35. — Lith. en
fac-similé par A. Ro-
baut.
\'ente Paravev
Nourrit, qui lui-même le tenait de Eugène Delacroix
^^f^4:^^=^^ fSepia.-H. 0-095,
icaSÊi^ ■ — . --^ -i^ ^ o'"i90. — Appar-
tient a M Ch Narrey.
^° Toile — H o™25,' L. o™35. — Signé
au bas a droite — Robe rosàtre, draperie
bleue — Appartient à M. Auguste Vac-
quene
4° Aquarelle — H. o'"24o, L. o^iqj. —
Appartient a M. le comte Doria. — Gravé
a 1 eau-forte en mêmes dimensions, par
F. Villot.
L. o'"34. — Signé au bas à droite. —
A appartenu d'abord au chanteur
N° 184 : Tête d'Indienne
Toile. — Dimensions inconnues. — Cat. A. Moreau, p. 169.
Nous ne trouvons trace de cette tète d'étude qu'au livret du Salon de 1827 et dans le catalogue
de M. A. Moreau.
N"" 18) : Le Tasse en prison
Sépia. — H. o'"2oo, L.o"'i65.— Non signé. — Appartientà M. Cho-
quer.— Non catalogué par M. Moreau.
On voit avec quelle persistance Delacroix revient à ce sujet qui l'avait si
douloureusement impressionné dans ses lectures de jeunesse. J ai déjà cité
un fragment d'une lettre à ^L Pierret (septembre 1819) où il exprime son
émotion avec tant de véhémence. Voici la fin de ce passage sur le Tasse:
«On pleure sur lui.... On s'agite sur sa chaise en lisant cette vie; les
4, yeux deviennent menaçants, les dents se serrent de colère. Un de mes
regrets est de n'avoir p'u lire la belle élégie de lord Byron ; je dis belle
parce qu'il a l'âme trop brûlante et que le sujet lui convient trop bien pour
qu'il ne l'ait pas saisie dans le bon sens. Je n'ai pu en apercevoir que quel-
Dis-moi ce que tu en penses et quel effet elle t'a produit.» Delacroix était à la
rsqu'il écrivit ce qui précède et il ne s'y amusait guère, car il dit encore à son ami
ques traits.
campagne ' .
Pierret : » Je ne suis vraiment heureux ici que lorsque je lis.
lorsq
1826
L'ŒUVRE DE DELACROIX
55
N° 186 : Tête de jeune fille
Croquis à la plume. — H.
Appartient à M. Alf. Robaut.
'Mo, L. O^OQ. -
Non catalogué
- Non signé. —
par M. Moreau.
fait
insu
C'est là un de ces vifs croquis où Delacroix en quelques traits de plume
,\, exprimait la synthèse d'un visage, d'un personnage, d'une époque. En le
I voyant on se rappellera la belle pensée recueillie dans ses agendas par
'■ M. Piron et publiée par lui : « Qui dit un art dit une poésie. Il n'y a pas
d'art sans but poétique... Devant la nature elle-même, c'est notre
imagination qui fait le tableau : nous ne voyons ni les brins d'herbe
dans un paysage, ni les accidents de la peau dans un joli visage. Notre
œil dans l'heureuse impuissance d'apercevoir ces infimes détails ne
percevoir à notre esprit que ce qu'il faut qu'il perçoive ; ce dernier fait encore à notre
un travail particulier... sa jouissance dépend de sa disposition présente. »
N° 187 : Cheval en liberté
Aquarelle. — H. o"'i5, L. o"
Non catalogué par M. Moreau.
3. — Siané au bas à droite. —
L'énergie du mouvement et l'ampleur de la forme font songer à
Rubens dont Delacroix disait : « J'aime son emphase, j'aime ses formes
outrées et lâchées. Je les adore de tout mon mépris pour les sucrées et
les poupées qui se pâment aux peintures à la mode et à la musique de
M. Verdi J'ai fait quelques croquis d'après les chasses de Rubens;
,j^-- -^:--^^. il y a autant à apprendre dans ces compositions, dans ces formes
;^- „-{^.;: :^ boursouflées que dans des imitations exactes Il y a beaucoup d'aca-
î^^^SjB-aJ démique dans Rubens, surtout dans son ombre systématiquement peu
empâtée et marquant sur le bord. Titien est plus simple sous ce rapport et surtout
Murillo.... Rubens à travers ses couleurs crues et ses formes, arrive à un idéal des plus puis-
sants. La force, la véhémence, l'éclat le dispensent de la grâce et du charme. »
N""" 188, 189 : Portraits du baron Schwiter
1° Lithographie. — H. o™22o, L. o'"i95. — Signé
au bas à gauche. — Dans le fond, à droite : ^ÈT'*
XXL — Ventes Parguez, 1861 : 10 francs; De
La Combe, i863 : 8 francs; Dubois, 1866 : 8 fr.
Vente posthume, 1864, sur chine : 6 francs. —
Cat. A. Moreau, p. 28.
2'' Dessin à la plume. — H. o™i8, L. o"M6. —
Photolithographié par Lefman (cinq épreuves). —
Appartient à M. Schwiter.
Delacroix, écrivant en i832 à M. Villot, lui parle de M. Schwiter: « Pierret
n est pas ici , il est parti ex abrupto pour suivre Schwiter à Nancy et de là à Strasbourg, oîi il
\a voir du gothique et des oncles qui lui donneront à dîner et à coucher.') (Lettres, édit. Burty.)
56
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1826
N" 190 : Portrait du baron Schwiter
Toile. — H. 2">3i, L. i"'5o. — Signé au
bas, à gauche. — Refusé au Salon de 1827. —
Cat. A. Moreau, p. 23 1.
Nous n'avons rien à ajouter à ce que nous avons
de|à dit de la lointaine et longue amitié qui unissait
Delacroix et M. le baron Schwiter. — M. Moreau
nous fournit un détail intéressant sur l'exécution
du grand portrait en pied. Le fond de paysage
lurait été peint en partie par Paul Huet. — Ce
tableau ayant été refusé au Salon de 1827, Dela-
croix le reprit un peu plus tard et le termina définitivement en i83o.
Ce porti lit qui était connu h l'atelier sous le sobriquet : la boîte à
violon est eertainement, de tous les portraits de M. Schwiter, le plus
ressembhnt et c est ce qui nous a induit à donner le détail de la tète
1 dans des proportions qui permettent d'en apprécier les traits.
^ Dans une lettre de 1S25 à M. Pierret, je trouve le passage suivant :
< M Louis Schwiter a qui )e prends la liberté de me rappeler, sera assez bon pour me faire
savoir par ton moyen et en l'informant de la délicieuse M"» Sophia, dans laquelle des
Prince's street habite la nymphe pour laquelle j'ai un anneau. Ily a à Londres une dizaine de
Prince's street, et Londres est fort grand. »
N° 191 : Proteus et Julia déguisée en page
Sépia. — H. o'"22, L. o'"i6. — Non signé. — Appartenait à
M. Leblond. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est la scène iv du quatrième acte des Deux- gentilshommes de Vérone où la
douce Julia, l'amante abandonnée de Proteus, après avoir offert ses ser-
vices à celui-ci, accepte de porter un message d'amour à la chaste Sylvia.
PROTEUS : Dis à ma dame que je lui rappelle la promesse qu'elle m'a
faite de son divin portrait. Ton message achevé, reviens dans ma chambre
où tu me trouveras triste et solitaire. (Il sort.)
JULIA : Combien y a-t-il de femmes qui voudraient faire un pareil mes-
sage ? Hélas, pauvre Proteus ! tu as pris un renard pour gardien de tes brebis. Hélas ! pauvre
fou! pourquoi est-ce que je le plains, lui qui me méprise de tout son cœur.''
N" 192 : Croquis divers
Lithographie. — H. o"'2io, L. o"'340. — Vente posthume :
9 fr. — Ventes Dubois, 20 fr.; Villot : 22 fr. ; Parguez : 5o fr. —
Cat. A. Moreau, p. 2g.
C'est une pierre d'essais, car les motifs y sont disposés dans l'ordre le
plus arbitraire; le Turc et l'homme d'armes dans un sens, les ruines
romantiques en sens opposé, et dans une autre direction deux por-
traits, ceux de deux amis du maître, Frédéric Soulier et Horace
Raisson. Nous ne connaissons pas d'autre portrait de ce dernier.
1827
L'ŒUVRE DE DELACROIX
57
N° 193 : Le Message
Lithographie. — Dimension de la
pierre: H. o"26o, L. o"^35o. — Vente
posthume, 17 francs. — Vente Villot,
18-5 : 3o fr. à la Bibliothèque na-
tionale. — Cat. A. Moreau, p. 29.
Cette lithographie a été faite par Dela-
croix d'après une aquarelle de Boning-
ton. Nous donnons par surcroît le motif
principal dans des dimensions plus étendues et propres à le rendre plus lisible.
N° 194 : La Fuite du contrebandier
Lithographie. — Trois états : premier et deuxième: H. o'"io2
L. o^igo; troisième: H. o"'OQO, L.o^iSo. — Signé: E. Lacroix.
— Vente posthume (premier état) : 10 fr. — Vente De La
Combe: 27 fr. — Ventes Langlais et Dubois (deuxième état) :
2 fr. — Cat. A. Moreau, p. 42.
Cette lithographie accompagnait une Ballade de Bétourné, musique,
de Th. Labarre, comme l'indique la lettre du troisième état avec la
mention: 0 Prix : 2 fr., à Paris, chez Troupenas, éditeur du répertoire des opéras français,
rue Saint-Marc, 23.» Le premier état sans aucune lettre; le second avec l'indication en bas,
à droite : « Lith.de Engelmann, rue du Faubourg-Montmartre, n" 6. 0
Année 1827
N"® 195, 196: Assassinat de Tévêque de Liège
Esquisses et variantes du tableau
de 1829, exposé en i83i.
i" Toile. — H. o'"27, L. o"'39.
— Lithographie en sens inverse,
par Mouilleron, notre vignette le
reproduit de ce même côté : o'" 1 5 3
sur o™2i 3. Eau-forte parCh.Cour-
try: o™oqo sur o'"i3o pour la ga-
lerie Durand-Ruel. — Cat. 'A. Moreau; p. ii3.
2° Toile. — H. o"'59, L. o"'72. — N° 55 de la Vente
posthume : 2,1 25 francs. — A appartenu à M. Rœclerer, du Havre, et à M. Binant.
58
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1827
N°
197
Tarn O'Shanter
Toile. — H. o"'26, L. o™3o. — Signé en bas à droite. — Salon de i83i. — Ventes
B., i855 : 8o5 fr.; marquis de L., i865 : 2,3oo fr.; Khalil-bey, 1868 : 3,-50 fr. —
Cat. A. Moreau, p. 248.
Nous avons reproduit l'esquisse de ce tableau à l'année 1S25. Delacroix a dû exécuter au
moins deux fois ce même sujet, ainsi que le dit M. Moreau; en 1S25, d'abord, pour madame
Dalton, et ensuite pour un autre ami, en 1S27, ainsi que le constate une lettre inédite qui
nous est passée sous les yeux : « Mon cher ami, je vous envoie... C'est une ballade écossaise
très célèbre de Burns, le poète populaire du pays. Tarn O'Shanter est un fermier qui passe la
nuit près du sabbat des sorciers. Ceux-ci se mettent à ses trousses, et en tête une jeune sor-
cière qui prend la queue de son cheval jusqu'à ce que ladite queue lui reste à la main. J'ai
omis cet épisode. Ne le vernissez que dans quelque temps. »
N° 198 : La Mort de Sardanapale
Toile. — H. 3™95, L. 4™95. — Salon de 1827.
— Gravé à Teau-fone par F. Régamey : o^gSo
sur o"Mog; par Greux : o™ioo sur o'"i26. — Li-
thographie par Sirouy : o"'427 sur o™537. —
Bois du Monde illustré : o'"223 sur o™287. —
Voir Tesquisse à Tannée 1826 et la réduction à
Tannée 1844. — ^^^- ^- Moreau, p. 169.
En février et mars 1828, Delacroix écrit à son ami
Soulier, le 6 février 1828 : <i J'ai effectivement fini
mon Massacre n" 2 (la Mort de Sardanapale). Mais
]'ai eu à subir des tribulations assez nombreuses de
MM. les très ânes membres du Jury. J'en aurai long
à te dire sur ce chapitre . Je continue ma lettre à deux
jours d'intervalle. C'est ce matin qu'on a rouvert le
Salon. Ma croûte est placée le mieux du monde. De sorte que, succès ou non succès, ce sera
à moi qu'il faudra m'en prendre. J'ai éprouvé, en arrivant là-devant, un effet abominable, et
je ne souhaite pas que l'excellent public ait mes yeux pour juger mon chef-d'œuvre. C'est
malheureux que je tombe à t'écrire un jour où je suis aussi vexé. Mais ce sera pour toi la
peine de m'avoir écrit si peu de chose. Quel exécrable métier que de faire consister son
bonheur dans des choses de pur amour-propre! Voilà six mois de travail qui aboutissent à
me faire passer la plus foutue des journées. Du reste, je suis habitué à ces choses-là, et ne
t'alarme pas trop pour l'amour de moi. C'est peut-être, comme toutes les autres fois où
le premier aspect de ma sacrée peinture accrochée à côté de celle des autres me jugule com-
plètement. Cela me fait l'effet d'une première représentation où tout le monde sifflerait. »
1 1 mars 1 828 : 0 Je ne fais pas encore grand chose, je suis ennuyé de tout ce Salon. Ils fini-
ront par me persuader que j'ai fait un véritable fiasco. Cependant, je n'en suis pas tout à fait
convaincu. Les uns disent que c'est une chute complète; que la <c Mort de Sardanapale » est
celle des romantiques, puisque romantiques il y a; les autres comme ça que je suis inganno,
mais qu'ils aimeraient mieux se tromper ainsi que d'avoir raison comme mille autres qui ont
raison si on veut et qui sont damnables au nom de Tàme et de l'imagination. Donc, je dis
que ce sont tous des imbéciles, que ce tableau a des qualités et des défauts, et que s'il y a
des choses que je désirerais mieux, il y en a pas mal d'autres que je m'estime heureux d'avoir
faites et que je leur souhaite... Tout cela fait pitié et ne mérite pas qu'on s'y arrête. »
1827
L'ŒUVRE DE DELACROIX
59
N° 199 : Le Tasse dans la maison des fous
Toile. — H. o"'6o, L. o'"5o. — Lithographie par Mouilleron
dans les dimensions de o™i8o sur o™i53, et par un anonyme
dans les dimensions de 0"'4o sur o™3o. — Signé au milieu en
bas. — Refusé au Salon de iSSg. — Appartient à M. Bis-
choffsheim. — Cat. A. Moreau, p. 118.
Cette nouvelle variante du Tasse n'est pas la moins émouvante
de toutes les compositions que ce sujet a inspirées à Delacroix et
que nous avons déjà rencontrées dans son œuvre (voir année 1824^
Ce que Th. Gautier a dit de l'une d'elles s'applique également à
celle-ci : « Le malheureux poète est assis, triste et songeur, au
milieu d'une bande de fous; il n'écoute pas leurs cris insensés, il ne
regarde pas leurs gestes extravagants, mais il s'interroge lui-même
avec effroi. Serait-il fou, en effet? Question terrible et qu'il n'ose
résoudre. » — Ici, le poète est seul dans sa chambre, l'aliéné à barbe rousse a disparu, mais
n d'autres grimacent et gambadent au fond, secouant les grelots de leur démence aux oreilles
du poète qui bientôt sera fou comme eux. » On ne peut rien imaginer de plus saisissant.
N° 200 : Épisode de la guerre en Grèce
Toile. — H. o'"65, L. o'"8o. — Vente Hôtel Drouot, 20 avril
1874 : 25,3oo fr. — Gravé à Teau-forte par Bouruet : o"'26 sur
©■"Sa. — Cat. A. Moreau, p. 8 1 .
Le prix de ce tableau en 1874 en dit assez toute l'importance. Voir
la variante à l'année i856. La peinture de 1827 est entièrement
exécutée au vernis copal, nous dit M. Moreau, et le cavalier princi-
pal porte le costume de Palikare du comte Palatiano, dont Eugène
Delacroix avait fait le portrait en pied reproduit par nous à l'année
1826. — La gravure de M. Bouruet est exécutée en sens contraire,
telle que nous la donnons ici. Comme elle ne porte ni lettre ni signature, elle fut indiquée au
catalogue de la Vente posthume comme pièce originale, sous le n° 686, avec le titre de :
« Cavalier turc poursuivant des Grecs sur un champ de bataille. »
N° 201 : Mort de Hassan
Toile. — H. o"'32, L. o'"40. — Signé en bas à gauche. —
Ventes Didier, 3 mai 1849:500 fr.; A. H., 29 mars 1854 :
55o fr.; X., 8 mai 1861 : gSo fr.; Barthélehiy, 14 décem-
bre 1871 : 5,600 fr.; Ad. Liebermann, 8 mai 1876 : 7,100 fr.;
i Beurnonville, avril 1880 : 7,900 fr. — Appartient au baron
^ de Beurnonville. — Cat. A. Moreau, p. 244.
Ce motif, emprunté au Giaouràp lord Byron, est aussi connu sous
le titre de « Grec mort » et de 0 Épisode de la guerre de l'Inde'pen-
dance 1). L'attitude de la mort violente est saisissante de vérité et
contraste en même temps que le feu sinistre de l'incendie avec l'éclat joyeux du costume.
6o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1827
N" 202 : Combat du Giaour et du Pacha
Toile. — H. o'"58, L. o"'72. — Salon de 1827. — Signé en bas
à gauche. — Gravé par Bouruet-Aubertot. — A appartenu à
M. Alexandre Dumas père et appartient aujourd'hui à M. Mah-
1er. — Gat. A. Moreau, pp. 82, i6q.
Le vrai titre, celui du Salon de 1827, est 0 Scène de la guerre actuelle
des Turcs et des Grecs ». Mais nous lui laissons le titre romantique
consacré par Théophile Gautier dans les Beju.x--Arts en Europe : « Il
existe un autre Combat du Giaour et du Pacha, que nous nous
souvenons d'avoir vu jadis chez Alexandre Dumas, et que nous au-
rions bien voulu retrouver h l'Exposition universelle de i855. Nous regrettons que
M. Delacroix n'ait pu se procurer le chef-d'œuvre d'après lequel Poterlet avait esquissé une
magnifique pochade, aussi chaude de ton que l'original. » • — Cette copie, retouchée par le
maître, appartenait à Th. Gautier et fut achetée à la ventede ce dernier par madame Alice Ozy.
N" 203 : Combat du Giaour et du Pacha
Lithographie. — H. o^Sô, L. o'"25. — Premier état. Ventes
Parguez, 1861 : 3y fr.; posthume, 1864 : 3o fr.; Gihaut, iBjS :
3o fr.;Burty, 1874: 82 fr.; Villot, 1875 : 40 fr. — Deuxièmeétat.
Ventes De La Gombe, t863 : i5 fr.; Dubois, 1866 : 16 fr.; Lan-
glais, 186S : I I fr. 5o ; Soleil, 1872 : 3i fr.; Sensier, 1877 : 10 fr.
— Gat. A. Moreau, p. 3o.
Nous reproduisons le premier état. Dans le second, les croquis de la
marge inférieure ont disparu. En outre, les demi-teintes existent à peine
et les blancs sont durs, autrement dit, le modelé du premier état est
plus velouté. Les croquis de la marge représentent une tête de lévrier
et une étude pour la figure du pacha. — Les dimensions du deuxième
état sont : H. on'So, L. o°'24.
Cette composition, qui diflère absolument de la précédente, n'a rien
de commun non plus avec le tableau exposé au Salon de i835, rien que la grandeur tragique
du combat.
N" 204 : Porte-Étendard
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Aquarelle gouachée. — Format in- 12. — Vente Villot, 1 865 : 2iofr.
— Appartient à M. Villot fils. — Gat. A. Moreau, p. 295.
Le cheval gris pommelé est lancé à cette grande allure de galop qu'affec-
tionnait Velazquez en ses portraits de l'infant. Le cavalier e'st coiffé d'un
casque couronné par un cimier en forme d'aigle. — Peut-être trouvera-t-on
la tête du cheval un peu petite; mais il est clair que Delacroix n'a cherché là
que le mouvement, et que l'aquarelle a été faite seulement pour la belle ligne
de l'élan, prise par le dessous du ventre, ligne qu'il a tant cherchée, dont
nous trouvons le premier effort dans le Waverley de 1S22, et qu'il a depuis
si magnifiquement réalisée dans ce Choc de cavaliers maures refusé au Salon de 1834.
N°' 205, 206 : La Grèce expirant sur les ruines de Missolonghi
i" Toile. — H. 2"m3, L. i'"42. — Au musée de Bordeaux. —
Lithographie par Alf. Robaut dans les dimensions de o""! 12 sur
o™o75. — Cat. A. Moreau, p. 199.
2° Esquisse peinte. — H. 0^41; L. o"'28. — Appartient à M. Alf.
Robaut.
La Grèce, représentée par une jeune femme en costume hellène, est
debout parmi les ruines. Elle va succomber et montre ses mains
désarmées. Derrière elle, un soldat turc plante un étendard sur les dé-
combres de la cité.
Ce tableau a été acheté par la ville de Bordeaux à Eugène Delacroix en
i853, à l'exposition de la Société des Amis des Arts; il fut payé 2,5oo fr.
D'une lettre à Théophile Silvestre du 3i décembre i858, il résulte que le maître l'exposa à
Londres avec le Marina Faliero, deux ou trois ans après son voyage en Angleterre.
N° 207 : Jeune femme au grand chapeau
Toile. — H. o"'26, L. o'"2i. — Appartient au statuaire Christophe-
— Non catalogué par M. Moreau.
Cette petite toile n'est pour ainsi dire qu'une ébauche, mais elle est mar-
quée au sceau de la plus exquise distinction et comme couleur et comme
composition. 11 semble qu'on retrouve là le souvenir d'une femme que
Delacroix a aimée et qu'il se serait plu à costumer dans le goût des por-
traits de Lawrence qu'il avait vus en Angleterre. Trente ans plus tard (i 858),
il écrit à Théophile Silvestre : « Peut-être trouverais-je dans Lawrence une
exagération de moyens d'effet qui sentent un peu trop l'école de Rey-
nolds; mais sa prodigieuse finesse de dessin, la vie qu'il donne a ses
emmes, qui ont 1 air de vous parler, lui donnent, comme peintre de portraits, une sorte de
supériorité sur Van-Dyck lui-même, dont les admirables figures posent tranquillement.
L'éclat des yeux, les bouches entr'ouvertes sont rendus admirablement par Lawrence. »
N"" 208 : Cavalier
Aquarelle gouachée. — H. o"'[47, L. o'"i 16. — Gravé à l'eau-forte
de mêmes dimensions par M. Villot. — Ventes Villot, i865 : 3o5 fr.;
Diaz, 1877 : 800 fr. — Cat. A. Moreau, p. 295.
L'eau-forte de M. Villot a été exécutée en 1S47; c'est d'après elle que nous
reproduisons ici ce cavalier, qui a la fière tournure du Gattamelata. Cepen-
dant nous devons dire que le graveur en a agi très librement avec le modèle,
où le fond est occupé par des montagnes et est tenu dans une gamme de
tons très clairs ainsi que le terrain. Il ne subsiste ici de l'œuvre originale
que la grande allure de l'ensemble, comparable à celle des plus belles
statues équestres de la renaissance italienne, comme le Gattamelata que
nous rappelions tout à l'heure, ou ce Colleone,dont Bonington a laissé une si brillante aqua-
relle bien connue des familiers du Louvre.
62
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1827
N° 209 : Deux hommes d'armes en costume Louis XII
Aquarelle. — Vente Villot, i865 : 200 fr. — Cat. A. Moreau, p. 295.
N° 210 : La Prière
Aquarelle, — Vente Du Sommerard, 1843 : 36 fr. — Vente Binant, 1844 : 21 fr.
— Cat. A. Moreau, p. 287.
N° 21 1 : Jane Shore
Aquarelle. — H. o"'27, L. o™32. — Signé, daté « 1827». — Lithographie en 1828. —
Vente Villot, t865 : i55 fr. à M. Lecesne. — Cat. A. Moreau, pp. 42, 286.
N° 212 : Seigneur vénitien assis
à Venise une de C'
Sépia. — H. o^igS, L. o'"i67. — Gravé à Peau-forte par F. Villot
dans les mêmes dimensions. — Cat. A. Moreau, p. 109.
L'eau-forte, qui date de 1845, et dont il existe deux états, n'a jamais été
terminée. La planche a été adjugée à la vente Villot à M. Maheu, qui en
a fait tirer quelques épreuves. — Le premier état est d'eau-forte pure et
n'a été tiré qu'à trois épreuves. Le second état porte des retouches au burin
dans les vêtements du personnage debout. — Ce personnage, que M. Mo-
reau présente comme un page, nous fait l'effet d'une femme, à en juger par
l'ampleur des vêtements et par les bras à demi nus. Delacroix a transporté
es scènes de maison galante qui furent chères aux HoUandais.
N°' 21 j, 214, 21^ : Portraits de la famille Pierret
-—-ui 1" Madame Pierret mère. —
Dessin à la mine de plomb.
— H. o"'25, L. o'"2i. —
Non signé, mais daté ainsi :
a 23 avril, vendredi saint,
1827. » — Cat. A. Moreau.
«;.->- 1 V- p. 232.
-^ir/i 'iWwMm^mi 0° Mademoiselle Victoire
Pierret. — Dessin à la mine
de plomb. — H. 0^24, L. o"'22. — Cat. A. Moreau, p. 232.
3° Mademoiselle Juliette Pierret. — Toile. — H. o'"39, L. o'"3i. - Non signé. —
Appartient à madame veuve Pierret. — Cat. A. Moreau, p. 232.
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1827
L'ŒUVRE DE DELACROIX
63
N° 216 : Portrait de Bonington
Delacroix
Dessin à l'estompe. — H. o'"25, L. o'"22. — Appartient à M. P. Le-
grand, gendre de M. Bornot. — Non catalogué par M. Moreau.
Richard-Parkes Bonington, né au village d'Arnald, près de Nottingham
(Angleterre), le i5 octobre 1801, mourut à Londres le 23 septembre 1828.
Venu en France à l'âge de quinze ans, il étudia à l'école des Beaux-Arts et
dans l'atelier de Gros, oîi il rencontra une partie des peintres romantiques.
La France avait le droit de revendiquer la gloire de son talent. C'est pour-
quoi le nom de l'artiste anglais figure avec honneur dans le livret de
l'Ecole française au Louvre. Ce dessin, exécuté h la lumière de la lampe,
est d'un effet très heureux. — Dans sa lettre de i85S à Th. Silvestre,
parle avec sympathie de son camarade Bonington, mort dans sa fleur.
N"* 217, 218
Portraits de MM. Leblond et Guillemardet
1° Dessin a la mine de plomb. — H. ^"ly, L. o"'i2.
— Appartenait à madame Leblond. — Cat. A. Mo-
reau, p. 233.
2" Dessin à la mine de plomb. — H. o'^ig, L. o"M5.
— Appartient à madame Pierret. — Cat. A. Moreau,
p. 232.
C'est par erreur que M. Moreau donne comme exécuté
<( jusqu'aux genoux » le portrait de M. Leblond, qui
n'est absolument qu'un buste. Si Delacroix n'admettait
qu'un très petit nombre damis dans son intimité, il leur était profondément attaché, comme
le prouvent les portraits si fréquents qu'il en a laissés.
N° 219 : L'Alchimiste
Sépia. — Vente Villot, i865 : 100 fr. à M. Lecesne. — Cat. A. Moreau, p. 296.
N° 220 ; Tête de vieillard
Croquis à la plume. — H. o"'oq3, L. o"'075. — Gravé à l'eau-forte par
F. Villot dans les mêmes dimensions. — Cat. A. Moreau, p. 1 10.
Nous conservons la désignation donnée par M. Moreau, sans trouver que
cette tête soit absolument celle d'un vieillard. Nous y voyons plutôt une
sorte de type à la Baudelaire. L'homme est vu de face; la tète inclinée à sa
droite montre un front dégarni ; le visage s'encadre dans une longue cheve-
lure flottant sur les épaules. La gravure ne porte pas le trait carré de notre
vignette. Elle est signée en bas à gauche des initiales E. D.; on lit à droite :
<i F. V., se. 1847. » Le modèle, en quelques traits, a une allure sculpturale.
64
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1827
N°^ 22 1, 222 : Frontispice pour « Les Tournois du roi René »
I Lithographie à la plume. —
H. o^SoS, L. o'^SgS. — Hauteur des
hi^ures, o'"i8o.
2° Aquarelle d'un autre projet sur le
même motif. — • H. 0^17, L. o'"2i.
Cnt. A. Moreau, p. 41.
Seules, les deux figures debout tenant un
ecu armorié dans le n" i sont de Eugène
Delacroix. C'est un ornemaniste nommé
Dubois qui a dessine le rideau décoratif au bas duquel on lit entre les
deux personnages : « Publié par MM. Champollion, Dubois et
Ch. Motte — M DCCC XXVU — Chez Ch. Motte, lithographe de
S. A. R. Monseigneur le duc d'Orléans et de S. A. R. Monseigneur le duc de Chartres, R. des
Marais, i3, Paris. » — Toutes les planches du volume sont le plus souvent coloriées.
N°'22), 224: Méphistophélès dans les airs
1° Toile. ^ — H. o"'48, L. o'"4o. — Salon de 1827. — Cat. A. Moreau, pp. 54, 70,147.
2° Aquarelle sur papier bleu. — Cat. A. Moreau, p. 286.
Dans ces deux ouvrages, Delacroix, reprenant le motif de sa lithographie, a introduit d'in-
signifiantes variantes dans l'aquarelle. (Voir plus loin la suite du Faiisl.)
W
22^ : Première apparition de Méphisto à Faust
H.
'i65, L.
Aquarelle. — Variante du n° 234.
Vente posthume.
0 M. Delacroix, dit Gœthe dans ses conversations avec Ecliermann,
est un grand talent qui a, dans « Faust », précisément trouvé son vrai
aliment. Les Français lui reprochent trop de rudesse sauvage, mais
ici elle est parfaitement à sa place... — De tels dessins, reprend Ec-
kermann, contribuent énormément à une intelligence plus complète
du poème. — C'est certain, dit Gœthe, car l'imagination plus par-
faite d'un tel artiste nous force à nous représenter les situations
comme il se les est représentées à lui-même. Et s'il me faut avouer que M. Delacroix a
surpassé les tableaux que je m'étais faits de scènes écrites par moi-même, à plus forte raison
les lecteurs trouveront-ils toutes ces compositions pleines de vie et allant bien au -delà des
images qu'ils se sont créées. » {Conversations, traduction E. Delerot.)
N" 226 : Méphisto apparaissant à Faust
Toile. — H. o'"48, L. o"'4o. — Salon de 1827. — Cat. A. Moreau, p. 170.
1827
L'ŒUVRE DE DELACROIX
65
N° 227 : Faust, Méphisto et Marguerite
Croquis divers.
Ailleurs, sur le même sujet. Gœthe dit encore, en parlant de la traduc-
tion in-folio de Faust : «...Si mon « Faust» a eu pourtant un succès dont
je vois la preuve en ce moment même dans ce luxe de typographie,
c'est qu'il renferme, fixé là pour toujours, le tableau du développement
d'un esprit pareil au nôtre, qui a souffert de toutes les peines qui tour-
mentent l'humanité, qui a éprouvé toutes les agitations qui la troublent,
qui a partagé toutes ses haini;s, qui a joui de toutes les félicités auxquelles
il aspire... 11 est bien curieux que l'esprit d'un artiste ait trouvé dans
cette œuvre obscure tant de plaisir et se soit si bien assimilé tout ce
qu'elle renfermait de sombre dans sa conception première, qu'il a pu
tracer les principales scènes avec un crayon aussi tourmenté que la destinée du héros. M. De-
lacroix est un peintre d'un incontestable talent, mais il est accueilli comme le sont souvent
les jeunes gens par nous autres vieillards. Les connaisseurs et les amis de l'art ne savent pas
trop, à Paris, ce qu'il faut dire de lui, car il est impossible de ne pas lui reconnaître des
qualités, et, cependant, on ne peut louer sa manière désordonnée. » Il sied vraiment h
Gœthe, dont le cerveau a conçu le tohu-bohu apocalyptique d'une œuvre comme Le second
Faust, de blâmer ce qu'il appelle « la manière désordonnée » de Delacroix.
N° 228 : Marguerite en prison
Jamais
Aquarelle. — Signée au bas à droite. — H. o'"25, L. o^iS. — 'Vente
Bourlon de Sarty, i865 : 100 fr. — Appartient à M. Alf. Robaut. —
Cat. A. Moreau, p. 286.
C'est là une des nombreuses pensées pittoresques que ce motif inspira à
Eugène Delacroix, alors tout occupé de ses lithographies du Faust. Le maître,
avec une parfaite justesse d'observation, ou bien avec une intuition de son
génie, a rendu ici, d'une façon poignante, le doux égarement d'esprit de
l'amante abandonnée. — « Je suis pourtant si jeune encore; si jeune! et déjà
mourir! J'étais belle aussi, et ce fut ma perte. Le bien-aimé était près de
moi, maintenant il est loin, ma couronne est arrachée, les fleurs dispersées...
e ne serai plus joyeuse. Ils chantent des chansons sur moi. C'est méchant de leur part.»
N° 229 : Faust et Méphisto galopant dans la nuit du Sabbat
Croquis. — Variante du n° 245.
■^ri^ Ici, les cavaliers se dirigent vers la droite du spectateur. On remarquera
^liS, le beau mouvement du cheval de Méphistophélès et des quatre jambes
rassemblées comme pour franchir un obstacle. C'est, à coup sûr, le mou-
vement le plus hardi que l'on connaisse dans toute l'hippographie artis-
tique. — Il importe d'ajouter que cette audace a été récemment justifiée
par les expériences de photographie instantanée faites en Amérique et
reproduisant les mouvements successifs du cheval à toutes les allures. — Les croquis de
toutes sortes que Delacroix a faits pour cette composition sont innombrables. Nous repro-
duisons ici l'un des plus caractéristiques.
66
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1827
FAUST. SUITE DE DIX-NEUF COMPOSITIONS
Lithographies. — Format in-folio. — Ventes Piron, 21 avril i865 (en un volume
relié) : 255 fr.; Dubois (épreuves du premier état, plusieurs avec croquis sur les
marges, mais sans le portrait de Gœthe) : 425 fr.; Vente posthume (épreuves sur pa-
piers de tons différents) : 400 fr.
Le titre de l'ouvrage porte : « Faust, tragédie de Gœthe, traduite en français par M. Albert
Stapfer, ornée d'un portrait de l'auteur et de dix-sept dessins composés d'après les principales
scènes de l'ouvrage et exécutés sur pierre par M. Eugène Delacroix. A Paris, chez Ch. Motte,
éditeur, rue des Marais, i3, et chez Sautelet, libraire, place de la Bourse, 1828.» Au centre
est un médaillon de Gœthe, par Porret, grave sur bois.
N°^ 230, 231 : Couverture de l'ouvrage
1" Lithographie. — H. o'"5o, L. o"'37. —
Titre frontispice.
2° Lithographie. — H. o^ig, L. o"'i6. —
Phototypographié dans le journal l'Art, numéro
du 2 janvier 1881, — verso de la couverture.
'^^^if-'^ "'""*' M('i^> "''^ï'i^'^'ivj^'' Ensemble. — Ventes Burty, 1874 : i 35 fr.;Villoi,
CTiZ-ll_i^^àg& ""^L^^S^:) 1875 : 5i fr. — Cat. A. Moreau. p. 5 i .
Ces deux dessins passent pour être de Achille De-
véria. Nous les reproduisons, convaincu que Delacroix y a collaboré
au moins de ses conseils.
Premier état. — Au recto : n A Paris, chez Ch. Motte, rue des
Marais, i3. — Sautelet, place de la Bourse. »
Deuxième état. — Au verso à gauche : « Lith. Vayron. « Au milieu :
(1 A Paris, chez Danlos, quai Malaquais, n° i. » Ce nom de Vayron
nous est inconnu.
Nous devons signaler un autre étatsans nom d'imprimeur, non décrit par M. Moreau.
L'addition de ces deux dessins porte le nombre total h dix-neuf.
N° 2j2: Portrait de Gœthe
Lithographie. — H. o'"i40, L. o"M5o. — Ventes Parguez (premier
état) : 5 fr. — Vente du 10 avril 1862 (premier état) : ig fr. — Vente
Langlais (premier état) : 24 fr.; (deuxième étatl : 10 fr. 5o. — Cat.
A. Moreau, p. 52.
Premier état. — En bas à droite : « Lith. de C. Motte »; h gauche : « Dela-
croix, lith. n; au milieu le fac-similé de la signature de Gœthe.
Deuxième état. — Même lettre, sauf les mots : n Lith. Vayron » remplaçant
à gauche ceux de « Lith. de C. Motte. »
Autre état sans nom d'imprimeur.
L'exécution dans son ensemble et en particulier le léger flou de la chevelure sont absolu-
ment remarquables dans les bonnes épreuves de la lithographie.
l82-
L'ŒUVRE DE DELACROIX
67
N°*23j, 234: Méphistophélès dans les airs
vendue en i
1° Lithographie. — H. o'"270, L. o"'23o. — Ventes De La
Combe (premier état) : 17 fr.; Parguez (premier état) : 17 fr.;
posthume (premier état) : 6 fr. — Cat. A. Moreau, p. 53.
Premier état. — Sans aucune lettre.
Deuxième état. — En bas à gauche : « Delacroix, inv. et lith. » à
droite : a Lith. de Ch. Motte, Paris »; au milieu la légende.
Troisième état. — En bas h gauche : « Delacroix, inv. et lith. »; à
droite : « Lith. Vayron »; au milieu, ces deux vers : « De temps en
temps j'aime à voir le vieux Père, — Et je me garde bien de lui rompre
en visière. »
2° M. A. Sensier a possédé la sépia originale de ce dessin; elle pro-
venait de la collection Villot, d'où elle avait passé dans la collection
873. Elle appartient aujourd'hui au comte Doria.
N°* i]y 1)6 : Faust dans son cabinet
pièce
i" Lithographie. — H. o"25o, L. o'"i7o. — Ventes De la Combe
deuxième état) : i5 Ir.; Parguez (premier état) : 33 fr.; posthume
premier état) : 17 fr. — Cat. A. Moreau, p. 53.
Premier état. — Sans lettre; sur les marges des croquis, à gauche un
casque et une épée, en bas une tète de cheval et une poignée d'épée.
Deuxième état. — Sans les croquis, sans aucune lettre.
Troisième état. — En bas à droite l'adresse de Motte; au milieu la légende.
Quatrième état. — En bas à gauche : « Delacroix, inv. et lithog. »; à
droite : n Lith. Vayron »; au milieu : « Pauvre crâne vide, que me veux-
tu dire avec ton grincement hideux? •>
Il existe un état sans nom d'imprimeur.
2° M. Andrieu possède la sépia originale quia servi à l'exécution de cette
Tous les sujets delà suite du Faust ont dû être ainsi traités avant d'être lithographies.
N° 237 : Faust et Wagner
Lithographie. — H. o™i85, L. 260. — Vente Parguez
(premier état) : 60 fr.; (deuxième état) : 10 fr. — Vente
Villot (troisième état) : 3 fr. — Cat. A. Moreau, p. 53.
Premier état. — Avant toute lettre, avec un trait carré et un
double filet autour du dessin; croquis dans la marge de gauche
représentant un Grec debout.
Deuxième état. — Le croquis effacé, mais avec le trait carré et
le double filet; avant toute lettre.
Troisième état. — Avec l'adresse de Ch. Motte.
Quatrième état. — A droite : « Lith. Vayron »; à gauche : « Delacroix »; au milieu ;
t( FAUST. Heureux qui peut conserver l'espérance de surnager sur cet océan d'erreurs!...
L'esprit a beau déployer ses ailes, le corps, hélas! n'en a point à lui ajouter. »
Il y a aussi un très bon état sans nom d'imprimeur.
68
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1827
N" 238 : Faust, Méphisto et le barbet
finir le fameux compte
Lithographie. — H. o"'23o, L. o"'2io — Vente Parguez (pre-
mier état) : 12 fr. — Cat. A. Moreau, p. 54.
Premier état. — Avec la légende au milieu et l'adresse de Ch.
Motte en bas à droite.
Deuxième état. — A droite : « Lith. de Villain. "
Troisième état. — En basa gauche : « Delacroix, invt et lithog. '>;
à droite: o Lith. Vayron »; au milieu : « Il grogne et n'ose nous
aborder; il se couche sur le ventre, il remue la queue. »
D'une lettre de 1862 à M. Philippe Burty, il resuite que le Faust
rapporta à Delacroix « quelque chose comme cent francs, et, de
plus, une gravure de Lawrence, \e Porlrait de Pie VJ/.it Ce compte
môme fut difficile à faire, car voici le brouillon sans date d'un billet
adressé à Ch. Motte: « M. Motte a bien voulu me promettre de
cette année. Ces chiennes d'affaires vont à reculons. »
N° 239 : Méphisto apparaissant à Faust
Lithographie. — H. o™26o, L. o"'2io. — Ventes Parguez
(premier état) : 60 fr.; posthume (premier état) : 40 fr. — Cat.
A. Moreau, p. 54.
Premier état. — Avant toute lettre.
Deuxième état. — En bas à droite l'adresse de Ch. Motte; au milieu
la légende.
Troisième état. — En bas à gauche : « Delacroix, inv. et lithog. »;
adroite : « Lith. Vayron »; au milieu : « méph. Pourquoi tout ce
vacarme? Que demande monsieur? Qu'y a-t-il pour votre service? »
Il y a un très bon état sans nom d'imprimeur.
Eugène Delacroix, comme on l'a vu plus haut, peignit ce sujet
pour M. Motte, l'imprimeur, qui vendit ce tableau à M. Devéria.
Ce tableau, haut de 0^48 et large de o"40, fut exposé au Salon de
1827 (voir cat. A. Moreau, p. 170, et plus haut, au cours de l'année 1827, n" 221.)
N" 240 : Méphisto recevant Fécolier
fij^m Lithographie.
0m état) : 5i fr.; :
tirage, l'cditcur
H. o"26o, L. o™220. — Ventes Parguez (premier
Delacroix (deuxième état) deux épreuves : 19 fr. —
Cat. A. Moreau, p. 55.
Premier état. — Sans aucune lettre. Tiré sur la pierre originale.
Deuxième état. — En bas h droite, l'adresse de Ch. Motte; au milieu la
légende. Tiré sur la pierre originale.
HÏaut mettre les amateurs en garde contre un troisième état portant en
bas à gauche : n Delacroix, invt et lithog. »; à droite : « Lith. Vayron »;
au milieu : « Ce que vous avez de mieux à faire, c'est de jurer sur la
_ parole du maître... Tenez-vous-en aux mots : Vous êtes sûr d'entrer par
la grande porte au temple de la Vérité. « La pierre ayant été brisée au
en fit faire une copie par un artiste resté inconnu.
1827
L'ŒUVRE DE DELACROIX
69
N° 241 : La Taverne des étudiants
subi plusieurs
Lithographie. — H. o"'270, L,o™220. — Ventes Parguez (pre-
mier état) : 53 fr.; posthume (deuxième état) : 12 fr. — Cat.
A. Moreau, p. 55.
Premier état. — Avant toute lettre.
Deuxième état. — A droite, l'adresse de Ch. Motte; au milieu la légende.
Troisième état. — En bas à gauche : 0 Delacroix invt et lithog. »; h
droite : « Lith. Vayron u; au milieu : « Au feu! A l'aide! l'enfer s'allu-
me!... Sorcellerie!... Jetez-vous sur lui... sonafTaire ne sera pas longue.»
1 y a aussi un état avec les mots : « Lith. Villain » et un autre sans
nom d'imprimeur.
Cette pierre est une de celles qui ont le plus souffert au tirage. Elle a
retouches et divers accidents.
N° 242 : Faust et Marguerite dans la rue
doute cet état sous
Lithographie. — H. o'"26o, L. o'"2io. — Ventes Parguez (premier
état) : 5i fr.; posthume (deuxième état): 16 fr. — Cat. Moreau, p. 56.
Premierétat. — Sans lettre, mais avec un tripletrait carré autourdu dessin.
Deuxième état. — En bas, à droite, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la
légende.
Troisième état. — En bas à gauche : « Delacroix invt et lithog. »; à
droite : « Lith. Vayron»; au milieu : « faust. Ma belle demoiselle, oserai-
je vous oflrir mon bras et vous reconduire ».
La pierre a été cassée après le troisième état depuis le milieu du côté droit
jusqu'au bas, où le mot « chez » est coupé en deux. M. Moreau avait sans
les yeux quand il a relevé la légende, car il a omis les mots : « chez vous. «
N° 243 : Méphisto se présente chez Marthe
J\ mK^_^ les
Lithographie. — H. o"^240, L. o"'20o.
— Ventes De La Combe (premierétat):
40 fr.; Parguez (premier état) : 40 fr.;
posthume (premier et deuxième états):
40 fr. — Cat. A. Moreau, p. 56.
Premier état. — Avant toute lettre; sur
'OYi î '\y'i "^ -"^^^ Is^ marges en croquis, des lions et des
'-~'^'/p^p/ H'rarC' ti:=^" ■ ^^*'""^^' ""'^ ^^^^ d'éléphant, plusieurs fi-
'''^""-^'^"^ guresde profil, de trois quarts et de face, un
choc de cavaliers, etc., nous reproduisons un fragment.
Deuxième état. — Sans lettre, mais les croquis effacés.
Troisième état. — En bas à droite, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la légende.
Quatrième état. • — Avec la légende, mais sans nom d'imprimeur.
Cinquième état. — En bas, à g"auche : « Delacroix, invt et lithog. »; à droite : « Lith. Vayron »;
au milieu : « méph. Il est bien hardi à moi de m'introduire aussi brusquement chez ces
dames. Je leur en demande un million de pardons. »
N° 244 : Marguerite au rouet
Lithographie. — H. 0^220, L. o™i8o. — Ventes Parguez (premier
état) : 23 fr.; De La Combe (premier état) : 24 fr.; posthume (pre-
mier état) : 3i fr. — Cat. A. Moreau, p. 57.
Premier état. — Avant toute lettre. Dans la marge du bas, un croquis de
Paysage.
Deuxième état. — En bas, l'adresse deCh. Motte; au milieu, la légende :
« Sans toi, l'existence — N'est qu'un lourd fardeau; — Ce monde si beau
— N'est qu'un tombeau — Dans ton absence. »
Troisième état. — En bas, à gauche : « Delacroix, invt et lithog. «; à droite :
(1 Lith. Vayron. »
Comparez la grâce naïve de notre composition à l'élégance fardée du tableau dA. Scheffer.
N" 245 : Duel de Faust et de Valentin
Lithographie. ^ H. o™23i, L. o"'28o. — Ventes Parguez
^p^emier état) : 38 fr.; posthume (premier état) : 12 fr. —
Cat. A. Moreau, p. 5-.
Premier état. — H. o'"265, L. o^SSo. Avant toute lettre. Cro-
quis dans la marge de gauche et dans celle du bas, représentant
une épée, le derrière d'un cheval, un page vu de dos et la tête
d un guerrier casqué.
Deuxième état. — Sans les croquis; bords non rectifiés. Mêmes
dimensions qu'au premier état.
1 roisième état. ^ En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la
kgende.
Quatrième état. H. o™225, L o™28o. En bas à gauche : " Dela-
croix, invt et lithog. »; à droite : « Lith. Vayron »; au milieu : « méph. Pousse. — val. Oh!
— MÉPH. Voilà mon rustaud apprivoisé... n
N" 246 : Fuite de Faust et de Méphisto après le duel
Lithographie. — H. o"26o, L. o'"2io. — Ventes Parguez (pre-
mier état) : 20 fr.; De La Combe (deuxième état) : 10 fr.; post-
hume (premier état) : 8 fr. —Cat. A. Moreau, p. 56.
Premier état. — Avant toute lettre; avec croquis dans la marge de
droite, représentant un homme en costume allemand, vu de dos.
Deuxième état. — Avant toute lettre, mais sans les croquis.
Troisième état. — En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la lé-
gende.
Quatrième état. — En bas à gauche : 0 Delacroix, invt et lithog. »;
h droite : 0 Lith. Vayron »; au milieu : o méph. Il nous faut prompte-
ment gagner au large. »
Le geste de Faust repoussant son épée au fourreau, et l'attitude de Méphisto jetant un regard
en arrière, sont admirables d'expression, ici d'ironie, là de remords.
1827
L'ŒUVRE DE DELACROIX
71
N° 247 : Marguerite à l'église
Dieu tond
Quidquid
Lithographie. — H. o^^bS, L. o"'220. — Ventes Parguez (pre-
mier état) : 26 fr.; posthume (premier état) : 35 fr.; X.... 1874 :
i/fr. 5o. — Cat. A. Moreau, p. 58.
Premier état. — Avant toute lettre; un triple trait carré entourant le
dessin.Voir le même sujet traduit plus simplement dans le tableau de 1846.
Deuxième état. — En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la lé-
gende.
Troisième état. — En bas, à gauche : « Delacroix, invt et lithog. «; à
droite : « Lith. Vayron »; au milieu : « marg. Malheureuse! Ah! si je
pouvais me soustraire aux pensées qui se succèdent en tumulte dans
mon âme et s'élèvent contre moi! — le mauvais esprit. La colère de
sur toi La trompette sonne... Malheur à toi. — chœur. Index ergo cumsedehit —
latet apparebit — Nil inultum remanebit. »
N° 248 : Faust et Méphisto dans les montagnes du Hartz
loin du te
h gauche
Lithographie. — H. ©'"240, L. o'"2o5. — Ventes Parguez ( pre-
mier état) : i5 fr.; De La Combe (premier état) : 3i fr.; posthume
(premier état) : gfr.; (deuxième état) : 7 fr. — Cat. A. Moreau,
p. 58.
Premier état. — Avant toute lettre; croquis dans toutes les marges, re-
présentant des chevaux, une barque à voile, un lézard, un serpent.
Deuxième état. — Sans les croquis et sans lettre.
Troisième état. — En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la légende.
Quatrième état. — En bas, à gauche ; « Delacroix invt et lithog. »; à
droite : « Lith. Vayron »; au milieu : 0 méph. Nous sommes encore
rme de notre course. » Après le quatrième état, la pierre a été cassée dans le haut,
l'entaille est de o™o55 sur une longueur de o'"o3.
N° 249 : L'ombre de Marguerite apparaissant à Faust
Lithographie. - H. o'"26o, L. o"35o. — Ventes Parguez
(premier état) : 3o fr.; posthume (premier état) : 10 fr.;
(deuxième et troisième états) : 6 fr. — Cat. A. Moreau, p. 59.
Premier état. — Avant toute lettre; croquis confus sur la marge de
gauche.
Deuxième état. — Croquis effacés; aucune lettre.
ffgivjf^^'. Troisième état. — En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la
S.Çt^aîf' légende.
Quatrième état. — En bas h gauche : 0 Delacroix, invt et lithog. »;
à droite : « Lith. Vayion »; au milieu : (i méph. Laisse cet objet : on ne se trouve jamais
bien de le regarder... Tu as bien entendu l'histoire de Méduse. — faust. Assurément, ce sont
là les yeux d'un mort, qu'une main amie n'a point fermés. C'est là le sein que Marguerite
m'a livré, c'est là le corps charmant que j'ai possédé. »
N° 2^0 : Faust et Méphisto dans la nuit du Sabbat
^^ Lithographie. — H. o'"2o5, L. o'"28o. — Ventes Parguez
~ (premier état) : 20 fr.; De La Combe (premier étati : 3o fr.;
posthume (premier état) : 8 fr. — Cat. A. Moreau, p. 59.
Premier état. — Sans aucune lettre; croquis dans la marge du bas.
Deuxième état. — En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la lé-
gende.
rroisième état. — En bas à gauche : 0 Delacroix, invt et lithog. »;
à droite : « Lith. Vayron »; au milieu : « faust. Que vois-je remuer
autour de ce gibet .'' Ils vont et viennent, se baissent et se relèvent. —
MÉPH. C'est une assemblée de sorciers. — faust. Ils sèment et consacrent.— méph. En avant!
en avant ! »
Quatrième état. — Sans lettre ni croquis, sauf un cou de cheval. Le bord droit redressé.
N° 2 5 1 : Faust dans la prison de Marguerite
représentée
Lithographie. — H. o™25o, L. o'"2i 5. — Ventes Parguez (premier
état) : 3i fr.; posthume (premier état) : 25 fr. — Cat. A. Moreau,
p. 60.
Premier état. — Avant toute lettre.
Deuxième état. — En bas, l'adresse de Ch. Motte; au milieu, la légende.
Troisième état. — En bas, à gauche : « Delacroix, invt et lithog. »; à
droite : « I.ith. Vayron »; au milieu : « faust. Reviens à toi! un seul pas
et tu es libre. — méph. Que de paroles inutiles! que de délais et d'incerti-
tudes! Mes chevaux frissonnent; l'aube blanchit l'horizon. »
_ 11 n'est pas sans intérêt de rapprocher cette composition de l'aquarelle
"^ que nous donnons au cours de cette année 1827, et où Marguerite est
seule dans la prison, avant l'arrivée de Faust et de Méphisto.
Année 1828
en haut à gauche
N° 2^2 : Intérieur d'alchimiste
Toile. — H. o"'23, L. o"'3i. — Appartient à M. Warnier,
d'Arras. — Non catalogué par M. Moreau.
Cette très ancienne toile, non datée, doit remonter à l'époque des
compositions du Faust. C'est l'intérieur du cabinet du fameux doc-
teur : un hibou perché sur une chaise gothique, auprès d'une table
où sont disposés des bocaux, une lampe, un chapeau h plume posé
sur des in-folios, des gants, une canne; cela sent pleinement les
œuvres ténébreuses de l'alchimie. Sur les carreaux de la petite fenêtre
it les initiales E. D.
i8-28
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N'''2^3, 2)4, 2 5^, 2^6 : Richelieu disant la messe
i°ToiIe. — -H. 4"'2o, L. 3"'oo. — Si-
gné, daté: 1828. — Lithographie par
Jourdy : o'"348 sur o"'245. — Ta-
bleau détruit en février 1848. —
Cat. A. Moreau, p. 210.
2° Aquarelle. — H. o'"34, L. o"'27.
— Vente Jacq. Léman, 1874 : 98 t'r.
3° Toile. — Esquisse sans chan-
gement, quoique plus sommaire.
— H. o"'34, L. o"'25. — Apppar-
tient à M. Mahler.
4" Ce n'est pas tout ce que Delacroix a fait sur ce sujet :
le cardinal de Richelieu disant la messe au Palais-Royal.
Il existe aussi une autre esquisse peinte, appartenant
à M. Ch. Nuitter, et divers projets et croquis pour le
même sujet, qui ont fait partie de la vente Leraan, citée
plus haut et sont entrés depuis dans la collection de M. Philippe Burty, notamment
des études pour le hallebardier.
N"' 257, 2^8 : Portraits d'élèves de la pension Goiibau
blanc, la
en ovale.
i" M. Eugène Berny d'Ouville. — Toile ovale. —
H. o"'6o, L. o"'5o. — Appartient à M. G. Arosa.
— Non catalogué par M. Moreau.
2° M. Auguste-Richard de la Hautière. — Toile.
— H. o^'ôo, L. o"'5o. — Appartient à M. de la
Hautière. — Non catalogué par M. Moreau.
M. Eugène Berny d'Ouville était lauréat du second
prix de thème latin au concours général en 1828, et
M. de la Hautière, lauréat du second prix de version
latine. Le portrait de ce dernier est resté dans son format carré d'origine.
Les cheveux sont châtain clair, le teint blanc et rose, l'habit noir, le gilet
cravate jaune avec des rayures. — Le portrait de M. Berny d'Ouville a été coupé
Il est signé en clair et daté au bas à droite : la redingote est brune.
N°^ 259, 260 : Copies d'après Rubens
1° Portrait d'une dame de la famille Boonen. — Toile. — H. o"'65, L. o'"54. — Pho-
tolithographié par Arosa: o^iig sur o"^098. — Vente posthume: 38o fr.; Vente
G. Aro'sa, février 1878 : 700 fr. à"M. H. Hecht.
2° L'embarquement de Marie de Médicis. — H. o"'40, L. o"'32. — Photolithographié
par Arosa :o'"i2o suro"'095. — Vente posthume : io5 fr.; Vente G. Arosa, février
1878 : 3io fr. à M. Barbedienne.
74
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1828
N° 261 : Bataille de Nancy — Esquisse
siette, de grandeur à l'œuvre
Toile. — H. o'"4q, L. o"'70. — Vente posthume, n" 56 :
4 100 fr. à M. de Laage. — Acheté à la vente de ce der-
nier par M. Choquet. — Photolithographié par Arosa en
deux dimensions : o'"i5o sur o™2o6, et o"'2i9 sur
o™io6. — Cat. A. Moreau, p. 3 12.
C ost l'esquisse du tableau de i83i (voir plus loin). Dans le
t ibleau, l'église a été supprimée, les accessoires du premier
pi in ont été simplifiés, les lignes de la composition ramenées
a une sorte de parallélisme horizontal, qui donne plus d'as-
un des morceaux les plus précieux du musée de Nancy.
N" 262 : Mazeppa
caractère qu'il est intt
Toile. — H. o'"265, L. o"'35o. — Appartient à M. David
d'Angers fils. — Non catalogué par M. Moreau.
Cette toile a été peinte d'après la composition lithographiée par
Géricault; les changements sont insignifiants. On sait que le héros
de Bvron a également inspiré Horace 'Vernet et Louis Boulanger.
Le lila^eppa lie Louis Boulanger fut précisément exposé en cette
année 1828 et il est placé aujourd'hui au musée de Rouen, dans
la même salle que le Triomphe de Trajan de Eugène Delacroix.
Le même artiste, qui avait une belle imagination romantique, a
consacré au même sujet trois autres lithographies d'un grand
ressant de comparer à celles de Delacroix.
N" 26) : Le prisonnier de Chillon
Sépia. — Vente Viliot, i865 : 80 fr. — Voir le tableau à Tannée 1834.
La composition diffère de celle du tableau. Dans ce dessin, le prisonnier est assis sur la paille.
N" 264 : Études de lions
Toile. — De 12a i5. — N"2i3 de la Vente posthume:
1,180 fr. à M. Bidermann. — Çat. A. Moreau, p. 322.
Ces études ont été faites sur nature ou peintes d'après des croquis
pris sur nature. On sent, en effet, les diverses reprises de l'artiste
suivant tous les mouvements de l'animal dans l'inconstance de
ses poses successives et leur extrême mobilité. « Les tigres, les
panthères, les jaguars, les lions..., écrit Delacroix sur un de ses
carnets, d'où vient le mouvement que la vue de tout cela produit
chez moi? Combien il est nécessaire de se secouer de temps en
temps, de mettre la tète dehors, de chercher à lire dans la création. »
i828
L'CEUVRE DE DELACROIX
75
N° 265 : Le Turc au harnais
Toile. — H. o"i40, L. o'"32. — Lithographie par Eug. Le Roux
dans les dimensions de o'"225 sur o^i/S.— Cat. A. Moreau, p. i25.
Coiffe d un large turban, dont l'ombre descend sur le visage et se prolonge
par une longue barbe noire, l'homme revêtu d'un caftan à larges manches
est assis sur un escabeau. De la main gauche, il tient une de ses jambes
croisée sur l'autre. De la droite il s'appuie sur un fusil. Près de lui, sur
un support élevé, repose une selle turque et tout le harnachement du
cheval. M. Moreau intitule ce tableau « le Turc à la selle. »
Il y a deux états de la lithographie faite par M. Le Roux. Le premier
état, sans aucune lettre, porte en bas au milieu : « Imp. Bertauts ». Sur
le deuxièrne état, on lit en haut à droite le numéro i; en bas à gauche :
« Eug. Delacroix, pinx. Galerie d'amateurs » ; a droite : « Eugène Le Roux lith., Giîiaut fr.,
édit., boulev. desitaliens, 5 »; au milieu : a Imp. Bertauts, tiré du cabinet de M. Moreau. »
N° 266 : Arménien
Sépia. — H. o™i6o, L. o'"ro9. — Gravé à Teau-forte, de mêmes
dimensions, par F. Villot. — Vente Villot, i865 : 49 fr. — Cat. A. Mo-
reau, p. 292.
C'est en 1845 seulement que M. Frédéric 'Villot grava ce dessin dont l'impor-
tance nous paraît bien minime. Mais nous nous sommes fait une loi de ne rien
éliminer de notre propre mouvement. Tel geste, telle attitude , dans le
moindre croquis, en apparence insignifiant, peut, en effet, avoir été comme
le coup d'essai du maître qui l'aura repris, agrandi, et plus tard complété dans
quelque autre composition. — N'y a-t-il pas là comme un souvenirde J.-J. Rousseau?
N°' 267, 268 : Cheval bai brun. — Deux études
Deux aquarelles gouachées, avec variantes sans importance. — "Vente "Villot, i865.
N° 269 : Faust au Sabbat
de cet
sonore
Aquarelle. — Toile de 4. — N° 389 de la "Vente posthume :
ii5 fr. — Appartient à M. G. Arosa. — Non catalogué par
M. A. Moreau.
Delacroix a cherché là surtout le cadre de la scène, une disposition de
montagnes en vue d'une composition définitive. Cette gorge rocheuse
avec ses monts abrupts a beaucoup de l'aspect sauvage que l'on re-
trouve si fréquemment dans nos Cévennes et dans la Montagne noire.
« Accroche-toi aux flancs du roc, autrement il va te précipiter au fond
abîme. Ecoute le frémissement plaintif des rameaux qui se brisent, l'ébranlement
des troncs puissamment secoués, le sifflement des racines.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1828
N«
170
Faust à 1 étude
pi$sj|?^jg Aquarelle. — Variante de la lithographie n° 23o de 1827. — H. o'"i63,
-Jrf;-i:."! ,rsTe £_ o™i35. — Vente Paul Blacque,'" 1866 : 490 fr. — Vente Fould, février
1882 : 3oo fr. — Non catalogué par M. Moreau.
Faust est assis. Dans la lithographie, il est debout. — Pendant l'exposition de la
vente Fould, on entendait dire dans le public que le type de ce Faust était
calqué sur celui de M. Gambetta. La ressemblance est en effet frappante, mais
elle est purement fortuite. Delacroix n'a point connu M. Gambetta, qui,
d'ailleurs, n'était point né en 1828. Les fausses légendes ont la propriété des
mauvaises herbes, celle de croître très rapidement, si on ne les arrache au moment où elles
sortent de terre. Nul moins que Delacroix n'a besoin qu'on ajoute à son œuvre les curiosités
de l'intérêt anecdotique. Il se soutient de lui-même par l'intérêt humain.
N°' 271, 272 : Quentin Dur'ward et la princesse de Croy
-Lithographie par Léon Noël:
- Non catalogué par M. Mo-
1" Aquarelle. — H. o"'25, L. o"M9.-
o"' 180 sur 0^140, en sens opposé. ■
reau.
Cette aquarelle n'est pas une des meilleures de Eugène Delacroix. Elle
a des tons qui sentent l'enluminure. Nous pensons qu'elle a dû être
exposée quelque temps à une trop grande lumière.
2" 11 existe aussi un dessin mine de plomb de la même composition, vendu
40 francs en 1846, à la vente de Monville, et mesurant o™20 sur o^iô.
A ce sujet, disons que les romans de Walter Scott étaient le seul terrain
où la bourgeoisie d'alors consentît à se rencontrer dans un sentiment
3 d'admiration commun avec les romantiques. M. Thiers lui-même qui,
soufflé par le peintre Gérard, a eu la bonne fortune extraordinaire de
parler en bons termes de Eug. Delacroix, resta dans le fond jusqu'à son dernier jour l'enne-
mi, sinon déclaré, du moins intime du romantisme.
N° 275 : Seigneur vénitien
jours de 18
M. de Sacy
connaître 1
nir : i( Ah!
Aquarelle. — H. o'"2i, L. o'"i6. — • N° SgS de la Vente posthume :
160 francs. — Vente hôtel Drouot du 24 mars 1876 : 60 fr. à M. Petit.
— Non catalogué par M. Moreau.
Nous conservons le titre du catalogue de la Vente posthume, bien que ce
jeune seigneur, traité à la façon de Bonington, ne nous paraisse rien avoir
de spécialement vénitien, tout en étant absolument romantique. — Si l'on
veut connaître le sentiment de M. Thiers sur le romantisme, on le trouvera
dans le discours de M. John Lemoinne h la réception de M. Labiche à
^ l'Académie française : <c Je me rappelle qu'un matin, dans les plus mauvais
i,M. Thiers que j'étais allé voir à Versailles, m'ayant demandé des nouvelles de
je lui répondis qu'il continuait à être amoureux de ses vieux livres et à ne pas
es romantiques. Et M. Thiers me dit avec cette vivacité dont vous avez le souve-
il a bien raison, Sacy; les romantiques, c'est la Commune. »
i828
L'ŒUVRE DE DELACROIX
77
N° 274 : Femme couchée caressant un chien
Aquarelle. — ■ Vente Villot, i865 : 520 fr. à M. Chevalier. — Cat. A. Moreau, p. 296.
N;' 275, 276 : M. Simon
plus lo:
1° Dessin rehaussé d'aquarelle. — H. o"M4o, L. o™og5. —
Signé au bas à droite.
2° Dessin rehaussé d'aquarelle. — H. o'"20, L. o™i3.
M. Simon, maître de ballets à l'Opéra, est représenté en costume
de théâtre. L'aquarelle le montre dans le rôle du MajorJomu de
(( La Belle au Bois dormant »; le dessin, dans le rôle du capitaine
Bracassio, chef de forbans, du « Diable amoureux. »
^ M. Simon était un vieillard très aimable. Sa démarche fut jusqu'à sa mort ce
qu'elle avait toujours été : élégante, simple et aisée tout à la fois. Il s'était retiré
à Crécy-en-Brie, où il est mort il y a environ cinq ou six ans. On trouvera
n divers portraits de madame Simon, qui était fort belle.
N° 277 : Chevalier
Mine de plomb rehaussée d'aquarelle. — H. o"'23, L. o'"i8. —
Appartient à madame Pierret. — Non catalogué par M. Moreau.
Il est revêtu d'une armure complète, le heaume en tête, la lance au poing,
et monté sur un cheval blanc qui s'avance au pas relevé, d'une noble
allure. Et ce qui accentue davantage cette allure, c'est la proportion très
restreinte de l'arrière-train du cheval. Delacroix voulait avant tout le
mouvement. 11 y arrivait souvent par des exagérations ou ce qui paraît
tel à notre jugement, fondé beaucoup plutôt sur le raisonnement que sur
l'exacte perception des formes apparentes. Je dis formes « apparentes » et
non formes « réelles ». Or, Eugène Delacroix n'a jamais manqué à celte
son art . Il a toujours rendu l'apparence des choses et non leur essence.
N"^ 278, 279 : Selbitz blessé
i°Dessinàlamine de plomb. — H.o'"270,L.o"'2o5.
— A appartenu à M. Riesener. — Non catalogué
par M. Moreau.
2° Aquarelle. — H. 25o, L. 265. — Vente Jacques
Léman, 1874 : 65 fr. — Non catalogué par
M. Moreau.
Le dessin a été très probablement exécuté après l'aqua-
relle, car il 'est incomparablement plus souple. Nous rappelons que ce motif
est emprunté au troisième acte de Gœt^ de Berlichingeii, qui a si souvent inspiré Delacroix.
78
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1828
N°'28o, 281, 282 : Intérieur d'hôpital militaire
1° Aquatinte. — H. o™22i, L. o'"26o. — Vente posthume du
29 février 1864 : 1 1 fr. et 22 fr. — Cat. A. Moreau, p. \- .
2° Dessin à la plume et sépia. — H. o"'24, L. o"'27. — Vente
Villot, 1875 à M. de Vasselot. — La composition est, dit-on, de
Géricault. — Non catalogué par M. Moreau.
3" Croquis. — H. o"i52, L. 210. — Photolithographié par
Arosa. — Non catalogué par M. Moreau.
Un turc coiffé d'un turban et tout habillé se dresse sur sou lit. De vifs
accrocs de lumiùre éclairent les mains, la tête, le traversin. Du plafond pend une draperie.
Dans l'ombre du fond on distingue vaguement une rangée de lits et un personnage qui se
tient debout près d'un de ces lits. — Sans aucune lettre, signature ni date.
La composition est dans le sens contraire à celui du dessin.
N° 283 ; Turc montant à cheval
Aquatinte. — H. o™2i6, L. o'"266. — Héliogravé pour
l'ouvrage de M. A. Moreau : o'"io5 suro'"i3o. — Vente
posthume (deuxième état] : 10 fr. — Vente Villot, décembre
18-5 : II fr. 5o. — Cat. A. Moreau, pp. 18, 199.
Premier état. Avec des essais de teintes différentes sur les marges;
sans aucune lettre, signature ni date.
Deuxième état. Sans aucune teinte sur les marges.
Cette planche et les deux suivantes, exécutées dans le principe
pour l'éditeur Osterwald, ne furent pas publiées. Osterwald était
un marchand d'estampes qui demeurait rue des Augustins, n° 37.
Dans la partie la plus ombrée du paysage, entre les jambes de devant du chevai, on aperçoit
deux petits palmiers qu'on ne voit pas dans notre vignette.
N° 284 : Turc sellant son cheval
i] Aquatinte. — H. o'"i86, L. o™227. — Vente posthume,
29 février 1864 (premier étatj^o fr. — Cat. A. Moreau, p. 17.
Premier état : aquatinte pure avec des essais d'aquatinte sur les
quatre marges.
Deuxième état : retouches a la pointe sèche dans le cheval, la
veste et la culotte du personnage.
Ce que nous ne pouvons nous lasser d'admirer dans ces œuvres
rapides, c'est la naïveté du geste, toujours juste parce qu'il est
fidèlement observé et rendu sans aucune préoccupation d'en-
noblissement académique. Par cette sincérité absolue qui ne
recule devant aucune gaucherie apparente, Eugène Delacroix atteint toujours et à coup sûr
au plus grand style. — On a vendu 80 fr. à l'Hôtel Drouot, en 1874, un mauvais dessin à la
sépia de cette composition, qui nous parut douteux.
1828
L'ŒUVRE DE DELACROIX
79
N° 285 : Mameluck retenant son cheval
Aquatinte. — H. o'"2i2, L.
— Cat. A. Moreau, p. 18.
260. — Vente posthume : 12 fr.
Sur les marges, des salissures provenant d'un tirage peu soigné. —
Cette aquatinte est extrêmement rare.
Personne n'a compris et rendu comme Eugène Delacroix les jolies
gaietés du jeune cheval, ses mouvements élégants et souples au
sortir du bain, ses façons de piaffer, de s'encapuchonner, de se
cabrer, la puissante élasticité de ses nerfs et de ses muscles. L'aqua-
tinte,que nous reproduisonsici, n'est pas le premierexemple de la rare
intelligence que Delacroix a toujours montrée dans ces représentations du cheval. J'ai eu déjà
l'occasion d'insister sur ce sujet; voir notamment les n"^ 172, 204, 229, etc.
N° 286 : Hamlet contemplant le crâne dTorick
Lithographie. — Premier état, H. o"^270, L. o"36o. —
Deuxième état, H, 0^260, L. o'"34i. — Ventes Parguez
(premier état) : 55 fr.; Dubois (la même épreuve) : 26 fr.;
De La Combe (troisième état) : 20 fr.; du 10 avril 1862
(troisième état) : 10 fr.; de Saint-Georges (troisième
état) : 4 fr.; Langlais (troisième état, avec Jane Shore) :
2 5 fr.; posthume (deuxième état, avec Jane Shore) : i 2 fr.
— Cat. A. Moreau, p. 42.
Premier état. — -Avec des croquis sur les marges, représentant à
droite une tête de mort, à gauche deux figures d'hommes et
un nez de cheval, sans aucune lettre et sans signature.
Deuxième état. — Sans les croquis, avant toute lettre. Signé sur la planche, à droite, en bas :
<i Eug. Delacroix. »
Troisième état. En bas à gauche : « Eug. Delacroix, inv. et del. »; à droite : « Lith. de
C. Motte. »; au milieu : n Hamlet, acte V. Scène L — le foss. — Ce crâne, seigneur, est celui
d'Yorick, le bouffon du roi. — ham. — Là étaient ces lèvres que j'ai baisées cent fois
Où sont tes farces, à présent? Où sont tes chansons? (Shakespeare.) » Et le texte anglais
placé en regard.
il y a peu de variantes entre la lithographie et le tableau de iSSq.
N° 287 : Cheval sauvage terrassé par un tigre
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"i5, L. o'"24. — Lithogra-
phie en fac-similé, numéro 17 de la publication de M. A. Robaut.
— Vente posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est le projet très net, très arrêté du numéro suivant. — Le tigre
mord à l'épaule droite et déchire de ses griffes un cheval renversé par la
soudaineté et la violence de l'attaque. La tête étant maintenue par une
des pattes du tigre, la victime, sous l'action de la douleur, contracte ses quatre jambes. En
exécutant la lithographie, E. Delacroix rendit ce mouvement plus souple et moins violent.
8o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1828
N° 288 : Cheval sauvage terrassé par un tigre
Lithographie. — H. o'"2oo, L. o'"276. — Ventes De La
Combe (deuxième état :i5o fr.; Dubois (la même épreuve) :
61 fr.; de Saint-Georges: 10 fr.; i865 (deuxième état): i52 fr.;
Langlais, i86g (premierétat) : i65 fr.; Villot, iSjS (troisième
état) : 47 fr.; A. Colin (une épreuve sur chine) : 100 fr.; His
de la Salle, 1881 (une épreuve sur chine) : 282 fr. — Cat.
A. Moreau, p. 3o.
Premier état. Avec des salissures sur les quatre marges.
Deuxième état. Avec des salissures sur la marge de gauche.
Troisième état. Sans salissure sur aucune des quatre marges. — Les épreuves de ces trois pre-
miers états sont absolument sans lettre.
Quatrième état. En bas à gauche : « Eug. Delacroix, fec. 0; à droite : i' Lilh. de Ch. Motte,
1828»; au milieu : « Cheval sauvage terrassé par un tigre. «
N° 289 : Jane Shore
en 1S2
férents
Lithographie. — H. o'"26o, L. o'"346. — Ventes Par-
guez : 4 fr.; Dubois : 6 fr.; Burty, 1874: 5 fr. 5o;
Villot : 7 fr. — Cat. A. Moreau, p. 42.
En bas à gauche : « Eug. Delacroix, inv. et del. »; à droite :
0 Lith. de C. Motte. «; au milieu : <i Jane Shore, acte V,
scène IL — sho. — Eloigne ces noires idées de tristesse et de
faute... Mes bras, mon cœur te sont ouverts; viens, que je te
ramène dans ta maison abandonnée (Rowe). » Et le texte an-
glais en regard.
Cette pièce, exécutée en 1828, est la reproduction d'une aqua-
relle faite après une représentation des artistes anglais à Paris,
7. Il a été tiré de cette lithographie des épreuves sur deux papiers de formats dif-
, avec mêmes chines et timbre sec.
N° 290 : Cheval effrayé sortant de l'eau
Lithographie. — H. o"'237, L. o'"225. — Signé à gauche, dans
l'eau : « Eug. Delacroix, x. 1828. » — Ventes Dubois (premier
état) : 9 fr.; Burty, Paris, 1874 : 40 fr.; Burty, Londres, 1876 :
22 fr. 5o. — Cat. A. Moreau, p. 42.
Premier état. Sans aucune lettre. — Deuxième état. En haut, au milieu :
Il L'Artiste »; en bas, h gauche : 0 Imp. Bertauts, R. Rodier, 47, Paris »;
au milieu : ci Cheval sauvage ».
N'a-t-on pas l'impression d'un éclair qui passe en entrevoyant cette cri-
nière? — L'étude a servi pour le cheval de Charles-le-Téméraire, duc
de Bourgogne, dans la Bataille de Nancy. C'est à peu de chose près le même mouvement,
sauf pour la tête; mais dans le tableau, le mouvement est retourné.
Année 1829
N" 291 : Christ descendu de la croix
Copie au pastel d'après le tableau du Tintoret conservé au musée de Caen.-
Viliot, 1867. — Vente Bocquct, 1879.
Vente
N° 292 : Levêque de Liège
Toile. — H. o^go, L. i"^i8. — Salon de
i83i. — Peint pour S. A. R. le duc d'Or-
léans.— Ventes duchesse d'Orléans: 4,800 fr.;
Villot, i865 : 35, 000 fr.; Khalil bey : 46,000
fr. — Appartient à madame de Cassin. — Cat.
A. Moreau, pp. 171, 246.
Sur ce chef-d'œuvre, nous laissons la parole à
notre très cher maître Théophile Gautier : « Le
roman de Quentin Durward a fourni le sujet du
Massacre de iévéque de Liège. Qu'on nous per-
mette de transcrire ces lignes du livret : n Guil-
laume de la Mark, surnommé le Sanglier des
Ardennes, s'empare du château de l'evèque de
Liège, aidé des Liégeois révoltés; au milieu d'une
orgie dans la grande salle, et placé sur le trône
pontifical, il se fait amener l'évêque, revêtu par dérision de ses habits sacrés et le laisse égorger
en sa présence. Ce tableau reste, malgré sa date ancienne, un des plus étonnants chefs-
d'œuvre de l'artiste. Qui eût jamais pensé que l'on eût pu peindre la rumeur et le tumulte?
Le mouvement passe encore, mais cette petite toile hurle, vocifère et blasphème. Il semble
qu'on entende voltiger au-dessus de la table, dans la vapeur sanglante des fanaux échevelés,
les cent propos divers et les chansons obscènes de cette soldatesque avinée. Quelles figures
de brigands! Quel accoutrement féroce! quelles tournures truculentes! quelle bestialité
joviale et sanguinaire ! comme cela fourmille et glapit, comme cela flaaiboie et pue ! quel
beau rire égueulé et quelle gaieté de tigre voyant entrer un mouton dans son antre à l'aspect
du pauvre évèque tremblant. «Le Sanglier des Ardennes se soulève h demi, alourdi par son
ivresse et par son armure et s'appuie h la table sur ses gantelets de fer pour ne rien perdre de
ce délicatspectacle : les égorgeurs lèvent déjà le couteau, et le sang de la victime va couler sur
la nappe à peine perceptible parmi les flots de vin des brocs renversés. L'architecture de la
salle, traitée avec une magie singulière de perspective, ne le cède en rien pour la terreur opaque
et sinistre aux plus noirs intérieurs de Rembrandt. Elle est si haute et si profonde que les lu-
mières n'en atteignent pas les recoins où les ombres se tapissent comme des chauve-souris
effravées ou des spectres surpris ; moins fait qu'un tableau, plus fini qu'une esquisse, le
Massacre de levêque de Liège a été quitté parle peintre à ce moment suprême où un coup
de pinceau de plus gâterait tout.u — Voir l'esquisse à l'année 1827.
Nous disons en notre introduction dans quelles conditions ce tableau a été peint et comment
le maître souhaitait qu'il fût vu.
82
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1829
N° 29^ : Portrait d un élève de la pension Goubau
Toile. — H. o™6o, L. o"'5o. — Signé au bas à gauche et daté
« 1829 ». — Appartient au frère du modèle, M. Schmitz, intendant
militaire à Orléans.
Achille Schmitz fut lauréat du second prix de version latine au concours
général en 1829 et du second prix de mathématic^ues spéciales en i833.
11 entra à l'Ecole polytechnique et fut tué capitaine du génie en i855,
pendant la campagne de Crmiée. Il a les cheveux bruns, le teint de
brique; l'habit est bleu très foncé, le gilet blanc, droit, ouvert, laissant
voir le plastron de la chemise et ses boutons d'or. Le fond est gris uni. —
Le trère de Achille Schmitz a fait lui-même une copie de ce portrait et a poussé le scrupule
jusqu'à copier la signature du maître.
N° 294 : Madame F. Simon
Toile. — H. o™6o, L. o"'5o. — Signé en haut, à gauche. —
Non catalogué par M. Moreau.
Ce portrait important a figuré à l'exposition posthume du boulevard
des Italiens, et en 1878 à l'exposition des portraits nationaux. Il appar-
tenait alors à MadameCinot, lafilledeM. Simon, maître des ballets de
l'Opéra, mort à Crécy-en-Brie, en 1877. Madame Simon, née Damoiseau,
était la hlle d'un médecin-vétérinaire, inspecteur général du dépar-
tement de la Seine. On pourrait ranger ce portrait au nombre des plus
beaux qui aient jamais été peints. Emporté par la beauté du modèle,
Delacroix s'est efforcé d'être à sa hauteur. Le charme du sourh'e le
plus honnête est traduit ici d'une manière indéfinissable.
Il y a des rubans moirés dans les coques et grosses boucles des cheveux.
Le corsage, qui avait été pris dans les costumes de l'atelier, était de
velours gros violet. L'écharpe qui le recouvre par endroits, retenue par les mains, est en
crêpe de chine jaune jonquille. Chaîne et broche en or. (Voir à l'année 1834.)
N" 29 )' : Portrait de Eugène Delacroix
Le;
Toile. — H. o"'5i, L. o"64. — Lithographie par A. Robaut :
o"'207 sur o'"i65, et par Letoula : o^SôS suro"'3o5. — Gravé sur
zinc pour le journal l'Art (1882), d'après un dessin de Brun. —
Appartient au musée du Louvre. — Cat. A. Moreau, p. 23-.
Eugène Delacroix avait par testament légué ce portrait h sa gouvernante,
knny Le GuiUou, sous la condition verbale de le donner au Louvre le
lourôù la famille d'Orléans aurait repris possession du trône. Cet événe-
ment ne s'étant pas réalisé, Jenny, à son tour, légua le portrait à Ma-
dame Durieu qui en fit don au Louvre en 1872. — Placé d'abord dans
un angle de la salle des sept cheminées (salon carré de l'Ecole française),
Ce portrait est maintenant dans les salles françaises du second étage,
dimensions dt notre réduction n'ont pas permis de conserver une ressemblance parfaite.
N° 296 : Sainte Madeleine au pied de la croix
Toile. — H. o'"34, L. o'"26. — Daté du 27 mai 1829. — Présenlc
en vente à l'Hôtel Drouot le 26 janvier 1876; retiré, faute d'en-
chères, à i,65o francs; on en demandait 3, 000 fr. — Eau-forte par
Ch. Courtry, dans les dimensions de o"'i70 sur o"'i3o. — Cat.
A. Moreau, p. 284.
Lorsque Eugène Delacroix a composé ce tableau, il était visiblement
préoccupé de Rubens. L'œuvre manque un peu d'originalité et le dessin
de la ^ladelcine n'est pas très heureux. Celui du crucifié, au contraire,
est plein de noblesse dans sa grande ligne rigide si sévère et si simple. —
(I Que peut vous dire le Christ idéalisé des Bvzantins dans sa froide et
sereine impassibilité? » a écrit Henry de la Madelène. « Mais le Christ en croix de Rubens,
le Christ mourant de Delacroix, qui les oublie, qui peut les oublier? »
N° 297 : Pieta
Toile. — H. o'"27, L. o^SS. — Gravé à l'eau-forte par
F. Villot : o"23i sur o"'3o6. — Vente Villot, i865 :
435 fr. — Appartient à M. VanPraet de Bruxelles. — Cat.
A. Moreau, p. 264.
Le paysage, l'aspect de la nature, l'état du ciel, l'heure du
jour, la saison, concourent toujours dans l'œuvre de Delacroix,
à l'effet moral du sujet. En cette esquisse, le maître a placé la
scène au déclin de la iournée,au moment oii passent les dernières
lueurs du soleil couchant. Dans la gravure de M. Frédéric
Villot, qui ne fut exécutée que dix ans plus tard, en iSSq, la composition est retournée.
N" 298 : Seigneur du temps de François 1"
Aquarelle. — Signé, daté. — Vente Villot, i865 : i5o fr. — Voir l'eau-forte à l'année
i833. — Cat. A. Moreau, p. 296.
Dans l'aquarelle, ne figure pas le cheval qui se voit dans le second état de la gravure.
N" 299 : Cheval abattu et cavalier démonté
Lithographie. — H. o"M8o, L. 0^280. — Introuvable. —
Non catalogué par M. A. Moreau.
Notre croquis a été fait d'après une contre-épreuve il peine lisible.
Le jet du dessin est très beau, et les attitudes de la chute ont une
justesse de mouvement absolument remarquable. — A comparer avec
le Soir d'une bataille de l'année 1S26. C'est le même drame
autrement interprété et transporté dans un autre milieu, la même
sensation tragique de l'abandon sur le champ de bataille désert.
84
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1829
N° joo : Steenie
admirés.
Lithographie. — H. o'"i6i, L. o"'2i5. — Vente Dela-
croix ^ 4 t"r. (sous le titre de « Redgauntlet poursuivi par
un lutin à cheval >>). — Cat. A. Moreau, p. 32.
Cette planche, jusqu'ici inédite, n'est pas terminée. Commencée
par Delacroix en 1829, puis laissée décote, il la reprit en 1841;
le ciel fut alors complètement gratté et le terrain du premier
plan couvert de nouveaux travaux, atin d'arriver à mieux
rendre l'effet d'un clair de lune. Néanmoins, Delacroix n'ayant
pas encore été satistait de son œuvre, l'abandonna de nouveau.
Le geste et le mouvement en sont pourtant bien dignes d'être
h raison de leur concordance avec la grande ordonnance des masses.
N" 301 : Un pendu qui ressuscite
Lithographie. — Cat. A. Moreau, p. 74.
Le pendu court après un homme qui fuit devant lui. Cette planche, destinée à illustrer une
nouvelle de M. V. Schœlcher qui porte le titre indiqué plus haut, ne fut jamais terminée :
il n'en a été tiré qu'une ou deux épreuves et la pierre grattée ensuite.
N" ^02 : Duguesclin
Lithographie. — H. o'"272, L. o'"204. — Vente posthume îles
deux pièces, premier état; : 18 fr.; Langlais ( les deux pièces,
premier état, avec Front-de-Bœuf) : 68 fr.; De La Combe (les deux
pièces, deuxième état) : 10 fr. -r- Cat. A. Moreau, p. 46.
Premier état. Sans aucune lettre.
Deuxième état. En haut, à gauche : « Chroniques de France » ; à droite :
■• Château de Pontorson » ; en bas, à gauche : c Delacroix del. à Paris,
chez H. Gaugain et, C'"=, rue Vivienne, 2, et rue de Vaugirard, 34» ; à
droite : « Impi^lith. dé P. Gaugain. London by Engelmann Graff Coindet
et C'i' Dean Street Soho » ; au milieu : <i Sous le pied des chevaux, le
pont-levis résonne. C'est lui, c'est Monseigneur, et dans la vaste cour
chacun veut, des premiers, saluer son retour. »
Troisième état. En haut, à gauche : « Chroniques de France » ; à droite : n Scènes de la
Fronde » ; en bas, à gauche : << C. Roqueplan del. » ; h droite : « Lith. de Ligny et Duplaix,
rue Quincampoix, 38" » ; au milieu : <i Entrée du duc de Bourgogne ».
C'est le peu de succès de cette pièce et de la précédente, avec le nom de Delacroix, qui en-
gagea l'éditeur à y substituer celui de Camille Roqueplan, beaucoup plus populaire à cette
époque : telle est l'origine du troisième état.
Cette pièce et celle qui suit ont été publiées dans un recueil de dix planches lithographiées.
Sur la couverture, un encadrement au milieu duquel se détache sur fond noir un
écusson entouré d'une guirlande de fleurs. En haut : « Madame Amable Tastu » ; au milieu:
« Chroniques de France, dessinées et lithographiées : MM. Boulanger, Delacroix, Devéria et
C. Roqueplan, à Paris » ; en bas : H. Gaugain et C'°, rue Vivienne, n" 2 ».
iSîQ
L'ŒUVRE DE DELACROIX
85
N° ^0} : La sœur de Duguesclin
Lithographie. — Premier ctat : H. o'"252, L. o™2o3. — Deuxième
étal: H. o"2 lo, L. o"'i 5o. — Gravé sur bois: o'"2io sur o™2 5o dans
le Magasin pittoi'esqiie [Juin 1864). — Cat. A. Moreau, pp. 45, 143.
Premier état. Sans aucune lettre.
Deuxième état. En haut, h gauche : « Chroniques de France » ; à
droite : o Château de Pontorson »; en bas à gauche : « Delacroix, fec;
à Paris, chez H. Gaugain et C'", rue Vivienne, 2, et rue de Vaugi-
rard, n" 34 »; à droite : « Imp. lith. de H. Gaugain, London by Engelmann
Graff Coindet et C'" Dean Street Soho »; au milieu : « Soudain courant
à lui, la sœur du châtelain le frappe de Tépée en s'écriant : Guesclin.
Octobre 1829. »
Troisième état. En haut, à gauche : « Chroniques de France » ; à droite : « Scène de la
Fronde » ; en bas, à gauche : « C. Roqueplan del. » ; adroite : « Lith. de Ligny et Duplaix,
rue Quincampoix, 38 » ; au milieu : « La Tour de Nesles. »
Cette lithographie a été exécutée sur pierre par le procédé dit au lavis.
N° 304 : Richard et Wamba
Lithographie. -— H. o^igS, L. o"^255. — Cat. A. Moreau,
p. 3i.^
Cette lithographie est extrêmement rare. M. Riésener possédait, avec
le croquis original de cette composition, le calque qui servit à Dela-
croix pour le transporter sur la pierre. C'est le croquis nième que
nous reproduisons. La lithographie ne porte ni k-ttre, ni date, ni
signature. On sait que le monf est emprunté à ïlvanhoe de Walter
Scott. Richard et Wamba se sont arrêtés dans la foret. Ce dernier
montre du doigt l'endroit où se dissimulent les hommes de Jean-sans-Terre.
N°' ^o^, }o6 : La Fiancée de Lamermoor
i" Lithographie. — H. o'"2i7, L. o"'!!^.
— "Vente De La Combe (premier état): 19 tr.
— Cat. A. Moreau, p. 47.
2° Lavis à Feiicre de Chine. — H. 0^14,
L. o™fi. — "Variante du précédent.
Premier état. En haut : « Walter Scott, chap.
XXIX »; en bas à gauche : « Delacroix, fec,
à Paris, chez E. Ardit, éditeur, rue Vivienne,
2 » ; à droite : « Imp. lith. de E. Ardit London
by Engelman Graff Coindet Dean Street Sohon;
au milieu : n n" 17, January i83o » ; puis ces
mots :« Et l'oiseau tomba aux pieds de Lucie dont la robe fut tachée
de quelques gouttes de sang. » Avec le texte anglais en regard.
Deuxième état. Ln bas adroite : 0 Inlp. lith. de E. Ardit » ; mais sans l'adresse de Ardit à
gauche, ni celle de Engelmann à droite et sans la date en anglais au-dessous du n° 17.
86
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1820
N" J07 : Front-de-Bœuf et la sorcière
Lithographie. — H. o'"2io, L. 200. — Ventes Langlais : 68 fr.
(avec les deux pièces des « Chroniques de France)»'; posthume
(sous le titre de « Boisguilhert sur son lit, maudit par la
Sorcière») : jS fr.; Sensier, décembre 1877 : 25 fr. — Cat.
A. Moreau, p. 3 i.
La force du mouvement en cette scène, tirée de ïlvanhoe deWalter-
Scott,est admirable et, malgré la richesse du lieu où elle se passe,
des boiseries sculptées, des hautes courtines relevées et drapées,
des armes jetées dans l'ombre, elle prend un caractère de violence,
de désordre absolument fantastique, qui tient précisément à l'habile
contraste d'un décor somptueux et de personnages a demi nus et dépenaillés.
N" J08 : Front-de-Bœuf et le Juif
Lithographie. — H. o"i66, L. o'"2i7. —
Vente Parguez (deuxième état) : 3 fr. — Lan-
glais, 1868 (deuxième état): 2 fr. — Vente
posthume (deux épreuves, premier et deuxième
états'' : 7 fr. — Cat. A. Moreau, pp. 45 et 74.
Premier état. Croquis sur les marges: à gauche, une femme
nue en pied, les bras liés derrière le dos; à droite, une
femme en buste, les cheveux épars flottant sur ses épaules
découvertes. Nous donnons une reproduction de ces deux croquis.
Deuxième état. Sans les croquis. En haut à gauche ; « Ivanhoé »; à droite : n Chap. XXII»;
au milieu : i< Walter Scott ». En bas à gauche : « Delacroix, fec, à Paris, chez Gaugain et
C"^, rue Vivienne, n" 2 »; à droite : « Imp. lith. de H. Gaugain, rue de Vaugirard, n° 34;
London by Engelmann Coindet et C'", St-Martin Lane Leices''" square»; au milieu:
(1 n" II, septembre 1829 » et ces mots : « Chien maudit issu d'une race maudite, vois-tu ces
balances? Il faut que tu m'y pèses mille livres d'argent » . Et le texte anglais en regard.
N" 309 : Lion de F Atlas
Lithographie. — H. o°'33, L. o'"46. — Ventes Dubois (pre-
mier état, avec le tigre) : 41 fr.; Langlais (premier état, avec
le tigre et deuxième état : 33 fr.; Soleil (premier état, seul) :
2 3 fr. — Cat. A. Moreau, p. 43.
i'remier état. Sans aucune lettre.
Deuxième état. En bas, à droite : o Delacroix, fec. ». Certaines
(.preuves sans nom ni adresse d'imprimeur; au milieu: n Lion de
1 Atlas » et le timbre sec en triangle de n E. Ardit à Paris u ;
En bas h gauche : « A Paris, chez H. Gaugain et C'<^, rue de Vaugirard,
te : « Delacroix, fec, Imp. lith, de H. Gaugain, rue Vivienne, n" 2; » au
de l'Atlas. » Il existe de cette planche et de la suivante une copie retournée.
r82Q
L'ŒUVRE DE DELACROIX
87
N° 3 10 : Tigre royal
Lithographie. — H. o™33, L. o"'^6. — Ventes Delacroix
(premier état) : 5o fr.; (deuxième état) : 21 fr.; (deuxième
état sur chine, mais coupée, avec le Lion de l'Atlas) : 20 fr.;
de C. 1"^'' février 1861 (les deux pièces, deuxième état) : 9 fr.
— Cat. A. Moreau, p. 44.
Premier état. Sans aucune lettre;
Deuxième état. En bas à gauche : « A Paris, chez Gaugain et C'',
rue de Vaugirard, n" 2, a Paris, »; tandis que dans le troisième
état on lit : 0 Rue Vivienne » et non pas comme ici deux fois :
« Rue de Vaugirard ; » au milieu : 0 Tigre royal. »
Troisième état. En bas à gauche « A Paris, chez H. Gaugain et C'", rue de Vaugirard, n" 84; u
à droite ; « Delacroix, fec, imp. lith. de H. Gaugain, rue Vivienne, n° 2; » au milieu :
« Tigre royal. »
Une lettre de Constant Dutilleux dit bien l'effet que produisirent ces travaux sur la jeunesse
enthousiaste d'alors : « Il vient de paraître de lui deux belles lithographies, un lion et un tigre;
c'est beau comme un Delacroix. Je n'en sais pas le prix, je n'en sais que la beauté. »
N°^ ^11, ji2 : Vercingétorix
i" Lithographie. — H. o'"25, L. o'"i8. — Ventes De La Combe,
i863 : 20 fr.; posthume, 1864 (les deux pièces): 7 fr.; Du-
bois, 1866 : 5 fr.; Soleil, 1872 (dans un lot): 38 fr.; Cat. A.
Moreau, p. 44.
En légende, en bas à gauche : « Lacroix, 1829, » et à droite : 0 Lith.
Engelmann. »
Cette planche servit de cul-de-lampe pour l'introduction du Voyage
en Auvergne du baron Taylor, p. 9.
2" Delacroix avait commencé sur ce même sujet, dit M. Moreau,
une première pierre restée inachevée. — H. o™23o, L. o™i6o. — La
tète du guerrier seule est terminée, le reste du personnage et le bou-
clier sont légèrement indiqués. Le paysage et les accessoires du pre-
mier plan n'existent pas, même en indication.
Nous ne connaissons de cette planche incomplète que deux épreuves; l'une de ces épreuves
est conservée à la Bibliothèque nationale.
N° ) 1 3 : Esclave turque
Lithographie. — Cat. A. Moreau, p. 74.
Nous reproduisons textuellement ce que dit M. Moreau de cette lithographie que lui-même
n'a jamais rencontrée en dépit de ses recherches : « Vêtue d'un riche costume oriental, l'es-
clave est assise sur un sopha très bas. «
Lithographie d'une aquarelle de Richard-Parkes Bonington. — « Delacroix, peu satisfait de
cette lithographie qui ne rendait pas assez bien selon lui la vigueur de l'original, la fit effacer
sur la pierre après un tirage de deux épreuves. »
N° j 14 : Tigre couché
Eau-forte. — H. o™096, L. o™i48. — Vente posthume (trois
épreuves du troisième et du quatrième état' : 7 fr. — Cat. A.
Moreau, p. 18 et 19.
Premier e'tat. Eau-forte pure.
Deuxième état. L'animal est à peine visible sous les travaux de
roulette, le côté droit du premier plan entièrement blanc sans
aucune hachure.
Troisième état. Le dos de l'animal se détache en foncé sur le fond et la tête en clair. 11 n'y a
pas trace de paysage à gauche.
Quatrième état. Le corps de l'animal, extrêmement vigoureux, s'enlève franchement sur le
rocher très nourri de détails; le fond du paysage très nettement indiqué.
Cinquième état. Bords rectitiés.
Sur certaines épreuves, le terrain et le rocher, incomplètement essuyés, produisent des effets
tout à fait différents et font croire au premier abord à des états plus nombreux.
N"^ ^15, ji6 : Études de chevaux
I" Cheval pur sang à Técurie. — Aquarelle.
— Vente Villot. — Appartient à M. Pierre
Legrand. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Cheval vêtu pour la promenade. — Aqua-
relle.— Vente posthume.— Vente Pils: 1 10 fr.
— Non catalogué par M. Moreau.
Nous ne nous lasserons pas de reproduire ni d'admirer les innom-
brables études de chevaux sorties de la main de Eugène Delacroix. La sincérité de son travail
d'après la nature nous livre le secret de sa puissante imagination dans les œuvres composées,
s'il est vrai que le meilleur de l'imagination soit fait de mémoire.
N" 3 17 : Psara, Episode de la guerre des Turcs et des Grecs
^ Dessin. — Gravé par Pourvoyeur: H. o'^ojo, L. o™o6o. — Cat. A.
'"^v Moreau, p. 106.
:';> . . . ...
S ") Un janissaire foule aux pieds deux Grecs morts. De la main droite il tient
un cimeterre, de la gauche l'étendard du prophète. Au fond, apparaissent
les murailles crénelées d'une ville.
Comme le suivant, ce dessin fut composé pour l'édition illustrée des C/ia'î-
sons de Béranger. Il fut fait successivement plusieurs tirages de ces planches.
Les remarqués faites au numéro suivant sur ces divers tirages des planches
et les substitutions de nom, s'appliquent également h ce numéro. Il v aurait
donc trois états de ces planches. Le premier sans titre; le second avec le titre et les noms de
Jules Boquet et de Perrotin, éditeurs; le troisième, sans le nom de Boquet, et avec celui de
Mauduit au lieu de Pourvoyeur. — Nous mentionnons les trois états signalés par M. Moreau,
mais nous croyons ii une erreur. Nous n'avons jamais vu qu'un seul état de cette planche.
N° 3i8 : Louis XI
lacroix à
parut en
le nom
Dessin. — Gravé par Pourvoyeur ( premier
état) : H. o™o66, L. o^oSS (deuxième état),
H. o™79, L- o"'6i. — Cet. A. Moreau, p. 107.
Le roi vient de quitter son fauteuil et s'approche d'une
fenêtre grillée; derrière lui, un page et deux hommes
d'armes.
Ce dessin a été fait en vue de la gravure pour la pre-
mière édition illustrée en quatre volumes des C/îiTn.soH5
de Béranger, publiée par Perrotin en 1829. Charlet,
Decamps, Bonington, Grenier, collaborèrent avec De-
cette édition. La gravure était de Pourvoyeur. Dans une édition ultérieure qui
1844, et qui se compose de deux volumes in-12, les planches furent agrandies et
de Mauduit substitué à celui de Pourvoyeur.
N° ^19: Page conduisant un cheval
^ ~r^ * <-î^:?fe^ Dessin rehaussé d'aquarelle. - H.o"'ii6, L. o'"i55. — Non
K^^* 'iî^tfî^i ^ Cette aquarelle non signée a été offerte à M. Paul Lacroix ( Biblio-
ffl^î * jf/"'iît<A phile Jacob) par Jules Janin, en 1829, peu de jours après que Eugène
^^^^■^""('iTs ■^ ^ Delacroix l'eut terminée, à l'intention de ce dernier. Jules Janin
^^S'^'-^.yJ^^^^ publia des « Salons » dans V Artiste. Delacroix lui écrit en iSSg pour
'^^^-^ . —^^' le remercier au sujet d'un article et ajoute : c Quoique je n'aie pas
encore obtenu d'être rangé au nombre des bons sujets de la peinture,
docile aux avis de l'Ecluse et autres, je n'en suis pas moins très flatté d'occuper de moi.
Tenir de la place, voilà, il faut en convenir, l'ambition de tous nous autres, et en tenir, autant
dans vos lignes, mon cher Janin, est chose plus flatteuse encore. » Ce l'Ecluse est Etienne
Delécluze, le critique classique d'alors au Journal des Débats.
Année i83o
N° po : Cromwell au château de Windsor
Toile. — Dimensions inconnues. — Salon de i83i. — Cat. A. Moreau, p. 171.
On lit dans le livret du Salon de i83i, sous le numéro 314 : (c Cromwell dans le château de
W
dan:
il tombe à cette vue
'indsor. Ayant retourné par hasard un portrait de Charles 1=
ins une méditation profonde; il oublie qu'il a un témoin qui l'observe : c'est un espion
du parti royaliste qui a obtenu accès auprès de lui^Wodstock, de Walter Scott). — Appar-
tenant h M. le duc de Fitz-James. » Le tableau est sans doute en Angleterre.
go
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i83o
N° ^2 1 : Bataille de Poitiers
Toile. — H. i'"i3,L. i'"45. — Signe et daté.
— Exposition universelle de i855. — Ap-
partenait alors à M. le vicomte d'Osembray.
— Ventes Marmontel, i i mai 1868 : 28,000
fr.; Edwards, 7 mars 1870: 42,650 fr., à
M. Aguado. — Cat. A. Moreau, pp. 189
et 258':
Le titre complet de ce tableau célèbre est : t. Le
roi Jean à la bataille de Poitiers. Son jeune fils,
Philippe-le-Hardi, cherche a le protéger dans
' 1 mêlée.» Admirable, tragique mêlée, en effet,
d'hommes et de chevaux combattant sous le ciel
bas, sinistre, où se mêlent aussi les nuées fu-
rieuses. Rien ne ressemble moins aux batailles
de convention, rien ne donne la sensation plus
intense du combat homme à homme, corps à corps, des étreintes meurtrières
N" 322 : Bataille de Poitiers — Esquisse
Toile. — H. o'"45, L. o"'55. — Esquisse. — Numéro 54
de la Vente posthume : 4,700 fr. à M. de Laage. — Vente
Diaz, janvier 1877: 12,000 fr.; baron de Beurnonville,
avril 1880 : 10,000 fr. — Cat. A. Moreau, p. 3i i.
Il semble, au premier aspect, que les différences entre l'es-
quisse et l'œuvre définitive (voir ci-dessus] soient insensibles.
Les personnages sont groupés de même et h peine plus nom-
breux dans le tableau^ On remarquera cependant que, dans
celui-ci, le maître a baissé la ligne d'horizon, de manière
à ce que les étendards se détachent en vigueur sur le ciel,
ce qui donne plus d'air et de mouvement à la composition.
Lorsque, en i83i, Delacroix réalisera la Bataille de Nancy, dont il avait tracé l'esquisse en
1828 (voir n" 261), il apportera dans la composition des modifications analogues.
N" 323 : Jeune tigre jouant avec sa mère
Toile. — H. i'"27, L. i"'90. — Signé, daté. — Salon de i83i.
— Gravé à Teau-forte par Charlotte Julien : H. o"'i46, L.
o"'225 ; eten bois par Bœtzel, d'après Feyen-Perrin pour
les Artistes de mon temps de Charles Blanc: H. o^'iig,
L. o"'i65. — Lithographie par le maître (voir année i83i).
— Cat. A. Moreau, pp. 47, 104, 171.
Cette admirable étude, qui faisait la gloire du cabinet de
M. Maurice Cottier, avait été peinte pour M. Thuret. M. Cottier, en mourant, l'a léguée au
Louvre, ainsi que son Hamlet\ mais il en a laissé l'usufruit à madame M. Cottier.
i83q
L'ŒUVRE DE DELACROIX
91
N° 324 : Jésus et le paralytique
Toile. — H. 0^24, L. o"'28. — Appartient à M. Ciioquet. — Non
catalogué par M. A. Moreau.
Cette esquisse est d'un ton vineux très doux et d'un sentiment de com-
passion délicieux encore apparent dans notre croquis, maigre la petitesse des
dimensions. Le geste suffit à l'éloquence de l'oeuvre, non seulement ici,
mais, on peut le dire, dans l'œuvre entier de Eugène Delacroix.
N° 325 ; Indien armé du gourka-kree
Toile. — H. o"'40, L. o'"32. — Signé à droite. — Salon de i83 1 .
— Gravé à Teau-forte par Lerat pour la Galerie Diirand-Ritel :
H. o"M25, L. o™098. — Cat. A. Moreau, p. 171.
Ce tableau, peint pour ^L Pierret, fut copié par le maître lui-même, à
la suite du Salon de i83i, pour M. Alexandre Dumas. Il fut exposé de
nouveau, en 1878, dans la galerie de M. Durand-RueL La puissance
du ton, en cette petite toile, est merveilleuse et le geste superbe. De-
bout à la lisière d'un bois, l'Indien en embuscade écarte des branches
d'arbre pour examiner les mouvements des troupes anglaises, campées
à quelque distance dans une plaine. — Delacroix, dans sa jeunesse,
avait fait une longue et patiente étude des miniatures indiennes, les
avait copiées et recopiées avec la plus na'ive fidélité [M. Philippe Burty
possède quelques-unes de ces copies). Mais ici le maître interprète librement, avec une ad-
rable certitude, un motif qui lui était ainsi devenu familier.
N'^ J26 : Le 28 juillet 1830
Toile. — H. 2™62, L. 3'"32. — Salon de i83i.
— Exposition universelle de i855. — Gravé à
Teau-forte par Salmon : H. o'"35o, L. o™443
— Lithographie par Mouilleron : H. o'"235, L.
o'"264. — Gravé sur bois pour affiches et frontis-
pice de l'Histoire de dix ans, de Louis Blanc
lafriches : H. o'^ôg, L. o'"5o; frontispice: H.
o"'22, L. o'"i5). — Appartient au Musée na-
tional du Louvre. — Cat. A. Moreau, pp. i23,
140, 2o5, 171.
.. Le Vingt-huit Juillet » dit Théophile Gautier, « est
un morceau unique dans l'œuvre du peintre qui,
cette fois seulement, aborda le costume moderne.
Auguste Ba'rbier venait de lancer ses » ïambes » en-
flammés, et cette rude poésie à la bouche noire de poudre et aux manches retroussées
pour le combat, dut échauffer la verve du peintre. On retrouve, dans sa composition mi-
réelle, mi-allégorique, tous les personnages du poète, depuis la forte femme « aux puissantes
92
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i83o
mamelles », jusqu'au pâle voyou au corps chétif. au teint jaune comme un vieux sou. Cette
Liberté dem.i-nue.coifïée du bonnet phrygien, agitant le drapeau tricolore au-dessus d'une
barricade jonchée de cadavres, étonne et surprend par son aspect fantastique au milieu de
personnages d'une réalité crue et brutale; mais, cette dissonance acceptée, quelle figure
neuve que celle de l'enfant embarrassé dans les butfieteries d'un soldat mort qu'il a
dépouillé et tenant un pistolet d'arçon! Comme c'est bien le gamin de Paris, cette graine
de héros, si elle tombe en bon terrain! Comme ces cadavres du premier plan sont jetés
avec une vérité terrible, pêle-mêle parmi les poutres et les pavés ! »
Delacroix estimait assez ce tableau pour en invoquer le souvenir comme un titre à l'appui
de sa candidature à l'Académie des Beaux-Arts en février iSSy, par suite de la mort du baron
Gérard. On trouve le 28 juillet i83o parmi « les noms de quelques-uns des ouvrages sur
lesquels il prend la liberté d'appeler les souvenirs indulgents de l'Académie.
N° 327 : Un fait inconnu de juillet 1830
Dessin. — Gravé sur bois par Porret pour le « Salon de i83i »
de Gustave Planche: H. D'yoga, L. o"'iqo. — Cat. A. Moreau,
p. 142.
Il est de tradition que Delacroix dessina lui-même le bois. Le premier
état porte, en bas, à gauche:» E. Delacroix »; adroite: « Porret ». Le
deuxième état porte, en bas, au milieu : « Un fait inconnu de Juillet
i83o ». C'estune réduction sommaire du célèbre tableau reproduit sous
le numéro précédent. « Les insurgés de la barricade, dit Théophile Silvestre, s'enivrent
de poudre et de soleil au fond d'un quartier noir et tortueux de la vieille Cité, entre
l'Hôtel-de-Ville qui les mitraille, l'Hôtel-Dieu qui les repousse et la Morgue qui les attend.»
N° 328 : Portrait d'un élève de la pension Goubau
qu on
Toile ovale. — H. o"'6o, L. o'"5o. — Signé, daté au bas à droite.
— Appartient à M. G. Arosa. — Non catalogué par M. Moreau.
Amédée Berny d'Ouville fut, comme l'avait été son frère Eugène en
1828, lauréat du concours général en i83o. Il était alors en sixième
et obtint le second prix de thème latin. Il mourut plus tard, en mer,
dans une traversée de l'Atlantique. Il est vêtu d'une redingote brun
verdàtre, d'un gilet jaune citron, d'une cravate rose clair. Ce portrait
soumis à M. Eugène Berny d'Ouville, est reconnu par lui et il s'écrie :
a C'est bien mon frère, il avait tout à fait cette petite tête de fouine.»
Et tel est, en effet, le mérite particulier des portraits peints par Eu-
gêne Delacroix. Il n'y faut pas chercher la ressemblance photogra-
phique, proprette, bourgeoise, on ne l'y trouverait point. Mais ce
est toujours sûr d'y rencontrer, c'est l'exactitude absolue et caractéristique du type.
N" 329 : Tigre couché
Pastel. — H. g""! 5, L. o'"22. — Vente baron de G. 1 858 : 1 5o fr. — (Voir l'eau-forte
originale à l'année 1846). — Cat. A. Moreau, p. 293.
i83o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
93
N° 330 : Gluck au piano
Pastel relevé d'aquarelle. — H. o'"222, L. o^i/o. — Gravé à
Peau-forte, de mêmes dimensions, par M. Villot. — Vente Villbt,
1864 : 96 francs. — Cat . A. Moreau, pp. 85, 25.
«Le musicien exécute au piano l'opéra d'Armide; il prie son auditeur,
debout à ses côtés, de lui tourner les feuillets d'une prétendue partition
dont toutes les pages étaient blanches. »
11 existe de l'eau-forte de M. Villot plusieurs états. Le premier, à l'eau-
forte pure, n'a aucune lettre : deux épreuves. Le deuxième état, avec des
travaux de roulette, montre la lettre. En bas à gauche : « Eug. Delacroix,
del. »; à droite : « Frédéric Villot, sculp., i835». Dans le troisième, la
tète de Gluck a été refaite. Quatrième état : Tous les travaux de rou-
lette et de pointe sèche sur l'habit et la culotte sont adoucis et rendus plus transparents.
N" 3 3 1 : Jeune fille auprès d'un puits
Aquarelle. — Salon de i83i. — Cat. A. Moreau, p. 172.
N"^ 332, 333, 334, 3M • Les Saisons
i°Le Printemps. — Sépia.
— H. ,o'"i35, L. o'"27o.
2° L'Été. — Sépia. — H.
0"'I05, L. 0'"220.
3° L'Automne. — Aqua-
relle. — H. o^iSo, L.
25o.
4° L'Hiver. — Sépia. —
H. o'"095, L. o-^iSS.
Ces quatre sujets ont été
exécutés, dit-on, en peinture
pour la salle à manger de
Talma. Nous reproduisons
les dessins qui ont passé à la
Vente posthume et qui ap-
partiennent, avec d'autres
croquis de ces compositions, à M. Alfred Robaut. Ils ne sont pas catalogués par M. Moreau.
N" 336 : Cheval arabe
Aquarelle.— Ventes Villot, i865: i5o fr.; Barillot, 1866 : 172 fr.— Cat. Moreau, p.291.
« Il est tourné vers la gauche. Dans le fond, une tente et plusieurs figures. »
94
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i83ô
N" jjj : Lion
Aquarelle gouachée. — H. 0^20, L. o"'3o. — Vente baron de C, i858 : 100 fr. —
Cat. A. Moreau, p. 293.
N° ^38 : Gulnare
Aquarelle. — Salon de 1 83 i . — Cat. A. Moreau, p. 172.
Gulnare vient trouver Conrad dans sa prison (Lord Byroa, Le Corsaire).
N" }}<)'■ Ecce Homo
Sépia. — H. o'"i5, L. o"'09. — Salon de i83i. — Voir i833.--Cat. A. Moreau, p. 172.
iriéme montre la tête
N" )40 : L'église des Jésuites
Sépia rehaussée d'aquarelle. — H. o'"253, L. o'"20o. — Gravé
à Teau-forte, de mêmes dimensions, par M. Villot en 1848. —
Cat. A. Moreau, p. 88.
Le suiet est tiré du conte d'Hoffmann. Le voyageur aide le peintre qui
travaille dans la chapelle; le premier est monté sur une échelle au pied
de laquelle se tient le peintre, sa palette à la main.
De l'eau-forte de M. Villot, il existe plusieurs états, qui, tous, ont la
lettre gravée à la pointe. En bas, à gauche : 0 Eug. Delacroix, del. »;
a droite : « Fréd. Villot, sculps., 1848 »; au milieu : « L'église des
Jésuites (Hoffmann) ».
Le premier état est à l'eau-forte pure; le deuxième a reçu des travaux
de roulette; sur le troisième, les veux du peintre sont effacés. Le qua-
du peintre retouchée et le terrain du premier plan très teinté.
N*" 341 : Gœtz de Berlichingen
Croquis à la plume. — H. o"'20, L. o'"3i. — Signé, daté du
II juin i83o. — Appartient à M. Feuillet de Conches. —
Non catalogué par M. Moreau.
Est-ce réellement Gœtz de Berlichingen ? La tête d'homme, à
droite, rappelle en effet, le Gœtz des belles gravures du Magasin
pittoresque (voir année 1843); mais le groupe de gauche nous tait
l'effet de viser moins haut et de représenter simplement quelque
étudiant se faisant versera boire par quelque fille de taverne allemande.
i83o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
q5
N°' j42, H^ H4, H^ H^5 H7^ H^ = Études de chats
Chat assis, vu de face.
H.
i" Le Chat de village. — H. o"'02o, L.
o"'o5o.
2° Tête de chat, tournée à droite. — H.o^oôo
L. o'^oSo.
3° Silhouette de chat maigre. — H. o'"o45,
L. o'"5o.
4° Petit chat jouant. — H. o'"075,
L. o^oqo.
5° Le Chat maigre. — H. o"'040,
L. 0™020.
6° Etude de chat d'après nature. —
H. o'"o65, L. o"'070.
L. o'"oi5.
o"'040,
Ces dessins font partie des quatre-vingts illustrations du livre de M.Champfleury : Les Chats,
histoire, moeurs, observations, anecdotes. Rothschild, éditeur, cinquième édition. — La
mise sur zinc est de M. Kreutzberger, la gravure est faite par le procédé de M. Comte.
N" }49 : Paul Foucher
Sépia. — Caricature. — H. o'"i3o, L. o"M 5o. — Reproduit en fac-similé
de mêmes dimensions dans les Cénacles romantiques de M. Ghampfleury.
— Non catalogué par M. A. Moreau.
» J'ai trouvé,» dit M.Champfleury, « dans les cartons de M. Pierret,un dessin à
la sépia de Eugène Delacroix, représentant l'allure habituelle de ce nouveau
petit Saintinet ; c'est dire qu'on n'entrevoyait dans le monde ni dans les ateliers
le bon Paul Foucher sous un jour bien sérieux... La maison hospitalière des
Picrret s'ouvrait tous les soirs à un groupe d'amis des arts : Delacroix, Schwiter, Frédéric
Villot, A. Jal, etc. Divers croquis donnent à croire qu'à la suite de quelque mésaventure ré-
cente attribuée à Paul Foucher, toute une soirée fut consacrée à dessiner ses faits et gestes. »
N° } ^o : Assassinat du duc de Bourgogne
vaille d
l'entrev
sans Pe
Croquis à la plume. — H. o^iSS, L. o'"23o. — Appartient
à M. Philippe Burty. — Non catalogué par M. Moreau.
Admirable croquis, tracé d'un jet de plume. Les mouvements si
différents de l'attaque violente et de la défense impuissante sont
rendus avec la décision et la certitude d'un grand maître. Il est
peu d'œuvres d'art qui, par des moyens si simples, arrivent à
communiquer l'émotion aussi vive d'un drame. La combinaison
des lignes dans le geste des bras levés pour frapper est une trou-
i génie comme il y en a tant dans l'œuvre de Eugène Delacroix. — C'est à l'issue de
ue avec le dauphin Charles, au pont de Montereau, en 1419, que fut assassiné Jean
ur, qui, lui-même, avait fait égorger Louis d'Orléans en 1407.
96
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i83i
Année i83i
N° ^ p : Melmoth ou Intérieur d'un couvent de dominicains
à Madrid ou l'Amende honorable
Toile. — H. i'"3î, L. i'"62. — Signé au milieu
et daté i83i. — Salon de 1834. — Gravé à
Teau-forte par M. Boilvindans les dimensions
de : o^ioj sur o"i36, pour la galerie Du-
rand-Ruel. — Cat. A. Moreau,pp. 174 et 255.
« J'ai trouvé à Rouen de quoi faire un tableau qui
m'inspire assez », écrit Eugène Delacroix le 3o
septembre i83i. Ce a de quoi faire un tableau »
était la salle du palais de justice. M.Alfred Robaut,
dans une biographie de Corot, nous a gardé le
souvenir de l''impression que l'illustre paysagiste
avait éprouvée en revoyant cette salle: (■■ Il fallut
l'accompagner au palais de justice, où il eut, à
l'éloge de Delacroix, une superbe exclamation.
Nous étions assis sur un des bancs qui font le tour
de la salle des Pas-Perdus; il était là silencieux depuis un moment, les yeux levés sur les
hautes voûtes en bois sculpté, quand tout à coup il s'écria: n Quel homme ! quel homme! »
Il revoyait dans sa pensée le tableau de l'Amende honorable que nous avions admiré ensemble
quelques jours auparavant dans les galeries Durand-Ruel. Pour lui, la salle n'était rien,
Delacroix était tout, quoique celui-ci n'eût fait que s'en inspirer comme fond à des per-
sonnages de Melmoth. »
N° 3^2 : Ruines de la chapelle de l'abbaye de Valmont
To lie. — H. o'"47, L. o^SS. — Daté. — Appartient à M. Bornot.
— Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix écrit le 3o septembre i83i, à son ami Pierret : « Je suis à
Valmont, séjour de paix et d'oubli du monde entier. Le charme que
j'y trouve, mon vieil ami, est dans ce dépouillement complet d'émo-
tions vives et saccadées qui font de ma vie de Paris une épreuve
continuelle et une danse sur la corde sans balancier. Affaires d'argent
et d'amour-propre, obligations de politesse, amour même, tout cela
ne tient pas dans mon cœur et dans mon esprit la place qu'une seule
de ces choses-là absorbe dans mon être, quand je me trouve au milieu
de ce foyer d'agitations continuelles où tu respires. Je ne me suis
jamais rendu compte à un pareil degré de l'inutilité des folies pour
faire mener heureusement la vie. Ce qui nous occupe surtout à Paris, c'est la fureur de faire
figure. Je crois à présent que si je trouvais un homme qui voulût me fournir le nécessaire
comme à un chapon qu'on engraisse, c'est-à-dire d'avoir tout mon travail et une autorité assez
i83i
L'ŒUVRE DE DELACROIX
97
grande sur ma liberté, je passerais un marche' tout de suite. J'ai trop de liberté pour en
sentir le prix. Ici j'en ai moins et davantage. Moins, en ce que je vis avec un despote
complet qui me gouverne physiquement, qui me fait dîner à telle heure, qui me fait aller
dans tel endroit pour mon plaisir, etc. Davantage, en ce que mon esprit, dégagé du souci
de s'occuper de mille soins insupportables à ma nature, divague à son gré, jouit de son propre
calme, crée des palais et des enchantements, sans que la voix de la nécessité triviale le
rappelle à terre. » Lettres, Édition Ph. Burty.
N° 5 5 ^ : Boissy d'Anglas
Toile. — H. o"'7g, L. i'"04. — ■ Signé et daté
i83i. — Gravé à Teau- forte par Bracque-
mond dans les dimensions de : 0^415 sur
o'"545. — Appartient à M. Larrieu. — Cat.
A. Moreau, pp. 172, 190.
La planche de M. Bracquemond fut exécutée sur
une commande du Conseil municipal de Paris;
elle a sept états, les six premiers avant la lettre ;
le septième porte, en bas à gauche : « E. Delacroix,
pinx. i>; à droite : « Bracquemond, aquaf. »; au
milieu : « Imp. A. Salmon. — Boissy d'Anglas
présidant la Convention le 1°^ prairial an III. >>
(I Delacroix. I) a dit Théophile Silvestre, n atteint le
dernier terme du fantastique et du terrible dans
le Boissy d'Anglas. Le peuple s'engouffre comme
un fleuve en colère dans l'enceinte de la Convention nationale. Murailles, escaliers, galeries,
craquent et chancellent; ouvriers, clubistes, guenillards, montent les uns sur les autres en
se cassant les membres; les représentants restent immobiles; le président contemple, sans
frayeur, la tête sanglante de Féraud qui lui est présentée au bout d'une pique, et les trico-
teuses, penchées du haut des tribunes, éclatent en tonnerres d'applaudissements. Un jour
rare glisse péniblement dans la salle pardessus les têtes qui foisonnent; la poussière soulevée
par les trépignements vole en tourbillons dans cette atmosphère orageuse, traversée par l'éclat
livide des baïonnettes. » — Ce tableau fut peint comme le précédent, pour un concours,
dans lequel la victoire resta au peintre Court. On reprochait à Delacroix de n'avoir pas,
selon la tradition, découvert la tête du président de l'assemblée.
N° 3 54 : Charles-Quint au monastère de Saint-Just
Toile. — H. o"'75, L. i'"i5. — Signé en haut, à droite et
daté i83i. — Salon de i833. — A figuré à l'exposition des
Alsaciens- Lorrains, en mai 1874. — Vente du comte de
Mornay, 29 mars 1877; 9,600 francs au marquis de la Valette.
— Voira 1 833, lithographie; à 1837, variante peinture; à 1839,
réduction exacte. — Cat. A. Moreau, pp. 48 et 173.
Revêtu du froc, l'empereur assis et à demi renversé dans l'attitude
d'un dilettante mystique, joue de l'orgue. Un autre moine imberbe,
debout auprès de lui, l'écoute. — Ce tableau qui a appartenu à made-
moiselle Mars,fut acheté 2,000 francs à la vente de la célèbre comédienne par M. de Mornay.
N° j ^ 5 • Bataille de Nancy
Toile. - H. 2"'37. L. B-^Sô.
— Salon de 1834. — Exp,
univ. i855. — Donné par
TEtat au Musée de Nancy.
— Gravé par Lançon : H.
o'"r23, L. o^iqS, pour un
livrede R. Ménard,/'^/5ace-
Lorraine. — Photographié
parBraun. — Cat.A.Moreau,
pp. 184 et 2o3. — Voir année
1828, n°26i.
Il Le 5 janvier 1477, le duc de
Bourgogne, Charles le Témé-
raire, livre cette bataille par
un temps glacé qui fut la perte
de sa cavalerie. Lui-même,
embourbé dans un étang, fut
tué par un chevalier lorrain au
moment où il s'uttoraiit d'en sortir. » "Notice du catalogue de i835.1 Commencé en i83i,
ce tableau ne fut terminé que pour le Salon de 1834. Nous modifions les dimensions
données par M. Moreau ',i"'oo sur 3^65;, pour adopter celles du catalogue du musée de
Nancy, qui se rapprochent d'ailleurs de celles du catalogue de l'exposition posthume.
N" 556 : Raphaël jeune méditant dans son atelier
Toile. —Salon de i83i. — Cat. Moreau, p. 171.
Tableau peint pour M. de Mornay. Raphaël est assis sur un escabeau, le coude sur une table.
— 'Voir plus loin, en cette même année i83i, un dessin du même sujet.
N°}57 : Le Christ au Jardin des Oliviers
Toile. — H. o^So, L. i™io. — Voir à Tannée 1827, n°* 176 à i83. — Cat.
A. Moreau, pp. 220, 226.
Cette réduction du grand tableau de 1827 a été peinte pour le chanteur Nourrit. Les dimen-
sions nous sont fournies par M. Moreau ; n'ayant pas vu le tableau, nous sommes forcé de
les reproduire telles quelles, mais nous doutons qu'elles soient exactes.
N° 558 : Tête de jeune femme
Toile. — H. o"'42, L. o^BS. — Etude peinte le soir à la lampe.— Vente Villot,
1864 : 145 fr. — Non catalogué par M. A. Moreau.
r83i
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" j)C) : Mirabeau et Dreux-Brézé — Esquisse
Toile de i5 à 20. — N° 14 de La Vente posthume. — Appartient à M. Jadin fils.
Non catalogué par M. Moreau.
N° )6o : Mirabeau et Dreux-Brézé
Peinture sur bois. — H. o"^j8, L. o"'g2. — Signé au
bas et daté 1 83 i . — N° 1 28 de la Vente posthume. —
Appartenait à M. Bouruet-Aubertot. — Non catalogué
par M. Moreau.
M. Bouruet-Aubertot, qui est mort en 1882, était le neveu
de l'ami intime de Eugène Delacroix qui a gravé plusieurs
compositions du maître. Ce tableau a 'été placé par
M. Bouruet-Aubertot père à l'exposition posthume de
Eugène Delacroix, boulevard des Italiens (n» 127 ducata-
loguej.Il a reparu aussi h l'exposition Durand-Rucl en 1878,
mais trop tard pour figurer au catalogue. Il y avait égale-
ment h cette exposition le même sujet peint sur toile de
même dimension par Tassaert. Ces deux artistes avaient l'un et l'autre produit leur œuvre en
vue d'un concours d'Etat qui eut lieu à cette époque.
« Comme les poètes, Delacroix devine, 0 adit Henri de la Madelène. « Onne peut même conce-
voir que les choses aient pu se passer autrement qu'il ne les a peintes. Le marquis de Dreux-
Brézé signifiant aux gens du tiers la volonté du roi, n'a pas pu avoir une autre attitude que
celle que l'artiste lui prête en face de la foudroyante apostrophe de Mirabeau. Quelle com-
position simple et puissante I Voilà bien les deux adversaires en présence, l'ancien régime et
la Révolution. Le marquis suivi des massiers du roi, vêtus de dalmatiques fleurdelisées,
magnifiquement vêtu lui-même, élégant, mince, fin d'attaches, personnifiant de la façon la
plus noble l'ancienne cour, et incarnant toute une époque, les gens du tiers dans la sévérité
uniforme de leur costume, affirmant déjà régalité civile, dont la conquête va coilter tant de
sang! C'est un duel véritable et le plus saisissant qu'on puisse imaginer! »
N° 361 : Portrait de M. de Verninac
Toile. — H. o'"40, L. 0^32. — Non signé. — N° 74 de la Vente posthume; r,2 5o fr.
à M. Lecomte. — Appartient à madame Duriez. — Cat. A. Moreau, p. 233.
M. de Verninac était neveu de Eugène Delacroix. Ce portrait, fort beau en ses petites dimen-
sions, n'est sorti de l'atelier du maître qu'à sa mort. Le modèle est représenté à mi-corps; il a
la tète coiffée d'un béret bleu. (Voir un portrait du même personnage, h l'année i833.)
N" 362 : Indien armé du gourka-kree
Répétition du tableau peint en i83o, voira" 325. — Non catalogué par M. Moreau.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i83i
N""" ^6), 364 : Madame Daltoii
1° Toile. — H. o™65, L. o"'54. — Appartient
à M. de CourvaL — Cat. A. Moreau, p. 233.
2° Dessin à la mine de plomb. — H. i'"5o,
L. o^ijo. — Vente posthume, à M. Castillon-
Bouvenne. — Non catalogué par M. Moreau.
Cette jolie personne, aux traits un peu forts, mais
réguliers, aux lèvres e'paisses, sensuelles et d'un beau
sourire, est accoudée à droite et regarde le spectateur en renversant un
peu la tête qu'elle a posée dans la main. Ses lourds cheveux noirs sont
divisés en larges bandeaux, comme dans le célèbre portrait de George Sand jeune, avec
laquelle, d'ailleurs, madame Dalton a quelque ressemblance. Madame Dalton était élève de
Delacroix; plusieurs de ses paysages ont été légèrement corrigés ou retouchés par le maître
et peuvent passer pour des Delacroix. Il y en a même eu d'inscrits sous le nom du maître
à la vente posthume. Nous avons vu qu'elle pratiquait aussi la lithographie. Le dessin doit
être de quelques années antérieur à l'ébauche peinte, si on s'en rapporte à l'expression du
modi.-le, qui, à n'en pas douter, y paraît beaucoup plus jeune.
N" 36^ : Une loge au théâtre
Aquarelle. — H. o^ijS, L. o"'2io. — Signé en haut à gauche: «Eug.
Delacroix i83i.» — Vente Durand, décembre 1874, 60 fr. , revendu
depuis à M. le comte Doria, décembre iSjS : i25 fr. — Non cata-
Joguépar M. Moreau.
C'est une scène à deux personnages. Avec un peu d'imagination, à l'attitude
de l'homme qui se retourne, à l'allure de la femme, debout, on peut voir
là comme une sorte de vision d'un conte d'Hoffmann. Si l'on n'y cherche
point d'intentions si subtiles, on n'y verra que le mouvement d'une
: pour laisser passer un nouvel arrivant qui se retourne pour s'excuser.
N" j66 : Jeune tigre jouant avec sa mère
Lithographie. — H. o'"ii2, L. o^'iSg. — Voir à l'année i83o, n° 323. — Vente
De La Combe, premier état : i3 fr. — Vente Dubois, la même épreuve : 4 fr. —
Vente Burty, 1874 (premier état) : 16 fr. — Vente Villot, 1875, premier état, deux
épreuves : 8 fr. 5o. — Vente Burty, à Londres, 1876, premier état: 3 fr. 10. — Publié
dans L'Artiste, tome I, année i83 r. — Cat. A. Moreau, p. 47.
Premier état. En bas à droite : « Lith. de Delacroix »; à gauche : 0 Eug. Delacroix » ; au
milieu : « Jeune tigre jouant avec sa mère » ; en haut : 0 L'Artiste ».
Deuxième état. Même lettre; seulement en bas a droite : « Lith'" de Castille. »
Sur les épreuves de ce tirage, les animaux sont plus corsés peut-être, mais il y a moins de
velouté, de souplesse dans le pelage et le travail du ciel a disparu. Il y a encore un état qui
porte au bas h droite: « Imp. Bertauts. » On ne voit de trait carré sur aucune épreuve. La
planche est travaillée jusqu'aux bords, mais il n'y a pas de hlet. Il doit exister un avant
premier état, c'est-à-dire sans aucu.ie lettre, mais nous n'avons pu en rencontrer d'épreuve.
i83i
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" '>)(^'] ■ Le roi Rodrigue
^ï1^ Peinture à la détrempe. —
' "' M. Alexandre Dumas fils. -
H. i"92, L. o'"95. — Appartient à
■ N° 289 de TExposition posthume de
Eug. Delacroix. — Non catalogué par M. Moreau.
Cette peinture fut exécutée à l'occasion d'une grande fête costumée donnée
par Alexandre Dumas, le i5 mars i832. Ziégler, Alfred et Tony Johannot,
Clément et Louis Boulanger, Jadin, Decamps, Grandville, Baiye et Célestin
Nanteuil avaient déjà terminé leur œuvre quand Delacroix arriva.
n Sans ôter sa petite redingote noire collée à son corps, sans relever ses man-
ches ni ses manchettes, sans passer ni blouse ni vareuse, Delacroix commença
par prendre son fusain; en trois ou quatre coups, il eut esquissé le cheval;
g^ en cinq ou six, le cavalier; en sept ou huit, le paysage, morts, mourants et
8 fuyards compris; puis, faisant assez de ce croquis', iriintelligible pour tout
autre que lui, il prit brosses et pinceaux, et commença de peindre.
t( Alors en un instant, et comme si l'on eût déchiré une toile, on vit sous sa main apparaître
d'abord un cavalier tout sanglant, tout meurtri, tout blessé, traîné à peine par son cheval,
sanglant, meurtri et blessé comme lui, n'ayant plus assez de l'appui des étriers, et se courbant
sur sa longue lance; autour de lui, devant lui, derrière lui, des morts par monceaux; au bord
de la rivière, des blessés essayant d'approcher leurs lèvres de l'eau, et laissant derrière eux
une trace de sang; h l'horizon, tant que l'œil pouvait s'étendre, un champ de bataille
acharné, terrible; — sur tout cela, se couchant dans un horizon épaissi par la vapeur du sang,
un soleil pareil à un bouclier rougi h la forge; — puis, enfin, dans un ciel bleu se fondant,
h mesure qu'il s'éloigne, dans un vert d'une teinte inappréciable, quelques nuages roses
comme le duvet d'un ibis. Tout cela était merveilleux à voir : aussi un cercle s'était-il fait
autour du maître, et chacun, sans jalousie, sans envie, avait quitté sa besogne pour venir
battre des mains à cet autre Rubens qui improvisait tout à la fois la composition et l'exé-
cution. En deux ou trois heures tout fut fini. » [Mémoires de Alexandre Dumas. 1
N" }68 : Cromwell devant le cercueil de Charles F''
Aquarelle. — In-folio. — Numéro 30? de la Vente posthume :
1,010 fr. — Appartient à M. René Paul Huet. — Non cata-
logué par M. Moreau.
Cette aquarelle a été faite à la suite d'une conversation du maître
et de son ami le paysagiste Paul Huet, au sujet du « Cromwell »
de Paul Delaroche, dont ils regrettaient l'attitude insolente devant
le corps du roi. Dans la composition de Delacroix, Cromwell,
traversant une chambre écartée du palais, rencontre par hasard le
cercueil de Charles I, s'arrête hésitant, troublé, et se découvre
d'un geste gauche qui trahit son trouble intérieur. — Voilà lu
— Notre vignette, faite de souvenir au moment de l'exposition de
■st pas d'une exactitude rigoureuse.
N" 569 : Raphaël dans son atelier
Dessin mine de plomb. — Vente Villot. février i865 : 3o fr. — Cat. A. .Moreau, p. 296.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i832
N° ^70 : Un page tenant un cheval par la hride
Aquarelle. — H. o'"2i, L. o'"29. — Signé au bas à droite.
— Legs de Eugène Delacroix au peintre Pérignon. — Non ca-
talogué par M. Moreau.
M. Pérignon était au nombre des quelques personnes désignées
par le maître dans son testament pour s'entendre avec son léga-
taire universel et classer ses dessins : « Chacun d'eux, ajoutait le
.testateur, voudra bien accepter et choisir un dessin important.» Les
-—— -w _ £».(^. autres personnes auxquelles le maître confiait cette mission étaient
MM. Dauzats, Carrier, le baron Schwiter, Andrieu, Dutilleux et Burty.
N° jji : Tigre couché
Dessin. — H. 0^070, L. o^oqi. • — Salon de i83i. — En bas à
gauche : « Eugène Delacroix. » A droite : « Porret. » — Cat. A.
'^Jj^ Kioreau, p. y5.
Ce dessina été gravé sur bois pour le Salon de i83i de Gustave Planche.
âj Premier état. Epreuves tirées hors texte extrêmement rares.
Deuxième état. Avec le texte autour du dessin.
Etendu de profil et tourné vers la gauche du spectateur, l'animal présente
la tête presque de face. Le fond est composé avec une sorte de décor composé de grandes
herbes et de palmiers qui se détachent sur une échappée de ciel.
^ï^i^fe^^
N'> ^72
Portrait de Eugène Delacroix
Étude
Croquis. — H. o'"i 1, L. o'"i i. — Appartient à M. Chenavard. — Non
catalogué par M. Moreau.
Ce très singulier croquis à la mine de plomb a été exécuté par Delacroix d'après
lui-même, dans la curieuse attitude d'un homme qui souffle et ouvre les veux tout
grands. Malgré la déformation voulue par l'efl'ort, on reconnaît encore Delacroix.
Année 1882
N° }j} : Bonaparte en Italie (Milan)
Toile. — H. o"'45, L.o"'6i. — N" i35 de la Vente posthume: 910 fr. — Vente Clc-
singer, 6 avril 1868 : 800 fr. — Appartient à M. Goldschmitt qui ne permet pas de
voir ce qu''il possède et qui consent encore moins à en laisser prendre un croquis.
— Cat. A. Moreau, p. 28?.
i832
L'ŒUVRli DE DELACROIX
N" }74 : Cavalier turc au repos
Sur soie. — H. o"'io, L. o"'i4. — Non catalogué par M. Moreau.
Cette fine composition, sortie comme en se jouant et d'un trait si sûr,
si pur des doigts du maître et qu'il n'a même pas daigné signer, a été
peinte sur un écran que Eugène Delacroix donna dans sa jeunesse à
^ son ami, M. Rivet, dont le nom est revenu si souvent dans ces pages.
Sfea^-^ i C'est une peinture à l'huile ou plutôt une sorte de lavis h l'huile, car la
facture en est si mince qu'au premier aspect on dirait d'une aquarelle.
C'est un procédé assez fréquent chez Delacroix et dont nous aurons à reparler.
N° 57^ : Portrait du docteur L. Desmaisons
Toile. — H, o"'65, L. o'"54. — Salon de i833 sous le titre : Por-
trait de M. D. — Cat. A. Moreau, pp. 173 et 234.
Eedocteur Desmaisons n'était point seulement le médecin de Delacroix :
dès 1814, il était aussi son ami. Son nom revient quelquefois dans ses
Lettres, notamment dans l'amusant amphigouri adressé à F. Guille-
mardet le 6 décembre i83o : « Je reprends en sous-œuvre la présente
lettre pour te tenir au courant de la brillante santé qui me caractérise
dans le moment actuel. Je n'en sors pas moins pour le moment du
conseil de discipline où, sur ma mauvaise mine, on vient de me donner
un répit de quatre mois pour la brave garde nationale dont on ne me
juge susceptihie de servir avec que quand je serai un peu engraissé de ma personne. Tu ne
t'étonneras pas de la présente manière de m'exprinier, un tant soit peu inopportune et inat-
tendue dans ma manière d'être d'habitude naturelle, attendu une lettre d'un gendarme de
Fouilletourte en Berry, que nous venons d'en faire lecture en société où nous nous trouvons,
qui est très drôle et très insolite pour l'expression des pensées dudit gendarme, qui écrit au
docteur Desmaisons, qui vient de nous faire boire d'excellent saubayor, que nous en avons
bu un verre à ta santé. » (Édition Burtv.)
N° ^76 : Portrait de M. Boissard de Boisdenier
Toile. — H. o'"6o, L. o'"5o. — Signé et daté : « Eug. Delacroix,
i832. » — Acheté par M. le baron de Beurnonville, 3,5oo fr.
— Non catalogué par M. Moreau.
Le tableau n'a jamais été rentoilé; la peinture en est claire dans la
gamme de tons de Rubens. — Redingote verte, fauteuil rouge cra-
moisi, fond brun rouge. On croit que ce portrait est celui de M. Bois-
sard de Boisdenier. En tout cas, ce n'est point, comme on l'a dit à
tort, celui de Pétrus Borel, l'écrivain romantique que MM. Chena-
vard, Préault,Riesener, Schwiter, etc., consultés par nous, n'ont point
reconnu. Boissard était un amateur distingué, peintre de quelque
talent, poète médiocre, excellent violoniste. Fils d'un pharmacien de
Tours, il ne prit qu'assez tard son titre de noblesse. Riche, il habita d'abord le petit hôtel
Lambert, puis l'hôtel Pimodan, où il eut pour familiers Charles Baudelaire et Théophile
Gautier. ("Voir la Notice de Théophile Gautier placée en tête des œuvres de Baudelaire.)
104
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i83a
N° J77 : Madame la marquise de Mornay, née de Caulaincourt
Toile. — H. o'"3io, L. o"''235. — Signé à gauclie, non daté. —
Appartenant à M. le comte de Mornay. — Cat^ A. Moreau, p. 234.
Madame de Mornay avait succombé pendant le choléra de i832, h cin-
quante-deux ans. Delacroix la peignit de souvenir. A son retour du
Maroc, il avait fait un court séjour chez son compagnon de vovage,
M. de Mornay, resté son ami. Ce portrait est un pur chef-d'œiivre.
La marquise de Mornay est vue presque de face jusqu'à la taille. Elle
est coiffée d'un de ces hauts bonnets de dentelles et de rubans h la
mode de l'époque. Les brides roses flottent sur une large collerette
blanche qui couvre les épaules et rejoint le vaste bouflant des manches
dites à gigot. Une chaîne d'or jette une note claire dans les colorations
de la robe sombre. ■ — Nous rectifions les dimensions erronées du cata-
logue Moreau qui donne à tort : H. o"i25, L. o'"20.
N" jjQ : Monsieur Frédéric Villot
Toile. — H. o™65, L. o"'54. — Voir à i833. — A M. Borthon,
de Dijon. — Cat. A. Moreau, p. 234.
Comme presque tous les portraits que Delacroix faisait de ses amis,
celui-ci n'est ni signé ni daté. En 1875-76, M. Georges Villot fils,
qui possédait une réduction de ce portrait (voir à l'année i833|
offrit au Musée du Louvre celui-ci, qui est de grandeur nature ; mais
MM. les conservateurs n'acceptèrent point ce don. Ce refus paraît
d'autant plus étrange que Frédéric ViUot avait été lui-même conser-
vateur du département de la peinture au Louvre, et que son passage
à ce poste important a été marqué par des travaux de classement
et des cataloguesqui font le plus grand honneur à sa mémoire. — C'est
une œuvre excessivement soignée, d'une facture minutieuse réalisée
au moyen de petits pinceaux. Elle n'a pas l'allure libre et indépendante de la plupart des
toiles du maître ; peut-être aussi Delacroix, peignant le portrait d'un ami et d'un connais-
seur, a-t-il été contenu par les observations de son modèle. Acheté par M. Robaut, le
I 3 janvier 1877, il a été cédé par lui à M. Borthon au prix de 700 fr.
N" ^79 : Chien mort — Étude
-^-,.-^. Toile. — H. o"'4o, L. o'"84. — Vente Hôtel Drouot, 23 mai
^ 1873 : 610 fr. à M. Soutzo. — Vente H. D. du 3o avril au
^^ ,^^_^ ^ =? 2 mai 1877 : 880 fr., à M. Perreau. — Non catalogué par
^'"J-^è^S^tf^ M. Moreau.
Le chien est rare dans l'oeuvre de Eugène Delacroix. Trop voisin de l'homme, trop familier,
trop doux, sa servilité n'était point faite pour tenter l'humeur du maître qui se portait tout
naturellement au contraire aux animaux de combat et de destruction. Parmi les animaux
domestiques, il ne s'est arrêté qu'au cheval, que sa fierté ennoblit autant que sa beauté. Pour
la première fois, peut-être, que l'artiste fait un chien, il fait un chien crevé.
i832
L'ŒUVRE DE DELACROIX
io5
N"^ 380, 581 : Portraits d'élèves de la pension Goubaux
1° Toile. — H. o™5o, L. o'"6o. — Signé au bas
à gauche et non daté. — Non catalogué par
M. Moreau.
2" Toile.— H. o"'5o, L. o"6o. — Signé en haut
à gauche et non daté. — Non catalogué par
M. Moreau.
M. Louis Judicis obtint le premier prix de version
grecque en quatrième (i832), le second prix de
version grecque en seconde (1834), le premier prix
de dissertation française en rhétorique (i835). —
M Petit de Beau\erger a\ Ht obtenu en i83'2 le premier prix de version latine en qua-
tiiemo II eut également en seconde le second prix de thème grec (1834) et en rhétorique le
second prix de dissertation française (1 835). —Voir sur l'institution Goubaux (qu'il faut
définitivement écrire Goubaux et non Goubau) les intéressants Souvenirs littéraires de
M. Maxime du Camp, publiés dans la Revue des Deux-Mondes.
1
m
f.A^t,
e^\
N« ^8:
Seigneur en armure
et l'intérêt
tons magni
le drame et
Toile. — H. o"'240, L. o"'i85. — Non catalogué par M. Moreau.
M. Frédéric ViUot en avait fait une aquarelle de même dimension qui
nous a été communiquée par M. Georges Villot, ce qui nous a permis
de faire notre vignette. La couleur du vêtement de dessous est rose ; la
draperie du fond, vermillon ; le tapis de table, vert. L'œuvre est du même
temps que le « Larmoyeur » d'Ary Scheffer et le motif essentiel iden-
tique : un homme en armure. La différence du génie des deux peintres
est sensible en de tels rapprochements. Il faut à la peinture d',\ry
Scheffer le soutien accessoire de l'intérêt littéraire, de l'épisode atten-
drissant ou pathétique. Ary Scheffer fera donc de son homme en ar-
mure un roi, le roi de Thulé, le' « Larmoyeur. » On cherche l'anecdote,
de l'œuvre d'art en soi s'évanouit. Chez Eugène Delacroix, il suffit de quelques
fiquement associés, d'une attitude simple, du clair regard de deux yeux bleus, et
l'émotion d'un temps, d'une date dans l'histoire s'imposent au spectateur.
N°® 38^, 384 : Exposition du musée Colbert
En cette même année i832, une exposition fut ouverte dans les salles du musée
Colbert au profit des victimes du choléra. Le catalogue mentionne cinq tableaux de
Delacroix. Nous en avons reproduit deux : Odette et Charles^ F/ (voir n° iSj) et un
Seigneur montrant le corps de sa maîtresse {voir n° i3g). Une Etude de femme couchée
peut se rapporter indifféremment à nos n"^ 55, 106, 140, 175, etc. Il ne nous reste
donc à compter dans la suite des œuvres du maître que les deux toiles suivantes :
1° Une femme caressant un perroquet., dont nous n'avons retrouvé aucune trace;
2° Léda, peut-être l'esquisse de la fresque que Delacroix peignit plus tard à Valmont.
io6
L'ŒUVRE DE DELACROIX
iS3'.
N" ^8^ : Portrait de M. J.-L. Brown
Toile. — Dimensions inconnues. — Salon de i833. — Cat. A. Moreau, p. 17:
N" 386 : Paganini jouant du violon
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K|^^^J
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C'est pour
en avril et
nous I
mai 188
Esquisse sur carton. — H. o'"4r, L. o'"28. — Vente Ad. Her-
mann, février 1879 : 1,600 fr. à M. Perreau. — Appartient à
M. Champfleury. — Non catalogué par M. Moreau.
De lacroix passe'pour avoir peint ce sujet pour Ricourt, ancien directeur
du journal {'Artiste. Du reste, dans les croquis de la vente posthume
du maître, il y avait diverses esquisses crayonnées de ce même per-
sonnage. — Dans les Notes données à M. Ph. Burty par M. Lassalle-
Borde's, nous trouvons un autre témoignage de l'impression que Delacroix
avait conservée de Paganini. « Il faudrait, me disait-il, que ce dont on
Il a la vision pût être rendu sans peine ; il faut que la main acquière égale-
» ment une grande prestesse, et l'on n'y arrive que par de semblables
I études. Paganini n'a dû son étonnante exécution sur le violon qu'en
» s'exercant chaque jour pendant une heure à ne faire que des gammes.
; même 'exercice. « — Ce portrait fut exposé à l'Ecole dês Beaux-Arts,
i, à la très intéressante exposition des ci Portraits du siècle. »
VOYAGE AU MAROC
N° ^87 : Un gynécée arabe
(,,,j,. Aquarelle croquis. — H. o"M25, L. o^'rqS. — Non cata-
'" logué par M. Moreau.
Ce léger et fin croquis, rehaussé d'aquarelle, est extrait d'un
album appartenant au duc d'Aumale. L'album contient de char-
mants dessins de femmes du Maroc, prélude du tableau du
Louvre : Les Femmes d'Alger. — C'est dans les premiers jours
de i832 que Delacroix partit pour le Maroc, en compagnie du
comte de Mornay, ambassadeur de France près de 1 empereur
Muley Abd-Ehr-Rhaman. Nous suivrons le maître pour ainsi dire jour par jouren ce voyage.
N" ^i
Paniers de fruits et d'œufs
Dessin rehaussé d'aquarelle. — H. o"'i7, L. o"'26. — On lit au
bas : " 28 janvier, la monna.» — N" 569 de la Vente posthume :
ji,_ T_L 5o fr., à M. Bornot. — Appartenait à M. Gavet. gendre de
'-'■^3^. ^ Bornot. — Non catalogué par M. Moreau.
Les paniers sont posés sur le sol auprès de volailles ; des poussins sortent de leur coque.
i83i
L'ŒUVRE DE DELACROIX
107
N°' ^89, ^90 : Croquis du xMaroc
1° Sépia. — H. o'"i2, L. o'"2o. — A
appartenu à M. Pierret. — Non cata-
logué par M. Moreau.
2° Dessin à la mine de plomb. —
H. o"'i6, L. o"'26. — Appartient à
M. Bornot. — Non catalogué par
M. Moreau.
Le 8 janvier, Delacroix écrit de Toulon à M. Pierret : « J'espère que nous ne tarderons pas
trop à partir. C'est probablement pour après-demain... Voilà le Midi enfin ; je me retrouve.
La belle vue et les belles montagnes ! » En passant par Fontainebleau, il a vu les mons-
trueuses restaurations des peintures du Primatice par « M. Alaux le Romain. « Il ajoute :
(1 Je suis convaincu que je ne trouverai rien de si barbare en Barbarie. »
N°' ^91, jC}2 : Chefs arabes
1° Croquis aquarelle. — H. o"'38, L. o™3o.
— Vente posthume. — Non catalogué par
M. Moreau.
2° Crayon noir et sanguine. — H. o"'3o,
L. o™26. — N° 536 de la Vente postliume :
100 fr. à M. Bornot. — Appartenait, en 1877,
à M. Porlier, gendre de M. Bornot. — Non
catalogué par M. Moreau.
^ss^'^.X Le 24 janvier, Delacroix écrit : n Enfin devant
Tanger ! Après treize jours de marche et d'une
traversée tantôt amusante, tantôt fatigante, et
après avoir éprouvé quelques jours de mal de
mer, ce à quoi je ne m'attendais pas, nous avons éprouvé des calmes désespérants et puis des
bourrasques assez eff'rayantes, à en juger par la figure du commandant de la 0 Perle». En
revanche, des côtes charmantes à voir, Minorque, Àlajorque, Malaga, les côtes du royaume
de Grenade, Gibraltar, Algésiras. Nous avons relâché dans ce dernier endroit. J'espérais
débarquer à Gibraltar, qui est à deux pas, et à Algésiras par la même occasion ; mais l'in-
flexible quarantaine s'y est opposée. J'ai pourtant touché le sol andalou avec les gens qu'on
avait envoyés à la provision. J'ai vu les graves Espagnols en costume à la Figaro, t'a été une
des sensations de plaisir les plus vives que celle de me trouver, sortant de France, transporté,
sans avoir touché terre ailleurs, dans ce pays pittoresque; de voir leurs maisons, ces man-
teaux que portent les plus grands gueux et jusqu'aux enfants des mendiants, etc. Tout Goya
palpitait autour de moi. C'a été pour peu de temps. »
N° j()j : Arabe mort
Aquarelle. — Vente Bourlon de Sarty, 4 mai i865 : 275 fr., à M. deBoigne. — Cat.
A. Moreau, p. 292.
Le cavalier est étendu mort sur le sol aux pieds de son cheval immobile.
io8
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l832
N° ^94 : Conversation mauresque
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"i4, L. o'"2o. — Fac-si-
milé auto-litliographié par A If. Robaut, pour la Galette des
Beaux-Arts, en i865, dans les dimensions de : H. o'"i38,
L. o"'ig8. — Non catalogué par M. Moreau.
Le 2 3 janvier, Delacroix écrit : « J'arrive maintenant à Tanger. Je
viens de parcourir la ville. Je suis tout étourdi de tout ce que j'ai vu...
Nous avons débarqué au milieu du peuple le plus étrange... Il faudrait avoir vingt bras et
quarante-huit heures pour donner une idée de tout cela. » — Ce dessin paraît être la com-
position même d'après laquelle Eugène Delacroix fit l'aquarelle qu'il offrit à son ami M. de
Mornay. L'aquarelle n'est, en effet, qu'une répétition du sujet, sans variante. (Voir plus
loin, à l'année i833, l'article consacré à l'album du comte de Mornay.)
N°^ ^95, jc)6 : Femmes juives arabes
o'"io, L. o^oj.
Non catalogué
1° Croquis rehaussé d'aquarelle. — H . o'"2q, L.o"M g. —
Vente posthume à M. Doria. — Non catalogué
par M. Moreau.
2° Croquis à la mine de plomb. — H
— Vente posthume, à M. Robaut. —
par M. Moreau.
« Les Juives sont admirables. Je crains qu'il soit difficile
d'en faire autre chose que de les peindre: ce sont des
perles d'Eden. » (Tanger, 2 5 janvier.) Il est difficile, en effet, de rien
voir de plus noble et d'un plus grand geste que les figures du premier
des deux croquis que nous donnons ici. Cela seul justifierait, s'il en était
besoin, les comparaisons enthousiastes que Delacroix établit si souvent entre cette vivante
réalité et l'antique. Le mouvement de la femme à l'amphore se retrouve plus loin.
N° 397 : Portrait de Eugène Delacroix
. — Gravé sur bois pour la Ga-{ette
'112, L. o"'i 10. — Cat. A. Moreau,
Croquis. — H. o"'i i, L. o'"
des Beaux-Arts, i865 : H.
p. 10.
Ce portrait de Eugène Dt;lacroix en costume de voyage, extrait d'un
de ses albums au Maroc, a été publié dans le tome XI.X, numéro du
1°'' août i865 de la Galette des Beaux-Arts, accompagnant un article
de M. Ph. Burty, intitulé : « Eugène Delacroix au Maroc. « « Je suis
en ce moment comme un homme qui rêve et qui voit des choses qu'il
craint pouvoir lui échapper (2 5 janvier). — Âla santé est bonne, je
crains seulement un peu pour mes yeux. Quoique le soleil ne soit pas encore très fort,
l'éclat et la réverbération des maisons, qui sont toutes peintes en blanc, me fatigue exces-
sivement... Au milieu de cette nature vigoureuse, j'éprouve des sensations pareilles à
celles que j'avais dans l'enfance ; peut-être que le souvenir confus du Midi que j'ai vu dans
ma première jeunesse se réveille en moi. » i8 février.)
i832
L'ŒUVRE DE DELACROIX
log
N°® 398, 399 : Marocains dans la campagne
i" Croquis et aquarelle. — H.
o"'i9, L. o'"27. — Appartient à
M. A. Robaut. — Non catalogué
par M. Moreau.
2" Sépia. — H. o"'i 10, L. o"'i65.
— Appartenait à madame Leblond.
— Non catalogué par M. Moreau.
(I L'empereur s'apfirète à nous faire une réception des plus magnifiques. Il veut nous
donner une haute idée de sa puissance. Nous commençons à craindre qu'il ne lui prenne
fantaisie d'aller h Maroc pour nous recevoir, ce qui nous ferait près de quatre cents lieues
à cheval pour aller et venir. Il est vrai que c'est un voyage des plus curieux et que très
peu de chrétiens peuvent se vanter d'avoir fait. » (Tanger, 8 février.)
N° 400 : Chef maure assis
Dessin. — H. o'"2g, L. o"M8. — Fac-similé pour VArt, 1878 :
H. o'"293, L. o^iSo. — Non catalogué par M. Moreau.
Ce dessin est tiré du cabinet de feu L. Riesener. — Le 8 février, Delacroix
écrit: «Je suis vraiment dans un pays fort curieux... Je m'insinue petit à
petit dans les façons du pays, de manière à arriver à dessiner à mon aise
bien de ces figures de Mores. Leurs préjugés sont très grands contre le
bel art de la peinture ; mais quelques pièces d'argent par-ci par-là arrangent
leurs scrupules. Je fais des promenades à cheval aux environs qui me font
un plaisir infini, et j'ai des moments de paresse délicieuse dans un jardin aux
portes de la ville, sous des profusions d'orangers en fleurs et couverts de
fruits... Tout ce que je pourrai faire ne sera que bien peu de chose en comparaison de ce
qu'il y a à faire ici ; quelquefois les bras me tombent et je suis certain de n'en rapporter
qu'une ombre. » Une ombre, soit; mais une bien belle ombre.
N° 401 : La chambre de Eugène Delacroix, à Tanger
^=S,^ Dessin rehaussé d'aquarelle. — In-folio. — Vente posthume
^~"|^ n» 564. Vente Sensier, décembre 1877. — Non catalogué par
''l^i^'- ^' Moreau.
Un fusil est posé sur le lit. Au fond, des nattes accrochées aux murs,
a Je ne te demande pas de nouvelles, je n'en suis pas plus avide ici qu'à
Paris, où j'ai l'habitude de ne vivre qu'au gré des émotions que mon
cœur me donne... J'emploie avec plaisir une part de mon tenips au
'travail, une autre considérable à me laisser vivre ; mais jamais l'idée
de réputation, de ce Salon que je devais manquer, comme on disait, ne se présente à rnoi ; )e
suis même sûr que la quantité assez notable de renseignements que je rapporterai d ici ne
me servira que médiocrement. Loin du pays où je les trouve, ce sera comme des arbres
arrachés de leur sol natal ; mon esprit oubliera ces impressions, et je dédaignerai de rendre
imparfaitement et froidement le sublime vivant et frappant qui court ici dans les rues et qui
vous assassine de la réalité. » [Tanger, 29 février.)
L'ŒUVRE DE DELACROIX
[832
N° 402 ; Arabes prenant le café
Sépia. — H. o""! 14, L. o'^i-o. — Photo-lithographie Arosa. —
Reproduit dans l'Aj-t, en i883. — Cat. A. Moreau, p. 128.
' fac-similé, exe'cuté par M. Arosa en 1868, de cette sépia achetée
par iM. Philippe Burty à la vente posthume de Delacroix, a été
lire à dix épreuves seulement. — « Nous partons après-demain
_ _ .^^^^_ pour Mequinez, où est l'empereur ; il nous fera toutes sortes de
|^;i-4^^^^^'ir^^Sfeg galanteries mauresques pour notre réception, courses de chevaux,
lijr^^-^^^^::S=^^^:^S coups de fusil, etc. La saison nous favorise, nous avons craint
les pluies, mais il paraît que le plus fort est passé. 11 me semble,
à voir ces objets nouveaux, que j'ai vécu déjà une année au milieu de tout ceci et qu'il y a
des siècles que je n'ai vu mes amis. /> (Lettre à F. Villot, 29 février.)
N° 403 : Musiciens marocains
Dessin. — H. o™2i, L. o'"23. — Gravé en fac-similé pour VArt,
1878 : H. 0,1 5o, L. o"'i7o. — Non catalogué par M. Moreau.
Ce dessin, tiré du cabinet de feu Riesener, est un croquis h la mine de
plomb très légèrement touché. 0 Imagine, mon ami » écrit Delacroix le
29 février 0 ce que c'est que de voir couchés au soleil, se promenant dans
les rues, raccommodant des savates, des personnages consulaires, des
Catons, des Brutus, auxquels il ne manque même pas l'air dédaigneuxque
devaient avoir les maîtres du monde; ces gens-là ne possèdent qu'une couverture dans
laquelle ils marchent, dorment et sont enterrés, et ils ont l'air aussi satisfait que Cicéron
devait l'être de sa chaise curule... J'apprends que le choléra est à Londres. Diable! »
N° 404 : Souvenirs du Maroc
N^ <a ^f^=J^ (?i «> Divers croquis. — H. 0^27, L. o">36. — Cliché
■ Cj *'4|Sa(^^^p\^^^ fac-similé pour V Autographe : H. o'"27, L. o"'36.
— Cat. A. Moreau, p. 149.
Publié dans le journal V Autographe, première année,
1864, page 68, ce sujet peut être, comme plusieurs autres
déjà cités, classé parmi les bois originaux. La planche ne
porte pas le mot « quatorze », comme le dit M. Moreau,
mais le mot «divers». Le premier état est sur Chine, imprimé
sur un côté seulement du papier. — n C'est un lieu tout
pour les peintres. Les économistes et les Saint-Simoniens
auraient fort à critiquer sous le rapport des droits de l'homme et de l'égalité devant la loi,
mais le beau y abonde, non pas le beau si vanté des tableaux à la mode. Les héros de
David et compagnie feraient une triste figure avec leurs membres couleur de rose auprès de
ces fils du soleil; mais en revanche le costume antique y est mieux porté, je m'en flatte. Si
vous avez quelques mois à perdre quelque jour, venez en Barbarie, vous y verrez le naturel
qui est toujours déguisé dans nos contrées, vous y sentirez de plus la précieuse et rare in-
fluence du soleil qui donne h toute chose une vie pénétrante. Je rapporterai des dessins, mais
cehi ne donnera pas la meilleure partie de l'impression que tout ceci procure. » (29 février.)
N'' 405 : Détails de harnachements
prix. Les
Croquis et aquarelle. — H. o"'25, L. 020. — Vente posthume. —
Appartient à M. A. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
« Nous sommes depuis hier dans cette ville (Mequinez), terme de notre
voyage. Nous avons mis une dizaine de jours pour faire cinquante lieues.
Cela ne paraît rien. Cela ne laisse pas que d'avoir sa fatigue quand on
va au pas au soleil sur de mauvaises selles.» (16 mars.) Si 'les selles sont
mauvaises, comme l'écrit Delacroix, le harnachement par contre est d'un
ton splendide. Rien ne peut en donner une idée plus somptueuse que ces
légers croquis rehaussés de quelques touches d'aquarelle dans les gammes
paille et bleu turquoise. Il n'est pas de musée d'art décoratif où cette
page si merveilleusement simple ne fût un modèle, un exemple sans
rvateurs de musées dédaignent trop les dessins et croquis des maîtres.
N°^4o6, 407 : Cavaliers arabes dans hi campagne
1° Croquis et aquarelle. — H. o"'2o,
L. o"26.— Vente Martin, 1880: 335 fr.
— Vente posthume. — Non catalogué
par M. Moreau.
2° Croquisàla plume. — H. o'"i2, L.
o"']4. — • Non catalogué par M. Mo-
reau.
« Notre petite troupe avait beaucoup de
peine a se maintenir ensemble et à se retrouver au milieu des mille coups de fusil qu'on
nous tirait dans la figure. Nous avions la musique en tète et plus de vingt drapeaux portés
par des hommes a cheval. La musique est également à cheval : elle consiste dans des espèces
de musettes et des tambours pendus au cou du cavalier, sur lesquels il frappe alternative-
ment et de chaque côté, avec un bâton et une petite baguette. Cela fait un vacarme vrai-
ment étourdissant qui se mêle aux décharges de la cavalerie. (Mequinez, 16 mars.)
Fantasia ou exercices marocains
Toile. — H. o"'59, L. 0^72. — Daté. — Salon de 1847. —
Voir variantes en t833 et 1840. — Cat. A. Moreau, pp. 102,
182, 267.
C'est le tableau de la galerie Bruyas, de Montpellier. — <i Notre
entrée ici (h Mequinez) a été d'une beauté extrême, et c'est un
plaisir qu'on peut fort bien souhaiter de n'éprouver qu'une
fois dans sa vie. Tout ce qui nous est arrivé ce jour-là n'était
que le complément de ce à quoi nous avait préparés la route.
A chaque instant on rencontrait de nouvelles tribus armées qui
faisaient une dépense de poudre effroyable pour fêter notre
arrivée. De temps en temps nous entendions quelques balles
oubliées qui silUaient au milieu de la réjouissance. » (16 mars.)
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l832
410 : Arabes du Maroc
1° Sépia. — H. o'"32, L. o"'24. — Vente Pierret,
1879. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Croquis et aquarelle. — H. o^iô, L. o"'i4. —
Vente posthume : 5o fr. à M. Charles Desavary.
— Appartient à M. Rouart. — Non catalogué
par M. Moreau.
« J'éprouve que les sensations s'usent h la longue,
et le pittoresque vous crève tellement les yeux à
""~ chaque pas, qu'on finit par v être insensible. On a
apporte avant-hier un paquet de lettres. C'était un piéton e.xpédié de Tanger, car on n'a
aucun moyen de communiquer dans ce pays où il n'y a ni routes, ni ponts, ni bateaux sur
les rivières. Nous avons h rester ici environ une dizaine de jours. » (Mequinez, 20 mars.)
N°'4ii, 412 : Arabes du Maroc
mettre en colère, et 1
1° Ebauche d'aquarelle. — H. o™25, L. o^iS.
. __. -■ .1- — Appartient à M. Arosa. — Non catalogué
""^^vB^^-\_ par M. Moreau.
M-— 2° Aquarelle. — H. o"'28, L. o™2i. — Vente
^'^'^^^KW-^es. posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
^U.v,';aas-^ V'^S " Js suis escorté, toutes les fois que je sors, d'une
Wte bande énorme de curieux qui ne m'épargnent pas
-:d: ^ les injures de chien, d'infidèle, decaracco, etc., qui
"v'^w'' ^^ poussent pour s'approcher et pour me faire une
"-t^»"^*^ grimace de mépris sous le nez. Vous ne sauriez vous
imaginer quelle démangeaison on se sent de se
laut toute l'envie que )'ai de voir pour m'exposera ces gueuseries. »
(Mequinez, 2 avril.) Ces hostilités persistèrent assez longtemps.
N"*' 413, 414 : Arabes du Maroc
1" Croquis et aquarelle. — H. o"'29, L. o'"36.
— Vente Riesener, i8-q : 53 fr. — Appartient
à M. Alexandre Dumas fils. — Non catalogué
par M. Moreau.
2°Croquis et aquarelle. — H. o"'22,L.o"'i7. —
V% Vente Carvalho, 1875 : 47 fr. — Non catalogué
:W par M. Moreau.
(( Je ne vous parle pas de toutes les choses
curieuses que je vois. Cela finit par sembler naturel à un Parisien logé dans un palais mau-
resque, garni de faïences et de mosaïques. Voici un trait du pays: Hier, le premier ministre,
qui traite avec Mornay, a envoyé demander une feuille de papier pour nous donner la réponse
de l'empereur. Avant-hier, on lui avait envoyé une selle en velours et en or qui est inesti-
mable, u (Mequinez. 2 avril.) — Les deux premiers croquis sont sur la même page.
i833
L'ŒUVRE DE DELACROIX
Il3
N""" 41^', 416 : Arabes du Maroc
1° Aquarelle. — H. o'"25, L. o"Uy. —
Il en existe une copie de même dimen-
sion vendue à Fhôtel Drouot le 25 mars
1876 : 23 fr. — Non catalogué par M. Mo-
reau.
2° Lavis. — In-folio. — Vente posthume
^partie du n" 371. — Vente Sensier, dé-
.-^cembre 1877, dans un lot. — Non catalo-
i gué par M. Moreau.
« Même de monter sur la terrasse vous expose à
des pierres ou à des coups de fusil. La jalousie des Mores est extrême, et c'est sur les terrasses
que les femmes vont ordinairement prendre le frais ou se voir entre elles.i)(Mequinez, 2 avril.)
N"^ 417, 418 : Arabes du Maroc
1° Aquarelle. — H. o"'2o, L. o'"3o.
— Vente posthume n° 526. — Appar-
tient à M. Philippe Burty. — Non
catalogué par M. Moreau.
2° Croquis et aquarelle. — ■ H. o'"i7,
L. o™24. — "Vente posthume, à M. le
comte Doria. — Non catalogué par
M. Moreau.
« Je vous ai mandé dans ma première lettre que nous avions eu l'audience de l'empereur. A
partir de ce moment, nous étions censés avoir la permission de nous promener par la ville ;
mais c'est une permission dont moi seul j'ai profité entre mes compagnons de voyage, atten-
du que l'habit et la figure de chrétien sont en antipathie à ces gens-ci, au point qu'il faut
toujours être escorté de soldats, ce qui n'a pas empêché deux ou trois querelles qui pouvaient
être fort désagréables, à cause de notre position d'envoyés. » (Mequinez, 2 avril.)
.<^*i^5S3£îSïfc^
N"" 419, 420 : Jeunes Juives du Maroc
i" Croquis et aquarelle. — H. c"28, L. o"'i8. — Vente
y/^ posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
^^ 2° Aquarelle. — H. o"'24, L. o^'ip. — Vente posthume. —
j?w Ventes Forget et Sensier. — Non catalogué par M. Moreau.
n J'ai passé la plupart du temps ici dans un ennui extrême, à
cause qu'il m'était impossible de dessiner ostensiblement d'après
nature, même une masure. » (Mequinez, 2 avril.) — La difficulté surexcitait
donc étrangement la passion du dessin chez Eugène Delacroix, car nulle époque de sa vie ne
fut, je crois, plus féconde pour l'étude que celle de ce voyage. Les impressions qu'il rapporta
lui fournirent la matière de ses plus belles productions.
114
LŒUVRE DE DELACROIX
i83;
N''42i ; Jeune lionne marchant
a pris en
celle-ci a
Toile. — H. o"'235, L. o"'325. — Lithographie par A. Robaut
pour le catalogue delà vente Dutilleux, en 1874, dans les dimen-
sions de : H. o'"o85, L. o""! i3 : i,53o fr. à M. Jacob. — Non
catalogué par M. Moreau.
( On nous a envoyé l'autre jour des chevaux pour le roi (on vient de
m en envoyer un), une lionne, un tigre, des autruches, des antilopes,
une gazelle, etc., et une espèce de cerf qui est une méchante bête qui
grippe une de ces pauvres autruches et l'a embrochée de ses deux cornes, ce dont
trépassé ce matin. » (iMequinez, 2 avril i832.)
N°42 2 : Les murs de Tanger
___ , Croquis à la plume, à la salive et au doigt. — H. o"'io, L.
fcsév^iS^^ o'"26. — Fac-similé par A. Robaut, tiré uniquement à deux
épreuves d'essai. — Vente posthume. — Appartient à M. A.
?^ Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
n Le climat de Tanger est délicieux; il n'y fait pas à beaucoup près aussi chaud qu'en Espa-
gne surtout dans l'intérieur de l'Andalousie. Ma santé va toujours, mais la vôtre ? Ecrivez-moi
toujours ici, peut-être n'y serai-je plus dans deux jours. •> (Tanger, 5 juin.)
N° 423 : Rivages de Gibraltar
Aquarelle. — H. o'"i6, L. o"'24. — On lit : « Côte
d'Afrique, détroit de Gibraltar, 23 janvier. — Vente pos-
thume. — Non catalogué par M. Moreau.
(( Je reviens de l'Espagne, oii j'ai passé quelques semaines; j'ai
vu Cadix, Séville, etc. Dans ce peu de temps, j'ai vécu vingt fois
plus qu'à Paris... J'ai retrouvé en Espagne tout ce que j'avais laissé chez les Mores. Rien
n'y est changé que la religion; le fanatisme du reste y est le même.» (Tanger, 5 juin.)
N" 424 : Babouches — Étude
Toile. — H. o'"i3, L. o'^iq. — Vente posthume n" 221 : ih5fr.,à
M. de Calonne. — Donné par M. de Galonné au peintre Ricard.
— Vente Ricard , à M. Sensier. — Vente Sensier, 3 décembre 1877 •
785 fr., à M. Wilson. — Vente Wilson, mars 188 r : r,32ofr. — Non
catalogué par M. Moreau.
La couleur des babouches est jaune jonquille garni de rouge vermillon, avec un ornement de
perles bleues. Même exquise association de tons que dans les études du même genre faites
par le maître, et notamment le Détail de harnachements . (Voir ci-dessus le n° 405.)
i832
L'ŒUVRE DE DELACROIX
]i5
N°' 42^, 426 : Croquis du Maroc
1° Croquis aquarelle.— H. o"i2C), L. o"M8. — Vente pos-
thume. — Appartient à M. A. Robaut. — Non catalogué
par M. Moreau.
2° Croquis aquarelle. — H. o"'26, L. o"'i7.— Aubas :
« Marchand de Fez. » — Vente posthume.— Appartient
à M. A. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
« Je suis revenu ici depuis trois jours et j'y suis en attendant
l'ordre de revenir. Nous passerons parOran avant de toucherla
belle patrie. Quand l'idée de retour me vient en tète, je l'écarté;
qui vais-je trouver mort ou infirme à jamais?Quelles nouvelles révolutions nous préparez-vous?
N°^427, 428,429,4^0,4^1 : Croquis du Maroc
goux, mars 1882
1° Marocain assis. — Sépia. — H. oi^iv,
L. o"'25. — Appartient à M. Petit. — Non
catalogué par M. Moreau.
2" Vieil arabe à cheval. — Croquis à la mine
de plomb. — H. o'" 18, L. o^a i. — Vente pos-
thume; vente Forget. — Non catalogué par
M. Moreau.
3" Aquarelle. — H. o"'i5o, L. o"'o6o. —
Vente posthume. — Appartient à M. le duc
d'Aumale. — Non catalogué par M. Moreau.
4° Sépia. — H. o'"2o5, L. o'"4oo. — A M. Ge-
bauër-Leblond. — Non catalogué par M. Mo-
reau.
5° Dessin rehaussé, d'aquarelle. — H. o"'3oo,
L. o"'2ro. — Vente posthume; vente Jehan Gi-
— Non catalogué par M. A. Moreau.
N" 4P : Intérieur de cour à Tanger
Aquarelle. — H. o"'29o, L. o'"26o. — Choisie par M. Devilly,
de Metz, dans les études du Maroc, en vertu d'un article du testa-
ment de Eugène Delacroix. — Non catalogué par M. Moreau.
Les boiseries de l'architrave sont de couleur vert pomme avec ornements
alternés de blanc et de brun. A gauche, les nattes appliquées au mur sont
Çj d'un ton fauve relevé de noir. Le dallage des murs est de couleur brique.
fe^ Au centre, le sol est carrelé de faïence en blanc relevé de vert et de brun.
j^^^^^^^^ Tout en haut, on voit une bande de ciel bleu. On lit de la main du
' "~ ■ maître; 0 Intérieur de cour moresque à Tanger, i832.» — Voici l'article
du testament de Delacroix : « Je lègue à M. Devilly, de Metz, une répétition ébauchée du
Christ portant sa croix, plus un dessin à son choix dans mes études du Maroc. »
i6
L'ŒL'VRE DE DELACROIX
N° 43 3 : Costumes de Tanger
Aquarelle. — H. o™i8, L. o"'26. — Lithographie par An-
drieu. — Cat. Moreau, p. 128.
La lithographie inédite, sans aucune lettre ni signature, est de
M. Andrieu. Elle reproduit une aquarelle de mêmes dimen-
sions, que M. Andrieu a choisie parmi les dessins du maître,
après le classement qu'il en opéra, aidé des personnes que nous
avons déjà citées plus haut. 0 Je te le dis, vous ne pourrez
jamais croire a ce que je rapporterai, parce que ce sera bien
loin de la vérité et de la noblesse de ces natures. L'antique n'a
rien de plus beau. Il passait hier un paysan qui était foutu
comme tu vois ici (quelques croquis rapides commentent le texte); pliis loin, voici la tour-
nure qu'avait avant-hier un vil More auquel on donne vingt sous. Tout cela en blanc,
comme les sénateurs de Rome et les Panathénées. » [Lettre à M. Pierret, 1 832.1
N''434: Une vérandah au Maroc
Croquis à la plume. — H. o"'io, L. o"'24. — Reproduit en
fac-similé inédit dans les mêmes dimensions par M. A. Ro-
baut et tiré à deux épreuves d'essai seulement. — Vente
posthume: vente Sensier. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 43 ^ : Conversation arabe
Dessin à la plume. — H. o"' 1 1 , L. o"'24. — Vente posthume à M. Ro-
^ fB haut. — Fac-similé n° 52 de la publication de M. A. Robaut. — Cliché
4%y\ f$$i?f\ phototypographique avec trait carré et addition des détails d"études
^^^^„Aj^i^ que fournit le dessin original : H. o'"i8o, L. o"'242, pour le jour-
^*"^ na\ VA i-t, 1882. — Cat. A. Moreau, p. i36.
C'est un groupe de plus à ajouter aux personnages consulaires. Brutus, Catons, Cicérons
raccommodeurs de savates qui enthousiasmaient le regard du maître.
N" 436 : Vue des hauteurs d'Alger
Dessin gravé sur bois en fac-similé dans l'Illustration, août
i865. -^ H. o'"045, L. o^iio. — Cat. A. Moreau, p. 149.
Ce dessin a été publié dans la Ga:;ette des Beaux-Arts, numéro du
i" août i865, accompagnant un excellent article de M. Philippe
"^~- Burty n Eugène Delacroix au Maroc. » Voir aussi, du même
auteur, Maîtres et Petits Maîtres, p. 'il et suiv. — Ce joli dessin est l'un des derniers, sinon
le dernier dessin que Delacroix ait fait sur la terre d'Afrique avant de rentrer en France.
i833
L'ŒUVRE DE DELACROIX
117
N°457 • Cimetière à Alger ou à Oran
1 AyS' .-.M Croquis à la mine de plomb. — H.o'"!-, L. o'"ij. — Don
■^^È^WP^MM^ ?^ '^^ Jennv Le Guillou à Constant Dutilleux. — Non catalogué
^^^^^ '^^^^^^- P'ir M. Moreau.
'S^lf\Ù^M^ <• Je suis ici depuis ce matin seulement. Nous sommes partis de
^^/""^^^k Tanger, il y a plus d'un mois; mais nous devions voir Oran et en-
-^ ■ îiî«' i-S^r^^^!^-. suite Alger, dont nous arrivons. Je ne suis pas fâché d'avoir
_^§^S;~r*^=-'i^3^2r' été à même de comparer ces lieux-là avec mon Maroc, et, en
-" "t:i^j -■ ■■ bonne conscience, quoique le temps de mon voyage ait de beau-
coup dépassé ce que j'avais calculé, il aura été curieux de voir
tant de choses diverses.» (Toulon 5 juillet.) » — Un des derniers croquis de Delacroix sur la
terre d'Afrique est un cimetière. En arrivant à Toulon, pendant l'insipide quarantaine, c'est
un spectacle semblable qui s'impose à ses regards. « Il y a la perspective agréable de trois
cimetières propres à enterrer les gens qui meurent autant d'ennui, je pense, que de peste.»
N°^ 4^8, 439 : Aquarelles d'Alger
1° Aquarelle. — Vente Paul Blacque, 8 mars
1866 : 190 fr.; Vente Diaz, janvier 1877: 255 fr.
— Non catalogué par M. Moreau.
2° Aquarelle. — H. o"'24, L. 0^27. — N°428 de
la Vente posthume : 635 fr. — Vente du 24 mars
1876 : 400 fr. à M. Guénot. — Non catalogué
par M. Moreau.
La jolie petite juive du n" 488 porte un costume
ravissant; le jupon est vert foncé et rose dans le bas.
n A propos, je reviens d'Alger; j'ai vu Oran, l'Andalousie, les dames de Cadix et de
Séville; franchement elles valent à elles seules le voyage et l'on revient si on^ peut. Me
voici pourtant, point engraissé, ce qui ne vous surprend pas ; point maigri, c'eût été plus
difficile. » (A. M. Frédéric Villot. — Toulon, 7 juillet i832, en quarantaine.)
N°^ 440, 441
Personnages d'Orient
I" Aquarelle. — H. o'"i65, L.
o'"20o. — Signé vers le haut à
droite: « Eug. Delacroix.» — Vente
Bocquet, 1879 : 260 fr.
2° Aquarelle. — H. o"'2o, L. o'"27.
— Vente Burty, 1874: BqS fr.
Ces deux aquarelles ne figurent ni
l'une ni l'autre dans le catalogue de
M. A. Moreau. Dans la première, il
cherchait déjà les mouvements de
figures assises qui devaient jouer un si grand rôle dans le tableau liei Femmes d'Alger.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l833
N° 442 : Arabe étendu par terre dans la campagne
Aquarelle. — H. o"M5o, L. o"'225. — A M. Soulier tils.
— Non catalogué par M. Moreau.
C'est chez M. Soulier père, le vieil ami de Eugène Delacroix,
que cette aquarelle a été improvisée un soir. Elle n'est ni signée,
ni datée, mais elle est très soignée. Le personnage, étendu de
tout son long auprès de maïs et de cactus, regarde devant lui
avec indifférence. Sa tunique blanche est bordée d'un bleu clair
et vif. Au second plan un cavalier précédé d'un autre Arabe passe lentement devant un
fond de montagnes. Un coin de bucolique au Maroc.
Année i833
N°* 445, 444, 44^ : L'appartement du comte de Mornay
1° Toile.— H. o"78,
L. o"'65. — Signé au
bas à gauche. — Salon
de i833. — Appartenait
a M. de Mornay. —
Vente du 29 mars 1877,
retiré à 4,450 fr. —
Cat.A.Moreau,pp.i73,
234, 328.
2° Toile. — H. o"'4o,
L. o"'32. — Etude du
précédent. — Gravé à
Teau-forte par Martial Potémont pour le cata-
logue de la vente Wilson: H. o"M7i, L. o"i 26.
— Vente posthume : 1,800 fr.; vente Wilson,
26 avril 1874 : 5, 200 fr.; mal catalogué sous
le titre de « Intérieur de la chambre de M. De-
lacroix dans sa jeunesse. » — Appartient à
M. Ch. Pillet. — Car. A. Moreau, pp. 173,215.
3° Aquarelle.— H. o'"3i, L.0^23. — Variante
légère du précédent. — Partie du n" 571 de
la vente posthume « Intérieur d'un appartement
avec deux portes » : 100 fr. à M. A. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
Dans la grande toile, Delacroix a peint les deux portraits réunis de M. le comte de Mornay
et du prince Anatole Demidoff dans l'appartement que M. de Mornay occupait rue de
Verneuil. Le premier est assis dans un fauteuil, il est vêtu d'une robe de chambre en étoffe
de l'Inde de couleur rose, se détachant sur un rideau d'un ton rouge pompéien. Le second,
en visite, est assis sur un canapé. Des tableaux et.des panoplies orientales ornent les murs.
i833
L'ŒUVRE DE DELACROIX
•î9
N''446 : M. Frédéric Villot
Toile. — H. o"'2o5, L. o'"i 5o. — Cat. A. Moreau, p. 235.
Delacroix fit en i833 cette réduction du portrait de i832. Voirn" SyS.
Comme on le voit, la copie réduite présente des modifications sensibles.
D'abord les proportions de toiles ne sont pas les mêmes. En outre ici
la tète est un peu plus inclinée, le canapé monte un peu moins haut
et l'expression de la physionomie est moins cherchée que dans le
grand portrait pour lequel, d'ailleurs, le modèle a posé un bon
nombre de séances, tandis qu'il n'a point posé du tout pour ce petit
portrait. Frédéric Villot était un véritable amateur, un grand curieux
d'art; il avait étudié, pratiqué tous les procédés de peinture et de gra-
vure, et je crois aussi la musique; un des premiers, sinon le premier,
il forma une collection d'albums et de bronzes japonais. Comme con-
servateurdes peintures au Louvre, il montra un grand goût éclectique
dont la tradition ne lui a point survécu; son principal titre à la reconnaissance de tous ceux
qui s'occupent de l'histoire de l'art est sa rédaction des « Notices des tableaux du Louvre. »
Marie-Joseph- Frédéric Villot naquit à Liège, département français de l'Ourthe.le 3i octobre
1809; il est mort à Paris, le 27 mai iSyS.
N" 447 : Portrait de M. Heurtaux
Toile ovale. — H. o^ôo, L. o^So. — Signé et daté sur le fond :
i833. — Non catalogué par M. Moreau.
M. Heurtaux, élève de la pension Goubaux, obtint le second prix de
version latine pour la classe de troisième au concours général. — Pen-
dant l'impression de ce volume ont paru les Souvenirs littéraires de
AL Maxime Du Camp auxquels nous empruntons les lignes suivantes
sur la pension Goubaux : « Cette pension était dirigée par un homme
qui eut quelque notoriété et remporta plus d'un succès dramatique.
Le père Goubaux, comme nous l'appelions alors, quoiqu'il n'eût guère
que trente-cinq ans, semblait avoir multiplié les pseudonymes pour
dérouter la curiosité : Pierre Aubry dans le Courrier français, Haute-
feuille à rOpéra-Comique, Dorival dans différents petits recueils oubliés aujourd'hui, Prosper
Dinaux au théâtre : on s'y perdait. C'était un humaniste distingué; il avait traduit une partie
des œuvres de Cicéron et les odes d'Horace comme tant d'autres et aussi infructueusement.
Il était alors célèbre au « boulevard du Crime », car on y jouait souvent Trente ans ou ta Vie
d'un Joueur, gros drame émouvant et moral qu'il avait machiné avec Victor Ducange. Il ne
devait pas s'arrêter en chemin : je retrouve son nom dans Richard d'Arlington de Alexandre
Dumas, dans Louise de Lignerollesde Ernest Legouvé, dans Latre'aumont. dans les Mystères
de Paris, dans le Juif errant de Eugène Sue ; il donna seul le Morne au diable. »
N" 448 : Portrait de M. de Verninac
Toile. — H. o'-'SS, L. o™40. — Cat. A. Moreau, p. 235.
Ce portrait, qu'il ne faut pas confondre avec celui que nous avons cité plus haut 111° 36 1),
fut légué par Eugène Delacroix à madame Duriez de Verninac.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
[833
N° 449 : George Sand en costume d'homme
Toile camaïeu. — H.o'"25, L. o"'2i. — Gravé au burin par
Calamatta. — H. o"'io8, L. o'"o84. — Appartient àM. Charles
Buloz. — Vente après décès de M. Buloz : 7,000 fr. — Cat.
A. Moreau, pp. 1 10, 235.
Notre croquis est fait d'après la gravure. La peinture montre plus de
mouvement dans la coiffure; une mèche vient sur la pommette droite
et, au lieu d'être bouclés au bas intérieurement, les cheveux sont légè-
rement retroussés extérieurement; le graveur a 0 arrangé «. — En
écrivant son testament, Eugène Delacroix se souvint de son ancienne
et constante amitié pour madame George Sand et lui légua un petit
0 couteau turc, un serpent en plomb qui lui avait été donné par
madame Dorval, et une grande esquisse représentant le Sabbat de Faust jCtTet de nuit.)»
En 1842, Delacroix passa une partie del'été à Nohant. —Cette peinture a figuré h l'Exposi-
tion des portraits historiques du xix"^ siècle, ouverte en i883 à l'Ecole des Beaux-Arts.
N'' 450 : Tète de jeune femme
Toile. — H. o"'42, L. o^SS. — Signé à gauche, daté i833. — Vente Villot, i i février
i865 : 145 fr. — Cat. A. Moreau, p. 283.
N°4^i : Bouquet de fleurs
Toile. — H. o'"59, L. o'"49. — Daté i833. — Vente Villot i865 : 325 fr. — Non
catalogué par M. Moreau.
N° 4P : Grec à cheval
Aquarelle. — Signé, non daté. — Vente du 29 avril i856 : i25 fr. à M. Berville;
vente J. Reiset, 25 février 1860 : 121 fr. à M. Leroy. — Cat. A. Moreau, p. 289.
N*" 4P : Charles-Quint au monastère de Saint-Just
Lithographie. — H. o"'i i5, L. o'"i48. — Voir les années i83i, 1837 et 1839. — Vente
Parguez, 1861 -.4 fr. ; vente Dubois, 1866 : 6 fr.; vente Villot, décembre 1875 :
4 fr" 5o c. à M. A. Robaut. — Cat. A. Moreau, p. 48.
En haut, au milieu : « Bagatelle (Journal de France) n» 3i
à droite ; <■ Lith. de Engelmann », au milieu le titre.
, en bas, à gauche : 0 Delacroix 1
i833
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N°4)4 : Portrait de madame Frédéric Villot
Nous
Villot
. Il
Eau-forte d'après nature. — H. o^oSS, L. o^^oSo. — Très rare.—
Signé à droite : Eug. Delacroix », daté à gauche i833. — Vente
De La Combe, 2 février (deuxième état) : 25 fr.; vente posthume
(deux épreuves du deuxième état) : 10 fr. — Cat. A. Moreau, p. 19.
Dans le premier état, l'ombre portée de la main sur le menton n'existe
pas, il n'y en a qu'une seule épreuve.
Dans le deuxième état, l'ombre de la- main est exécutée au moyen de
hachures de pointe sèche et de simples points,
ons parlé du dessin de bague que Delacroix avait composé en i83i pour madame
fit aussi pour elle en 1846 un modèle de Saint Rémi destiné à une nappe d'autel.
N°45 5 • Christ au roseau
î^*
Eau-forte. — H. o"'i5o,L. o^ogo, — Vente posthume (deuxième état):
14 fr. ; vente Burty, 1874 (troisième état) : 6 fr.; vente Villot,
décembre i 875 (deux épreuves du premier étati : 28 fr. à M. Goupil.
— Cat. A. Moreau, p. 20.
^X\S "'(jM Premier état. En bas, à gauche : « Eug. Delacroix », pas de date à droite;
^K' î%."V?i V ' '^'^ qu'une salissure produite par un défaut de brunissage sur le cuivre.
Sî'V^'^M^?' Epreuves d'essais.
^^ ' I-Oai» Deuxième état. En bas: « Eug. Delacroix », à droite : « i833 » avec des
r >^ isj^—^r-.^ contre-tailles dans le fond exécutées par Villot.
Troisième état. En bas, même lettre et en plus au milieu : « Cabinet de l'Amateur. »
Cette pièce a paru, en 1844 dans la treizième livraison du Recueil intitulé : Cabinet de
l'Amateur et de l'Antiquaire, dirigé par M. Piot. Elle est la reproduction d'une sépia expo-
sée au Salon de iS3i et que nous avons cataloguée, en l'année i83o, sous le n" 334.
N° 40 : Lion debout
Lithographie. — Très rare. — H. o"'i 5o, L. o'"i4o. — Héliogravé
pour l'ouvrage de M. Moreau dans les dimensions de : H. o™\ i3,
L. o'"i33. ^ Vente Villot, décembre 1875 : 5 fr. à M. A. Robaut.
— Cat. A. Moreau, p. 32.
L'animal est vu de face, la tête penchée en avant, la crinière hérissée,
les pattes tendues comme s'il s'arrêtait, subitement surpris, et au mo-
ment de se rassembler pour s'élancer sur une proie. A gauche, de simples
hachures occupent le fond. — Dans le catalogue de la vente après décès
de Frédéric Villot. en décembre iSyS, cette lithographie est cataloguée
au n" 446, sous le titre » Lion, la tète baissée. » Nous n'avons pas jugé à
propos de modifier le titre adopté par M. Moreau. Nous avons pris au contraire, cette licence
pour quelques-unes des planches qui suivent, les indications venues de M. Villot nous
ayant paru beaucoup plus conformes au sujet.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i833
N° 457 • ^^ë^ agenouillé sur des nuages
Eau-forte. — H. o^oôg, L. o"'o86. — Vente De La Combe,
3 février i863 : 8 fr. ; vente posthume, février 1864 (deux épreuves):
7 fr.; vente Villot, décembre iSjS, n° 386 (deux épreuves du
premier état chine et blanc) : 6 fr. 5o c. à M. A. Robaut. — Cat.
Se ^' Moreau, p. 19.
^^r*^'- Premier état. Sans trait. — Deuxième état. Avec trait carré.
Cette composition devait servir de frontispice à une suite d'eaux-fortes
état de projet. Sur la banderole on lit : « Eaux-fortes, par Eugène Delacroix. »
N° 458 : Seigneur cuirassé tenant une épée
Eau-forte. — H. o^ioô, L. o^oôô. — Signé à droite. — Vente
posthume (premier état, deux épreuves) : ijfr.jvente Villot, décembre
1875 (premier état, deux épreuves extra sur chine) : 11 fr. Soc. à
S M. A. Robaut.
Premier état. H. o"'io6, L. o'"o66. — Sans trait carré et sans lettre.
Deuxième état. H. o"'ioo, L. o'^'oôo. — En haut à droite le monogramme
E. p. dans un rond et le numéro 2. En bas, au milieu : « Un homme
d'armes du temps de François i"'' »; à droite : 0 Imp. Delâtre, Paris. Publi-
cation Cadart. » L'une des épreuves de M. Villot était sur japon jaune d'or.
N°459: Un forgeron
rappor
Villot,
de i83
Eau-forte. — H. o«'i63 L. o"'098. — Vente Villot, décembre
1875, (une épreuve du premier état et une épreuve du deuxième
état, ensemble) : 25 fr. à M. Goupil. — Cat. A. Moreau,
p. 24.
Premier état. H. o'"i63, L. o'"098. — Sans aucune lettre ; bavures
sur les marges ; dans celle du bas, h droite, un croquis d'oiseau à
la pointe ; et dans celle du haut, à droite, une académie d'homme.
Deuxième état. Mêmes dimensions. Sans lettre. Croquis effacés.
Troisième état. H. o"'iôo, L. o"'096. En haut, à droite :1e mono-
gramme E. D. dans un médaillon et le numéro 4; en bas, h droite ;
« Imp. Delàtre, Paris », au milieu : «Forgeron.» Publication Cadart.
Cette gravure est un essai en manière noire. 0 C'est h M. Villot que
Delacroix dut de faire la connaissance des procédés techniques de la
""^ •?-'.;■ '■ '. gravure h l'eau-forte. Les premières planches des deux amis sont le
résultat d'un travail commun. Ce mélange des deux collaborateurs
intime qu'il devient difficile de discerner la part afférente à chacun, et qu'il faut s'en
ter, sans y croire aveuglément, h la signature. » (Préface du catalogue de la vente
18-5.) Le rédacteur ajoute ; « Je ne parle que des tout premières planches. A partir
2, le travail de M. Delacroix devient plus personnel et plus reconnaissable. »
[833
LŒUVRE DE DELACROIX
123
N" 460 : Soldat allemand
Delàtre.
Eau-tbrte. — Signé dans le ciel à gauche en haut. — Voir
l'aquarelle de 1829. — Vente De La Combe 1 premier état) :
28 fr.; vente posthume (deux épreuves du deuxième étatl : 4? fr.;
vente Villot, décembre 1875, (premier état, une épreuvei : 49 fr.;
(deuxième état, une épreuve): i4fr. — Cat. A. Moreau,p. 2d.
Premier état. H. o"'iS2. L. o"M 34. Sans trait carré. Le personnage
seul au milieu de la planche. Tirée à quatre épreuves.
Deuxième état. Mêmes dimensions. Le bras droit qui tient la bride,
le cheval et les figures, ont été ajoutés à la pointe sèche.
Troisième état. H. o^iyS, L. o'"i34. En haut à droite, le mono-
gramme E. D., dans un rond, et le numéro i ; en bas, h droite : « Imp.
Paris » , au milieu : « Un seigneur du temps de François i^''' 'i.
N''46i : Une Juive d'Alger
Eau-forte. — H. o"'2oo, L. o'"i54. — Signé à gauche en haut
« Eug. Delacroix, i833. » ■ — Vente De La Combe (premier état):
6j fr.; vente posthume (deuxième étatl : 8 fr.; vente Villot, dé-
cembre 1875 : i5 fr. 5o à M. Goupil. — Cat. A. Moreau, p. 23.
Premier état. H. o"'200, L. o'»i54. Sans aucune lettre, malgré le trait
carré; certains travaux du tapis et des accessoires paraissent nettement
dans le bas de la marge de droite.
Deuxième état. H. o"'2o8, L. o'»i52. Tous ces travaux disparus.
Troisième état. En haut, h droite, le monogramme E. D., dans un
rond, et le n" 3 ; en bas, h droite : « Imp. Delatre, Paris »; au milieu :
" Juive d'Alger. Publication Cadart ». Il y a une erreur dans les dimensions fournies par
M. Moreau et que nous avons données; celles du premier et du deuxième état sont lesmèmes.
N" 4Ô2 : Arabes d'Oran
pg:g,^^g-^__-_^^ -_-_-^ggi Eau-forte retouchée en 1847. — H. o"'i5o, L. o"'2io. — Signé
fi":^"-"^ ;~- - i7=.:wî5s^ sur le terrain à droite : «Eug. Delacroix.» — Vente posthume
(deux épreuves du deuxième étatl : 23 fr.; vente Burty,
1877 [deuxième étatl: gfr.; vente Villot, décembre 1875 [deux
épreuves du premier état) : 19 fr. 5o c. à M. A.Robaut. — Cat.
A. Moreau, p. 25.
;__^l Premier état. H. o"'i3o, L. o"'2io. — Sans trait carré. Sans
g^!^ aucune lettre; des travaux de roulette accentués dans le côté gauche
du ciel et sur le terrain du premier plan, qui ont été très atténues
dans les épreuves du deuxième état ; en bas, au milieu, à la pointe: » Arabes d'Oran u.
Deuxième état. Mêmes dimensions. Le vêtement du second personnage s'enlève en vigueur.
Troisième état. H. o"M45. L. o"'i90. Trait carré. En haut, à droite, le monogramme E. D.
dans un rond, et le n" 5 ; en bas. à droite : p Inip. Delàtre. Paris », au milieu >• Arabesd'Oran ■'.
1-4
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i833
N" 463 : Étude de femme vue de dos
Eau-fone. — H. o""i i3, L. o"'i63. — Signé «Eug. D."à gauche
en haut de la planche, au milieu des hachures du fond. —
Vente posthume (cinq épreuves du deuxième état) : i i fr.
5o c. ; vente Villot, décembre 1875 (deux épreuves du
deuxième état) : 14 fr. à M. Goupil; vente His de la Salle,
janvier 1881 (une épreuve du premier état) : 23 fr. à
M. Goupil. — Cat. A. Moreau, p. 24.
Premier état. H. o™i33, L. o™i63. — Sans trait carré. Eau-forte pure. En haut, à gauche,
h peine quelques hachures dans le fond. Les épreuves blondes de ton laissent voir dans le
fond et autour de la tête et des cuisses tout le travail des hachures. Les épreuves de cet état
ont été tirées presque sans marges (o™o3o sur la largeur et o"'020 sur la hauteur).
Deu.'iième état. Mêmes dimensions. En haut, à droite, dans le fond, des hachures qui
forment une teinte et équarrissent le sujet de ce côté; h gauche, quelques travaux de roulette.
Troisième état. H. o'"i 10, L. o'°i6o. En haut, à droite, dans un petit rond, le rnonogramme
E. D. et le numéro 6 ; en bas, au milieu : « Etude de femme vue de dos. Publication Cadart. »
Les planches de cuivre de cette gravure et des six autres qui précèdent étaient restées iné-
dites du vivant de Delacroix. M. Villot père les avait gardées. Elles figurèrent h sa vente en
i865, et furent adjugées à MM. Cadart et Luquet, au prix de 812 fr. On les a tirées alors
avec une marque particulière et un titre.
N'' 464 : Costumes du Maroc
Aquarelle. — H. o"'i8, L. o'"3o à o'»35. — Salon de i833. — Cat. A. Moreau, p. '174.
On va retrouver sous la rubrique de l'année i833 un grand nombre de motifs fournis ii
Delacroix par ses souvenirs du voyage au Maroc. Il peut se faire que plusieurs de ces oeuvres
aient été exécutées dans le courant de l'année i832 ; mais celle-ci étant déjà très chargée de
travail, nous sommes autorisés à supposer que le maître ne s'est pas rigoureusement arrêté
dans cette reprise de souvenirs au 3i décembre. Nous en avons un témoignage éclatant dans
l'exécution du célèbre tableau des Femmes d'Alger. D'ailleurs, comme on le verra, un cer-
tain nombre de ces œuvres sont datées, et, par conséquent, il n'y a point de doute sur l'é-
poque de leur exécution.
N°^465, 466 : Costumes de Tanger
1° Autographie à la plume. — H. o'"i90, L. o'"23o. — Signé
au bas, à droite : « Eug. Delacroix, i833. » — Vente Villot,
décembre 1875 : 6 fr. à M. A. Robaut. — Cat. A. Moreau,
p. 33.
Ce croquis à la plume, imprimé sans trait carré, est rare.
'"^ 2» C'est la même idée et la même disposition, à peu près, qu'en un
tableau vendu à l'hôtel Drouot en 1873. Un jeune marchand juif.
^ debout, déploie une bande d'étoffe qu'il semble offrir à un vieux
Maure à longue barbe assis devant lui sur une pierre dans la campagne.
1833
L'ŒIVRE 1)K DELACROIX
N" 467 : Famille juive
Aquarelle. — H.o'"i8, L. o"'3oà o"Ki5. — Salon de i83?. — Cat. A. Moreau.p. ijS.
N" 468 : Fantasia arabe
Toile. — H. o"'5q, L. o'"73. — Signé et daté i833. —
Gravé à Teau-forte par Le Guay pour VArtisie, dans
les dimensions de : H. o"'i62, L. o'"222. — Variante du
tableau de i832. — Vente Van-Isacker, i5 mai i852 :
1,060 fr.; vente M. B.,3o mai i855 : 1,405 fr. à M. Get-
ting; vente San Donato, 21 février 1870: t3,ooo fr. à
M. Louis Lefebvre, de Roubaix. — Cat. A. Moreau.
pp. 102, 268 et note.
Nous avons reproduit un passage de la lettre du 16 mars, où
Delacroix note les sensations désagréables que lui causaient les coups de fusil que la fantasia
lui tirait à la figure. Il ajoute encore : «Tout cela nous donnait une colère mêlée de comique
que je me rappelle à présent avec moins d'humeur. »
N" 469 : Rencontre de cavaliers maures
Toile. — H. o^^Sr, L. i"'oo. — Voir à Tannée 1834
pour la gravure à Peau-forte par Eugène Delacroix. —
Tableau refusé au Salon de 1834. — Cat. A. Moreau,
P- 177-
Nous invitons les amateurs à se méfier d'une mauvaise
copie de ce tableau traitée en frottis, et qui circule dans le
commerce. L'original était en novembre iSSi, chez
MM. Arnold et Tripp.
Jamais Delacroix ne s'est plus complètement livré en
apparence au génie de l'esquisse qu'en cette admirable
composition. Mais il suffit d'observer le merveilleux équi-
libre de ce groupe furieux, que l'on pourrait inscrire dans
le champ géométrique d'une médaille, pour être convaincu une fois de plus que la main du
maître n'improvisait que sur des thèmes longuement médités. Les chevaux se heurtent et
l'un d'eux se dresse sous le choc en même temps que sous l'effort de son cavalier pour
l'arrêter. Dans ce mouvement la puissante silhouette du cheval bai brun s'enlève sur un
fond de collines qu'éclairent les fumées d'un combat et les clartés opalines d'un ciel gris très
doux où passent des bleus de turquoise. Sur ce premier groupe se découpe le profil allongé,
élégant du cheval gris blanc dont le poil soyeux et fin laisse passer, comme des lueurs roses,
les transparences de la peau. Le geste des cavaliers, celui surtout de l'homme dont on n'a-
perçoit que la tête et le poing, est d'une audace de vérité extraordinaire dont on ne retrouve
d'exemple que dans Rubens. Et c'est à Rubens aussi que fait penser l'éclatante variété des
rouges que Delacroix s'est plu à multiplier dans cette précieuse composition, étincelante
et joyeuse comme l'œuvre d'un peintre coloriste, vivante comme l'œuvre d'un grand dessi-
nateur du mouvement, solide et forte comme l'œuvre d'un maître statuaire.
L'ŒUVRE DE DEl-ACROIX
iS33
N" 470 : Arabes causant
Aquarelle. — H.o'"i4, L. o"'28.
Cat. A. Moreau, p. 290.
Vente Baroilhet. 12 avril 1862 : i85 fr. —
N" 471 : Même sujet
Autographie à la plume. — H. o'"2io, L. o™25o. — Sans
aucune lettre, signature ni date. — Vente De La Combe (pre-
état) : 41 fr.; vente posthume (deuxième état, avec les
les de Tanger )) ) : 10 fr. ; vente Villot, décembre 1875
(deuxième état) : 5 fr. 5o à M. C. Paul Perrier.
Premier état. En bas, au milieu, dans la marge, croquis assez peu
distincts dont un représentant une petite tète d'enfant.
Deuxième état. Sans les croquis.
'— "^ ' n Pour ces choses de souvenir, les premiers croquis ne doivent être
ni trop cherchés, ni retouchés. » (Eugène Delacroix.)
N° 472 : Deux Arabes causant
« Eug. Delacroix de
et des chines de différents formats. Il n
Sépia. — H. o"'i3, L. o'"20. — Gravé à Peau-forte par Frédéric
Villot en 1845, dans les dimensions de o'"o97 sur o'"i42. —
Vente Villot, 11 février i865: 600 fr.à M.Lecesne. — Cat. A. Moreau,
pp. loi et 291.
Les deux figures, l'une de face, l'autre de profil, sont assises sur le
sable dans l'attitude et avec la mimique de la conversation. Dans le fond,
une chaîne de collines. — La planche de M. Villot porte en bas à droite :
Fréd. Villot sculpt. 1845. » Cette planche a été tirée sur des papiers
a pas eu de retouches.
N" 47 3 : Un Arabe
Dessin. — H. o"'3i, L. o"'20. — Photolithographié par Arosa :
H. o"^3io, L. o™20o. — Non catalogué par M. Moreau.
Il est vu presque de face, incliné en avant, les bras tombant, les mains
croisées et enveloppé dans son burnous. L'attitude est étrange, l'expression
'iv 'U' \ / puissamment caractérisée. Delacroix, parlant de l'Afrique un jour, disait à
\"^ 1 1 f Théophile Silvestre, qui l'a rapporté dans son livre. Les artistes vivants :
V \ y\ / ) " L'aspect de cette contrée restera toujours dans mes yeux; les hommes de
cette forte race s'agiteront toujours, tant que je vivrai, dans ma mémoire ;
c'est en eux que j'ai vraiment retrouvé la beauté antique. » Il confirmait
ainsi, bien des années après son vovage au Maroc, l'impression qu'il en avait
gardée et qu'il exprimait si vivement au moment même dans ses lettres à ses amis.
N"'474' 47) : Muletiers de Tétium
.■.''j':kn 1° Dessin à la mine de plomb. — H. o'"io,L. o'"28. —
Vente Susse, 1844 : 60 fr. — Cat. A. Moreau,p. 289.
2° Autographie à la plume. — H. o"i20, L. o"'26o. —
Vente posthume (avec les «Femmes d'Alger») : 12 fr.;
vente Dubois (seulei : 10 fr.; vente Langlois (seule): 6 fr.
90 c; vente Villot, décembre 1875 (premier étatl : 5 fr. à
M. Perrier. — Cat. A. Moreau, p. 48.
La pierre de notre n» 2 et celle des n Femmes d'Alger » furent
vendues ensemble i23 fr. à M. le directeur de la Galette des
Beaux-Arts. Notre cliché est fait d'après l'autographie. Il y a une légère variante dans le
dessin à la mine de plomb. Les deux états ne différent que par l'addition, au bas. à gauche.
des mots : « Gazette des Beaux-Arts », et à droite : « Imp. Bertauts, Paris. »
N" 476 : Femme de Tanger
Autographie à la plume. — H. o"M90, L. o™2 5o. — Signé à
gauche : « Eug. Delacroix, i833. » — Vente De La Combe :
12 fr. ; vente Dubois : 14 fr.; vente posthume, 17 fr. — ■ Cat.
A. Moreau, p. 32.
La femme est debout, vue de dos, tournant la tète vers la gauche,
les bras ouverts et étendant du linge sur une corde supportée par de
longs piquets. Un jeune garçon est assis par terre; derrière lui
on voit un grand vase déterre à deux anses. Sur le sol divers acces-
soires. Le fond est occupé par de rapides hachures diagonales. — Ce dessin sur papier auto-
graphique, tiré comme le précédent, sans trait carré, est rare.
N° 477 : Jeune femme du Maroc
Dessin à la plume. — H. o™i6,L. o"M 5. — Signé en rébus : un 2, un la,
une croix. — Vente Villot, 1 1 février i865 : qr fr. à M. Choquet. —
Publié en 1882 dans le journallM;-?, par procédé phototypographique
avec trait carré, dans les dimensions de : H.o'"i70, L. o"'i55, numéro
du 23 avril 1882, avec le titre : « Jeune femme du Maroc. » — Cat.
A. Moreau, p. 292.
La femme est jolie et de type européen; mais il faut se rendre à l'évidence du costume.
N" 478 : Femme d'Alger
Croquis à la plume. — H. o"'i i , L. o"'i4.-
— Non catalogué par M. Moreau.
Galerie Bruyasau Musée de Montpellier.
I2S
l/ŒUVRF. nr. DELACROIX
rS3:
N" 4J9 : Femmes d'Alger
Deuxiimc état.
lauche
Autographie à la plume. — H. o"'i6o, L. o'"22o. —
Signé à gauche en bas : « Eug. Delacroix, i833. » —
Vente posthume (deux épreuves du premier état avec
une épreuve des « Muletiers de Tétuan » ) : 12 fr.; vente
Villot, décembre 1875 ipremier état) : 10 fr. à M. Goupil.
— Cat. A. Moreau, p. 49.
Premier état. En bas. au milieu, le titre seul : « Femmes
d'Alger « de la main de Delacroix.
K Gazette des Beaux-Arts ». à droite: « Imp. Bertauts, Paris. »
N" 480 : Femmes d'Alger
Croquis aquarelle. — H. o"'2i5, L. o'"28o. — Appartient
à M. Christophe. — Non catalogué par M. Moreau.
a Oui, ce sont bien là les intérieurs garnis à hauteur d'homme de
carreaux de faïence formant des mosaïques comme dans les
salles de l'Alhambra, les fines nattes de jonc, les tapis de
Kabviie, les piles de cous.çins et les belles femmes aux sourcil.s
rejoints par le surmeh, aux paupières bleuies de khôl, aux
joues blanches avivées d'une couche de fard qui, nonchalamment
accoudées, fument le nargilhé ou prennent le café que leur offre
dans une petite tasse à soucoupe de filigrane, une négresse au
le Gautier, Les Beaux-Arts en Europe.^
N°48i
Femme d'Alger
^
Pastel. — In-folio. — Photographié par Braun. — Appar-
tient au Musée du Louvre. — Non catalogué par M. Moreau.
0 L'Afrique a produit sur M. Eugène Delacroix une impression
'^ï^"'j^-\ ' ^''^'^ ^^ durable; s'il n'est pas resté, comme Marilhat et
lg,?^^^^^S^»!x ' Decamps, Arabe ou Turc à tout jamais, occupé sur son divan
à égrener le chapelet de ses souvenirs d'Egypte ou d'Asie et
dédaigneux comme un musulman de la civilisation des giaours,
il le doit a la mobilité ardente de son esprit trop compréhensif
pour se borner à une seule sphère et qui a des fenêtres
ouvertes sur tous les horizons ; le haschisch oriental n'a causé chez lui qu'une hallucination
passagère, et de ce soleil vertigineux, le hàle tombé, il n'a gardé qu'un rayon. Le désert ne
l'a pas absorbé dans sa grandeur morne et leatement recouvert de son sable, et pourtant de
ce court voyage au Maroc il a rapporté un monde complet. » (Théophile Gautier, Les
Beaux-Arts en Europe. » — Au bas de la page, à droite, Eugène Delacroix a noté quelques
indications pour la couleur de la jupe; elles sont intéressantes h recueillir ; i< Teinte plus
rougeâtre au frisan ;sici du jour et sur les tournants: au milieu, violet. »
i83o
L'CEUVRE DE DELACROIX
12t)
N" 482 : Femmes d'Alger dans leur appartement
tint po
de Ver,
cemme
Toile. — H. i'"77j L- ^'"37. — Autolitho-
graphié par Sirouy : H. o^iSS, L. o'"235.
— Gravé à Peau-forte parCélestin Nanteuil :
H. o""i63, L. o"'262. — Gravé au burin par
Waltner : H. o'"244, L. o™3i4. — Salon de
1834. — Au musée du Louvre. — Car. A. Mo-
reau, pp. 128, i/S, roo, 2o5.
Delacroix faillit ne pas livrer ce tableau à l'Ad-
ministration qui avait fait avec lui le prix do
3,000 fr. pour cette œuvre, quand il apprit qu'un
peintre fort me'diocre,mais protégé de Lamartine,
M. Decaisne, recevait 4,000 fr. pour un tableau,
« l'Ange gardien ». Le ministre insista auprès
de Delacroix en lui disant que le roi lui-même
avait fait le prix de son tableau, et le maître se
ur battu. 11 faut dire cependant qu'on lui commanda immédiatement, pour le musée
saiUes, l'Entrée des croisés à Constantinople. — C'est Lamartine qui attribuait inno-
nt à Delacroix de pauvres peintures de M. Vinchon, et l'accablait d'éloges.
N" 48^ : Femme arabe
Dessin à la plume. — H. o"'27, L. o"'i7. — Fac-similé par A. Robaui.
— Reproduit dans le journal L'Exposition de Toulouse, i865, dans
les dimensions de: H. o'"27, L. o'" 17. Reproduit aussi dans le journal
L'Art, en 1 883. ^Appartient à M. Ph. Burty. — Cat. A. Moreau, p. i36.
Evidemment ce dessin a. été fait sous l'empire du rapprochement qui s'établissait
dans l'esprit de Delacroix entre les nobles attitudes de la statuaire antique et de
la réalité contemporaine, où le climat impose l'usage des draperies flottantes.
On comparera ce dessin à celui des femmes à la fontaine, de i832, que nous
avons catalogué, au n" SgS, sous le titre « Femmes juives arabes. »
N" 484 : Chasseurs arabes
beau mensont
Aquarelle. — H. o'"240, L. o"'2i5. — Lithographiec à la plume
par A. Robaut : H. o'"o98, L. o'"o90. — Vente posthume n° 426 :
6i)0 fr. ; vente Constant Dutilleux, mars 1874 : 835 fr.; vente
Marmontel, janvier i883 : 455 fr. à M. Tabourier. — ■ Non
catalogué par M. Moreau.
C'était une des aquarelles les plus importantes et les plus terminées de
la vente posthume de Eugène Delacroix. L'attitude de la figure principale
est d'une hardiesse singulière et faite pour effarer les partisans de cet art
que l'illustre critique anglais John Ruskin appelle n l'art des poses et du
C'est ce qui faisait dire il H. de la Madelène : c La vie, voilit ce qu'il cherche.»
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i833
N" 48) : Chasse au tigre
Aquarelle gouachée. — H. o'"2d, L. o'"31-). — Appartenait a
M. Riesener. — Voir la « Chasseaux lions» de i858. — Non
catalogué par M. Moreau.
Il n"y a pas trace dans la correspondance de Eugène Delacroix
qu'il ait assisté a aucune chasse de cette sorte ; mais il avait vu,
observé, note dans son infaillible mémoire tant de violentes che-
vauchées, qu'il y aura facilement trouvé les éléments nécessaires
d'une telle composition. Quant aux tigres, n'oublions pas que
l'empereur du Maroc avait envoyé à M. de Mornay, pendant que Delacroix était avec
celui-ci à Mequinez, un tigre précisément que le maître ne se sera pas fait faute d'étudier.
Nous avons cité, en son lieu, la lettre qui a trait h cet envoi.
N°^ 486, 487 : Chevaux arabes
i" Lavis. — In-quarto. — Galerie Bruyas au Musée de
Montpellier. — Non catalogué par M. Moreau.
2" Aquarelle. — H. o"'i8, L. o'"22. — Signé à gauche, non
daté. — Vente Susse, 10 janvier i856 : 69 fr. à M. Adolphe
Moreau. — Cat. A. Moreau, p. 289.
Quoique nous réunissions les deux études sous la même rubrique.
nous devons prévenir le lecteur qu'elles n'ont rien de commun.
Notre croquis est fait d'après le dessin de la galerie Bruyas. —
Le cheval est bien un cheval arabe, mais transporté, peut-être
né, dans quelque ferme de France, dont on aperçoit les bâtiments dans un bouquet
d'arbres. — Je ne sais pas un artiste, même en Angleterre, où il y a d'excellents dessinateurs
de chevaux, capable de fixer d'une main plus savante un mouvement plus souple, plus
équilibré, plus naturel dans sa grâce fugitive et comme saisie au vol.
N"" 488. 489 : Marocain et son entant
1" Toile. — H. o'"235,L. o"'3io. —
Signé au bas à droite. — Vente
Wilson, mars i88t : 900 fr. — Non
catalogué par M. Moreau.
2° Aquarelle. — H. o"'22, L. o'"29.
— Vente A. Carrier, 5 mai 1875 :
5oo fr. à M. Paschal. — Non cata-
logué par M. Moreau.
L'aquarelle avait été choisie par A. Carrier parmi les dessins du maître, au classement des-
quels il avait concouru, en vue de la vente posthume, avec MM. Dauzats, Pcrignon, Schwiter,
Andrieu, Dutilleuxet Burty, désignés à cet effet par le testament. — «Quand on n'a d'abord pu
ressaisir ce que la mémoire représente vaguement, il faut faire d'autres croquis du même sujet
et les refaire jusqu'à ce que l'on ait retire l'image du fond de sa mémoire. »(E. Delacroix.)
i833
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N° 490 : Juif drogman du consulat
Aquarelle. — H. o™34, L. o™26. — Signé et daté en haut à
droite, i833. — Appartient à M. Petit. — Cat. A. Moreau,
p. 174.
Par son importance et par le soin tout particulier que Delacroix y a
apporté, on doit supposer que cette aquarelle a été exposée et que ce
serait bien l'oeuvre qui figure sous le n'^ GSy au livret de l'Exposi-
tion de cette même année. Une sorte de drogman porte la main
gauche à une gibecière et la famille juive l'écoute attentivement.
C'est une de ces nombreuses scènes de mœurs locales que le vif
regard du maître saisissait au passage dans les rues de ces villes du
Maroc où il ne lui était point permis de s'arrêter, poursuivi
comme il l'était par la curiosité importune et même hostile des
indigènes. Nous avons eu déjà l'occasion de faire remarquer que
les obstacles a\ aient ete un puissant aiguillon pour l'activité du maître.
N° 491 : Soldat de la garde de l'empereur du Maroc
Aquarelle. — H. o"'r6, L. o'"25. — Signé. — Gravé à Peau-
forte par F. 'Villot, 1845 : H. o™i63, L. o"'23o. — Vente
Villot, i865 : go fr. — Voir à 1848 variante. — Cat. A.
Moreau, p. loi.
n Nous avons eu un passage de rivière, bien entendu sans ponts et
sans bateaux, qui peut être comparé au passage du Rhin pour la
quantité de coups de fusil qui nous accueillaient. Mais tout cela
n'était rien au prix de notre réception dans la capitale. On nous
a d'abord fait prendre le plus long pour nous faire juger de son importance.» (Mequinez, i832.)
N" 492 : Soldats endormis dans un corps de garde
Aquarelle. — H. o^iS, L.o™3o ou o"^35. — Salon de i833.
• — Cat. A. Moreau, p. 174.
Eugène Delacroix a traité plusieurs fois ce motif. On verra
plus loin (n" 507) une autre aquarelle faisant partie de l'album
de M. de Mornay. Voir aussi, a l'année 1841, le tableau appar-
tenant à M. le duc d'Aumale.
Dans les extraits des souvenirs manuscrits de M. de Planet, pu-
bliés par Th. Silvestre, nous relevons les observations suivantes
de Delacroix sur les Maures : 0 Ils ont les lèvres déformées, la
bouche grande, le nez avec un méplat incliné au bout du carti-
lage, les yeux grands et beaux, le nez aquilin et ordinairement bien fait. Les femmes ont de
l'or partout ; cercles, bagues, bracelets, gros pendants d'oreilles en forme de croissant, etc. »
(Voir les impressions de Eugène Delacroix au Maroc, dans VHistoire des Artistes vivants,
rééditée depuis, sous le titre Les Artistes français, par Th. Silvestre, ouvrage auquel nous
avons fait déjà plusieurs emprunts, en nous proposant de retourner à cette source précieuse.
l32
L'ŒUVRE DE DELACROIX
[833
N°493 : Kaid Mohammed-ben-Abou
Eau-forte. — H. o™i lo, L. o"M7o. — Signé en haut, à droite,
«Eug. Delacroix, i833.» — Vente posthume (premier état) 17 fr.;
vente Burty, 1874 (premier état): 2 5 fr.; vente Villot, décembre
1875 (deuxième état) : 3 fr. 5o. — Cat. A. Moreau, p. 2 i.
Premier état. Sans aucune lettre ni trait carré.
^JiL Deuxième état. En haut, à droite, « les Artistes contemporains »,
^5^ en bas « Chef Maure à Mekinez, par Eug. Delacroix. »
Le Kaïd est accroupi sur des tapis, son café est posé à terre, près de
lui, sur une tablette. Aux murs sont accrochées une petite armoire entr'ouverte et des armes.
0 Le modèle avait ordinairement une rare intelligence de mes moindres intentions; mon croquis
fait, il le prenait, le tournait et le retournait en tous sens avec la curiosité du singe qui
cherche à lire un papier, et le remettait en place, riant de pitié pour moi. »
L'ALBUM DU COMTE DE MORNAY
Il nous paraît intéressant de réunir les dix-huit aquarelles que Delacroix offrit au
comte de Mornav pour son album, et qui, mises en vente le 2q mars 1877, produi-
sirent un total de 17,235 francs. Nous emprunterons en grande partie nos renseigne-
ments aux notes prises par feu M. Adolphe Moreau à la vente de Mornay. Ces notes
nous ont été gracieusement communiquées par madame veuve Moreau.
N°494: Campement dans la ville d'Alias-sar-el-Kebir
Aquarelle. — H. o"M 5o, L. o"'23o. — Signé au bas vers le
milieu : « Eugène Delacroix ». — Voir à Tannée 1839 le
tableau variante. — Vente de Mornay, retiré à 420 fr. —
Non catalogué par M. Moreau.
«Cher ami, écrit Delacroix à M. Pierret, je suis encore ici; vous
voyez que nous ne nous trompions pas, quand nous calculions
que les trois mois au moins seraient employés au voyage. Heu-
reusement les affaires sont terminées et nous partons après-
demain pour Tanger, d'où, je pense, nous ne tarderons pas à nous embarquer. » (Mequinez,
2 avril i832.) — La grande tente au centre est rayée bleu et blanc. Le pavillon français flotte
au-dessus. Au second plan une foule ; des montagnes dans le fond.
N"49^ : Vue de la rade et de la ville de Tanger
Aquarelle. — H. o'"i7, L. o'"25. — Signé en bas à gauche : « Eugène Delacroix. »
— Vente de Mornay: 61 5 fr., a M. de La Valette.
Au premier plan, un personnage debout, en veste jaune, calotte bleu foncé, turban blanc.
Près de lui, un jeune garçon assis sur un rocher. A droite, la mer; au fond, une falaise.
'833 L'ŒUVRE DE DELACROIX i33
N° 496 : Mauresque et sa servante
Aquarelle. — H. o"'i6, L. o'"i8. — Signé au bas à gauche. — Venie de Mornay :
1,000 fr.,àM. Goupil. — Vente Paul Daru, juin 1877 : 36o fr.
La mauresque est assise sur un tertre, les jambes dans l'eau ; elle est coiffée d'un foulard jaune.
La servante, au second plan, debout, étend du linge. Au fond, une haute montagne.
W 497 : Conversation mauresque
Aquarelle. — H. o'"i4, L. o'"i8. — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay :
63o fr., à M. Ferai. — Cédé par M. Ferai à M. Borthon de Dijon.
Lafemme s'appuie sur des coussins jaunes; à gauche, près du tapis, un pot de fleurs. (V. n" 394.)
N° 498 ; Abraham-hen-Chimol, drogman du consulat
Aquarelle. — H. o"'26, L. o'"i8. — Signé en bas à gauche. —
Vente de Mornay : 480 fr., à M. Ferai.
« Dans ce moment, nous sommes prisonniers dans une maison de la ville,
environ depuis cinq ou six jours, jusqu'au moment où nous aurons notre
audience. Etant toujours en présence les uns des autres, nous sommes
moins disposés à la gaieté et les heures paraissent fort longues, quoique
la maison ou nous logeons soit fort curieuse pour l'architecture moresque
qui est celle de tous les palais de Grenade dont vous avez vu les gra-
vures. » (Mequinez, 20 mars 1832). Abraham-ben-Chimol est vêtu d'un
manteau bleu doublé de rouge, d'une redingote marron à brandebourgs et d'un pantalon blanc.
N° 499 : Négresse venant chercher de Teau
Aquarelle. — H. o'"23, L. o'"i7. — Signé au bas à droite. — Vente de Mornay :
610 fr., au duc de Vicence.
L'esclave est appuyée au mur d'une maison. Vêtue d'une longue robe jaunâtre et d'une che-
mise bleu foncé, elle porte sur le bras gauche un burnous blanc. Près d'elle, à gauche, se
trouve une cruche; au fond, un personnage en blanc est vu de dos.
N" ^00 : La femme et la fille d' Abraham-hen-Chimol
Aquarelle. — H. o"'22, L. o'"i6. — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay :
i,55o fr., à M. Hecht.
La mère, assise, est vêtue d'une robe vert foncé, à manches blanches; elle a un corsage rose et
une coiffure verte. _La fille, debout, se penche vers sa mère; elle a une coiffure jaune.
V^-^-- -^--
l34 L'ŒUVRE DE DELACROIX l833
N" ^'oi : Le ministre Amin-Bias
Aquarelle. — H. o'"22, L. o'"i6. — Signé au bas à droite. — Vente de Mornay :
700 fr. à M. le duc de Gramont.
Amin-Bias était ministre des Finances et des Affaires étrangères; il est représenté assis, la tête
tournée à droite; sa barbe est grise. Il est enveloppé dans un burnous tout blanc; on voit un
pied chaussé d'une babouche jaune. A gauche, une table.
N" 502 ; Les convulsionnaires de Tanger
Aquarelle. — H. o'"2o, L. o"'23. — Signé à gauche. — Vente de Mornay : 1,440 fr.,
à M. Hartmann.
La composition se rapproche beaucoup de celle du tableau de i838.
N° ^03 : Danse de nègres dans une rue de Tanger
Aquarelle. — H. o'"23, L. o"i8. — Signé au milieu. — Vente de Mornay : 1,110 fr.,
à M. Gauchez.
Au centre, un personn.ige joue du tambour; deux autres dansent en tenant de petits bâtons
dans chaque main; à droite, un enfant en gilet rouge sort d'une porte.
N° ^04 : Halte de cavaliers arabes près de Tanger
Aquarelle. — H. o"M6, L. o'"26. — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay ;
1,700 fr., à M. Hartmann.
Quatre chevaux, dont un blanc, sont au repos au milieu de cactus; deux arabes en manteau
bleu et blanc sont assis à droite ; au fond, une ville sur une colline et des montagnes bleuâtres.
N" 505 : Fantasia devant la porte de Mequinez
Aquarelle. — H. o'"i5, L. o'"27. — Signé au bas à droite. — Vente de Mornay :
1,200 fr. , à M. Gauchez.
Au premier plan, un peloton de cavaliers lancés au galop, à demi enveloppés de fumée. Celui
du milieu, sur un cheval gris, brandit son fusil. Au second plan, à droite, la porte de la ville
avec d'autres cavaliers. Au fond, des montagnes d'un bleu léger.
« Autre plaisir que j'avais : l'étude des chevaux arabes. Ils ont, sous le ciel natal, un carac-
tère tout particulier de fierté, d'énergie, qu'ils perdent en changeant de climat; il leur arrive
assez souvent de se débarrasser de leurs cavaliers pour se livrer des batailles qui durent des
heures entières ; tout en eux, attitudes et caractère, sent l'héroïsme de la nature primitiva. »
(Th. Silvestre, Les Artistes français.)
N"* ^06 : Muley-Abd-er-Rhaman
Aquarelle. — H. o'"26, L. o'"i8. — Signé à gauche. — Vente de Mornay :
1,700 fr., à M. Goupil. — Vente Paul Daru, 5 juin 1877 : 600 fr.
Dans une lettre que Eugène Delacroix écrivait de Mequinez, en mai i832, à son ami Pierret,
il parle ainsi de l'empereur Abd-er-Rhaman : « Nous avons eu hier audience de l'empereur.
Il nous a accordé une faveur qu'd n'accorde jamais à personne, celle de visiter ses apparte-
ments intérieurs, jardins, etc. Tout cela est on ne peut plus curieux. Il reçoit son monde à
cheval lui seul, toute sa garde pied à terre. Il sort brusquement d'une porte et vient à vous
avec un parasol derrière lui. Il est assez bel homme. Il ressemble beaucoup à notre roi; de
plus, la barbe et plus de jeunesse. Il a de quarante-cinq h cinquante ans. Il était suivi de sa
voiture de parade; c'est une espèce de brouette traînée par une mule. 0 On sait comment
Eugène Delacroix a su mettre à profit l'audience, dont il a donné le récit dans le fragment
de lettre que nous venons de citer. Il en fit le sujet d'un tableau, magnifique par la compo-
sition et par le choix exquis des colorations. (Voir aux années 1844, 1845 et 1862.)
N° ^07 : Soldats endormis dans un corps de garde
Aquarelle. — H. o^iô, L. o"'i9. — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay :
820 fr., à M. de Sourdeval.
Deux personnages couchés sont enveloppés de burnous blancs. Une selle occupe le premier
plan à droite. Au fond, dans l'ombre, on voit un amas de vêtements, d'armes et d'autres
selles. L'effet de lumière vient du côté droit et se concentre au milieu. Nous avons décrit,
sous le n''49i, le même motif traité également en aquarelle.
N" ^'08 : Arabes sur un marché
Aquarelle. — H. o"'i8, L. o'»i2. — Signé au bas à droite. — Vente de Mornay :
5oo fr. à M. Féval.
Suivant M. A. Moreau, qui a fait un examen sévère des dix-huit aquarelles de la vente
Mornay, et dont nous avons pu étudier les notes manuscrites, le catalogue ne donnerait pas à
cette aquarelle son vrai titre, qui serait non pas 0 Arabes sur un marché », mais u Costumes
de Tanger ». La composition aurait en effet une grande ressemblance avec celle qui est
décrite par A. Moreau lui-même dans son catalogue, page 138, et que nous avons mentionnée
plus haut sous le n° 433.
N° 509 : Kaïd Mohammed-ben-Abou
Aquarelle. — H. o'"i4, L. 0^14. — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay :
6o5 fr., à M. de Bordesoulle.
Nous avons reproduit plus haut (n° 493) une eau-forte du maître représentant le même per-
sonnage; dans l'aquarelle, il n'y a pas d'armes accrochées au mur.
l36 L'ŒUVRE DE DELACROIX l833
N" ^ lo : Couloiiglies et Arabes
Aquarelle. — H. o'"i6, L. o'"i6. • — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay :
855 fr., à M. de Bordesoulle.
Assis à la porte de leur maison, ils sont sur des tapis. L'un, vu de dos, la pipe h la main, a
pour costume une veste rayée rose, une ceinture rouge et une culotte vert foncé; l'autre est
en manteau noir. A droite, une rue et deux personnages assis.
N" ^11 : Comédiens ambulants
Aquarelle. — H. o"'24, L. o'"i8. — Signé au bas à gauche. — Vente de Mornay :
1,400 fr., à M. Gauchez. — Cat. A. Morcau, pp. 184, 202.
Eugène Delacroix reproduisit la même composition sur une toile qui fait partie du musée de
Tours (voir à l'année J848); mais dans l'aquarelle, le fond représente les murailles d'une ville,
tandis que dans le tableau, c'est une plaine. — Au premier plan se voit un personnage debout,
tenant un bâton; un autre personnage danse en s'accompagnant de la mandoline.
LE SALON DU ROI
Peintures décoratives exécutées au Palais Bourbon, à Paris. — Cat. -A. Moreau,
pp. 211 et 2 I 2.
« Le palais Bourbon est l'édifice oii siège actuellement la Chambre des députés. On accède au
Salon du roi, soit par la porte de la place du palais Bourbon, soit par la grille du quai
d'Orsay. En suivant ce dernier itinéraire, on traverse la grande salle des Pas-Perdus, dont
les voussures et le plafond sont peints par Horace Vernet.
C'est en i8'33 que M. Thiers fit obtenir à l'auteur déjà célèbre de la Barque de Dante, du
Massacre de Scio, du Marino Faliero, de la Liberté, etc., la commande de l'œuvre qui nous
occupe. Delacroix l'exécuta en cinq années; elle lui fut payée, y compris la partie ornemen-
tale (pilastres, bandeaux, inscriptions, guirlandes, etc.), la modeste somme de 3o,ooo francs.
La distribution de la lumière est très défectueuse au point de vue pictural dans le Salon du
Roi, grande pièce carrée de onze mètres sur onze mètres, percée de tous côtés de portes et
de fenêtres réelles ou simulées. Le jour n'y entre que par trois ouvertures donnant sur une
galerie qui sert de passage et par une percée circulaire placée au milieu du plafond; de plus,
ce plafond est plat, et les rayons qui pénètrent par cette sorte de lanterne centrale éblouissent
le regard, au préjudice des peintures qui l'avoisinent.
Mais Delacroix pouvait mettre au service de son incomparable puissance d'expression une
technique tellement savante, qu'il est parvenu à vaincre cet obstacle. Lorsqu'ori a embrassé
d'un long coup d'œil ce merveilleux ensemble, on ne peut qu'admirer la clarté qui préside
à l'exposition des idées, la netteté des formes, la simplicité et le naturel des attitudes, l'aisance
et l'ampleur des mouvements propres h chacun des personnages, et surtout l'aspect de la co-
loration obtenu à l'aide de gradations de teintes que pouvait seul combiner son talent.
Ces teintes sont grises dans les parties inférieures, où la transition du dallage aux rnurailles
s'opère à l'aide de figures en camaïeu légèrement rehaussées de couleur dans les draperies et
accessoires. Elles sont colorées ensuite dans une gamme très douce, à la manière des tapis-
series, à mesure que se développe, entre les cintres et le bandeau courant sous la corniche,
l'évolution des motits qu'il s'agissait de symboliser. Elles sont puissantes enfin dans les
huit caissons du plafond, où la couleur éclate avec l'énergie dont la palette de Delacroix
l833 L'ŒUVRE DE DELACROIX 187
possédait si bien le secret. L'harmonie de l'effet réalisé par ces combinaisons savantes donne
au spectateur attentif une première et complète satisfaction et le conduit ainsi à chercher le
sens de ces allégories qui arrêtent ses regards charmés.
Comme on pourra en juger, malgré les proportions très réduites de nos reproductions,
Delacroix a montré dans l'ensemble de cette œuvre considérable, jusqu'à quel point sa
conception était souple et pouvait se plier à l'interprétation des motifs les plus variés. C'est que
dans sa haute intelligence d'artiste, Delacroix se rend compte tout d'abord du caractère
de l'architecture qui doit encadrer son œuvre, et il soumet son exécution aux exigences
de ce cadre. Ainsi, dans le cas présent, comme les surfaces verticales des parois ne présentent
que de trè.s légères saillies, il a trouvé bon d'apporter à leur décoration une grande simplicité
de motifs et de tons; il a mis une sourdine aux sonorités ordinaires de sa palette. Le plafond, au
contraire, était divisé par des moulures épaisses, entre lesquelles se creusent les caissons;
l'artiste, dans ces parties plus mouvementées, a réchauffé ses tons, varié et enrichi son
coloris, animé et multiplié les figures.
L'ensemble présente en somme un aspect doux et frais, tout différent de la magnificence
opulente qui s'étale au Louvre dans le plafond de la galerie d'.Apollon C'est que, dans cette
dernière œuvre, la richesse inouïe de l'architecture et particulièrement l'abondance des
figures en ronde bosse, qui contribuent pour une si grande part h la décoration, obligeaient
Delacroix à déployer les ressources extraordinaires de sa palette et de son dessin. « Ondit,» a
écrit Théophile Silvestre,» que le dessin et la couleur sont deux principes se développant au
préjudice l'un de l'autre; que tel tableau est bien peint, partant mal dessiné, tel autre, beau
de lignes et détestable par les tons; que les coloristes ne parlent qu'à nos sens, tandis que les
dessinateurs s'adressent surtout à notre intelligence. Cette division exclusive fut de tout temps
un sujet de stériles querelles, non seulement en peinture, mais dans toutes les branches du
génie humain : en histoire, en politique, en religion. Elles traînent dans tous les livres sous
cette invariable rubrique : spiritualistes et matérialistes, penseurs et écrivains, catholiques et
athées, dessinateurs et coloristes. Chaque maître a développé avec amour sa tendance natu-
relle la plus forte, sans rester pour cela inférieur dans les autres parties de l'art, il serait vul-
gaire d'ajouter qu'une qualité dominante exige de certains sacrifices et que ses défauts sont
souvent un excès de ses qualités. »
Eugène Delacroix a écrit lui-même sur ces compositions une notice que le journal /'.4r< a
publiée le 16 juin 1878 avec quatre croquis de projets pour la décoration des archivoltes.
Nous ne nous ferons point faute de faire de larges emprunts à ce précieux document. CVoir
aussi le SjIou du Roi au palais législatif, texte et dessins par A. Robaut. Paris, 1882, in-i8,
et un article publié parle mèmea'uteur dans l'Art, numéro du 2 mai 1880.)
N°' ^12, 513, p4, 515, 516, ^17, 518, p9 : Plafond
Dimensions : grands caissons, H. 1^40, L. 3'^8o; petits caissons, H. et L. i'"4o. —
Cat. A. Moreau, pp. 211, 212.
0 Ce plafond se divise en neuf caissons. Celui du centre, presque entièrement occupé par une
lucarne circulaire, ne comporte comme décoration que des coins ornés de masques. Tout
autour du caisson central, il s'en développe huit autres, dont quatre présentent des surfaces
allongées; ils ont une grande importance décorative. Le peintre y a placé des figures qui
sj'mbolisent, selon sa conception, les forces vives de l'Etat, c'est-à-dire la Justice, l'Agri-
culture, l'Industrie, la Guerre. Il a trouvé la source d'une inspiration grandiose.
i°La y;(5/;'ce, attribut principal de la puissance suprême, lien indispensable des sociétés
humaines, abaisse son sceptre avec un geste de protection sur des vieillards, des enfants et
des femmes qui l'implorent.
2° L'yl^n'ci(//î(r<? occupe le grand caisson du côté de la cour; elle nourrit des enfants qui se
pressent sur son sein bruni ; près d'elle, un laboureur féconde la terre et lui confie la
semence de la saison prochaine.
i38
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l833
3° V Industrie. La figure principale au plafond est ici caractérise'e par ses accessoires : balles
de marchandises, ancres, etc. Un Génie appuyé sur un trident personnifie la marine ; un
Génie tenant le caducée svmbolise la rapidité des transports et la sécurité des transactions.
^S.:B^'.-^
'g'S
■N ^' ■'■■•'?
4° La Guerre est représentée par une femme à demi-couchée, coiffée d'un casque lauré, cou-
verte de l'égide, appuyée sur un chapiteau d'ordre ionique et tenant des drapeaux dans le
pli du bras. Des femmes éplorées s'enfuient et se retournent pour contempler une dernière
fois les traits du père ou du mari qui vient de succomber en défendant la patrie.
5", 6°, 7", 8". Les quatre derniers caissons, plus petits et carrés, occupent les angles du pla-
fond ; Us sont ornes de figures d'enfants, qui portent des emblèmes se rapportant aux figures
principales : le hibou de Minerve; la corbeille de fleurs et le bâton des pasteurs; le ciseau,
le compas et le marteau; la massue d'HercuTe. »
i833
I-'ŒUVRK DE DELAC:R0IX
i3q
N"^
po, ^'2K 522, ^2j : Frises et bandeaux
H. 2"6o, L. I i'"oo. — Cat. A. Moreau, pp. 211, 212.
«Au-dessus des archivoltes qui surmontent les bases réelles ou simulées pratiquées autour de
la salle, s'étendent, sur chacun des quatre côtés, de grandes frises non interrompues. Eugène
Delacroix y a développé une suite de décorations correspondant h celles du plafond, c'est-à-
dire des scènes relatives à la Justice, à l'Agriculture, aux Arts et h la Guerre. Les personnages
y ont de moindres dimensions que les figures principales du plafond; ils so.nt peints dans
une gamme assez mate qui fait songer aux plus belles tentures des Gobelins. Enfin, des
bandeaux étroits, qui relient les frises à la corniche du plafond, portent, mêlées à des guir-
landes de fleurs, des inscriptions latines choisies avec ce goût littéraire si pur et si classique qui
distinguait Delacroix.» — Nous empruntons nos descriptions au livre déjà cité de M. Robaut.
i'5_« Sur la frise qui accompagne la Justice, se déroulent les sujets suivants : d'un côté, la
Vérité et la Prudence assistent un vieillard occupé à écrire les lois; la Méditation s'applique
à interpréter les textes : les peuples se reposent sous l'égide des principes protecteurs. De
l'autre côté, trois vieillards siègent sur un tribunal; prés d'eux, la Force debout, figurée
sous les traits d'une jeune femme presque nue, appuyée sur la massue, ayant à ses pieds
un lion frémissant, semble prête à faire respecter leurs décisions.
Plus loin, un Génie vengeur exécute leurs ordres et va saisir dans leurs repaires les larrons
et les sacrilèges, qui dérobent des trésors et cherchent à dissimuler les fruits de leurs rapines.
Sur le bandeau on lit, au milieu : justitia; à gauche : leges incidere ligno (graver les lois
sur la table' ; à droite : cui.pam p.ena premit comes (le châtiment suit de près la faute)».
140
L'ŒUVRE DE DELACROIX
[833
2" « Sur la frise correspondant à V Agriculture sont figure'es : d'un côté, la Vendange, par des
faunes et des suivants de Bacchus qui célèbrent la fêle de l'Automne; de l'autre, la Moisson,
sous les traits d'un robuste paysan qui se désaltère au vase écumant que lui présentent des
femmes et des enfants. Une moissonneuse lassée s'est endormie sur des gerbes ; plus loin,
h l'ombre, un Sylvain couronné de lierre s'exerce sur la flûte champêtre, un autre, sur le
chalumeau ; ailleurs, un jeune garçon caresse une chèvre que retient un enfant. Sur le
bandeau, en légende, au milieu : agricultura; à gauche : plenis spumat vindemia labris
(la Vendange écume à pleines cuves); à droite : pacis alumna ceres (la Paix nourrit Cérès). «
Reprenons ici, avec Th. Silvestre, la question du dessin de Delacroix : <• Ilfaudrait remuer au-
jourd'hui, pour vider la question entre Ingres et Delacroix, les raisons jadis invoquées par
les derniers imitateurs de Raphaël contre le Caravage et Ribéra, par les élèves du Poussin
contre Rubens, par les fanatiques de David contre Prudhon et Gericault. Il est bien plus
simple de s'en rapporter au bon sens et de reconnaître tout de suite que la Nature, ce maître
à tous, dessine et colore h la fois avec une indivisible puissance. Oui, les meilleurs dessina-
teurs sont les plus grands coloristes, de même que les plus grands coloristes sont les meilleurs
dessinateurs. Un professeur de pensionnat est capable de dessiner avec justesse la forme du
premier objet venu et de copier la plus vaste des compositions; mais, pour cela, lui faut-il
autre chose que la patience, la justesse de l'oeil, et, à défaut de cette justesse, une loupe, un
compas, un pantographe? On prend pour un beau dessin une image proprement achevée
jusqu'au moindre détail avec un crayon finement taillé; ce n'est la qu'une patiente chinoi-
serie, faite comme ii la pointe d'une épingle. Regardez ces beaux croquis de Rubens, écrits à
grands traits, spontanément, rapidement, comme des paraphes, sous l'empire d'une forte im-
pression : quelle vie, quel feu, quelle tournure! »
i833
L'ŒUVRE DE DELACROIX
141
3° 0 Sur la frise correspondant à Vlndustrie se de'roulent des actions variées ayant trait à l'in-
dustrie et au commerce : à gauche, des nègres échangent contre des denrées européennes
les dattes, l'ivoire, la poudre d'or ; des nymphes de l'Océan, des dieux marins chargés de
perles et de coraux, président à l'embarquement de navigateurs figurés par des enfants qui
couronnent de fleurs la proue d'un navire. A droite, des métiers à tisser la soie, des fileuses,
des femmes et des enfants apportent des cocons dans des corbeilles, et d'autres personnages
sont occupés à les recueillir sur les branches mêmes du mûrier. Sur le bandeau, en légendes,
au milieu : industria; à gauche : indi dona mauis (dons de la mer des Indes) ; à droite :
Fuso STAMiNA TORTA LEvi (tils tordus par le fuseau léger). »
« Ah! Raphaël, Raphaël, quel grand dessinateur!» écrit encore Silvestre, « disent depuis plu-
sieurs centaines d'années ceux-là surtout qui, ne voyant Raphaël que dans les détails, ne le
comprennent pas. Faut-il donc s'étonner que maint critique routinier s'écrie : Delacroix ne
sait pas dessiner! Dites qu'il ne dessine pas comme les autres et qu'il ne veut pas suivre de
recette; mais nul n'a plus étudié, comparé, réfléchi. Il me faudrait une année pour dresser
un inventaire raisonné de ses dessins, sans compter les feuilles volantes qu'il a, dans sa jeu-
nesse, éparpillées par le monde. Je connais de lui des essais d'une obstination presque puérile
et qu'il faisait uniquement pour réussir ou pour se prouver à lui-même qu'il était capable de
réussir dans les travaux les plus ingrats. S'il lui arrive de commettre des fautes, et, si l'on veut,
des énormités, il ne faut les attribuer nia l'ignorance ni au manque de réflexion : tout est en
lui combinaison, parti pris et logique; il lui est sans doute difficile, avec sa nature fiévreuse,
de ne pas marquer tous ses ouvrages d'un cachet d'emportement; mais soyez sûr que sa tête
reste froide, lucide. Il est souvent très savant dans son art et, ce qui vaut mieux encore, doué
de ce génie divinatoire qui trouve les choses du premier coup. »
14'2
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i833
4" «Sur la frise correspondant à la Guerre on voit, d'une part, la fabrication des armes, à proxi-
mité d'arsenaux qui regorgent de glaives, de catapultes, etc., des forgerons gonflent leurs
soufflets, attisent le foyer, aiguisent des épées, et martellent sur l'enclume des casques et des
cuirasses. D'autre part, sont représente's les malheurs de la Guerre : des femmes emmenées
en esclavage lancent au ciel des regards désespérés, leurs bras s'affaissent sous les liens.
Surle bandeau, en légendes, au milieu : bei.lum; à gauche : invisa m.\tribus ar.ma (les armes
odieuses aux mères); à droite : gladios incude parante (l'enclume préparant les glaives).»
N°^ ^24, ^2^, 526, 527, ^28, ,'29, ^'50, 531 : Pilastres
H. 3 mètres, L. variant de o'"97 à i"'io. — Cat. A. Moreau, p. 212.
« Les piliers qui séparent les haies et qui soutiennent les archivoltes sont taillés en forme de
pilastres. Pour en couvrir la surface haute et droite de peintures décoratives, Eugène Dela-
croix se trouvait en face du problème que Jean Goujon a si bien résolu dans ses adorables
bas-reliefs d'angle de la Fontaine des Innocents. Il a pris un parti semblable et rempli
les espaces étroits, dont il disposait, par des figures dont les mouvements accentués et en
même temps les formes onduleuses donnent l'idée de vivantes arabesques. D'ailleurs il
convenait à cet esprit fln et vigoureux, du moment où il avait h représenter sous des aspects
nécessairement variés et dans des dimensions colossales, huit figures de fleuves et de mers,
d'établir entre ces personnages allégoriques et les réalités géographiques auxquelles ils ré-
i833
LŒUVRE DE DELACROIX
14:
pondent, de profondes et délicates analogies. Il devait, par une ingénieuse association de
formes et d'idées, nous rappeler les sinuosités des rivages, ciirva littora, leurs enfon-
cements et leurs brusques saillies, la puissance mobile et le parcours capricieux de ces masses
et de^ ces cours d'eau qui répandent le mouvement dans le paysage comme la vie dans la nature.
Les figures dites des fleuves sont peintes en grisaille; ce sont, d'ans l'ordre que nous avons adopté
pour la description iiu plafond et des frises, d'abord les deux mers qui baignent les côtes de
la France: oceanus irOcéani et mediterraneu.m .mare (la Méditerranéel, caractérisée par le
type africain. Puis le.s six fleuves qui fertilisent la France : garumna (la Garonne) ; araris
(la Saône); ligeris (la Loire); rhenus (le Rhin); sequana (la Seine); rhodanus (le Rhône'".
N°' ^p, ^jj, )j4, )j^ : Premières pensées du plafond
Dessins à la plume. — In-
quarto. A M. Etienne Arago.
Rien n'est plus intéressant que de
comparer ces premières idées aux
sujets définitivement choisis et
réalisés par l'artiste. On peut
suivre les mouvements de sa
pensée et, pour ainsi dire, sur-
prendre les secrets de son génie.
Sa conception première n'est que
l'expression matérielle du sujet.
Ainsi,laji(i//ce venge une victime
en poignardant l'assassin ; la
Guerre est symbolisée par un
appel aux armes. De ce point de départ violent et presque vulgaire, l'intelligence du maître
s'est élevée jusqu'aux visions les plus nobles et les plus sereines de l'art décoratif.
N°® ^^6, 5^7, ^^8, 5)9 : Premières pensées de la frise
A. Robautjdans les dimensions de : H. o"'2o5, L. o"'31io, pour le journal VArt, 187S.
Malgré l'extrême réduction de nos croquis, on pourra cependant comparer ces premières
pensées aux compositions définitives reproduites plus haut. Pour la frise comme pour le pla-
fond, le maître a substitué à des épisodes violents, à des mouvements tourmentés, des scènes
tranquilles, des attitudes calmes, s'harmonisant mieux avec les lignes de l'architecture.
144
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l834
N" ^40 : Croquis de chevaux
Dessin à la plume. — In-folio. — Garde-main avec morceau du bandeau sous cor-
niche du « Salon du Roi ». — Publié en phototypographie par la Vie moderne, du
26 juin 1880 : H. o™i32, L. o"M40. — Non catalogué par M. Moreau.
Six tètes ou corps de chevaux reproduits en une feuille de croquis à la plume. En haut de la
planche, on lit dans un cartouche, sur un commencement de frise du Salon du roi à la
Chambre des Députés, l'esquisse des mi^ts a Matribus detestata ».
N"^ ^41, 542 : Deux études pour la frise
1° Dessin à la mine de plomb. — In-octavo. — Projet
pour le rectangle de la Justice.
2° Dessina la plume. — In-octavo. — Allégorie de la
/ Force dans la frise de la Justice. — Gravé sur bois en
fac-similé par Sotain, pour la Ga:{ette des Beaiix-
•'^j Arts, tome XIX, i865. — Appartient à M. Burty.
^ «Il importe aussi, pour apprécier sainement la décoration
de la Salle des Fleuves, de ne pas perdre de vue que
nous sommes en présence de personnages héroïques surhumains. Nous ne
devons point, par conséquent, leur demander les attitudes précises et les
mouvements exacts que fournit le modèle à l'atelier. Notre imagination doit suppléer
également à certaines bizarreries provenant de l'étroitesse du cadre dans lequel est empri-
sonnée l'immense allégorie. A tous ces titres, Delacroix a complètement et magistralement
rempli le programme qu'il s'était imposé; aussi, quand on considère les dispositions parti-
culières de la salle et les difficultés à vaincre, ceux qui connaissent l'œuvre entier de l'artiste
estiment que, parmi tant de compositions grandioses, il n'en est pas qui donnent mieux que
celles-ci une idée de l'étonnante souplesse et de l'incomparable puissance de son génie ».
Année 1884
N" <,4j ; Eftet de neige à Champrosay
Toile. — H. o™2i, L. o'"33. — N° 216 de la Vente posthume:
260 fr. à M. Filhs. — Appartenait, en 1877, à M. Choquet. —
Non catalogué par M. Moreau.
« Champrosay, » écrit Delacroix, vingt ans plus tard, « est un village
d'opéra comique; on n'y voit que des élégantes ou des paysans qui
ont l'air d'avoir fait leur toilette dans la coulisse; la nature elle-même
y semble fardée; je suis offusqué de tous ces jardinets et de ces pentes
maisons arrangées par des Parisiens. Aussi, quand je m'y trouve, je me sens plus attiré par
mon atelier que par les distractions du lieu. »
i834
L'ŒUVRE DE DELACROIX
145
N" ^4 : Vue prise à Champrosay
Carton. — H. o"Uj, L. o™26. — N° 219 de la Vente posthume.
— Non catalogué par M. Moreau.
Effet général vert bleu; à mi-côte, en haut, à droite, un château devant
le rideau d'arbres. Delacroix n'aimait que de cette sorte ce pays de
Champrosay où cependant il allait a faire ses vendanges, car, — dît-il à
madame de Forget, — j'ai du raisin». Mais si le pays ne lui plaisait guère, il
n'en était pas de même de l'habitation. « Quand j'aurai 5o,ooo francs de trop, disait-il h
M. Schwiter, j'achèterai un palais; il sera comme ma petite campagne de Champrosay, où
je ne trouve pas le temps de mettre les pieds, et qui est remplie d'agréments. »
N"'' 545, 546, ^7 : Peintures décoratives à Valmont
Léda, Anacréon, Bacchus. — Trois essais de fresques. —
A M. Bornot. — Non catalogué par M. Moreau.
Ces fresques occupent des dessus de porte dans le corridor du
premier étage de la propriété de Valmont. Elles furent peintes en
1S34, comme en témoigne le passage suivant de la lettre du 2 3 sep-
tembre adressée à M. F. Villot : « A propos, je dis que je n'ai rien
fait, je me trompe. J'ai fait peut-être plus que je ne pense, car
j'ai essayé de la fresque. Le cousin m'a fait préparer un petit mor-
ceau de mur avec les couleurs convenables, et j'ai fait en quelques
heures un petit sujet dans ce genre assez nouveau pour moi, mais dont je crois que je pourrais
tirer parti si l'occasion s'en présentait. Cela est plus commode que la détrempe. La difficulté
consiste surtout à terminer et à arrondir convenablement les formes; mais je crois que le
changement qui s'opère dans les tons n'est pas aussi considérable que dans la détrempe. Au
reste^ c'est fort long à sécher, et, depuis 4 ou 5 jours que c'est fait, |e ne suis pas encore cer-
tain que les tons aient recouvré leur éclat. J'avoue que je serais singulièrement ragaillardi par
un essai dans ce genre si je pouvais le faire sérieusement et en grand. Je crois le procédé
beaucoup plus simple qu'on ne le fait. » — Nous reproduisons ici la Léda.
N"'' ^48, ^49, 550 : Croquis pour les fresques de Valmont
1° Croquis mine de
plomb. — In-quarto
,vT, jTr T en hauteur. — Non
p^/^^Ç0 catalogué par M. Mo-
reau.
2° Croquis mine de plomb. — In-quarto en largeur. — Non cata-
logué par M. Moreau.
3" Croquis mine de plomb. — In-quarto en largeur. — Non catalogué par M. Moreau.
Nous n'avons reproduit qu'une des trois fresques qui décorent la vieille demeure de Valmont.
Les deux premiers croquis que nous donnons ici rappellent suffisamment le sentiment des
autres compositions. Quant au troisième, c'est la première pensée du premier.
14(3
LHEUVRE DE DELACROIX
l834
N" 5 5 1 ; Une rue à Mequinez
Toile. — Sans aucun détail. — Salon de 1834. — Cat. A. Moreau, p. 174.
N° ^ ) 2 : Portrait de Léon Riesener
Toile.
H. o"'52, L. o'"42. — Cat. A. Moreau, p. 235.
Il est représenté de face en buste, vêtu d'un habit bleu à boutons de
métal. M. Philippe Burty a donné, en tète du premier volume de
on édition des lettres de Eugène Delacroix, des Notes de Riesener
sur le maître. En remerciant les personnes qui ont prêté leur concours
1 cette publication, M. Burty ajoute : a Pardessus tout, le concours de
1 éon Riesener, qui quitta brusquement la vie, presque au moment où
1 achevais ces lignes, m'a été utile. Nous avons souvent agité ensemble
le projet d'une notice biographique que pour ma part je jugeais inutile,
étant peu porté par mes habitudes de critique à me substituer à ceux
qui peuvent prendre eux-mêmes la parole, et la série de ces lettres
composant une réelle autobiographie, sincère et animée. Aujourd'hui, le bon et spirituel
Léon Riesener n'est plus là pour m'encourager et me rectifier; j'ai jeté mon manuscrit au
feu. Je crois ne pouvoir faire mieux que de transcrire ces curieuses notes que, dans sa mo-
destie, le parent et l'ami d'Eugène Delacroix ne m'avait remises que comme matériaux. »
Ce portrait fut exposé dans l'hôtel de Riesener, à la vente après décès de cet ami du maître.
N° 555 : Portrait de M. Bellinger
Toile. — H. o^âo, L. o'"5o. — Signé en clair .sur le fond. —
Non daté. — Non catalogué par M. Moreau.
La redingote est grise. M. Bellinger, élève de la pension Goubaux,
avait obtenu le deuxième prix de mathématiques spéciales au concours
général. Nous avons déjà cité, au sujet du « père Goubaux », un
passage des Souvenirs littéraires de M. Maxime du Camp. Celui-ci dit
encore : « Il était sans doute absorbé par ses travaux littéraires, car on
le voyait peu à la pension, du moins dans les classes élémentaires que
je suivais; en revanclie, nous étions en rapport avec madame Goubaux,
petite femme sèche, brune, alerte, qui passait souvent dans nos salles
d'études et nous vitupérait lorsque nos blouses étaient déchirées, nos
cheveux ébouriffés et nos mains tachées d'encre... Si mes souvenirs
sont exacts, c'est en i83o que la pension Saint-N'ictor quitta la rue Chanteraine, abandon-
nant ses terrains à des néothermes qui ont disparu à leur tour pour faire place aux ateliers
du tapissier décorateur de la ville de Paris. On nous transporta rue Blanche, dans une maison
nouvelle dont le jardin s'étendait jusqu'à la rue de Clichy. Cette maison existe encore; elle a
été un lieu de plaisirs publics. Aujourd'hui, elle abrite une sorte de théâtre. Quant h la
pension Saint-Victor, elle a eu de glorieuses destinées, car de transformation en transfor-
mation elle est devenue ce grand collège Chaptal qui s'élève au point d'intersection de la rue
de Rome et du boulevard des BatignoUes; l'œuvre de mon ancien maître, du a père
Goubaux », a prospéré : ce qui tendrait h prouver que l'on peut être à la fois auteur dra-
matique et bon pédagogue. » (Maxime du Camp, Souve>:irs littéraires. Tome I.)
i834
L'ŒUVRE DE DELACROIX
147
N" ^ ^ : Mademoiselle de la Boutraye
Toile ovale. — H. o"'y3, L. o"'59. — Appartient à ma-
dame Millaud du Tillet, fille de M. le comte du Tillet. —
Cat. A. Moreau, p. 233.
Elle est coiffée en cheveux avec le haut chignon formant coques sur
le sommet de la tête et les boucles de côté encadrant l'ovale du
visage. Elle est vêtue d'une robe blanche sur le corsage de laquelle
descend une chaîne en fer de Berlin se rattachant à la haute ceinture
de soie. M. Moreau, qui cite ce portrait, commet quelques erreurs.
Mademoiselle de la Boutraye et non Boutrai, devenue comtesse
Raymond du Tillet, a été peinte en 1834, et non en 1829. Nous allons
citer, h propos du portrait en pied de Rabelais, l'opinion très juste de
M. Lassalle-Bordes sur l'habileté de Delacroix h faire revivre sur la
toile les traits et le caractère d'un personnage historique d qui ne posait pas devant lui. »
M. Lassalle-Bordes, qui travailla longtemps auprès du maître, prétend que celui-ci éprouvait
Il une grande torture à faire des portraits. » — Ce portrait parut, en 1878, à l'exposition des
portraits historiques. (Catalogue Henry Jouin, n" 855.)
N°^ 5^5, ^56 : Portraits de madame et de M. Simon
" Toile. — H. o'"58, L. o'"48. —
'|fo©^ Appartient à M. Choquet. — Voir un
-i^l.^M autre portrait à l'année 1829. — Non
catalogué par M. Moreau.
2° Sepia — H. o'"i65, L. o'"i3o. — Non
catalogue par M. Moreau.
/j^ Uj Le portraiten pied de madame Simon est une mer-
^^ Aeille de couleur et de lumière. Le coup de soleil
sur le païquet est une note de peintre éblouissante,
qui dcmontrt uni. fois de plus la variété infinie du talent de l'ad-
mirable artiste qui pou\ait s'arrêter à ces phénomènes purement
pittoresques, au moment où il exécutait les grandes compositions
décoratives du Salon du Roi. — Dans la sépia, M. Simon,
omme nous l'avons dit ( voir n" 204), maître de ballet à l'Opéra, est représenté
en costume de capitaine Bracassio, chef de forbans, dans le n Diable amoureux. «
N° ^ ^ 7 : Bouquet de fleurs dans un vase de grès
Toile, — H. o"'72, L. o"'92. • — Non signé ni daté. — Vente George Sand,
23 avril 1864 : 2,070 fr.; vente E. Carlin, 29 avril 1872 : 13,650 fr. —
Cat. A. Moreau, p. 282.
<i Au lieu de simplifier en les généralisant les colorations locales. Delacroix multipliait les
tons a l'infini et les opposait l'un h l'autre pour donner à chacun d'eux une double inten-
sité. L'effet pittoresque résulte donc, chez Delacroix, des complications contrastées, u
N" ^)8 : Portrait en pied de Rabelais
Toile. — Grandeur nature. — Pour la bibliothèque de Chinon.
— Gravé à Teau-forte par Célestin Nanteuil, pour la publication : le
Musée, dans les dimensions de : H. o"M43, L. o"'o94. — Salon de
1834. — Cat. A. Moreau, pp. 106, 1-5.
Ce portrait qui est tout à fait remarquable, même en tant que portrait,
semble avoir e'té bien ignoré au moment où il aurait dû être rappelé,
en 1882, lors de l'inauguration du monument de Chinon. Les curieux trou-
veront sur cette peinture un article très intéressant de Alexandre De-
camps, dans le Musée, revue du Salon de 1834, page bj. Il est
vraisemblable, dit M. Philippe Burty, que ce portrait ne fut pas jugé
digne d'orner les galeries de Versailles. C'est pourquoi il fut donné à la
bibliothèque publique de Chinon. M. Lassalle-Bordes le cite, à juste
titre, comme un exemple de la supériorité de Delacroix quand il avait h reproduire les traits
et le caractère d'un personnage historique qui ne posait pas devant lui.
N""
559
Ensevelissement du Christ
Toile. — H. o'"325, L. o"'240. — A madame Boulanger-Cavé, à
\'ersailles. — Non catalogué par M. Moreau.
Ce tableau a été préparé à l'aquarelle sur papier et retouché à l'huile. Sans
le savoir probablement, Delacroix revenait ainsi au procédé usité par les
peintres du xv siècle, qui n'adoptèrent pas immédiatement la pratique
franche de la peinture à l'huile et procédèrent pendant longtemps encore
par des glacis à l'huile sur une préparation de peinture à l'eau. Il n'est pas
chimérique d'attribuer à cette méthode la parfaite conservation des pein-
tures anciennes. Les vieux maîtres étaient extrêmement méticuleux en ce
qui concerne la technique delà peinture; leurs scrupules au sujet des véhicules des matières
colorantes étaient infinis. Leurs couleurs ne s'étant pas écaillées ni crevassées, cela prouve
incontestablement qu'ils surchargeaient leur peinture aussi peu que possible. (Th. Silvestre.)
N° ^60 : Tigre au repos près de son antre
Toile. — H. o'"26o, L. o"'335. — A madame Boulanger-
Cavé, à Versailles. — Non catalogué par M. Moreau.
Ceci est encore une mise en œuvre de quelque étude faite au Maroc.
Aux enthousiasmes du maître pour le pays et la race, il est curieux
d'opposer ce qu'en dit, dans ses Souvenirs littéraires, M. Maxime du
Camp, parfois grand admirateur de Eugène Delacroix. « Je sortis
de la provmce d'Oran et j'entrai au Maroc ; laid pays, lourde race,
sans élégance, sans grandeur, sans goût. Des peintres, curieux de couleur et de contrastes, en
ont reproduit quelques aspects et croient y avoir trouvé l'Orient; singulier Orient, que les
véritables Orientaux appellent 0 le moghreb » le couchant. «
i834
L'ŒUVRE DE DELACROIX
149
N" 01 : Le prisonnier de Chillon
Toile. — H. o'"j3, L. o'"92. — Daté et signé à
droite. — Salon de i835 et Exposition universeUe de
i855. ^ Lithographie par M. Alophe dans les dimen-
sions de : H.o"M5i, L. o™225, et par Mouilleron dans
les dimensions de : H. o'^igo, L. o"'245. — Vente de la
duchesse d'Orléans, 18 janvier i853 : 4,700 fr. à M. A.
Moreau. — ■ Cat. A. Moreau, pp. 82, i33, 175, 246.
Ce tableau fut peint pour le duc d'Orléans. Il appartient au-
jourd'hui à madame veuve Adolphe Moreau. « Le temps a
doré Je sa plus belle patine le Prisonnier de Chillon. Lié à une colonne par une chaîne
rivée à une ceinture de fer. le malheureux voit mourir son jeune frère, attaché un peu plus
loin, sans pouvoir rompre ses entraves ; le mouvement avec lequel il s'élance vers l'agonisant
est d'une violence superbe; les fonds humides et froids font deviner de vagues arcades sous
leur glacis bleuâtre et donnent une grande valeur à la figure principale, effleurée par un
rayon tombant d'un soupirail. » (Théophile Gautier, Les beaii.v-jrts en Europe.) a La chaîne de
fer est tellementtendue qu'onla dirait elle-même animée, près de se rompre. « (Th.Silvestre.l
N" 02 : Rencontre de cavaliers maures
Eau-forte (trait carréi. — H. o"'i84, L. o'"25i. — Voir
à i833 le tableau refusé au Salon de 1834. — Vente
posthume, trois épreuves: 79 fr. ; vente Villot, décembre
1875 : 59 fr. à M. GoupiL — Cat. A. Moreau, p. 21. —
Cette eau-forte a été publiée en report lithographique dans le
Musée, revue du Salon de 1834, par Alexandre Decamps,
Paris 1834, in-4"', avec cette lettre : En haut au milieu: « Le
Musée »; à gauche: 0 Peint par Eugène Delacroix;» à droite:
«Transport et lith. Delaunois»; au milieu : « Rencontre de ca-
valiers maures (tableau refusé au Salon.) » lia été fait aussi un cliché phototypographique
dans les dimensions de H. o'^igi, L. o'"254, pour l'Art, livraison du 7 mai 1882. '
N° )àj : Rencontre de cavaliers maures
Dessin à la plume. — H. o'"i67, L. o"233. — Appartient à ^L Choquet. — Cliché
phototypographique dans les dimçnsions de : H. o"'i70, L. o"'240 pour l'Art, li-
vraison du 7 mai 1882. — Non catalogué par M. Moreau.
Sans changements importants avec l'eau-forte qui précède et dont l'exécution est plus serrée.
En faisant ce dessin, son tableau sous les yeux, le maître se façonnait la main à la direction
des malheureuses hachures, inévitables sur une planche de métal. Il faut dire aussi, à propos
des eaux-fortes de Delacroix, dont le procédé peut sembler inférieur à côté des publications
récentes, qu'on n'avait pas alors, ou plutôt on semblait avoir délaissé les « ficelles » pour
teinter les valeurs graduellement et avec ce velouté qui rend si bien le gras de la peinture.
— Delacroix a supprimé les cavaliers du fond, qui sont dans le tableau de 1 833 (voir n'' 469^
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i834
N" (64 : Soldat m:iure
Aquarelle. — Signé, non daté. — Vente Villot, 1 i février i865 : 3o5 fr. — Cat.
A. Moreaii. p. 291.
N"- 56^, ^'66 : Officiers turcs
1" Aquarelle. — H. o'"266, L. o"'i85.
— Signé au bas, à droite. — Appartient
à M. G. Revenaz. — Non catalogué par
M. Moreau.
2" Aquarelle. — H. o'"i63, L. o'"24o.
— Signé au bas, à droite. — Appartient
à M. G. Revenaz. — Non catalogué par
M. Moreau.
montre 1 olhi.ier turc aidant son cheval à sortir d'un marais;
le cht\ il csl bai brun pommelé; au fond, on aperçoit dans le lointain
de n3mbri.u\ c^\ iliers qui passent un gué. — Dans le n" 1, l'officier
est monté sur un cheval alezan qui avance au pas relevé.
« Rien n'est plus impertinent ni plus bête que de parler à un grand artiste, érudit et penseur
comme Delacroix, des obligations qu'il peut avoir au dieu du hasard. Cela fait tout simple-
ment hausser les épaules de pitié. Il n'y a pas de hasard dans l'art, non plus qu'en méca-
nique. Une chose heureusement trouvée est la simple conséquence d'un bon raisonnement,
dont on a quelquefois sauté les déductions intermédiaires, comme une faute est la consé-
quence d'un faux principe. Un tableau est une machine dont tous ks systèmes sont intelli-
gibles pour un œil exercé, où tout a sa raison d'être, si le tableau est bon; où un ton est
toujours destiné à en faire valoir un autre; où une faute occasionnelle de dessin est quel-
quefois nécessaire pour ne pas sacrifier quelque chose de plus important. »
N°^ 07, 08 : L'ermite de Copmanhurst et le chevalier
1'^ Composition gravée à Taquatinte par
7 Prévost. — H. o"'420, L. o"'402. — Li-
tho4raphiée par Menut - Alophe, pour
1 Artiste (1834) : H. 0^140, L. o"'i73. —
Cat A. Moreau, pp. 86 et i i i.
Piemier état de la lithographie. En haut, au
milieu : « l'Artiste »; en bas, à gauche ; « Eu-
gi.ne Delacroix »; à droite : <i Lith. de Frey »;
Ermite de C'ipmanhurst (Ivanhoe) », et sur la
phneht a la plume « Alophe, d'après Delacroix. »
Deuxicme état. En haut, au milieu : «Galerie delà Galette des Femmes »; en bas, même
lettre, sauf h droite : « Imprimerie d'Auhert » au lieu de : « Lith. de Frey. "
2° L'épreuve gravée que reproduit notre second cliché n'a pas été cataloguée par M. Mo-
reau. Il est possible qu'elle ait été prise sur la grande planche au moyen de « caches. »
1804
LŒUVRE DE DELACROIX
l5l
N" ^69 ; Le jeune Clifford trouvant le corps de son père
sur le champ de bataille de Saint-Alban
Lithographie. — H. o^iSS, L. o™222. — Composition
analogue à celle de la Mort de Lara. — Vente Sensier
.deuxième état) en lots : 3 fr. ; (troisième état) en lots :
2 fr. — Cat. A. Moreau, p. 49.
Premier état. Sans aucune lettre. — Nous tenons de M. Villot
qu'il n'en a été tiré qu'une seule épreuve, la pierre ayant été
cassée au tirage. Les épreuves des autres états ont été tirées
sur une seconde pierre recommencée par Delacroix.
Deuxième état. En haut: «L'Artiste »; en bas, à droite: « Lith.
de Lemercier. Shakespeare, Henri V!»; à gauche: « Eugène Delacroix»; au milieu le titre.
Troisième état. Le nom de Lemercier n'est pas visible sur les épreuves de cet état.
Publié dans l'Artiste, tome VIIL année 1834.
« Pour Delacroix, la nature est un vaste dictionnaire dont il roule et consulte les feuillets
avec un œil sûr et profond ; et cette peinture, qui procède surtout du souvenir, parle surtout
au souvenir. L'effet produit sur l'àme du spectateur est analogue aux moyens de l'artiste.
Sacrifiant sans cesse le détail à l'ensemble, et craignant d'affaiblir la vitalité de sa pensée par
la fatigue d'une exécution plus nette et plus calligraphique, il jouit pleinement d'une origi-
nalité insaisissable, qui est l'intimité du sujet. » (Ch. Baudelaire.)
N" 570 : Hamlet et Tomhre
Croquis mine de plomb. • — H. o'"220, L. o"'iq5. — Fac-similé
A. Robaut (n" 56) dans les dimensions de o"'220 sur o'^igS. —
Vente posthume : i65 fr. à M. Alfred Sensier. — Voir la litho-
,., graphie n° 579. — Cat. A. Moreau, p. i36.
/y^ yfll^ ((L'ombre : Je suis l'esprit detonpère, condamné pour un certain temps à
ÇifeiW-.^ ^ errer la nuit... Écoute, écoute, on ! écoute! Si tu as jamais aimé ton tendre
père — Hamlet: O ciel ! — L'ombre: Venge-le d'un meurtre hor-
rible et monstrueux. — H.\mlet : D'un meurtre '\.. Fais-le-moi vite connaître. »
N" ^71 : Hamlet et sa mère
Dessin aquarelle. — H. o™22, L. o'"i8. — Appartient à madame
Pierret. — Non catalogué par M. Moreau.
Il ne faut pas confondre cette rencontre d'Hamlet et de sa mère, conim(: on le
fait généralement, avec celle de la deuxième scène du drame. Delacroix nous
montre ici la scène XI en présence de l'ombre invisible pour la reine, où
celle-ci lui dit : « Pourquoi vos yeux sont-ils fixés dans le vide et échangez-
vous des paroles avec l'air impalpable ? Vos esprits regardent avec effarement
.. que regardez-vous.' » et Hamlet répond: « Lui!... lui!... voyez comme sa
. Ne vovez-vous rien ici? — Non, rien, si ce n'est nous-mêmes. »
l52
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i834
N° ^72 : Insultes d'Hamlet à Ophelia
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"24, L. o"Mg. — Fac-similé
A. (Robaut n" 44), dans les dimensions de : H. 0^24, L. o™iq. —
Vente posthume : i5 fr. à M. Albert de la Fizelière. — Voir la
lithographie 11° .541 et le tableau à 1840. — Cat. A. Moreau, p. i36.
0 Si tu te maries, je te donnerai pour dot cette vérité empoisonnée: Sois
aussi chaste que la glace, aussi pure que la neige, tu n'échapperas pas à la
calomnie. Va-t'en dans un couvent. Adieu. Oui. si tu veux absolument te
marier, épouse un imbécile; car les hommes sensés savent trop bien quels
monstres vous faites d'eux. Au couvent, allons et vite! Adieu.» Et Ophelia répond: 0 Puis-
sances célestes, guérissey-le ! Secourez-le, vous, cieux cléments! »
N° ^yj : Reproches d'Hamlet à sa mère
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"24, L. o™r8. — Fac-similé
A. Robaut (n'>45), dans les dimensions de : H. o"'24, L. o^iS. — Vente
posthume: 20 fr. à M. Albert de la Fizelière. — Voir lithographie
n° 546. — Cat. A. Moreau, p. i36.
« Cessez de vous tordre les mains ! Silence ! asseyez-vous, — que je vous
torde le cœur! Oui, j'v parviendrai, — s'il n'est pas d'une étoffe impénétrable;
— si l'habitude du crime ne l'a pas fait de bronze — et rendu inaccessible au
sentiment. .) — La Reine : 0 Qu'ai-je fait pour que ta langue me flagelle de
ce bruit si rude? « — Hamlet : » Regardez cette peinture-ci, et celle-là. »
Baudelaire a cité quelque part des lignes de fienri Heine qui expliquent bien la méthode de
Delacroix : « En tait d'art, je suis surnaturaliste. Je crois que l'artiste ne peut trouver dans
la nature tous ses types, mais que les plus remarquables lui sont révélés dans son âme, comme
la svmbolique innée d'idées innées, et au même instant. Un professeur d'esthétique a voulu
remettre en honneur le vieux principe de l'imitation de la nature, et soutenir que l'artiste
plastique devait trouver dans la nature tous ses types. Il a oublié l'architecture, n
N" ^'74 : Le crâne d'Yorick
Croquis crayon. — Cliché pour VArt, livraison du 3o septembre 1877. — H. o"'i65,
L. o'"i8o avec ce titre : « Alas ! poor Yorick ». — Vente posthume. — Non catalogué
par M. Moreau.
N'' ^75 : Hamlet et Horatio
Sépia. — H. o"'2o, L. o"'i5. — Vente posthume, n" 104 bis, à M. Petit. — Appar-
tenait à M. Monnerot. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est la même composition que celle du tableau catalogué sous le numéro suivant.
£834
[.'ŒUVRE DE DELACROIX
i53
N" ')'/()■. Hamlet et Horatio au cimetière
Horatio !
dos mille
Toile. — H. i'"oo, L. o'"8i. — Signé à gauche «Eug. Delacroix. "
Daté i835. — Tableau refusé au Salon de i836. — Lithographie
pour le journal V Artiste, en i836, dans les dimensions de o"'i87
sur o'"i4i. — Vente Edwards, 7 mars 1870: 21,000 fr. à
M. Heine. — Cat. A. Moreau, pp. 1 12, 176 et 252.
Le jury a refusé ce tableau au Salon de i836. — Le fond est la
reproduction du cimetière de Toulon, où Delacroix demeura en qua-
rantaine en revenant d'Alger après son voyage au Maroc. Ce tableau*
payé vingt et un mille francs à la vente Edwards, était sorti de l'atelier
de Eugène Delacroix au prix de deux cents francs. — On connaît la
fameuse scène du cimetière : « Hélas! pauvre Yorick!... Je l'ai connu,
c'était un garçon d'une verve infinie, d'une fantaisie exquise : il m'a porté sur son
fois. » (Voir plus loin,, n"* SyS, 592, 5q3, et à l'année iSSg.)
HAMLET — SUITE DE SEIZE COMPOSITIONS
Lithographies. — Vente Langlais, treize pièces sur chine ( première publication ) :
100 fr. — Vente De La Combe, treize pièces sur chine (première publication) : i5i fr.
— Vente posthume, treize pièces en un cahier complet ( première publication et
plusieurs cahiers incomplets) : 80 fr. — Vente Piron, treize pièces sur blanc (première
publication] : 80 fr. — Vente Soleil, seize pièces sur blanc (dont les treize de la pre-
mière publication) : 70 fr.; treize pièces dépareillées: 60 fr. — Vente Th. Gautier,
16 janvier 1873 : t25 fr. Tirage moderne, épreuves tachées d'eau. — Vente Villot,
10 décembre 1875 : 62 fr.
Les seize pierres, avec quatre épreuves de chaque pierre tirées chez Lemercier, ont
été achetées par M.Paul Meurice, à la Vente posthume, au prix de 2,o5o fr. — M. Paul
Meurice en a fait tirer deux cents exemplaires, puis, les pierres ont été sciées et enca-
drées.— • L'ouvrage eut donc deux éditions. La première parut seulement en 1843.
Sur la couverture on lit : « Hamlet ; treize sujets dessinés par Eug. Delacroix. A Paris, chez
Gihaut frères, éditeurs, boulevard des Italiens, 5. Lith. de Villain, rue de Sèvres, 19. » Cette
publication avait été faite pour le compte personnel de Delacroix. Le tirage ne comportait que
quatre-vingts exemplaires dont soixante sur blanc et vingt sur chine, lesquels étaient épuisés
au décès de l'auteur. Il en a été tiré à l'origine quelques épreuves sur chine dont le format
dépasse le trait carré d'un à deux centimètres. Elles sont très recherchées quoiqu'elles portent
la lettre. Il y a plusieurs états. Le premier, sans lettre aucune, a été tiré h très peu d'exemplaires
sur chine et sur blanc. Le deuxième, avec lettre, tiré sur grand format porte : « Imprimerie
Villain ». Le troisième , avec lettre, est sur papier blanc. Le quatrième a été tiré avec la
lettre effacée ou cachée au moyen d'un papier mince dont on distingue l'empreinte; il est
sur chine avec l'adresse de l'imprimerie Bertauts.
Deuxième édition, 1864. — Cat. A. Moreau, p. 61. Sur la couverture on lit : 0 Hamlet. Seize
sujets dessinés et lithographies par Eug. Delacroix. Paris, Dusacq et C", Michel Lévy frères,
Pagnerre. M.D.CCC.LXIV. » Les trois sujets ajoutés avaient été exécutés en même temps
que les treize premiers; mais Delacroix, en 1843, n'avait pas voulu qu'il fussent publiés et
s'était contenté d'en faire tirer quelques épreuves d'essai sans nom d'imprimeur et sans lettre.
Bien que les treize planches de la publication originale continuent à porter dans le second
tirage les mots : « Lith. de Villain », ce tirage a été exécuté chez M. Bertauts.
i54
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l834
N° ^77 : La reine s'eftbrce de consoler Hamlet
■iQf). — Cat. A. Mo-
Lithographie. — 1834. — H. o"'253 ,
reau, p. 61 .
Signé en bas, à droite, sur la planche: « Eug. Delacroix, 1834.» En
légende : « Cher Hamlet, écarte cette sombre apparence et jette un
regard ami vers le roi. — Hamlet, acie I, scène IL » — Hamlet est debout
au milieu d'une salle de réception du château; sa mère, à ses côtés, lui
jette un regard inquiet ; au fond, Polonius, Laertes, et des seigneurs de
leur suite. — On connaît la situation dramatique. .■Vu début de la scène,
le roi l'a exposée. « Quoique la mort de notre cher frère soit encore de
fraîche date et qu'il pût paraître que nos cœurs fussent accablés sous le
chagrin, avec une joie en quelque sorte déroutée, le bonheur dans un
œil et la douleur dans l'autre, mêlant les réjouissances aux funérailles
et les cantiques funèbres h l'hymne nuptial, nous avons pris pour femme celle qui fut autre-
fois notre sœur.» Hamlet persiste à porter le deuil de son père; sa mère lui dit : oTu sais que
c'est la loi commune ; — tous ceux qui vivent doivent mourir, et passer de la nature à l'éternité, d
N° ^78 : Hamlet veut suivre l'ombre de son père
Lithographie. — i835. — H. o"'26o , L. o"'2o5. — Cat. A. Mo-
reau, p. 62.
Signé en bas, à gauche, sur l'image : «Eug. Delacroix, i835.» En légende :
K Mon destin me crie de le suivre. Lâchez-moi, messieurs, ou, par le ciel,
je ferai un fantôme du premier qui m'arrêtera. — Hamlet, acte I,
scène IV. 1) — Hamlet, sur la plate-forme du château, retenu par Marcellus
et Horatio, veut s'élancer vers le fantôme qui retourne la tête en s'éloi-
gnant. — Marcellus et Horatio, en faction sur l'esplanade d'Elseneur.
ont à plusieurs reprises aperçu l'ombre du feu roi et prévenu Hamlet. A
minuit, le fantôme se montre en effet, et, par trois fois, fait signe h son
fils de le suivre. Celui-ci obéit, malgré sa propre terreur et la résistance
de ses amis. Quelle force, quelle impétuosité dans l'élan du jeune prince!
N° ^70 : Le fantôme sur une autre partie de la terrasse
Lithographie. — 1843. — H.o'"258, L.o"'i93. — Cat. A. Moreau, p. 62.
Signé en bas, à droite, sur l'image : <i Eug. Delacroix, 1843 ». En légende:
« Je suis l'esprit de ton père. Venge-le d'un meurtre infâme et dénaturé. —
Hamlet, acte I, scène V. » — Hamlet, l'êpée h la main, est debout sur le
rempart, son manteau soulevé par le vent ; il jette un regard d'effroi sur
l'ombre de son père qui s'avance vers lui. — C'est la terrible scène où
Hamlet apprend comment son père a été empoisonné. L'ombre prélude à
la révélation par quelques paroles dont Delacroix traduit le sens mot à
mot : <i ... Je te ferais un récit dont le moindre mot déchirerait ton âme,
glacerait ton jeune sang, ferait jaillir tes yeux de leurs orbites comme deux
eurs sphères, détruirait l'harmonie de ta chevelure symétriquement rangée et
tout droit chacun de tes cheveux comme les dards d'un porc-épic irrité. »
iS34
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" ,-8o : Polonius et Hamlet
prunier, et qu i
Lithographie. — Sans date. — H. o'"248, L. 0"'i82. — Cat. A. Mo-
reau, p. 62.
En légende : «Que lisez-vous, monseigneur?... Des mots, des mots, des
mots. — Hamlet. acte II, scène II. » — Hamlet, les yeux regardant dans
le vide, tient à la main un livre ouvert; Polonius, debout à ses côtés, lui
parle. Il vient de déclarer au roi que Hamlet est fou, fou d'amour pour sa
fille Ophelia, qui lui a remis une lettre du prince. C'est alors qu'il aborde
Hamlet. Celui-ci feint de ne pas le reconnaître et le berne. — « H.amlet. Le
coquin de satirique dit ici que les vieillards ont des barbes grises, que leurs
faces sont ridées, que de leurs yeux découlent l'ambre épais et la gomme du
!s ont une riche pénurie d'esprit en même temps que de très faibles jarrets. »
N''^ 581, 582 : Hamlet et Ophelia
1" Lithographie. — Sans date. — H. o"'243, L. o"'i98. — Cat. A.
Moreau, pp. 62, i 14.
Signé à gauche : « Eug. Delacroix. » — Non daté. — En légende :
(( Nous sommes tous d'insignes vauriens, ne crois aucun de nous, entre
(.n un monastère. — Hamlet, acte III, scène I. » — Hamlet, debout, fait
un geste d'adieu à Ophelia, assise dans l'attitude du désespoir. — (Voir le
tableau à l'année 1840.)
Le premier état sans lettre est une épreuve d'essai; le deuxième a la
li-gendc et le nom de l'imprimeur. Cette planche n'a été publiée que
dans la seconde édition (1864'.
2 M Paul iMeunce possède un croquis à la mine de plomb de cette même scène ; il n'y a
qu'une différence, c est que la composition est retournée.
N° ^8} : Hamlet fait jouer aux comédiens la scène de
l'empoisonnement de son père
Lithographie. — i835. — H. o™248, L. o'"323. — Cat. A.
Moreau, p. 63.
Signé à droite sur l'image : nEug. Delacroix, i835.» En légende:
0 C'est une intrigue scélérate, mais qu'importe ! Votre majesté et
nous, avons la conscience libre; cela ne nous touche en rien...
Vous voyez, il l'empoisonne dans le jardin pour s'emparer de son
royaume; l'histoire est réelle, écrite en bel italien. — Hamlet, acte
III, scène II. » — Au premier plan, Hamlet tenant un éventail à
la main est étendu sur des coussins aux pieds d'Ophelia. Le roi
et la reine sont assis ; derrière eux, debout, Rosencrantz et Polo-
nius regardent la scène qui se joue sur le théâtre. A droite, se tient Horatio appuyé contre
une colonne, il semble examiner le visage du roi. — La planche n'a fourni qu'un très petit
nombre de bonnes épreuves, soutenues dans les demi-teintes.
i56
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i834
N° 584 : Hamlet et Giiildenstern
Lithographie. — Sans date. — H. o"'252, L. o"'2o6. — Cat. A.
Moreau, p. 63.
Sans signature ni date. — En légende : u Voudriez-vous jouer de cette
flûte? — Monseigneur, je ne puis.... — Je vous en conjure. — Hamlet,
acte III, scène II. » — Hamlet, ayant Rosencrantz à ses côtés, présente à
Guildenstern une flûte que celui-ci repousse du geste. — Rosencrantz et
Guildenstern ont été chargés par le roi de sonder Hamlet, de le faire
parler, de découvrir si sa lolie est réelle ou seulement apparente, si elle
est causée par son amour pour Ophelia ou si elle n'est qu'une feinte pour
masquer de pires sentiments. Hamlet se moque d'eux et finit par s'em-
porter : c( Sang de Dieu! croyez-vous qu'il soit plus aisé de jouer de moi que d'une flûte? »
N° ^8^ : Hamlet tenté de tuer le roi
possède une pi
Lithographie. — 184?. — H. o'"263, L. o'"i8t. — Cat. A. Moreau,
p. 63.
Signé à gauche sur l'image : « Eug. Delacroix, 1S43. » En légende: « A
présent, je puis le tuer facilement... mais quoi! le surprendrai-je au milieu
de ses prières, au moment où il purifie son âme? Non, non. — O cons-
cience plus noire que la mort! âme engluée dans le crime! Je ne puis
prier!... mes paroles s'adressent là-haut, mes pensées demeurent ici-bas. —
Hamlet, acte III, scène III. » — Le roi est à genoux, les mains jointes, au
pied d'une colonne, dans un appartement du château. Debout derrière lui,
Hamlet, qui vient d'entrer, tire son épée du fourreau. — M. Paul Meurice
inture du même sujet. CVoir à l'année 1843.)
N""* 586, 587 : Le meurtre de Polonius
H i" Lithographie. — Sans date. — H. 0^241, L. o"M92. — 'Vente
Dubois, 1866 ( premier étati : 18 fr.; vente Villot, décembre 1875
(premier état) : 5 fr. à M. Robaut. — Cat. A. Moreau, p. 64.
Sans signature ni date. En légende : « Qu'est-donc? un rat? — Hamlet,
a^te III, scène IV. » — Hamlet, l'épée à la main, se précipite vers le
rideau derrière lequel est caché Polonius. Sa mère le retient par le bras.
(Voir le tableau à l'année 1843.)
Le premier état est avant toute lettre et sans trait carré. Le deuxième état
a la légende, mais n'a pas de nom d'imprimeur ni trait carré. Le troisième
état porte la légende et le nom de l'imprimeur. Pour un véritable amateur,
les nuances s'apprécient, sur la planche même, par des différences très sensibles et non par
les marges, c est-a-dire que quand bien même on mettrait au carré et on rognerait cette
planche en premier état, on la distinguerait toujours du deuxième état par les coups de
grattoir très clairs au-dessus de la reine ; en outre, l'ombre portée sur le rideau n'a pas les
taches claires qui sont signalées dans le deuxième état.
2" A la vente posthume, le dessin du même sujet fut adjugé pour 290 fr. à M. Vasselot.
N" 588 : Hamlet et k reine
Lithographie. — 181^4. — H. o'"26o, L. o"'i8o. — Vente posthume
(premier état et deuxième) : 23 fr.; vente Soleil (premier état) : 2g fr.
— Cat. A. Moreau, pp. 64, i36.
Signé en haut.h droite: « Eug. Delacroix, 1834. »En légende : « N'ajoute
rien de plus, cher Hamlet. Ces mots pénètrent jusqu'à mon oreille comme
autant de poignards ; rien de plus, cher Hamlet. — Hamlet, acte III,
scène iV. » — Hamlet vient de quitter son siège ;il fixe des yeux hagards
sur le portrait qu'il tient à la main. Sa mère, assise à ses côtés, fait un geste
d'effroi et veut le retenir.
Le premier état présente sur les marges de gauche, en croquis, une femme,
le sein nu; le deuxième n'a ni croquis ni lettre. Le troisième a la légende et le nom de
l'imprimeur. — Dans le croquis préparatoire (voir le n» 67 1) la composition est en sens
inverse, parce que Delacroix n'a pas retourné son dessin pour le lithographier. Il a d'ailleurs agi
de cette manière pour presque toute la suite. En outre, le sujet n'est pas exactement le même.
N° 589 : Hamlet et le cadavre de Polonius
Lithographie. — 1845. — H. o"'255, L. o"'i77. — Partie du n" 407
de la vente posthume (quatre feuilles) : 102 fr. — Cat. A. Moreau,
pp. 64, 252.
Signé au bas, h droite, sur l'image : « Eug. Delacroix, iS35 ». En légende:
(( Vraiment, ce conseiller est maintenant bien silencieux, bien discret, bien
grave, lui qui dans sa vie était le drôle le plus bavard du monde. —
Hamlet, acte III, scène IV. » — Hamlet soulève la draperie derrière la-
quelle s'était caché Polonius et considère son corps étendu par terre. —
Voir le tableau à l'année 1845. ^On se rappelle que, pendant son entretien
avec sa mère, Hamlet,, entendant une voix derrière la tapisserie,ct croyant
que c'est la voix du roi, frappe de son épée et tue Polonius par méprise : « Je t'ai pris pour
un plus grand que toi, » dit-il, hautain et méprisant.
N° ^90 : Le chant d'Ophelia
Lithographie. — 1834. — H. o'"259, L. o™2o8. — Vente Burty
( preniier état ) : 25 fr.; vente Villot, 1875 (premier état avec un
autre) : 55 fr. — Cat. A. Moreau, p. 65.
Signé à gauche : « Eug. Delacroix, 1834. » En légende : « Son linceul
blanc comme neige était parsemé de fleurs. — Hamlet, acte IV, scène V.»
— Ophelia, devenue folle, chante devant la reine dans une salle du
palais d'Elseneur. Elle est presque à genoux, tenant une écharpe à la
main ; au fond, debout, derrière elle, la reine et Horatio. C'est le
meurtre de son père par son amant qui a causé la tolie d'OpheHa.
Le premier état est sans aucune lettre, c'est une épreuve d'essai.— Le
deuxième état avec la légende et le nom de l'imprimeur. Cette planche n'a été publiée que
dans la seconde édition que M. Paul Meurice fit faire en 1S64.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l834
N°^ ^91, ^92 : Mort d'Ophelia
1° Lithographie. — 1843. — H. o"'i86, L. o™255, — Cat. A.
Moreau, pp. 61, 25i, 252.
Signe a gauche, en bas : n Eug. Delacroix, 1843.. » En légende ;
« Ses vêtements appesantis et trempés d'eau ont entraîné la pauvre
malheureuse. — Hamlet, actelV, scèneVII.n — Ophelia vient de glisser
dans les eaux du ruisseau. D'une main, elle se soutient encore à la
branche d'un saule, tandis que de l'autre elle presse sur sa poitrine les
fleurs qu'elle avait cueillies. C'est la reproduction littérale du récit
de la mort d'Ophelia tait par la reine. — Voir les tableaux aux années i83S, 1844 et iSSg.
2» Il faut signaler aussi un dessin de ce même sujet qui lit partie de la vente posthume et
qui fut adjugé, sous le numéro 402, pour 55 i fr. à M. Boignes.
N°' 59^, 594 : Hamlet et Horatio devant les fossoyeurs
1° Lithographie. — 1843. — H. o"'283, L. o'"2i4. — Cat. A. Moreau,
pp. 66, 1 12, 178, 25i.
Signé en bas, sur l'image : « Eug. Delacroix, 1843. » En légende : n Ce
crâne, monseigneur, était celui d''Yorick, le bouffon du roi. — Hélas !
pauvre Yorick. — Hamlet, acte V, scène I. » — Hamlet, qu'accompagne
Horatio, regarde le crâne que lui présente l'un des deux fossoyeurs. — Voir
le tableau refusé au Salon de i835.
2" A la vente posthume, on a pu voir plusieurs productions du maître sur
le même sujet etd'abord sous le nuniéro 403, un dessin adjugé pour 465 fr.
à M. Lecomte. Ensuite sous le numéro 404 on a vendu une peinture,
que nous reproduisons plus loin, à l'année 1840, et qui fut adjugée 'pour
■. Enfin sous le numéro 104 bis fut produite une sépia, qui fut acquise par
entrée dans la collection de M. Monnerot. (Voir plus haut, n" 575.)
N"^^ 59)5 59<^ • Hamlet et Laertes dans la fosse d'Ophelia
i°Lithographie. — 1834. — H. o"'284, L. o'"iq5. — Cat. A. Mo-
reau, pp. 65, I 36.
Signé à gauche : a Eug. Delacroix, 1S34. « En légende : « Ne me serre pas
ainsi h la gorge, l'ami, il y a quelque danger à courir avec moi. — Hamlet,
acte V, scène I. » — Hamlet et Laertes luttent corps à corps au fond de la
fosse ouverte pour recevoir Ophelia. Ils ont sauté dans la fosse tour à tour
en présence du roi, de la reine et de leur suite, accompagnant le cortège
funèbre, et se prennent à la gorge : « Me voici, moi, Hamlet le Danois ! —
Le diable prenne ton âme! — Ta prière est mauvaise... » (Voir à l'année
1842.) Le premier état sans lettre est une épreuve d'essai. Le deuxième a la
lettre et le nom de l'imprimeur. — Cette planche, comme celles que nous
avons cataloguées sous les n"* 58 1 et 590, n'a été publiée que dans la seconde édition.
2" M. A. Robaut possède un dessin du même sujet. Il en a fait un fac-similé (troisième série
de sa publication). Ce dessin est plus simjile d'effet que la lithographie originale.
i835
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i59
N° 597 : Mort d'Hamlet
dis pa
Lithographie. — 1843. — H. o"'289, L. o^soS. — Cat. A. Morcau,
pp. 66, i36.
Signé à Jroite,_ en bas, sur le dessin : « Eug. Delacroix, 1843 ». En lé-
gende : « Ah ! je meurs ! Horatio, justifie moi et ma cause auprès de ceux
qui m'accuseront... Quelle vaste curée a faite la mort! que de princes
frappés par_ le trépas! — Hamlet. acte V, scène IL» — Hamlet, tenant
encore son épée à la main, vient de tomber mortellement frappé. Horatio
essaye de le soutenir. Derrière eux, Osric et deux autres seigneurs
emportent Lacrtes. Au fond, la reine qui se meurt, après avoir bu la
coupe empoisonnée. (Voir à l'année 1842.) — Delacroix a fondu ici, je ne
fondu, tous les mouvements de la dernière scène du drame.
Année i835
N° 598 : Joueurs d échecs à Jérusalem
Toile. — H. o'"455, L. o™55o. — Eau-forte de Ferdinand
Lefmanpour r^r/wfe,tiansles dimensions de o'"i46 sur o"'i 75.
— Eau-forte d'Hédouin pour la galerie Durand-Ruel, dans les
dimensions dé o"'o92 sur o'"io5. — Cat. A. Moreau, p. 100.
Les deux joueurs sont accroupis devant un échiquier posé par terre,
au pied d'un grand mur dont le faite est couronné de végétations et
au delà duquel on aperçoit des terrasses arabes. Une femme qui
soutient des deux mains un vase sur l'épaule droite s'est arrêtée
debout pour les regarder. L'un des joueurs est coiffé d'un turban.
Le titre que nous reproduisons est celui qui a paru dans V Artiste. On sait que Eugène Dela-
croix n'est jamais allé à Jérusalem, il est donc permis de supposer que ce titre fallacieux est
une invention capricieuse du directeur de VArtiste.
N° 599 : Retour de l'Enûint prodigue
Toile. — H. o"'26, L. o'"34. — Vente Sensier.
par M. Moreau.
Non cataloaué
En ce sujet biblique à peine indiqué, Delacroix avait trouvé les plus
touchantes attitudes du pardon. H. de la Madelène l'a dit très juste-
ment : Il La peinture religieuse exige avant tout une grande âme et
un cœur profond ! L'artiste peut ne pas avoir la foi des maîtres pri-
mitifs; mais qu'importe qu'il s'apitoie sincèrement devant la Passion du Sauveur ou le déses-
poir de Marie! Le premier but de l'art est d'émouvoir les âmes, et les tableaux ne sont pas
faits pour soutenir des thèses de philosophie. » [E. Delacroix au boulevard des Italiens.]
i6o
L ŒUVRE DE DELACROIX
i835
N°' 600, 601 : Le combat du Giaour et du Pacha
Toile. — H. o'"73, L. o"'6o. — Daté
i835. — Exposition universellede i855.
— N° 76 de l'Exposition du Pavillon de
Flore, 1 878. — Vente CoUot, #8 janvier
I 85o : 1 ,600 fr.àM. Davin; vente Davin,
14 mars i863 : 7,35o fr. à M. Péreire;
vente Laurent Richard, mai 1 878 : retiré
à 27,000 fr. — Gravé à Teau-forte par
~^^, Massard pour le catalogue Laurent-
Richard dans les dimensions de o"'i3i sur o™! 08; sur bois,
pour le Monde Illustré, d'après Edmond Morin, dans les
dimensions de o'" 197 sur o" 137. — Appartient au baron
Gérard. — Cat. A. Moreau, pp. iSg, 190, 244, 276.
2° Dessin à la sépia. — H. o"M6, L. o'"i6. — Variante du
précédent. — Voir aussi le tableau et la lithographie de 1827.
(I Quel i;oùt passionné n'a-t-il pas pour le cheval, et comme on sent qu'il aime profondé-
ment celte noble bète! Le cheval de Delacroix est presque une créature humaine : il l'associe
à toutes les actions de ses héros; il lui prête leurs passions, il lui fait partager leurs rivalités
ou leurs périls. Dans les mêlées, le cheval est toujours à la place d'honneur et sa vaillance
s'affirme par l'éclat des prunelles et la fumée des naseaux. Le giaour et le pacha fondent
l'un sur l'autre avec furie ; mais qui est le plus furieux, des chevaux ou des cavaliers ? »
N" 602 : Le Christ entre les deux Lirrons
Toile. — H. i'"85,L. i'"35. — Signé en bas à gauche et
dite i835. — Salon de iS35. — Exposition posthume.
— Appartient à la ville de Vannes. — Cat. A. Moreau,
pp 175, 221.
M Robaut a vu ce tableau h Vannes en 1S73 et transcrit les
lignes suivantes peintes sur la toile même, à droite au bas :
1 Donné à la ville de Vannes par S. AL le roi Louis-Philippe I<"',
101 des Français, sur la demande de M. Vigier, député du
premier arrondissement électoral et membre du Conseil
_ gênerai du département du Morbihan. » Si l'on y tenait, la
\ phi.e de cette inscription était sur le cadre et non sur la
loile. i\L Robaut a protesté contre ce vandalisme et cette muti-
htion inqualifiables, danslenuméro 23i du journair^4r/|i'"' juin
1 S7 |\ — La scène représente le sommet du calvaire. Le Christ
L-it en avant. La croix de l'un des larrons n'est pas encore
diessée. La Madeleine, étendue à, terre, lève les yeux vers le
Chi ist. — Ce tableau, acheté par l'État au prix de 2,000 francs,
et donné par lui à la ville de Vannes, est resté dans l'église
Saint-Paterne jusqu'en i865. A cette époque, comme il avait beaucoup souffert par suite des
mauvaises conditions dans lesquelles il s'était trouvé placé, il fut envoyé à M. Andrieu, qui
le restaura. 11 est maintenant à l'Hôtel de Ville de Vannes, dans le cabinet du maire.
i8?5
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i6l
N" 603 : Jeune religieuse
Toile. — Esquisse. — H. o"'42, L. o'"3 i . — Non signé. ■
à M. Christophe. — Non catalogué par M. Moreau.
Appartient
ue tous les
«On se rappelle ce que Diderot dit à ce peintre qui lui apporta le portrait de
son père, et qui, au lieu de le représenter tout simplement dans ses habits de
travail (il était coutelier), l'avait paré de ses plus beaux habits ; « Tu m'as
tait mon père des dimanches, et je voulais avoir mon père de tous les jours."
Le peintre de Diderot avait fait comme presque tous les peintres, qui
semblent croire que la nature s'est trompée en faisant les hommes comme
ils sont; ils fardent, ils endimanchent leurs figures : loin d'être des hommes
ours, ce ne sont pas même des hommes. ( Delacroix, Questions sur le beau.)
N° 604 : Madame Delaporte
Toile. — H. on'20, L. o"'i5. — Cat. A. Moreau, p. 236.
M. Laporte ou Delaporte était encore consul de France à Tanger en 1S46, lors du voyage de
Dumas en Afrique; il en est maintes fois question dans le Veloce.
N" 60^ : Félix Guillemardet
Toile. — Salon de i835. — Cat. A. Moreau.
M. F. Guiljemardet était un des meilleurs amis du maître, peut-être celui qu'il ',a le plus
regretté. (Ecrits poslJiumes.) Son nom a passé maintes fois sous les yeux du lecteur.
N" 606 : Portrait de madame Riesener
Ni signé, ni daté. — Cat. A.
Toile. — H. o"'7o, L. o'"5
Moreau, p. 236.
Au moment même où Delacroix faisait ce beau portrait de sa tante
maternelle, madame Riesener, mère du peintre Léon Riesener, il écri-
vait, en faveur de ce dernier, une lettre dont le destinataire est
inconnu :i. N'ayant pu presque sortir depuis près d'un mois, h cause
d'une indisposition assez grave qui m'est survenue, je n'ai pu, comme
je le désirais, aller rappeler à votre souvenir que vous m'aviez tait
espérer qu'il pouvait se trouver quelque occasion d'employer le jeune
Riesener dans les travaux de Versailles. Je prends le parti d'en
appeler encore à votre obligeance sur ce sujet. Un encouragement
venu du gouvernement, si peu important qu'il soit^ serait un motif
d'émulation pour un jeune homme dont le talent n'a pu être encore
suffisamment apprécié. » Delacroix travaillait lui-même alors pour le musée de Versailles
au portrait du maréchal de Tourville, que nous allons décrire.
102
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l835
N"'' 607, 608 : Le maréchal de Tourville
!° Toile. — H. 2"^2i. L. r"44. — Gravé au
burin pour les Galeries historiques de Ver-
sailles, dans les dimensions de o'"2o6 sur
o™i33. — Au muse'e de Versailles. — Cat.
A. Moreau, pp. 91, 2o5.
2° Toile. — Esquisse. — H. o"'34, L. o"^27.
— N° i38 de la Vente posthume : 160 fr. à
M. Arosa. — Vente Arosa, février 1878 :
410 fr. à M. d'Anthouart. — Photolithogrâ-
phié par Arosa dans les dimensions de o"' 1 20
sur 0^091 . — Non catalogué par M. Moreau.
Faut-il rappeler que Anne-Hilarion de Cotentin. comte de Tourville,
marm célèbre, ne en 1642, nomme marei-hal en lôqS, mourut en 1701? — Le rapproche-
ment des deux compositions prou^e quelle réflexion Delacroix apportait h tout ce qu'il faisait.
N° 609 : Nature morte
Toile. — H. o'"27, L. o'^ig. — Signé en haut à gauche. — Vente
posthume : 600 fr. à M. Haro. — Non catalogué par M. Moreau.
Voilà un sujet que les amants du u style noble » trouveront bien peu
digne d'occuper un grand artiste. Delacroix pensait à eux, quand, dans
les quelques belles pages intitulées : Des critiques en matière d'art, il écrit :
n .A force de voir ajouter ou retrancher h la création et parer les objets de
tant d'imaginations fantasques, on a cru véritablement que rien n'était
plus simple que de remettre à sa place et de polir soigneusement ce qui
ne semblait qu'ébauché dans l'ordre commun. Il s'en est suivi une espèce
d'aristocratie dans les êtres qui sont du domaine des arts. Telle innocente
bête a été déclarée commune, peu présentable, triste, hideuse à voir; ou bien il a fallu tant
de façons pour suppléer en elle au laid ou à l'ignoble, tant de détours pour lui donner
droit "de bourgeoisie et l'offrir du côté honnête, qu'elle n'est plus entrée en scène que toute
rebâtie et proprement accommodée au goût du jour. »
N° 610 : Cheval arabe au piquet
Toile. — H. 0^345, L. o"'434. — Eau-forte de Bracquemond,
1857, inédite dans les dimensions de o'"345 suro"'434. • — Cat.
A. KIoreau, p. 10 1.
M. Edmond About avait communiqué la gravure de ce tableau à
Delacroix, qui lui en envoya une appréciation sévère, trop sévère.
Nous la reproduisons cependant, car elle montre bien ce que le
maître exigeait de ses graveurs : <i On ne peut méconnaître un sen-
timent très vif dans cet ouvrage. La tête du cheval surtout a beau-
coup d'expression et tout annonce d'heureuses dispositions; mais l'inexpérience du lavis et
i835
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i63
du modelé des plans se fait trop sentir en général Vous me trouverez peut-être sévère,
monsieur, et il n'est pourtant personne à qui j'eusse désiré davantage d'être agréable en
cette occasion. Mais vous comprendrez plus facilement que qui que ce soit que j'ai plus à
perdre que tout autre dans une interprétation incomplète. Il me faut absolument un homme
qui sache dessiner tout à fait, non pas à la manière d'un prix de Rome, mais avec une con-
naissance de la ligure et une habileté de main capables d'interpréter avec sûreté là où il n'y
aurait que des indications légères, etc., etc. Cette science, je ne me dissimule pas qu'elle ne
peut être que le fruit de longues études que la plupart des peintres eux-mêmes ne font pas.
Des graveurs, les uns ne savent que calquer timidement un original, faute d'une connaissance
suffisante de la gravure; les autres, par la même raison, déguisent comme ils peuvent cette
insuffisance h l'aide des travaux du métier. » [Lettres, édition Burtv.) — Nous reproduisons
cette lettre telle que ladonne M. Burty.On nous dit cependant qu'elle est adressée àM.Champ-
fleurv et non à M. E. About, et qu'au lieu du mot « lavis » (ligne 6) il faut lire « dessin. »
N°^6ii, 612 : Arabes d'Oran
parler. Con
i" Toile. — Salon de i835. — H. o"'4r, L. o"'3i.
— Vente Jacob de Vos, à Amsterdam, mai i883,
sous le titre : « Orientaux assis à la porte d'une
maison » : 9,600 fr. à M. Langenhuiscn, à
Huisen.- — Cat. A. Moreau, p. 176.
2° Croquis mine de plomb. — In-quarto. —
Vente posthume. — Non catalogué par M. Mo-
reau.
Le tableau représente, assis à terre, à la porte d'une maison, un Arabe,
et devant lui, vu de dos, un Turc qui fume une longue pipe. Auprès d'eux
se tient assis sur une margelle de puits un jeune nègre qui les écoute
muraille, h droite, est accrochée la tète d'un homme de couleur.
N^'^éij, 614 : Côtes normandes
1° Falaises de Fécamp. — Toile. — H.
o^Sô, L. o'"45. — Ni signé, ni daté. —
Etude, effet de pluie, commencé par madame
Dalton. — Appartient à M. Bornot. — Non
catalogué par M. Moreau.
2° Ruines du château d'Arqués, près Dieppe.
— Aquarelle. — H. o'"i8, L. o"'i5. —
Vente posthume. — Non catalogué par
M. Moreau.
Delacroix a toujours aimé les côtes normandes. En 1854, il écrit de Dieppe à madame de
Forget : « Je me lève de très bonne heure, parce que je ne trouve pas le temps long et que
je ne suis pas embarrassé de ma journée. J'ai trouvé par hasard une ressource pour certains
moments, dans la rencontre que j'ai faite, sur la plage, de mon ami Chenavard, le peintre.
C'est un homme de beaucoup d'esprit et qui a une vraie conversation. Nous n'abusons pas
l'un de l'autre, et cela renouvelle les sensations. » (Lettres, édition Burty.)
104
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l835
N"^ 615, 616 : Falaises d'Étretat
i" Aquarelle. — H. o'"i5, L. o"'2o. —
Appartient à M. de Courval-Piron. —
Non catalogué par M. Moreau.
2° Aquarelle. — H. o"o8, L. o'"i4. —
-=- -*i— Vente posthume. — Appartient àM. Al-
fred Robaut — Non catalogué par M. Piron.
\otre numéro i représente les falaises d'Etretat du côté de
I (.camp le numéro 2, les mêmes falaises du côté du Havre, avec
leur dei-oupure et leur aiguille romanesque tant de fois repro-
duites par les peintres. — Dans une vente d'autographes du i'"' juin i883, nous avons
trouvé la plus ancienne lettre connue de Eugène Delacroix; elle est datée du 10 janvier
1814. Il y parle de son premier voyage en Normandie, de son premier séjour à Valmont,
tout près d'Étretat, de ce Valmont, ancienne abbaye de Bénédictins, qui lui a inspiré une
foule d'idées « romantiques. » Le mot y est, en 1814!
N"^ 617, 618 : L'église de Therouldeville, près de Valmont
',^~ à M. Bornot.
1° La sacristie — Aquarelle. — H.
o"M25, L. o"'i6o. — Vente posthume à
M. Lambert-Bornot. — Non catalogué
par M, Moreau.
'-■'''^'/' 2° L'Eglise. — Mine de plomb. —
^ H. o'"i35, L. o"'240. — Vente posthume
Non catalogué par M. Moreau.
En septembre 1834, Delacroix écrit à F. Villot : 0 Je suis devenu si
paresseux ici, que le plaisir de causer un peu avec vous ne m'empêche pas de songer h la
fatigue extrême de tailler une plume et de chercher du papier pour le faire. Je ne sais, pour
ainsi dire, que végéter. Quelques excursions rares aux environs et à la mer complètent mon
existence, qui est adaptée aux mœurs de la province. » {Lettres, édition Burty.)
N" 619 : Le Roi des Aulnes
ton visage? u — L'enfant: i
spectre noir !! » — Le père
Sépia. — H. o"'2io, L. o^SoS. — Appartient à madame
Pierret. — Non catalogué par M. Moreau.
Nous ignorons si Delacroix a jamais repris ce projet et s'il en
a fait un tableau. Nous ne trouvons pas dans son œuvre d'autre
trace de composition d'après la célèbre ballade de Gœthe, que
la musique de Schubert a rendue si ^populaire : a Voyez ce
cavalier hâtant le pas. — 11 tient son fils, qu'il réchauffe en ses
bras; ... la nuit est noire, au loin gronde l'orage, ... le vent
mugit avec fracas. — Le père : « Mon fils, pourquoi me cacher
0 Mon père!! là!! Je viens de le voir, ... le roi des Aulnes, le
0 Mon fils, c'est un brouillard du soir. »
i835
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l65
N" 620 : Parc de Valmont
Aquiirellc— H.o'"i5o, L. o"235. — Partie du n° 597 delà Vente
posthume : 120 fr. — Appartient à M. Bornot. — Non cata-
logué par M. Moreau.
La vue est prise de l'habitation d'où Delacroix e'crit à Frédéric
^ ___^ Villot : « Je suis ici fort désappointé par ce temps effroyable qui ne
ï,^5^'«?«v=r^='=:; .i:==--=--i.v, cesse de^ régner. Les ouragans se succèdent continuellement, et la
pluie n'a eu de relâche qu'un jour à peu près. Vous concevez
combien cela est attristant, quand on se trouve au milieu d'un pays charmant, dont la
verdure est encore comme au mois de mai et qui offrirait de si jolies promenades. La mer est
bouleversée; j'ai eu le plaisir de la voir dans un fort bel état de fureur, mais il a fallu me
faire tremper pour y aller et pour en revenir, u
N" 62 1 : Paysan de Frépillon
Aquarelle. — In-quarto. — Appartient à madame Théophile
Silvestre. ^ Riesener en avait fait un grand tableau — Non cata-
logué par M. Moreau.
En regard de ce type si curieusement étudié, il est intéressant de placer
les ironies du maître écrivant : « Les écoles modernes ont proscrit tout ce qui s'écarte de
l'antique régulier; en embellissant même le Faune et le Silène, en ôtant des rides à la vieil-
lesse, en supprimant les disgrâces inévitables et souvent caractéristiques qu'entraînent, dans
la représentation de la forme humaine, les accidents naturels et le travail, elles ont donné
naïvement la preuve que le beau ne consistait pour elles que dans une suite de recettes.
Elles ont pu enseigner le beau, comme on enseigne l'algèbre, et non seulement l'enseigner,
mais en donner de faciles exemples. Quoi de plus simple, en effet, à ce qu'il semble? Rap-
procher tous les caractères d'un modèle unique, atténuer, effacer les diff'èrences profondes
qui séparent, dans la nature, les tempéraments et les âges divers de l'homme, éviter les
expressions compliquées ou les mouvements violents, capables de déranger l'harmonie des
traits ou des membres, tels sont en abrégé les principes à l'aide desquels on tient le beau
comme dans sa main ! Il est facile de le faire pratiquer à des élèves et de le faire transmettre
de génération en génération, comme un dépôt. » (Questions sur le beau.)
N** 622 : Le connétable de Bourbon
sociale
Croquis mine de plomb. — H. o"i24, L. 0'"2o. — Non catalogué
par M. Moreau.
Ce dessin est extrait d'un album donné par Jenny Le Guilleu à M. Cons-
tant Dutilleux. Le motif, représentant le connétable de Bourbon poursuivi
par sa conscience, est emprunté au Sac de Rome du mvstique, doux et
^ laid Ballanche, un des timides soupirants de madame Rècaniier, un des
> caudataires de Chateaubriand, qui a dit de lui : « Ce génie théosophe
ne nous laisse rien à envier h l'Allemagne et à l'Italie. » Les grands
hommes ont de ces mots écrasants. Comparer l'auteur de la Palingénésie
à Goethe et à Dante! Le pavé était trop lourd. Le pauvre Ballanche en reste'écrasé.
i6d
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i835
N^^ôz^, 624 : Croquis à la plume
1° Courrier espagnol. — H. o"'22, L. o'^ij. —
Daté « i3 janvier 35 ». — Vente Pierret, mai 187g.
— Non catalogué par M. Moreau.
2° Femme assise. — H. o^^o, L. o"'i7. — Daté
« i_3 janvier i835. » — Appartient à madame Jules
Michelin. — Non catalogué par M. Moreau.
<( On a raison de trouver que l'imitation de l'antique est
excellente, mais c'est parce qu'on y trouve observées les
lois qui régissent éternellement tous les arts, c'est-à-dire l'expression
dans la juste mesure, le naturel et l'élévation tout ensemble ; que, de plus, les moyens pra-
tiques de l'exécution sont les plus sensés, les plus propres à produire l'effet. Ces' moyens
peuvent être emplovés à autre chose qu'à reproduire sans cesse les dieux de l'Olympe, qui ne
sont plus les nôtres', et les héros de l'antiquité. Rembrandt, en faisant le portrait d'un men-
diant en haillons, obéissait aux mêmes lois du goût que Phidias sculptant son Jupiter. »
N°62
Lion regardant marcher une tortue
Dessin à la plume. — H. o"'i7, L. o"'24. — Vente posthume n° 474;
acheté 400 fr. par M. le baron de Laage. — Reproduction fac-
similé par A. Robaut dans les dimensions de o'"i7 sur o"'24.
— Gravé sur zinc pour V Illustration du 29 octobre 1864. — Cat.
A. Moreau, pp. i36 et 325.
0 A chaque tentative audacieuse de ceux qui veulent qu'on donne
aux choses leur figure véritable, et non une tournure de bonne compagnie ou d'opéra
comique, les critiques se prévalent d'un certain type, enfant de leur cerveau, courent à la
défense des principes avoués par les gens de goût, et, tenant fort à l'étroit les téméraires
et les novateurs, démontrent de même comment la nature tombe aussi dans de grandes
divagations. Ils ont en cela merveilleusement aidé l'essor de la médiocrité dans tous les
genres. » [Des critiques en matière d'art.] Article de Delacroix dans la Revue de Paris, 1829.
N° 626 : Toit de chaumière et groupe d'arbres
Lithographie, croquis sur une feuille avec
trois autres croquis, par madame Dalton.
— H. o'"i33, L. o™i22.| — Vente De La
Combe : 8 fr.; vente posthume : 7 fr.; vente
\illot, décembre 1875 : 4 fr. à M. Robaut.
— Cal. A. Moreau, p. 33.
Ce dessin se trouve à droite dans le bas d'une
teuille contenant trois autres croquis de pavsage exécutés par
■ madame Dahon. élevé de Delacroix, et non pas par Paul Huet.
comme l'indique le catalogue de la vente De La Combe. — Nous donnons le fac-similé de
la page et la reproduction en plus grand du croquis de Delacroix.
i83b
L'ŒUVRE DE DELACROIX
167
Année i836
N° 627 : Saint Sébastien secouru par les saintes femmes
Toile. — H. 2"'i5, L. 2"^46. — Gravé à i'eau-forte par
Salmon, dans les dimensions de : H. o"'ioo, L. o"^i2q.
Eau-forte de Boilvin, dans les dimensions de : H. o'^gq,
L. o'"i28. — Salon de i836. — Appartient à l'église de
Nantua. — Cat. A. Moreau, pp. 96, 176, 222, 264.
Acheté par l'Etat au prix de 3, 000 fr., ce tableau a été vendu
par la fabrique de Nantua en 1869, pour lasommede 23,ooofr.,
à M. Brame. L'affaire fit grand bruit. Le conseil municipal, qui
n'avait pas donné son autorisation, assigna la fabrique et de-
manda contre M. Brame la nullité de la vente. Le tribunal de
Nantua maintint le marché. Appel fut interjeté et la cour de Lyon a annulé la vente con-
sentie a M. Brame. La cour de Lyon a ainsi consacré ce principe que les objets d'art donnés
aux fabriques font partie du domaine public et ne peuvent, en conséquence, être aliénés.
L'arrêt est de décembre 1873. — Outre les eaux-fortes ci-dessus mentionnées, il faut, pour
être complet, citer aussi une lithographie de Menut Alophe. Delacroix, en effet, écrivait le
25 mars iS36à M. de Cailleux, sous-directeur des musées royaux du Louvre : « Je vous serais
bien reconnaissant s'il vous était possible défaire mettre momentanément mon tableau de Sa/««
Sébastien dans un lieu où il pût être dessiné par M. Alophe, qui vous remettra cette lettre. »
N" 628 : Saint Sébastien. — Esquisse
Toile. — H. o"'24, L. o'"32. — Photolithographie Arosa : H. o"'098, L. o'"i24. —
Vente Arosa, février 1878 : i,3oo fr. à M. Rouart. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 629 : Tête d'homme à barbe. — Étude
Toile. — H. o"'44, L. o'"36. — Epreuves lithographiques obtenues
'par cliché sur verre, essai de M. A. Robaut, dans les dimensions de
H. o'"i42, L. o™i 16. — Vente hôtel Drouot, 28 décembre 1874:
io5 fr. — Non catalogué par M. Moreau.
Tête avec emmanchement de buste; la tête seule est terminée. Delacroix
avait donné cette étude à M. Jules Garipuy, professeur de peinture à Bor-
deaux, en i838. La singulière indication des épaules, en cette étude, n'est-
elle pas sortie de la brosse du peintre dans une de ces heures d'ennui et de
découragement, dont il se plaint dans une fort belle lettre à Villot en
cette même année i836 ? « Un des caractères du découragement est de vous faire considérer
votre profession comme inutile à vous et aux autres. La paresse, d'accord en cela avec l'hu-
meur noire qui teint tout à vos yeux, dépouille de son charme le plus grand la possibilité
de travailler, lequel charme est cette possibilité même... » (Lettres, édition Burty.)
i68
LŒUVRE DE DELACROIX
l836
N° 630 : Musiciens arabes
Aquarelle. — H. o'"4o, L. 0^70. — Signé, et daté i836.
— Voir à l'année 1848. — Gravé à l'eau-forte par Laguil-
lermie, pour le catalogue de la vente Faure, dans les
dimensions de : H. o^oSS, L. o""! 22. — Vente Demidoff,
i3 janvier i863 : 2,100 fr. à M. Bouruet-Aubertot ;
vente Duval, i3 Juin 18-3, retiré à 1,000 fr. ; vente
Faure, juin 18/3: 8,5oo fr.; vente de madame R. F.,
I 7 mars 1876 : 3,5oo fr.; vente Marmontel, i883 : 700 fr.
— Cat. A. Moreau, pp. 184 (note), 290, 292.
La composition est la même, à peu de chose près, que celle du tableau du musée de Tours,
Musiciens et bouffons arabes. L'aquarelle est très soignée, mais dure et manquant d'air. Le
tableau de 184S, au contraire, est un joyau dans l'œuvre de Eugène Delacroix.
N°63i : Arabe assis au coin dune rue
Lavis. — In-quarto. — Vente posthume; vente Sensier, 1877.
— Non catalogué par M. Moreau.
On est stupéfait de l'immense quantité de motifs que Delacroix a
rapportés de son rapide voyage au Maroc. Il n'exagère donc pas quand
il dit, dans une lettre publiée '^o.v Y Autographe : u En fait de composi-
tions tout arrêtées et parfaitement mises au net et prêtes pour l'exécu-
tion, j'ai de la besogne pour deux existences humaines, et quant aux
projets de toute espèce, c'est-à-dire à de la matière propre à occuper
iesprit et la main, j'en ai pour quatre cents ans: jugez si j'ai le temps
de me promener comme mes honorables confrères qui, je pense, pour
la plupart, trouveront du temps de reste pour tout ce qu'ils ont à tirer de leur cerveau. »
N"'" 6p, 633 : Un astronome en observation
1° Sépia. — H. o'"2o, L. o"'i8. — Appartient à
M. Chenavard. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Crayons de couleur. — H. o'"20, L. o'"22. —
Appartient à M. Chenavard. — Non catalogué par
M. Moreau.
Nous avons eu occasion de citer une lettre de Delacroix
où il parle, dans les meilleurs termes, de son ami Chena-
vard, chomme de beaucoup d'esprit et qui a une vraie conversation.» M. Che-
navard, philosophe autant que peintre, sinon plus, est l'auteur de compo-
sitions historiques destinées à la décoration du Panthéon et qui ne reçurent pas leur
destination, ainsi que d'une vaste peinture philosophique intitulée Divina Tragedia.Ch.AT\&x.,
Delacroix, Chenavard, Comairas, Lelièvre se réunissaient quelquefois le soir pour dessiner
et causer chez Poterlet, leur ami commun, qui, plus tard, s'empoisonna avec de l'opium.
i83G
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i6q
N" 6^4 : George aifublé d une armure
Plume et lavis encre de Chine. — H. o'"i9, L. o"'25. — Appur-
fe^ "S tenait à M. G. Arosa. — Non catalogué par M. Moreau.
/ji^-fi^-'- Scène deGœtz dcBerlichingen. (Acte I, scène IL) Une auberge au milieu
.&K-à-<7 ^'^^ ''°'^' — Gœtz : a George ! II n'entend pas. George! George!» —
il'^fli'y 1 ^'7 '-'' ^'^°'"?^ arrive, affublé de l'armure d'un homme fait. — George :
•'IHl rrtt \wJ-- ". Monseigneur! — Gœtz. Où étais-tu donc.'' As-tu dormi? Que
/p=^\yi^--_--. Jilji j' >' diable signifie cette mascarade? Mais sais-tu bien que tu as fort bonne
façon? Approche, mon enfant, ne rougis donc pas; ce n'est pas la
bravoure qui te manque, c'est plutôt un peu de taille... Cela viendra. C'est la cuirasse de
Jean? — George. Oui, monseigneur. Il l'a ôtée pour dormir un instant. — Gœtz. 11 est
plus délicat que son maître. — George. Ne vous fâchez point, je la lui ai prise sans bruit,
j'ai décroché du mur la vieille épée de mon père, j'ai couru dans la prairie, et là, je l'ai
tirée hors du fourreau. — Gœtz. Et tu as frappé d'estoc et de taille tout ce qui était autour
de toi, n'est-ce pas ? Tu as dû bien arranger les buissons ! Jean dort-il ? — George. Vous
l'avez réveillé en m'appelant, et c'est lui qui m'a crié que vous me demandiez. Je voulais
d'abord me débarrasser de cette armure, mais vous m'avez appelé deux ou trois fois de suite.»
N° 6^ ^ : L'Évêque et Adélaïde jouant aux échecs
Croquis à la mine de plomb. — H. o™!/, L. o"^22. — Appar-
tient à M. Burty. — Non catalogué par M. Moreau.
Scène de Gœtz de Berlichingen. (Acte II, scène I.) Château de Bam-
berg. — Un salon. Adélaïde : « Vous n'êtes pas à votre jeu. Echec au
roi! — L'ÉVÊQUE. Il y a encore de la ressource... — Liebetr.\ut. On
appelle cela un jeu royal; on prétend qu'il fut inventé pour un roi et
que ce roi inonda l'inventeur d'une mer de générosités ! Si ce n'est
pas un conte, il me semble que je vois ce prince-là. Pauvre d'esprit... ou d'années, sous la
tutelle de sa mère ou de sa femme, il avait un peu de duvet au menton et quelques poils d'un
blond fade autour des tempes; frêle comme un jeune saule, il jouait volontiers aux dames
avec les dames, non par passion, Dieu l'en' garde ! mais par passe-temps. Son gouverneur,
homme trop actif pour être un savant, trop roide pour être courtisan, inventa « ad usuni
Delphini » ce jeu où Sa Majesté se trouvait si dignement représentée... et ainsi du reste. »
N° 636 : Adélaïde congédiant Weislingen
(\ it) f^ y''\ Croquis à la mine de plomb. — H. o"'i6, L. o"'2 i.
M- zi! P>- f V à^- Burty- — Non catalogué par M. Moreau.
Appartient
yr" Scènede Gœtz de Berlichingen. (Acte II,scèneVI.) La chambre d'Adélaïde.
— Adélaïde. 0 Avez-vous encore quelque chose h me dire? — Weislin-
GEN. Je... dois... partir... — Adélaïde. Eh bien! partez, Weislingen. —
Weislingen. Gracieuse dame... je ne puis. — Adélaïde. Vous le devez.
— Weislingen. Sera-ce là votre dernier regard ? — Adélaïde. Allez !
je suis indisposée fort mal à propos. — Weislingen. Ne me regardez pas ainsi. — Adélaïde.
Veux-tu être notre ennemi et que nous te souriions? Pars! — Weislingen. Adélaïde! —
lyo
L'ŒUVRE DE DELACROIX
t836
Adélaïde. Je vous déteste ! » — Entre Franz. — Franz. «Gracieux seigneur, l'évèque vous fait
demander. — Adélaïde. Allez ! allez! —Franz. Il vous prie de venir au plus tôt. — Adélaïde.
Allez, vous dis-je! — Weislingen. Je ne vous fais pas mes adieux, je vous reverrai. — Il
sort. — Adélaïde. Me revoir... nous y mettrons bon ordre. Marguerite, s'il vient, tu le
renverras. Dis-lui que je suis malade, que j'ai une migraine, que je dors... repousse-le. S'il
est possible de le gagner, ce n'est que par ce moyen. «
N° 6^7 : Lerse
-T?>^., ^y?^. Aquarelle. — H. o"'24, L. o^MS. — Appartient à madame Pierret.
.-^'^-'-'■.^'f-j — Non catalogué par M. Moreau.
Scène de Gcetz de Berlichingen. (Acte III, scène VI.) Jaxthausen. — George, o II
veut vous parler à vous-même. Je ne le connais pas ; c'est un homme de haute
taille, avec des yeux noirs et flamboyants. — Gœtz. Faites-le entrer.» — Entre
Lerse. — Gœtz. « Que Dieu vous garde ! Que nous apportez-vous? — Lerse.
Ma personne! Ce n'est pas grand'chose; mais telle qu'elle est, je vous l'offre.
• — Gœtz. Vous êtes le bienvenu, doublement le bienvenu. Un brave homme,
au moment où, au lieu de gagner de nouveaux amis, je craignais de perdre les
anciens! Dites-moi votre nom? — Lerse. Franz Lerse. — Gœtz. Je vous
remercie, Franz, de m'avoir fait connaître un brave. — Lerse. Je me suisdéjà fait connaître
à vous. Mais cette fois-là vous ne m'en avez pas remercié... »
N° 638 : Gœtz et les paysans
tête
ennem
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"270, L. o'^aiS. — Appar-
tient à M. Burty. — Non catalogué par M. Moreau.
Scène de Gœtz de Berlichingen. (Acte V, scène V.)— Arrivent les chefs.
— LiNK. (. En avant, seigneur capitaine! il n'y a pas un instant à perdre;
'ennemi est en force près d'ici. — Gœtz. Qui a brûlé Miltenberg? —
Metzler. Si vous voulez faire des façons, on vous montrera que nous
n'en faisons pas, nous! — Kohl. Sauvez notre vie et la vôtre; allons,
marchons! — Gœtz, à Metzler. Tu me menaces, je crois, misérable vau-
rien ! Penses-tu que j'aie peur de toi parce que le sang du comte Hel-
senstein souille tes habits? — Metzler. Berlichingen ! — Gœtz. Oui,
tu peux dire mon nom ; mes enfants n'en rougiront pas. — Metzler.
Toi! tu n'es qu'un lâche! un valet de princes!» — Gœtz lui décharge sur
un coup qui l'étend h terre. Les autres les séparent. — Kohl. (>'"' '' '
li débouche ici de tous côtés, et vous vous querellez ? — Link. En av;
Kohl. <> Etes-vous fousr
i-ant ! en avant!
N° 639 : Adélaïde donne le poison au jeune page
Croquis mine de plomb rehaussé de lavis. — In-folio. — Appartenant au comte
Doria. — Non catalogue par M. Moreau.
Cette composition, qui a servi de modèle à la lithographie (voir plus loin, n" 644), diffère ce-
pendant par quelques détails. Le gant n'est pas encore à terre. Le dessin est retourné.
i836
L'ŒUVRE DE DELACROIX
GOETZ DE BERLICHINGEN
Suite de sept lithographies. — Nous réunissons ici à la même date, comme nous
l'avons fait pour la suite de ÏHainlet, les sept lithographies exécutées par Eugène
Delacroix sur des motifs de Gœt:; de BerUchinge>i. On vient de voir de quelle façon
il s'y était préparé. II y iravailla sans suite de"i836 à 1843 et en fit tirer quelques
épreiives, en même temps que VHamlet. En décembre 1843, il écrit à l'imprimeur
Villain qu'il voudrait en avoir cinq ou six épreuves, car » une fois la planche tirée,
les finesses sont entièrement perdues. » Il désire pouvoir en donner et en conserver.
N° 640 : Frère Martin serrant la main de fer de Gœtz
Lithographie. — H. o"'255, L. o^ipS. — Gravé sur bois, sur un
dessin du maître, pour le Magasin pittoresque, voir aux années
1842 et 1843. — Vente posthume 1 premier et deuxième étatsi :
17 fr.; vente Forget, décembre 1873 [deuxième état": 7 fr.; vente
Villot, décembre 1873 i premier étati : 20 fr., à la Bibliothèque
nationale. — Cat. A. Moreau, p. 36, jj.
Premier état: Le fond, à gauche, très soutenu de ton.
Deuxième état : Le fond, surtout près de la faux, très affaibli.
Scène de Gœtz de Berlichingen. (.A.cte I, scènelL) — n Martin. Votre
nom, je vous prie. — Gœtz. Excusez-moi... Adieu, ill lui tend la
main gauche.) — M.\rtin. Pourquoi me tendez-vous la main gauche .''
Ne suis-je pas digne de la droite d'un chevalier? — Gœtz. Et quand vous seriez l'empereur, il
faudrait bien vous en contenter. Ma main droite, bien qu'à la guerre elle ne me soit pas inutile,
est insensible aux serrements de l'amitié. Elle et son gant ne font qu'un : elle est de fer. »
N" 641 : Weislingen attaqué par les gens de Gœtz
Lithographie. — H. o"'3o5, L. 0^270. — Voira l'année i85o.
— \'ente posthume deuxième état), deux épreuves, 22 fr.:
vente Forget, 1873: 12 fr.; vente Villot (deuxième étati ;
26 fr. à M. Goupil. — Cat. A. Moreau. p. 36.
Premier état : H. o™370, L. o"'3oo. Sans trait carré. Avec deux
croquis dans la marge inférieure, représentant des têtes.
Deuxième état : H. o™3o5, L. o™270. Sans les croquis.
Scène de Gœtz de Berlichingen. [.Acte I. scène IIH • — « Lecav.\lieb.
Nous nous enfonçons dans la forêt de Hasiach. Rien de plus curieux
que ce qui nous est arrivé. Imaginez-vous que pendant que nous
marchions dans la nuit, un pâtre s'est trouvé là avec ses moutons; et voilà que cinq loups
sont venus fondre tout à coup sur le troupeau, s'en donnant à cœur joie. Notre maître se
prit à rire et dit : « Bon succès, chers camarades! bon succès [lOur tout le monde et pour
nous aussi ! <> Comme nous nous réjouissions d'un si favorable augure, voilà Weislingen qui
arrive avec quatre cavaliers.... Mon camarade et moi, suivant l'ordre de notre maître,
nous le prenons par le milieu du corps et nous nous v cramponnons. «
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l836
N" 642 : Weislingen prisonnier de Gœtz
Lithographie. — H. o'"28o, L. o"'2io. — Vente Forget, décembre
1873 (premier état) : lo fr. — Cat. A. Moreau, p. 3-.
Premier état. Avec deux eroquis, l'un de Marsyas sur Li marge de
droite, l'autre de lion sur celle du bas; le lion est retourné.
Deuxième état. Sans les croquis.
Scène de Gœtz de Berlichingen. (Acte I, scène IV.) — 0 Weislingen. Je
voudrais que vous me laissiez seul. — Gœtz. Pourquoi cela? Mettez-vous
à votre aise, je vous en prie. Vous êtes en mon pouvoir et je n'aurai garde
d'en abuser. — Weislingen. Ce n'est pas là ce qui m'inquiète, c'est votre
devoir de chevalier. — Gœtz. Et vous savez qu'il m'est sacré. —
Weislingen. Je suis prisonnier; le reste m'est indifférent... Oh 1 si je
m'éveillais et que tout cela ne fùtqu''un songe !... Au pouvoir de Berlichingen ! dont je venais
de secouer le joug, dont je craignais la pensée comme le feu ! lui que j'espérais vaincre !... Et
cet ancien ami, ce loyal Gœtz IDieu ! Grand Dieu! Quelle tin aura tout cela?... Adelbert, te
voilà donc de retour dans cette salle, théâtre des jeux de notre enfance... où tu l'aimais... où
ton âme se confondait avec la sienne !... Qui peut l'approcher et le ha'ir ? Hélas ! maintenant,
je ne suis plus rien ici ! Vous avez passé, jours de bonheur où le vieux Berlichingen était aussi
là, près de la cheminée où nous jouions ensemble, où nous nous aimions commedes anges...
L'évêque va être bien en peine, ainsi que tous mes amis. »
N" 64^ : Gœtz de Berlichingen écrit ses mémoires
I ithographie. — H. o"'265, L. o^'igo. — Gravé sur 'bois, sur un
dessin du maître, pour le Magasin pittoresque. — Voir aux années
1S42, 1843 et 1845. Vente De La Combe, i863 (premier état), avec
tiois autres pièces de la même suite : 62 fr.; vente posthume, deux
Lpieu\es ideuxième étati : 44 fr.; vente Dubois, 1866 (premier
cttt 26 fr.; vente Forget, décembre 1873 (deuxième état' : 10 fr.;
\ente Villot, décembre 18-5 (deuxième étati : 17 fr.,à M. Vignères.
— Cat A. Moreau, pp. 35 et -j.
Premier état. Croquis d'une tète sur la marge gauche; bords non rectifiés.
Deu\ii.me état. Sans les croquis, bords rectifiés.
Troisième état, avec la mention de l'imprimeur 0 Imp. Bertauts. »
Scénede Gœtz de Berlichingen. (Acte IV,scèneV.) — «Au château de Jaxthausen, Gœtz devant
une table ; Elisabeth auprès de lui h son ouvrage ; sur la table, une lumière, de l'encre et du
papier. Gœtz. Jamais je ne pourrai me faire à l'oisiveté. Ma prison de jour en jour se rétrécit.
Je voudrais pouvoir dormir, ou au moins me figurer que le repos a quelque chose d'agréable.
— Elisabeth. Eh bien, achève d'écrire l'histoire de ta vie que tu as déjà commencée. Ce sera
entre les mains de tes amis un témoignage qui pourra leur servir un jour à confondre tes
ennemis. Lègue à une noble postérité la jouissance de ne pas te méconnaître. — Gœtz. Ecrire,
ce n'est qu'une oisiveté affairée : ce métier me fatigue et m'ennuie. Pendant que j'écris ce
que j'ai lait, j'enrage de perdre un temps que je pourrais employer à faire autre chose.»
— Gœthe, mort en i832, n'a pasconnu cette suite de lithographies. Lui qui avait tant admiré
celles du Fausl, il eût retrouvé dans le Gœt^ de Berlicliiugeii les grandes qualités de son inter-
prète singulièrement ennoblies. Je ne sais si dix ans plus tôt, à l'époque du Faust, Delacroix
eût rencontré cette grandeur simple en même temps que cette force d'expression qui était né-
cessaire pour rendre l'énergie et la rude vertu du vieux Gœtz.
i836
L'ŒUVRE DE DELACROIX
173
N'' 644 : Gœtz blessé recueilli par les Bohémiens
Lithographie. — H. o"'3io, L. o"'2?o. — Gravé sur bois, sur un
di-ssin du maitrc, pour le Magasin pittoresque. Voir aux années
1842, 1843 et i85o. — Vente Dubois (premier état) : 25 fr.;
\ente posthume (premier étal) : 21 fr.; vente Villot (deuxième
(.tati : 26 fr. à M. Robaut; vente Sensier, 1877 (deuxième état) :
10 h., à M. A. Robaut. — Cat. A. Moreau, p. 36 t\.-j.
Premier état. Bords non rectifiés.
Deuxième état. Avec bords rectifiés.
SLLne de Gœtz deBerlichingen.(Acte V, scène VL) — 0 La nuit obscure
dans une foret sauvage. — Camp de Bohémiens. — Gœtz, à cheval.
Dieu soit loué ! j'aperçois du feu. Ce sont des Bohémiens. Mes bles-
sures saignent; l'ennemi me poursuit. Grand Dieu ! quelle horrible fin
< Hii-. Est-ce la paix que tu nous apportes? — Gœtz. Je vous de-
en grâce de me secourir. Mes blessures m'épuisent. Aidez-moi à descendre de cheval !
N" 645 : Adélaïde donne le poison au jeune page
Lithographie. — H. o"'240, L. o'"i85. — Vente Villot, catalogué:
u Hamlet et Ophélie »: 55 fr. à M. Meurice. — Cat. A. Moreau, p. 87.
Scène de Gœtz de Berlichingen. (Acte V, scène VIIL) — «Adélaïde. Il m'arra-
chera de son château pour m'enfermer dans un cloître. — Fr.\nz. Enfer
et mort! — Adélaïde. Me sauveras-tu? — Franz. Tout! tout, plutôt que
cela! — Adélaïde en pleurs, l'embrassant. Franz! ah! Franz! pour nous
sauver! — Franz. Oui, il tombera... De mon pied je lui briserai les reins!
— Adélaïde. Point d'emportement. Tiens, remets-lui plutôt un billet plein
^ _ de respect oii je lui dis que j'obéis, et cette fiole... vide-la dans sa boisson.
— Franz. Donnez. Vous serez libre! — Adélaïde. Libre... oui, quand tu
ne seras plus obligé de te glisser jusqu'à moi tremblant, sur la pointe du pied... »
N" 646 : Weislingen mourant
Lithographie. — H. o'"28o, L. o"'220. — Vente De La Combe
deuxième état, avec trois autres pièces de cette suite) : 62 tr.;
vente Dubois (premier état) : 27 fr. ; vente Langlais (premier
état , avec la pièce de « Goetz écrivant ses mémoires », 26 tr.;
vente posthume (premier état, sur chine) : 32 fr.; vente Villot
(premier état) : 26 fr., à M. Alfred Robaut. — Cat. .'\. Mo-
reau, p. 37.
Premier état ; Les bords non rectifiés.
Deuxième état : .Avec les bords rectifiés.
Scène de Gœtz de Berlichingen. (Acte V, scène X.) — « Le château de
Weislingen. — Weislingen. "^Tu vois bien que j'ai respiré l'haleine
^' ~ i.mpoiso'nnée de la mort. Mes forces penchent vers la tombe. J'allais
mourir comme un misérable, tu viens ajouter le désespoir à mes misères... Si je pouvais
'74
L'ŒU\RE DE DELACROIX
l837
parler, ta haine et ton exécration se changeraient en pitié et en gémissements ! Ah ! Marie !
Marie ! — Entre Franz dans la plus. grande agitation. — Weislingen. Ne pleure pas ainsi,
Franz! Bon jeune homme, mon malheur te va au cœur. — Franz se jette à ses pieds et
embrasse ses genoux. — Marie à part. Il est très malade. Sa vue me. déchire le cœur. Comme
je l'aimais ! A présent que je suis près de lui, je sens combien vivement je l'aimais.
Weislingen. — Franz, lève-toi et ne pleure plus. Je puis en revenir. L'espérance ne finit
qu'avec la vie. — Fr.\nz. Non, vous n'en reviendrez pas. 11 taut que vous mouriez. — Weis-
lingen. Il le faut ? — Fr.^nz, hors de lui. Du poison... du poison... de votre femme. Moi!
c'est moi ! (Il s'enfuit.) «
Année 1887
N° 647 : Chef arabe dans une tribu
Toile. — H. r"oo, L. i"M5. — N" 3 du catalogue de
rExposition posthume : « Chef marocain visitant
une tribu. » — Signé à droite en bas, et daté 1837. —
Salon de i838. — Musée de Nantes. — Voir variante
à 1862. — Cat. A. Moreau, p. 177, 2o3.
Outre les deux titres que nous venons de donner : n Chef
arabe dans une tribu » et « Chef marocain visitant une
tribu 11, ce même tableau est encore connu sous le titre :
« La Halte, ou le Kaïd marocain acceptant l'hospitalité
des pasteurs ». C'est pour ce tableau que Delacroix fit, à
Frépillon, les études de chèvres que nous reproduisons
un peu plus loin. (Voir le n" 658.)
Accompagné de cavaliers portant des étendards, le chef
arabe est arrivé au sommet d'un plateau dans les mon-
tagnes, dont son escorte achève de gravir les dernières pentes. Les enfants, les femmes, les
hommes s'approchent; l'un d'eux, à pied, tient aussi un étendard, une des femmes lui
présente un plat de couscous, auquel le Kaïd porte la main ; une autre s'avance ayant sur
la tète une cruche qu'elle soutient de ce beau geste du bras levé, que de précédentes études de
l'artiste nous ont rendu familier. Un jeune enfant d'une charmante naïveté, avec une petite
branche aux doigts, se mêle aux pasteurs. A droite, la chèvre, curieuse elle aussi, regarde
la scène du pied d'un monticule, où se tiennent trois personnages dans l'ombre d'un arbre.
N" 648 ; Portrait d'homme de la famille Demidoff
Toile. — H. o'"99, L. o"'8o. — Signé au bas à gauche, daté 1837. — N° 784 de la
vente San-Donato, 1880, — Non catalogué par M. Moreau.
En reproduisant la désignation du catalogue de la vente San-Donato, nous exprimons le
regret dene pouvoir reproduire aussi la peinture; mais toutes les démarches de M. Robaut
pour obtenir d'en faire prendre un croquis à Florence, au moment de la vente, sont restées
vaines. D'après ce qui nous en a été dit, ce portrait ne serait pas des meilleurs dans l'œuvre
de Delacroix. Ha été retiré des enchères à 2.000 francs environ.
183/
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" 649 : Portrait de M. Déloge
Sans aucune indication autre que :" Portrait à mi-corps. » — Cat. A. Moreau, p. 236.
N^ô^o
Bataille de Taillebourg.
Esquisse
Toile. — H. o™53, L. o'"66. — N" Sj de la Vente
l^ posthume : 7, 5oo fr., à M. Haro. — Voir aux années
1841 et 1842. — Cat. A. Moreau, p. 3 12.
Une autre esquisse, décrite sousle n'' suivant, et qui mesure
o'^-H sur o'"66, est un compromis entre le grand tableau
de Versailles et la présente esquisse. On raconte que
Delacroix faisant un croquis dans les allées du parc de
Berryer, a Angerville, fut un jour abordé par un invité
qui ne connaissait pas le grand artiste, et, comme on
parlait peinture, lui dit : « Il faut que je vous avoue que
je n'aime pas Delacroix. » L'artiste le laisse poursuivre :
(I Tenez, dit-il, il y a de lui, à Versailles un certain
Pont de Taillebourg, eh bien, l'on ne voit seulement pas le pont. » Delacroix se retour-
nant : a Voici ce qui m'est arrivé : le Gouvernement m'avait, en efî'et, commandé le Pont
de Taillebourg et les dimensions précises m'avaient été remises par l'architecte des musées.
Or, mon tableau s'est trouvé trop grand, et on a coupé le pont. »
Sans insister sur la confusion de l'interlocuteur, nous rappellerons que l'auteur de ce coup
de ciseaux est l'architecte Fontaine. Ce sont là jeux d'architecte.
N"-'' 6^1,652 : Bataille de Taillebourg. — Esquisse et croquis
1° Toile.
H.
'54, L. o'^bb. — Quelques variantes avec
S^ir la précédente composition. — Appartient à M. Choquet. —
"'^ Non catalogué par M. Moreau.
2° Croquis à la mine de plomb. — H. o"'26, L. o"'26. —
N° 233 de la Vente posthume. — Appartient à M. A. Robaut.
— Non catalogué par M. Moreau.
Notre dessin reproduit le croquis. Celui-ci est un projet pour
toute la partie qui occupe la gauche du tableau. Ce projet, très dis-
tinct, n'a pas été exécuté. Je dirai, tout à l'heure, que Taillebourg est
le chef-d'œuvre de la Galerie des Batailles au musée de Versailles;
j'incline a croire qu'il est également le chef-d'oiuvre des batailles de
Delacroix. Il ameutait cependant la foule des sots, des pédants et des cuistres. « Quelle
lutte!» écrit Henry de la Madeléne indigné. 0 Quelle lutte! Pour ces honnêtes gens,
l'illustre artiste était une sorte de monstre, un ennemi public, un profanateur, un impie !
Contre lui, tout était licite ! 11 fallait lui courir sus comme à une béte fauve, ou le parquer,
au moins, comme un lépreux ! Si par malheur un pareil homme parvenait a faire école, c'en
était fait! Goût, délicatesse, pudeur, règle, tradition, tout était perdu! Ce n'était pas un
pinceau quetenaientses mains magistrales, c'était le « balai ivre » des barbouilleurs. Le Pont
de Taillebourg était l'œuvre d'un sauvage. «
176
LŒUVRE DE DELACROIX
1837
N°65} : Bataille de Taillebourg
Toile. — H. 4'"93, L. 5'"58. — Gravé au burin et
au trait par Bailly, dans les dimensions de: H. o™2 3o,
L. o"' 2 80, et: H. o"'i 10, L. o"', 122 pour« les Gale-
ries historiques de Versailles ». — Salon de tSSj.
— Au musée de Versailles. — Cat. A. Moreau,
p. 91, 176, 204, 223.
Saint Louis franchit sur la Charente le pont de Taille-
bourg, gardé par l'armée anglaise; emporté par son
ardeur, c'est à peine s'il a été suivi parquelques hommes
d'armes ; les Français essayent de rejoindre leur roi en
traversant la rivière à la nage. Ce tableau est le chef-
d'œuvre de la Galerie des batailles. On trouvera, aux
années 1841 et 1842. l'admirable variante en hauteur
composée pour le vitrail de la chapelle d'Orléans, à
Dreux. Ici on remarquera la suppression de l'arche du pont, due aux ciseaux de Fontaine.
N" 654 : Charles- Qiiint au monastère de Saint- Jiist
Toile. - H. o'"i7, L. o'"25. — Voir variante à
l'année 1 83 i . — Appartient à madame Boulanger-
(^avé, veuve de l'ancien directeur des Beaux- Ans.
— Cat. A. Moreau, p. 173 (note).
On se rappelle que dans le tableau de i83i, lithogra-
phie en i833, l'empereur Charles-Quint est représenté,
comme ici, en habit de religieux et touchant de l'orgue;
la différence entre les deux compositions est dans la
figure du novice, que la première montre debout auprès
de l'empereur. Dans celle-ci, au contraire, le novice,
passant dans les jardins du monastère que l'on voit par
une Icnetre ou\ertc, s'est approche, attiré par les sons de l'orgue. Un bras pose sur l'appui
de la fenêtre , il écoute avec ravissement. On trouvera à l'année 1839 une autre réduction.
N"6^) : Lion dévorant un lapin
ses énormes pattes,
Aquarelle et pastel. — H. o"'20, L. o"'3o. — Voir la lithogra-
phie à Tannée 1829 et le tableau à l'année i856. — Vente
du baron de C, 22 janvier i858 : 200 fr. • — Appartient à
M. Georges Duplessis. — Cat. A. Moreau, p. 293.
11 v a de sensibles différences .entre la lithographie de 1829 et
l'aquarelle de 1837. Dans la première le lion ramène à lui sa
proie, la tient entre ses avant-bras avec un geste de nourrice. Ici,
au contraire, le grand fauve écrase l'animal du seul poids de
ins effort, et semble jouer le terrible jeu du chat avec la souris.
.837
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" 6^6 : Le Christ en croix. — Ebauche
Toile. — H. o"45o, L. q"'3G5. — Reproduit en pliototypie, par
G. Arosa, pour le catalogue de sa vente, dans les dimensions de :
H. o'"i2i, L. o"'096. — Vente Arosa, février 1878:610 fr. à
M. Dolfus. — Non catalogué par M. Moreau.
Le génie essentiellement créateur et naturellement original de Eugcne
Delacroix s'accommodait on ne peut mieux des attitudes et des types
consacrés par la tradition dans les sujets religieux : il n'éprouvait alors nul
besoin de se mettre l'esprit h la torture pour faire du nouveau quand
même. La grande et majestueuse simplicité de la pose du Christ en croix,
telle qu'elle se perpétue dans l'art depuis des siècles, lui suffisait ample-
ment. Il n'a jamais songé h modifier les moyens ni l'outillage de la crucifixion, h suspendre
le corps de la grande victime par des cordes, h lui écarter les jambes et à les clouer de côté,
entre le tendon d'Achille et le court péronier latéral, à un tronc d'arbre non équarri, trop
gros pour l'étreinte des membres intérieurs. De telles et si bizarres recherches, dont nous
avons depuis été les témoins, ne sont que des affectations de l'esprit de décadence.
N° 6^7 : Prisonniers de Nicopolis devant Bajazet
Dessin. — H. o™ioo, L. o'"i4o. — Gravé sur bois pour
V Histoire des ducs de Bourgogne. — Cat. A. Moreau,
p. 140.
Nous signalons ici la grande analogie qui existe entre cette
composition et celles de la jeunesse du maître en ses esquisses
de concours à l'Ecole des Beaux-Arts. Elle a été publiée dans le
tome II de V Histoire des ducs de Bourgogne, par M. de Ba-
rante, Paris, Dufey. éditeur, rue des Marais-S.-G., iSjy. Cette
planche, dont le titre est gravé sur une ligne en caractères de
gothique allemande, ne porte pas le nom du graveur, niais seulement en bas, à gauche, celui
de Eugène Delacroix. C'est peut-être, du reste, la moins bien gravée de toute "la collection
qui sort des ateliers Thompson, et aussi Andrew, Best Leloir.— On amène à Bajazet, assis sur
des coussins, des prisonniers enchaînés, nus pour la plupart jusqu'à la ceinture. L'un d'eux
cependant, vu de tace. les mains liées derrière le dos. porte son vêtement de guerre avec la
croix sur la poitrine. On compte dix-huit figures.
N° 658 : Études de chèvres et de chiens
^- 'î^ -.' ^ V 1
Croquis à la mine de plomb. — H. o"'i6, L. o™2i. — On
lit au bas : « Mardi 6 juin 1837, Frépillon. » — Non cata-
logué par M. Moreau.
II existe aussi, du même temps, d'autres études de chiens et de rats.
Dans un des agendas de Eugène Delacroix, on trouve la note sui-
vante : (I Albert DutiER. J'ai remarqué, en présence de son Saint
Hubert et de son Adam et Eve. que le vrai peintre est celui qui
connaît toute la nature. Ainsi les figures humaines n'ont pas, chez lui, plus de perfection
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l838
que celles des animaux de toutes sortes, que les arbres, etc. Il fait tout au même degré,
c'est-à-dire, avec l'esprit rendu que comporte l'avancement des ans à son e'poque... Tout,
chez lui, est à consulter. » C'est ce que M. Alfred Dumesnil, dans son beau livre, La foi
nouvelle cherchée dans l'art, de Rembrandt à Beethoven, a résumé d'un mot : « Tout ce qui a
vie a droit. » C'est pourquoi Delacroix, dont le cerveau méditait tant de compositions
héroïques, ne dédaignait rien dans la nature et laissait tomber de son crayon ces études de
chèvres, de chiens et de rats, de perroquets et de tous autres genres d'anirnaux.
Année i838
N° 6)9 : Colomb au couvent de Sainte -Marie de Robida
Toile. — H. o"oo, L. i"M6. — Daté iS.^S. — Gravé à
Peau-forte par Bracquemond pour le catalogue de la vente
San-Donato et cliché ensuite pour V Illustration, dans les
dimensions de : H. o"i lo, L. o"i45. — Voir le pendant à
1839. — Vente San-Donato, 26 février 1870: 38, 000 fr. —
Appartient à M. Edouard André. — N" 80 de rExposition
du pavillonde Flore, en 1878. — Cat. A. Moreau,p.94,259.
Debout dans le parloir du couvent, Christophe Colomb regarde
une carte géographique suspendue au-dessous d'une rangée de
tableaux; son fils Diego est assis devant lui, dans un fauteuil
la muraille. Le prieur, don Juan Pérès'de Marchena. suivi d'un frère, s'avance
\ci^ jui. A gauche, on voit un groupe de trois moines debout et causant. — Par erreur,
iM. Adolphe Moreau dit que la gravure parue dans le numéro du 5 février 187 i de l'Illustra-
tion, porte à droite, en bas, le nom de u Villot »; c'est n Gillot » qu'il faut lire. M. Gillot père
est l'inventeur du procédé de reproduction photographique sur zinc, qui a fait une révolution
dans le mode d'illustration des )ournaux et des livres.
adosse
vers
N° 660 : La mort d'Ophelia. — Grisaille
Toile. — H. o'"37, L. 0^46. — Signé à droite, non daté.
— Voir des variantes aux années 1828, 1844, i85q. —
Vente Villol, 11 février i865 : 2,020 fr. à M. Soultzener.
— Cat. A. Moreau, p. 25 i.
Ce qu'il y a surtout de très remarquable, dans cette peinture en
camaïeu, c'est l'expression de douleur et de folie peinte dans la
physionomie d'Ophelia, et que notre croquis ne pouvait rendre.
u La Reixe : Près d'un cours d'eau, il y a un saule qui mire ses
feuilles blanchâtres dans la glace de l'onde ; elle est venue là
avec des guirlandes fantasques, composées de renoncules, d'orties, de marguerites et de ces
longues fleurs pourprées que nos bergers au langage indécent nomment d'un nom plus
grossier, mais que nos chastes vierges appellent doigts de morts : pendant qu'elle grirnpait
pour accrocher à ses rameaux pendants sa couronne d'herbes fleuries, une branche envieuse
s'est cassée, et alors, elle et ses trophées de verdure sont tombés dans l'eau gémissante. »
i838
L'ŒUVRE DE DELACROIX
179
N°66i : Portrait de Yousouf
Toile ovale. — Dimensions inconnues. — Non catalogué par M. Moreau.
Le 23 août i838, Delacroix écrit à un M. *'* qu'il lui envoie sur sa demande, uniquement
pour lui être agréable, ce portrait comme le portrait d'un Arabe quelconque, plutôt que celui
de Yousouf, qu'il n"a pour ainsi dire point vu.
N° 662 : Convulsionnaires de Tanger
Toile. — H. r"oo, L.i'"35. — Signé à droite, non
daté. — Gravé à Teau-forte par Laguillermie
pour la galerie Durand-Ruel,dansles dimensions
de : H. o"095,L. o™i25. — Salon de i838. — Ex-
position universelle de i855. — Voir variante à
l'année 1857. — Vente Van Isacker, i5 mai i852:
2,175 fr. à M. .lourdan; vente 20 janvier i838:
29,000 fr. à M. Mala; vente du marquis du
Lau, 5 mai 1869 : 48,500 fr. à M. Edwards;
vente Edwards, 7 mars 1870, retiré 349,000 fr.;
vente Edwards, 24 février 1881 : 95,000 fr.
a M. Balensi. — Cat. A. Moreau, pp. 177,
igt, 268.
(( Si nous n'avions nous-même», dit Th. Gautier, « vu les Aïssaouas se livrer à leurs
étranges exercices, se rouler sur la braise, manger des serpents, broyer du verre, mâcher du
feu, se taillader le corps, et, renversés par terre, tressaillir dans leurs spasmes intermittents
comme des grenouilles galvanisées, nous pourrions peut-être taxer d'exagération les
Convulsionnaires de Tanger.... 11 y a dans cette toile une incroyable turbulence de
mouvement, une férocité de brosse que personne n'a dépassée, et surtout une couleur chaude,
transparente et légère, dont le charme tempère ce que le sujet peut avoir d'horrible et de
répugnant. «(Les Beaux-Arts en Europe.) — Le catalogue de la vente Edwards donne comme
dimensions : H. o"'96, L. i">29. On aura mesuré en dehors de la feuillure.
N° 663 : L'Arabe au tombeau
catalogué
sous les titres de
Toile. — H. o'"45, L. o"55. — Signé à droite, non daté.
— Refusé au Salon de i83g. — Vente duchesse d'Orléans,
10 janvier i853 : 2,i5o fr.; vente marquis de Lamberty,
I 7 décembre 1 868 : 1 1 ,000 fr. — Cat. A. Moreau, p. 1 78, 269.
L'Arabe, descendu de son cheval, est assis sur le sol parmi des
tombes entremêlées de cactus et indiquées seulement par des
hgnes de pierres. L'animal, richement harnaché, allonge le cou
d'un mouvement curieux vers son maître en prière. Au loin, sur
une éminence entourée de murailles ornées, on distingue un
autre Arabe à cheval, au repos. — Ce tableau a été également
la Prière » et de <■ Ben Abou près du tombeau. »
i8o
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l83&
N° 664 : Intérieur d'une cour au Maroc
Toile. — Dimensions inconnues. — Salon de i833. — Cat. A. Moreau, p. 177.
N°66^ : George Sand et Chopin
*,lljiii|^l' séparés. — Chopin
" *^ -i, dans les dimension
PP-
282 bis.
™5o, L. i^oo. — Ces deux portraits sont aujourd'hui
seul, lithographie à la plume par A. Robaut,
3ns de : H. o™ioo, L. o'"o84. — Cat. A. Moreau,
Simple ébauche. La tête de Chopin est bien construite, par larges plans.
L'œuvre n'a jamais été achevée. Delacroix avait représenté madame
Sand jusqu'aux genoux et de grandeur nature, debout auprès du grand
musicien assis. La toile demeura dans l'atelier du peintre jusqu'à sa
mort, et, à cette époque, passa dans la famille Dutilleux ; elle a, depuis
en deux parties, et forme aujourd'hui deux portraits distincts. — Celui de
Sand mesure: H. o™8o, L. o'" Sy ; celui de Chopin, assis au piano: H. o'"43,
— Vente C. Dutilleux, mars 1874: 820 fr. à M. Brame. — Appartient à M. Marmontel.
N" 666 : Chopin seul
Dessin à la mine de plomb. — H. o"'27, L. o'"2i. — Reproduit en cliché pour le
journal VArt, n" 2 i 3, 26 janvier 1879, dans les dimensions de : H. o™i35, L. o™io5.
— On lit au bas : « Collection de feu M. Riesener. — Cat. A. Moreau, p. 238.
Ce dessin est sur papier jaune clair rehaussé de blanc. M. Riesener tenait ce dessin de Jenny
Le Guillou. Il l'a légué au Louvre. Il a figuré à l'Exposition universelle de 1878, dans la
très intéressante galerie des portraits anciens.
N° 667 : Médée furieuse. — Esquisse
'37. — Musée de Lil
Cat. A. Moreau,
^Jif^^-rf^-^ p. 120, 121,202.
L'intelligente administration du Musée de Lille a acquis à la Vente posthume
du maître, une vingtaine de dessins et croquis d'études faites pour le tableau
de « Médée », ainsi que cette esquisse peinte à l'huile où il y a des modifi-
cations très sensibles, entre autres un grand voile bleu qui flotte à la partie
supérieure du corps. La robe est jaune, la jupe violette. — Un critique de mé-
chante humeur s'étonnait fort, d y a quelque vingt ou vingt-cinq ans, que
Médée tint le poignard de la main gauche. S'il avait pris la peine de se
reporter à l'argument du tableau, son étonnement eût cessé : « Médée furieuse est poursuivie
et sur le point de tuer ses enfants. » Tel est le texte de Delacroix : « Sur le point » ne
veut pas dire « en train u; j'en demande bien pardon à M. Olivier Merson.
i838
L'ŒUVRE DE DELACROIX
i8l
N° 668 : Médée furieuse
Toile. — H. 2"'6o, L. i'"65. — Signé au bas à gauche, et daté
i838. — Lithographie par Challemel pour le Charivari, dans les
dimensions de : H. o"'i68, L. o™i lo; par Alophe, deux fois, dans les
dimensions de: H. o"'i48, L. o"Moo; par Lassalle, dans les dimen-
sions de : H. o"'66, L. o'"55. — Gravé au burin parCh. Geoffroy,
dins les dimensions de : H. o™40, L. o"'26; à Peau-forte, par
Milius, pour rArt, dans les dimensions de : H. o'"232, L. o"' i 56.
— Essais de reproduction à la plume et au crayon, par Edouard
Boldoduc. — Salon de i838. — Exposition universelle de r855. —
Appartient au Musée de Lille. — Cat. A. Moreau, p. 177 et 112.
L administration du Musée de Lille, mal inspirée cette fois, refusa de
confier ce chef-d'œuvre pour l'Exposition posthume du maître. — « La
a dit Th. Gautier, « est peinte avec une fougue, un emportement et un
uleui- que Rubens ne désavouerait pas. Le geste de lionne ramassant ses petits
1 Médée retient ses enfants qui s'échappent, est d'une invention superbe. »
N""" 669, 670,671 : Croquis pour la Médée
] 1° Croquis simple trait, mis au carreau. — H.o"^2i5, L. o"'ii5. —
Y Cliché pour /'.4rf, inédit. — Venje posthume. — Appartient au Musée
3J , de Lille. — Non catalogué par M. A. Moreau.
> , 2° Trente feuilles de croquis provenant de la vente posthume au Musée
dde Lille. — Cat. A. Moreau, p. 202.
3° Deux croquis préliminaires de la figure de Médée, mesurant, l'un:
•H. o"M8, L. o''M4; l'autre : H. o"'i7o, il. o'"i45. — Clichés pour IMrf,
'l^jl^ t^ ' n° du 7 octobre 1877. — Non catalogués par M. Moreau.
'i*^^r — ,"!" ' Ces deux derniers croquis présentent la même disposition que l'étude peinte
portant notre n" 667 et appartiennent comme elle au Musée de Lille.
N°672
Un soir d'automne
étaient le plus
Aquarelle. — H. o"'26, L. o"'i5. — Appartient à M. A. Robaui. —
Non catalogué par M. Moreau.
Vue prise par l'artiste, de la fenêtre de son atelier, rue des Marais-Saint-
Germain, n° 17. — A ce propos, il est intéressant de relever dans les
livrets du Salon de 1822 à i863, l'adresse des divers ateliers occupés par
Eugène Delacroix. — 1822 : rue de la Planche, n» 22 ; — 1824 : rue de
Grcnclle-Saint-Germain, n" 118; — 1827 : Passage Saulnier ; — i833 :
quai Voltaire, n» i5:' — i836 ; rue des Marais-Saint-Germain, n" 17;
— 1845 : rue Notre-Dame-de-Lorette, n" 54 (numéro donné par M. Mo-
reau ; le catalogue de l'Exposition universelle dit n" 53i; — i85g : rue
de Furstenberg, n" 6, où se voit une plaque commémorative. Ces ateliers
souvent insuffisants pour l'exécution de grandes peintures décoratives.
l83
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l838
N°' 673, 674, 675, (^-d, 6~j^ 678, 679, 680 : Études d'animaux
1° Chasses au lion. — Deux croquis
mesurant Tun : H. o"'2io, L. o"'i9o;
'autre : H. o"'072, L. o"'i9o. — Vente
posthume, à M. Ch. Desavary.
2° Têtes de lions. — H. o'"20o, L. 0^270.
— Vente posthume : 3oo fr., à M. de
Laage.
3° Lion dépouillant un os. — H. o™i 5o,
L. 0,210. — Vente posthume : 220 fr., à
M. de Laage.
4" Lionne attaquant un cavalier renversé.
— H.o"M6o, L. o'"23o. — Vente posthume:
3o5 fr., à M. Robaut.
5° Lion assis. — H. o'^igo, L. o"'3oo. —
Signé au bas, à droite. — Vente pos-
thume : 38o fr., à M. de Laage.
6° Gladiateur terrassé par une lionne. —
H. o"220, L. o"'340. — Cliché en photo-
tvpographiepour VArt,zn i883.
/'"Tigre blessé se désaltérant.- — H. o'"254,
L. o ""300.— Vente posthume : 440 fr., à
M. de Laage.
8" Gladiateur terrassé par un lion. —
H. o'"220, L. o'"290. — Cliché en photo-
typographie pour VArt. — Vente pos-
thume : 5oo fr., à M. de Laage.
Tous ces croquis sont exécutés à la mine de plomb, sauf le n° 5, qui est un croquis à la
plume. Tous ont été reproduits dans la première série des fac-similés publiés par M. A.
Robaut, dans les mêmes dimensions, à l'exception des « chasses au lion » en deux sujets,
reproduits dans les dimensions de H. o™i6. L. o"'25. Tous ont figuré à k vente posthume.
Tous sont mentionnés, mais non catalogués par M. A. Moreau, pp. i35 et i36.
N° 681 : Duo de piano et violon
Croquis mine de plomb. — In-quarto. ^ Vente posthume. —
Appartient à M. Choquet. — Non catalogué par M. Moreau.
On sait que Delacroix était grand amateur de musique. Amédée
Cantaloube nous a conservé en une petite plaquette le souvenir
de conversations du maître sur Rossini. En i83o, Chopin était venu
chez lui, rue des Marais-Saint-Germain, 17. et s'y était fait entendre,
.ar, à cette date (septembrei, Delacroix fait enlever un piano de
l'icyel que Chopin y avait fait transporter. Quatre ans plus tard, il
écrit encore de .Nohant : « J'ai des tête-à-tête à perte de vue avec Chopin, que j'aime beau-
coup, et qui est un homme d'une distinction rare : c'est le plus vrai artiste que j'aie
rencontré. » Et en 1849, '^ 28 octobre, il va au service de son « pauvre et cher Chopin. »
N" 682 : Deux têtes de femme, — Étude
Croquis au crayon noir. — H. o"'i9, L. o"'3^
"^■^ — Appartenant à M. Henri Faure, de Lille. -
M. Moreau.
— Vente posthume.
Non catalogué par
Il est bien étrange de retrouver, à quinze anne'es de distance, des études de
l'attitude et l'expression rappellent d'une façon frappante celles de «l'Orpheline
au cimetière » de 1823, n" 66, et de la «Tête de femme pour \e massacre de Scio de 1824,
n" 95. L'analogie est telle que nous ne saurions trop que répondre si l'on nous reprochait
ici quelque erreur de classement. D'autre part, si rarement que Delacroix se soit répété, peut-
on refuser d'admettre que deux fois, à bien des années d'intervalle, l'artiste ait remarqué
et reproduit le même mouvement sur nature ?
tète dont
N" 68^ : La confession du Giaour
H. o'"io5, L. o'"i5o. — Lithographie par Mouilleron.
— Cat. A. Moreau, p. ir3.
La lithographie, faite par A. Mouilleron pour la France
littéraire, porte pour titre « La confession du Giaour, par
E. Delacroix, » mais ne nous dit pas ce qu'était l'œuvre
originale, toile, aquarelle ou dessin. A en juger d'après
l'intensité des valeurs, nous inclinons à croire que c'était un
tableau, ou tout au moins une aquarelle très poussée.
— « Hugo, Parisina , les Foscari, le Giaour, le Corsaire.
Toujours, son héros est l'homme aux prises avec la pire
angoisse en iace du naulrngc, de la torture, de la mort, de sa propre mort douloureuse et
prolongée, de la mort amère de ses plus chers bien-aimés, avec le remords pour compagnon
parmi les lugubres perspectives de l'éternité menaçante, sans autre soutien que l'énergie
native et l'orgueil endurci. Ils ont trop désiré, trop impétueusement, d'un élan insensé
comme un cheval sans bouche, et désormais leur destin intérieur les pousse dans le gouffre
qu'ils voient et ne veulent plus éviter. » (H. Taine, Histoire de littérature anglaise. Byron.)
N*'" 684, 685 : Scènes d'Alger
^M I" Juive d'Alger. — • Lithographie à la plume.
^5 — H. o"'! lo'; L. o'"20o. — Cat. A. Moreau,
!>.' ,i^' p. 5o.
I".^^^ 2° Une vue à Alger. — Lithographie à la
-'^^/f plume. — H.o"'i4o, L. o"'i 10. — Cat. A. Mo-
■"""'"'^ reau, p. 5o.
Cette dernière pièce et celle qui précède ornent une des pages du 0 Livre d'or », publié par
Curmer, celle où se trouve l'autographe d'Alphonse Karr. — Paris, iS38. — En bas de la page
à gauche : « Dx (sans doute pour jûelacroix) inv' » ; à droite, « N. Desmadryl dcl"- »; en bas de
la page, au milieu : « Lith. de 'Villain. » — Comme M. Moreau, nous laissons l'attribution de
ces planches à Delacroix, mais on doit plutôt supposer qu'elles sont l'œuvre d'une main
étrangère, interprétant les dessins du maitre, le lithographe Desmadryl, par exemple.
.84
LŒUVRE DE DELACROIX
i83q
Année i83
9
N° 686 : La barque de don Juan. — Esquisse
Toile. — H. o'"8i, L. i"'oo. — Signé au bas, à gauche. —
Esquisse du tableau de 1840. — Gravé à l'eau-forte par Le
Rat, pour la galerie Durand-Ruel, dans les dimensions de :
H.o'"io3, L. o'"i2j. — Vente du 24 février 1881 : 7,5oo fr.
— Cat. A. Moreau, p. 87.
Superbe esquisse et au moins d'une qualité de peinture égale à
celle du grand tableau de 1840, qui appartenait h M. Adolphe
Moreau et que cet amateur a légué au musée du Louvre. Voir,
au sujet de ce motif et des différents titres qu'on lui a donnés, ce
propos du tableau « La barque de don Juan », a l'année 1S40.
que nous en disons i
N" 68- : Noce juive dans le Maroc
Toile. — H. i"'o3, L. r"4o. — Daté. —
Salon de 1841. — Exposition universelle
de i855. — Gravé à Teau-forte, par Wac-
quez, pour l'Artiste {i8^\\, dans les dimen-
sions de : H. o'"i40, L. o"'i9o; par H. Le-
fort, E. Hédouin et Ch. Chaplin, avec la
seule signature de Chaplin, pour la chalco-
graphie du Louvre, dans les dimensions de:
H. o"'266, L. o'"36o. Sur le troisième état
de cette planche, M. H. Lefort a gravé
comme remarque, en bas, au milieu, un
petit portrait du maître, etfacé après un tirage
de quinze épreuves. — Lithographie par
Mouilleron , dans les dimensions de :
H. o"'i86, L. o'"255. — Gravé sur bois* pour le Alusée français {iSS5\, dans les
dimensions de : H. o"'i8o, L. o"'26o; pour la Galette des Beaux-Arts, l'Illustration
et le Journal illustré, dans les dimensions de : H. o"'i27, L. o"'i69. — Appartient
au Musée du Louvre. —Cat. A. Moreau, pp. 100, i3i, 179, 206.
Cet admirable tableau avait été commandé à l'artiste par M. le marquis ^L^ison, qui
n'en fut pas satisfait et trouva trop élevé le prix de 2,000 fr. que Delacroix en demandait.
Il fut acheté au prix de i ,3oo fr. par le duc d'Orléans, qui le donna au musée du Luxembourg.
— Voici le texte explicatif fourni par Delacroix au livret du Salon de 1841 : « Les Maures
et les Juifs sont confondus. La mariée est enfermée dans les appartements intérieurs, tandis
qu'on se réjouit dans le reste de la maison. Des Maures de distinction donnent de l'argent
pour des musiciens qui jouent de leurs instruments et chantent sans discontinuer le jour et
la nuit ; les femmes sont L-s seules qui prennent part à la danse, ce qu'elles font tour à tour
et aux applaudissements de l'assemblée. »
i839
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1.85
N" 688 : Le campement arabe
Toile. — H. o"35, L. o'"45. — Signé au bas, à droite. —
Refusé au Salon de iSSg. — Photolithographié par Arosa
pour le catalogue illustré de sa vente, dans les dimen-
sions de H. o'"io2, L.o"'i25. — Vente Hôtel Drouot,
lo février i853 : 400 fr., à M. . Arosa ; vente Arosa,
février 1878: 4,300 fr. à M. Pinart. — Voir, à Tannée i833,
l'aquarelle variante qui faisait partie de Talbum des
dix-huit aquarelles de M. de Mornay, cataloguée sous le
. titre de « Campement dans la villed'Alias-sar-El-Kebir »
n° 494- — ^at. A. Moreau, pp. 178 (note) et 269. '
Sous une tente ouverte, soutenue par un piquet grossier, deux Arabes sont blottis. Au
second plan, deux chevaux, l'un gris, l'autre bai, sont attachés et paissent, surveillés par leur
maître. Un grand ciel orageux roule de larges nuées au-dessus des tentes qui ferment
l'horizon. — Les variantes avec l'aquarelle sont sensibles, ne fût-ce que par l'absence de la
grande tente rayée, où flotte le pavillon français.
N° 689 : Paysage du Maroc
s'élèvent
Arabe à
terrains
Toile. — H. o™3o, L. o"'39. — Signé au bas, non daté. —
Photolithographié par Arosa, dans les dimensions de : H.
o"'o96, L. o"',i22. — Vente D., 10 février i858: 25o fr. à
M. Arosa; vente Arosa, février 1878 : 3, 100 fr. à M. Leroy;
vente Leroy, 1882 : 2,i5o fr. — Cat. A. Moreau, p. 270.
Deux Arabes, au premier plan à gauche; l'un, debout, tient un
fusil, l'autre est assis. Ils sont placés au pied d'un monticule où
de grands arbres, au bord d'une longue route par où s'avance vers eux un autre
cheval, vêtu d'un burnous bleu foncé à capuchon. A droite, des mouvements de
boisés descendent vers une longue plaine bordée à l'horizon par des montagnes.
N° 690 : Colomb au retour du Nouveau-Monde
Toile. — H. o"'90, L. i"'i6. — Daté. — Gravé à l'eau-
forte par Bracquemond, pour le catalogue San-Donato, et
cliché ensuite pour l'Illustration, dans les dimensions de :
H. o"'i 10, L. o"'i45. ■ — Vente San-Donato, 26 février
1870 : 80,000 fr. à M. HoUender. — Appartient à
M. E. Secrétan. — Cat. A. Moreau, pp. 94, 259.
Christophe Colomb monte les marches du trône où le roi d'Es-
pagne Ferdinand et la reine Isabelle l'attendent debout. Au
premier plan sont déposés les magnifiques trophées de l'expé-
dition, des vases, des objets précieux que le conquérant a rapportés du nouveau-monde. Un
moine assiste, le sourcil froncé, à ce spectacle. Des femmes, des cavaliers occupent le
second plan h gauche. — Delacroix a mis en ce tableau tous les joyaux de sa palette.
i86
L'ŒUVRE DE DELACROIX
rSSg
N° 691 : Cléopâtre et le paysan
Toile. — De 25 environ. — • Salon de i83q. — Exposition
d'Alsace- Lorraine, n" ii3 du catalogue. —Photographié
par Braun. — Vente du 18 janvier i85o: i,3o5 fr.; vente
Cjeorge Sand, 23 avril 1864: i,i65 fr. — Appartient à
madame Carayon-Talpayrac. — Cat. A. Moreau, pp. 178,
254, 25-.
AL Adolphe Moreau signale une première variante de ce
tableau où la reine, au lieu d'être assise sur un siège antique,
serait couchée sur un sopha de couleur rouge, et c'est à cette
variante qu'il attribue les prix de vente que nous venons de citer. Le paysan, au lieu
d'être placé à gauche de la composition, serait placé à droite. Nous nous demandons s'il ne
s'est pas fait quelque confusion avec la variante dont nous parlerons tout à l'heure, et qu'il
décrit avec certaine inexactitude. — Quoi qu'il en soit, l'attitude de Cléopâtre ici, est d'une
grâce exquise, et le mouvement du paysan d'une justesse de réalité saisissante. Les formes
inassives de l'homme sont calculées pour faire ressortir la beauté de la reine.
N° 692 : Cléopâtre et le paysan. — Variante
comme le d
d'une robe
Toile. — H. o"'28, L. o"'36. — Signé à gauche, non daté.
— Vente C, i 3 avril i865; 9 mai 1874 : 7,25o fr.; vente
de S., 5 mai 1877: 4.i5o fr! — Cat. A. Moreau, pp. 178,
254, 257.
La reine, le sein découvert et les bras chargés de bijoux, vêtue
d'une robe d'un vert jaune avec un voile violet rattaché au
diadème de la coiffure, est couchée sur un lit de repos d'un
ton rose vineux. Elle se retourne à demi vers l'esclave qui
apporte le panier de figues à grandes feuilles. Cet homme,
dont les chairs sont très colorées, est recouvert d'une ample
draperie bleu foncé. Derrière le lit, et non derrière le paysan,
il M. Moreau, apparaissent deux esclaves attentifs. L'un tient une lyre; il est vêtu
rougeàtre, l'autre porte une robe jaune et un manteau bleu.
N° 693 : Justice de Trajan. — Esquisse
^{."
Toile. — H. o"'58, L. o"'45. — N° 58 de la Vente posthume : i ,600 fr.
-j'^ àM.Piron. — Vente Piron, 21 avril i865 : 455 fr.; vente Miolan-
■,' E^i^"' Carvalho, 14 mars 1876:800 fr., à M. Alexandre Dumas fils; vente
.^, H-;;!'.''', I Alexandre Dumas fils, février 1882 : 1,620 fr. — Cat. A. Moreau,
iiiiiiiiii
iR^èfe^^ Cette esquisse présente peu de différences avec le tableau. Trajan est
liiiS^ê^l moins avancé dans le milieu de la toile et son cheval est d'un ton foncé.
'-^ --— ~ — ' On ne voit pas ici le jeune homme du premier plan qui s'écarte vers la
droite, le bras droit plié; mais toute la grande ordonnance de l'œuvre est trouvée.
i83i)
L'ŒUVRE DE DELACROIX
187
N° 694 : Hamlet et les deux fossoyeurs
Toile. — H. o"'8o, L. o'"65. — Signé au milieu en bas et daté
i83g. — Salon de iSSg. — Exposition universelle de i855. —
Gravé à Teau-forte par Nanteuil pour l'Artiste, dans les dimen-
sions de : H. o"'i46, L. o"'[20. — Lithographie par Eugène Le
Roux, dans les dimensions de : H. 0^279, L. o™223. — Vente
de la duchesse d'Orléans, 18 janvier i853 : 6,3oo fr., à M. Mau-
rice Cottier. — Appartient en usufruit à madame veuve Maurice
Cottier, mais en nue propriété au musée du Louvre. — Cat. A.
Moreau, pp. 66, 86, 134, 178, 246.
Le legs généreux de M. "Maurice Cottier assure à notre Louvre la
possession de ce chef-d'œuvre, ainsi que de notre n" jaS: «Jeune
tigre jouant avec sa mère. » — La scène du cimetière est rappelée au livret de 1S39 par
les premières paroles du début: 0 Le fossoyeur. Ce crâne, monsieur, était le crâne d'Yorick,
le boutTon du roi. — Hami.et. Hélas ! pauvre Yorick ! » — Le catalogue de l'exposition du
boulevard des Italiens, en 1860, le dit daté_ de i838.
N° 69^ : Charles-Quint au monastère de Saint-Just
Toile. — H. o""i2, L. o"M7. — Signé, daté, i83g. — Réduction du tableau de i833.
— Vente du 18 janvier i85o : 2,5oo fr.; vente San-Donato , 2r février 1870:
5,200 fr. — Voir à Tannée i83i , la vignette sans changement. — ■ Cat. A. Moreau,
pp. 48, 1-3, 254.
N"^ 696, 697 : Portrait de M. Henri Hugues
i» Toile — H. o"'74, L. o'"6o. — Non
signé. — Cat. A. Moreau, p. 237.
2° Aquarelle ovale. — H. o'"i5, L. o'"i2.
— Cat. A. Moreau, p. 237.
L'aquarelle, dit M. Moreau, est d'une fraîcheur
de tons extrêmes. Le modèle qui, dans le por-
trait à l'huile, porte une redingote marron,
a ici un habit bleu clair. — Quoique nous
réunissions les deux œuvres, l'aquarelle doit
être plus ancienne de plusieurs années. Elle
appirti-niit i Léon Riesener, à qui Delacroix légua le grand por-
trait M Henri Hugues était le cousin des deux artistes et Léon
Riesener a trace de lui, dans les notes qu'il a fournies à M. Philippe
Burty, le charmant portrait qui suit : « Pendant longtemps, lui (Delacroix), Henri Hugues,
fils d'une sœur de sa mère et moi, nous nous réunissions une fois par semaine, tantôt
chez l'un, tantôt chez l'autre, à tour de rôle, ou chez le restaurateur. Il apportait dans ces
dîners une gaieté aimable, toujours conciliante et une amitié attentive, affectueuse pour
le cousin Henri, notre aîné, homme charmant, ingénu, chevaleresque, que Delacroix aimait
L'ŒUVRE DE DELACROIX
l839
ele tout son cœur et dont le souvenir lui est resté cher constamment. Il en a fait un beau
portrait qu'il me donna. Henri, employé dans l'administration des postes, poète par
délassement, était plus que négligé dans sa toilette. Je me rappelle qu'une fois à grand'peine
nous sortions d'une représentation extraordinaire de l'Auberge des Adrets, donnée, je ne
sais pourquoi, le jour, par Frédérick-Lemaitre. Le chapeau et la tenue de Henri, sortant du
théâtre, étaient réellement plus que comiques. Delacroix, très élégant et recherché dans sa
toilette, lui donnait impassiblement le bras en plein boulevard, et, gai comme un pinson,
jouissait de l'esprit de son vieil ami : c'est h l'amitié de ces deux hommes que je dois ce
que j'ai de bon à mes yeux, o
N° 698 : Desdemona maudite par son père
Peinture sur bois. — H. o'"400, L. o'"3i5. — Signé au bas à
gauche. — Appartient a. M. E. Secrétan. — Non catalogué par
M. Moreau.
<( Desdemona, aux pieds de son père qui veut lui donner sa malédiction
pour avoir épousé secrètement Otello, qu'on voit dans le fond. » — Cette
toile, par son aspect éclatant, produit l'effet d'une masse de fleurs disposées
dans leur plus ardente harmonie. On en jugera par les colorations. Le
doge porte un manteau rose rouge, doublé d'un violet bleu foncé et
perlé, une toque et un voile du même noir bleu que les manches du
vêtement; Desdemona, une robe verte à galons d'or et une écharpe violet
rouge doubke d hermine. Son riche éventail en plumes de paon garni de diamants est tombé
sur les dalles. Les murs sont de marbre jaune avec quelques écussons armoriés en mosaïque
N°' 699, 700 : Desdemona maudite par son père. — Croquis
i" Croquis à la plume. — H. o"'22, L. o"'28. —
Reproduit en fac-similé par A.Robaut, de mêmes
dimensions. — Vente posthume: 359 fr. à M. A.
Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
2" Croquis à la plume. — H. 0^280, L. o"\2o5. —
Reproduit en fac-similé par A. Robaut, de mêmes
dimensions, et en cliché phototypographique pour
le journal /'y4?V, livraison du 23 avril 1882, dans
lesdimensions de : H. o"'28o, L. o™2o5. • — Vente posthume, n" 459, à M. Alfred
Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
Le second croquis est d'une exécution plus large et plus colorée que le précédant. Delacroix
en a définitivement adopté la disposition, sauf pour les fonds. ( Voir le n" G98.)
N° 701 : Deux tigres et deux lions
Dessin. — Dimensions inconnues. — Daté. — Vente Villol, i865. — Non catalogué
par M. Moreau.
i839
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" 702
Le poète Arion et le philosophe Anaximandre
Aquarelle (étude). — H. o'"o85, L. o"i35. — Appartient
à M. Alfred Robaut. — Notes écrites lisibles sous l'aqua-
relle. — Non catalogué par M. Moreau.
A., On peut voir au Louvre, parmi les dessins du Primatice, trois
1^5 groupes de <; deux hommes à moitié drapés et assis à terre,
tournés à gauche >>. Ce sont les compositions originales, en
'é^ tout semblables au fragment que nous reproduisons ici, exé-
cutées h la sanguine et rehaussées en blanc sur papier légèrement
teinté, d'après lesquelles Nicolo deU'Abbate a peint la galerie de Henri II à Fontainebleau. La
copie n'a pas été faite d'après les sanguines du Louvre, qui ne possède pas exactement ce
motif, mais d'après la peinture. Le dessin pris sur place à Fontainebleau porte encore les
notes manuscrites au crayon mine de plomb, sur lesquelles Delacroix a peint h l'aquarelle la
tonalité des figures et des paysages. — En haut, à gauche : « Plus foncé, plus rouge, » c'est
du vieillard vu de dos qu'il parle. — En haut, à droite sur le ciel : « Bleu clair » — Au bas, à
droite, pour la draperie de l'homme vu de face : « Brun rouge laqueux. » Au milieu, au
bas : <i Herbe ». — Les noms d'Arion et d'Anaximandre sont sans doute empruntés a la des-
cription du P. Dan: Merveilles de Fontainebleau.
N"
^o^
Études de fauves
Lionne et lion. — Croquis à la plume. — H. o
'Signé « Eug. Delacroix » en haut à gauche et
"20, L.
daté du
février
M '^r i8f3g. — Non catalogué par M. Moreau.
"'/"S Ce croquis fut offert par M. X**', en 1871,;! la loterie de l'Opéra. On y
■atd^ retrouve comme le plus souvent, chez Delacroix, ce sens profond de la
grandeur héroïque qu'il réalisait, en quelque sorte inconsciemment,
même en dessinant d après le modèle vivant. La lionne a une si grande
allure qu'on la voit toute prête h entrerdans quelque cortège de Bacchus.
Le lion vu de dos, grimpant, a quelque chose d'héraldique dans son
étrange silhouette. Ces croquis, s'ils sont fait de souvenir, ne valent pas
une de ces fidèles études d'après nature, superbes de tbrce et de simpli-
cité, et telles qu'on on rencontre, pour ainsi dire, à chaque page dans l'œuvre de Delacroix.
N'' 704 : Cheval en liberté
Croquis à la plume. — H. o'"2o, L. o'"28. — Appartient à
M. Georges Villot fils. — Non catalogué par M. Moreau.
Les chevaux de Gros sont héroïques, pleins de feu ; le « peintre
d'Aboukir » leur a rendu la grandeur, cette belle fièvre qui est leur
santé, mais il n'a guère reproduit que la race arabe et, malheureu-
sement, il les a tous vêtus de satin. C'est de la soie qui adhère au
poitrail ruisselant, qui se blanchit d'écume sous le cuir des courroies et l'or des caparaçons.
Ce n'est pas là cette peau tellement fine et souple que l'attouchement le plus léger la fait
frémir sous le doigt. Gros a peint le coursier; Géricault et Delacroix ont pemt le cheval.
igo
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1840
N°'705, 706: Etudes de tigres
. -'- 5:
2° Tigre étendu au repos. — Sépia.
Non catalogué par M. Moreau.
=r.:i-_i=- 1° Tigre suivant une piste et grognant.
^^^g — Croquis à la plume. — H. o""[2,
^"""'1? L. o'"iQ. — Daté 9 février iSSq. — Ex-
"i trait d'un dessin offert par M. Brandon
- à la loterie de TOpéra ( 1871 ). — Non
catalogué par M. Moreau.
H. o'"075, L. o'^iqo. — Vente posthume. —
Année 1840
N" 707 : Le naufrage de don Juan
Toile. — H. i'"3o, L. i'"95. — Signé à gauche et daté
1840. — Salon de 1841. — Exposition universelle de
i855. — Exposition du boulevard des Italiens, 1860.
— Lithographie en deux dimensions par Français :
1° H. o'"i5o, L. o'"233; 2" H. o'"285, L. o'"43o. —
Gravé sur bois pour rillustration et pour la Galette
des Beaux-Arts, dans les dimensions de : 1° H. o'"i40,
L. o™2 26 ; 2° H. o"M 14, L. o'"i8i. — Gravé en aqua-
tinte pour l'Artiste, par Desmadryl, dans les dimen-
sions de : H. o"'i45, L. o'"2i5. — Appartenait à M. Moreau, qui Ta légué au
musée du Louvre. — Cat. A. Moreau, pp. 11 5, 139, 140, 179.
En léguant au Louvre ce tableau très important, M. Moreau avait imposé la condition qu'il
ne serait pas exposé dans les salles actuelles du second étage, très mal défendues contre la
chaleur et la lumière pernicieuses de l'été. Il a donc été placé dans la grande galerie française,
dite du xvni° siècle au premier étage. « Si l'on relit, dans le poème de Byron, le passage d'où
l'artiste a tiré le sujet du Naufrage de don Juan, on sera peut-être surpris qu'il n'ait pas
placé sa barque entre cette mer unie comme une glace et ce ciel d'un azur impitoyable qui
ajoutent encore h l'horreur de la scène, par l'ironie du contraste ; mais les moyens de la
poésie et de la peinture ne sont pas les mêmes ; — un ciel bleu, une mer calme, n'eussent
peut-être pas aussi bien donné l'idée du danger couru que ces flots lourds et clapotants, sous
ces nuages d'une lividité sinistre, dont l'écume moutonne autour de cette barque sans voile,
sans rame, sans boussole, sans gouvernail, perdue au milieu de l'immensité, où des
malheureux, se jetant des regards de cannibales, agitent des billets au fond d'un chapeau,
pour savoir qui sera mangé, comme dit la naïve ballade des matelots, — c'est le n radeau de
la Méduse », dépouillé de son appareil tragique et théâtral et ramené à la plus simple
expression. — Ne pensez plus à don Juan, qu'il serait difficile de reconnaître parmi ces
visages hâves, creusés, amaigris, convulsés par d'exécrables convoitises, et dites si jamais
épisode de naufrage a été rendu d'une façon plus profondément naïve et plus naïvement
effrayante. — Comme on sent frétiller les requins à triples rangs de dents sous ces vagues
d'un vert glauque, balançant leur crête de mousse blanche ! comme le vent et le tonnerre
grondent sourdement derrière ces nuages bas, gros d'orage et de pluie ! » (Th. Gautier.)
1840
L'ŒUVRE DE DELACROIX
191
N° 708 : Barque de don Juan
Croquis lavis. — H. o'"23, L. o^So. — Vente posthume. -~
Vente Sensier. — Non catalogué par M. Moreau.
*!^2-- ^^ iS83, à l'occasion du legs fait au Louvre par M. Moreau, un
peintre, M. Charles Jacque, dans une lettre rendue publique,
plaisante agréablement l'ignorance routinière des écrivains qui
ont toujours écrit la Barque ou le Naufrage de don Juan, au lieu
ÏS^^^^^^H ^'^ '^ Barque ou le Naufrage du Don Juan. M. Charles Jacque
^^'<^--^^^^^^É^i nous renvoie h l'école, c'est-à-dire au Don Juan de Molière et à celui
de da Ponte, qui a inspiré le chef-d'œuvre de Mozart, et où il n'y
a pas, en effet, trace de barque, ni de naufrage. Selon M. Charles Jacque, Delacroix aurait em-
prunté le motif de son tableau à un fait divers de journal, rapportant un épisode du nau-
frage d'un vaisseau nommé « le don Juan ». Si M. Charles Jacque, avec moins d'imagination
et plus de précision, avait consulté le catalogue de l'Exposition universelle de i855, il y
aurait lu « le Naufrage de » et non pas « du don Juan ». S'il avait ouvert le catalogue de
l'Exposition du boulevard des Italiens (Tableaux de l'école moderne tirés de collections d'a-
mateurs, 1860), il aurait pu y lire le passage du « Don Juan » de Byron, que Delacroix, lui,
avait lu : « Que faire ? On propose de tirer au sort : on prépare les billets qui désigneront
la victime... Les lots sont faits, marqués, mêlés et distribués dans une silencieuse horreur...
Et le sort tomba sur le précepteur de don Juan ». Ch. 11, st. lxxiv, lxxv. — Delacroix, dans ses
lettres, désigne parfois ce tableau sous le titre de: n le Naufrage ». La lettre de M. Charles
Jacque fut publiée dans le Figaro et dans le Temps du 7 avril i883. Personne n'a encore
protesté, que je sache, contre cette malheureuse boutade, sauf M. A. de Montaiglon dans
Y Intermédiaire an 20 avril iS83, colonne 255, sous la signature M. D. A.
N" 709 : Prise de Constantinople par les Croisés. — Esquisse
Toile. — H. o'"37, L. o"''48. — Non signé ni daté. —
Lithographie par Braun. — Exposition d'Alsace-Lorraine.
— Vente Dauzats, après décès : 7,100 fr. — Appartient au
duc d'Aumale. — Cat. A. Moreau, p. 121, 258.
Ce tableau est l'esquisse admirable qui servit à Delacroix
en 1841, pour l'exécution du grand tableau de Versailles, qui
est, avec la bataille de Taillebourg, la plus noble gloire de ce
musée. — Nous donnons ici l'argument du tableau, pour n'avoir,
un peu plus loin, à nous occuper que de l'œuvre : a Baudouin,
comte de Flandre, s'avance suivi d'un cortège de cavaliers
portant des bannières : au premier plan, un groupe de personnages qui tendent vers lui des
mains suppliantes ; au deuxième plan, sous les arcades d'un portique, un guerrier entraîne
un vieillard: au fond, les dernières scènes du combat, et la ville en perspective. »
N" 710 : Hamlet et les deux fossoyeurs
Dessin marouflé sur toile. — H. o"3o5 , L. o"23o. — N° 404 de la Vente posthume:
,61 fr. — Appartient à madame Boulanger-Cavé. — Non catalogué par M. Moreau.
192
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1840
N° 711
Hamlet et le fossoyeur
Toile. — H. o'":îo. L. o"'42. — Réduction du tableau de iSSg. — Voir la lithogra-
phie originale de Eugène Delacroix, à Tannée 1834. — Vente B., 16 mars 1840:
40 fr.; vente Didier, 3 mai 1849 : 3oo fr.; vente Cachardy, 12 février i853 : Sgo fr.:
vente. r8 mars 1854: 23o fr. — Cat. A. Moreau, pp. 42, 243.
N° 712
Adieux d'Hamlet et dOphelia
Toile. — H. o'"28, L. o'"2i. — Lithographie par Loutrel pour la
collection Moreau, dans les dimensions de : H. o"'28o, L. o'"2io.
— Vente Schwabacher, 9 mai 1874 : 4,5oo fr. — Voir à l'année
1834. — Cat. A. Moreau, p. 114, et variante, p. 62.
Cette scène n'est point, comme l'a cru M. Moreau, et comme nous
l'avons cru nous-mème un instant. la première du troisième acte, où
Hamlet donne brutalement des conseils à Ophelia : c'est évidemment
celle que décrit Ophelia lacté 11, scène 2I racontant â Polonius, son
père, son entrevue avec Hamlet : « Il m'a prise par le poignet et m'a
serrée fortement: puis il s'est éloigné de toute la longueur de son bras,
et. avec son autre main ainsi sur'son front, il s'est mis à étudier mon
visage avec tant d'attention, qu'on aurait dit qu'il voulait le dessiner. Il est resté longternps
dans cette attitude; enfin, me secouant un peu le bras, et baissant et relevant trois fois
sa tête, — comme cela, — il a poussé un soupir si lamentable et si profond, qu'il semblait
ébranler toute sa charpente et emporter sa vie; cela fait, il m'a lâchée ; puis, la tête
retournée par-dessus son épaule, on aurait dit qu'il trouvait son chemin sans le secours
de ses yeux, car il est sorti sans se servir d'eux, et jusqu'à la fin, il n'a cessé de diriger
sur moi leur lumière. »
N"7i3 : Portrait de mademoiselle Heindericks
Toile cintrée du haut. — H. i'"40, L. i"'o6. — Signé, daté aii
bas adroite sur le terrain: «E. Delacroix, 1840.» — Non catalogué
par M. Moreau.
Mademoist;lle Heindericks était religieuse Clarisse. Sa famille descen-
dit dit-on, de Van Dyck. — Devant cette image si expressive de la
be\uté moderne, les dernières lignes de l'écrit de Delacroix, intitulé
Qtiestions sur le beau nous reviennent en mémoire, et nous voulons
les mettre sous les yeux du lecteur : 0 Quoi ! le beau, ce besoin et
^ette pure satisfaction de notre nature, ne fleurirait que dans des
contrées privilégiées, et il nous serait interdit de le chercher autour
de nous! la beauté grecque serait la seule beauté ! Ceux qui ont
iLcrédité ce blasphème sont des hommes qui ne doivent sentir la
beiuté sous aucune latitude, et qui ne portent point en eux cet écho
mt u ur qui trc iiUe en présence du beau et du grand. Je ne croirai point que Dieu ait
reserve aux Grecb seuls de produire ce que nous, hommes du Nord, nous devons préférer;
tant pis pour les yeux et les oreilles qui se ferment et pour ces connaisseurs qui ne veulent
1840
L'ŒUVRE DE DELACROIX
193
ni connaître, ni par conséquent admirer! Cette impossibilité d'admirer est en proportion de
l'impossibilité de s'élever. C'est aux intelligences d'élite qu'il est donné de réunir dans leur
prédilection ces types différents de la perfection, entre lesquels les savants ne voient que des
abîmes. Devant un sénat qui ne serait composé que de grands hommes, les disputes de ce
genre ne seraient pas longues. Je suppose réunies ces vives lumières de l'art, ces modèles
de la grâce ou de la force, ces Raphaël, ces Titien, ces Michel-Ange, ces Rubens... je les
suppose réunis pour classer les talents et distribuer la gloire, non pas seulement à ceux qui
ont suivi dignement leurs traces, mais pour se rendre entre eux la justice que l'assentiment
des siècles ne leur a pas refusée : ils se reconnaîtraient bien vite h une marque commune, à
cette puissance d'exprimer le beau, mais d'y atteindre chacun par des routes différentes. »
N° 714 : Justice de Trajan
Toile. — H. 4"'g5, L. .l'ngô. — Signé à droite au bas
et daté. — Lithographie par Challemel dans les dimen-
sions de : H. o"'i88, L. o"'i45. — Salon de 1840. —
Exposition universelle de i855. — Appartient au musée
de Rouen. — Cat. A. Moreau, p. 119, 178, 19g.
Ce tableau fut payé au maître 6,000 fr. Il a subi de grandes
restaurations ; on a dû remplir d'énormes crevasses qui s'y
étaient formées.
<i Quatre vers de M. Antony Deschamps, traduits de Dante,
ont fourni le sujet de la Justice de Trajan, dit Théophile
Gautier, dans les Beau.v-Aris en Europe.
Une veuve était là, de douleur insensée,
S'efl'orçant d'arrêter la marche commencée :
Autour de l'empereur s'agitaient les drapeaux,
Et la terre tremblait sous les pieds des chevaux.
« Cette action n'est pas de celles que la peinture puisse rendre
d'une façon bien intelligible, mais elle fournit, par ses acces-
soires, d'admirables ressources à l'artiste. Que Trajan se soit
arrêté et n'ait continué sa marche triomphale qu'après avoir fait rendre justice à la pauvre
veuve, c'est ce qu'il n'est pas aisé de deviner à l'inspection du tableau; mais qu'importe ? —
Cette riche architecture, ce ciel qui luit à travers les colonnes, cet empereur, étincelant dans
sa pourpre, sur son cheval cabré, au milieu des généraux, des vexillaires, des soldats, des écuyers
et du peuple, ces trophées, ces étendards, ces clairons droits, ces buccines recourbées, ces
armes, ces cuirasses, ces draperies, forment un admirable et splendide ensemble. — La
Justice de Trajan est peut-être comme couleur la plus belle toile de AL Eugène Delacroix,
et rarement la peinture a donné aux yeux une fête si brillante : la jambe s'appuyant, dans
son cothurne de pourpre et d'or au nanc rose de sa monture, est le plus frais bouquet de
tons qu'on ait jamais cueilli sur une palette, même h 'Venise. »
N°'' 715, 716 : Portraits de Jenny Le Guillou et de sa fille
Toiles. — Léguées par Jenny Le Guillou à M. Duriez. — Cat. A. Moreau, p. 238.
C'est sur des toiles distinctes de 10 à 12, et non sur une seule, comme le donnerait à penser
la mention qu'en fait M. Moreau, que Delacroix a peint de grandeur nature ces deux portraits,
qui, dit-on, sont au Louvre, mais non exposés. La mère est en bonnet, la fille en cheveux.
'94
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1840
N°'7i7, 718,719,720,721,722: Froissart, Calvin,
Régnier, Rabelais
i" Quatre dessins à
la sépia ou à Taqua-
relle. — H, o"'i9o.
L. o'"i6o. — Gravés
à Peau - forte par
Wacquez pour le
Pliitarque français
(1840). — Cat! A.
Moreau,p.io7,io8.
2" et 3»M.G.Villot possédait, en 1876, un croquis qui lui venait de son père; ce dernier avait,
en effet, posé en costume pour Froissart. On a nu voir un croquis semblalile à la vente
de M. Edouard Rodrigues, en octobre 1878.
N*"" 723, 724 : Croquis à la plume
« et qu'il lui fa
1° Tigre en marche. — H. o'"o5, L. o'^og. — Dessiné en soirée
sur du papier à musique. — Appartient à madame veuve
Jules Michelin. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Lion couché et homme vu de dos (fragments). — H. o"'22,
L. o"'29. — Reproduction en fac-similé par A. Robaut, dans
les mêmes dimensions. — Vente posthume à M. Paul Huet. —
Non catalogué par M. Moreau.
Sur le fac-similé du n" 2 sont reproduites les cinq lignes suivantes,
extraites d'une autre feuille : « Faire un choix dans la nature. On
« en fait très adroitement une loi parce que les trois quarts du
« temps, la nature se passe des contrastes. C'est donc par impuis-
n sance qu'on choisit, parce que les moyens de l'art sont bornés,
ours sacrifier une chose pour en faire valoir une autre. »
N° 725 : Madame Viardot et George Sand
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"23, L. 0^34. — Datés du
29 janvier 1840. ■ — Non catalogué par M. Moreau.
« S'il entend Franchomme ou Chopin, Allard, Prudent, Delsarte ou
Alcan, dit M. Moreau, ou bien encore quelques-unes de ces indivi-
dualités du grand monde que le talent à su élever ii la hauteur de
véritables artistes; si leurs doigts merveilleux rendent comme il la
comprend la musique de ses maîtres favoris, oh! alors, son bonheur
n'a pas d'égal.... Que madame Viardot lui tasse connaître un vieil air de Gliick, il en rêvera
des semaines entières, et le résultat de chacune de ses soirées sera pour le lendemain une
journée de travail productif où son pinceau puisera de sublimes inspirations. »
1840
L'ŒUVRE DE DELACROIX
195
N'
726
Portrait de madame Bornot
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"2i, L. o'"i6. — Exécuté à Val-
mont, en septembre 1840. — Appartient à M. Bornot. — Non catalogué
par M. Moreau.
Delacroix, dont l'œuvre de portraitiste est bien à tort compté pour si peu dans
l'ensemble de ses ouvrages, avait au contraire la passion du portrait, si l'on
en juge par le nombre considérable d'images de ce genre, qu'il a laissées.
Il n'a jamais négligé l'occasion de faire un portrait. Pourquoi ? Parce que ce
grand artiste qui portait dans son cerveau tout un monde de figures héroïques,
appartenant à tous les âges de l'histoire, s'inspirait surtout de la réalité' moderne, de la
nature vivante, et non des canons de l'esthétique académique. Il demandait au portrait de
le familiariser avec la vie même, avec l'expression de la pensée et du sentiment intérieur,
alors que l'antique ne lui eût fourni que la symétrie et la belle proportion des traits.
Aussi dit-il quelque part : « Le Silène est beau, le Faune est beau, le Socrate même est
beau; cette tête est pleine d'une certaine beauté, malgré son petit nez épaté, sa bouche
lippue et ses petits yeux. Elle ne brille pas, il est vrai, par la symétrie et la belle proportion
des traits, mais elle est animée par le reflet de la pensée et d'une élévation intérieure.
Encore, le Silène, le Faune et tant d'autres figures de caractère sont-elles de la pierre dans
l'antique. On concevra facilement que la pierre, le bronze et le marbre demandent,
dans l'expression des traits, une certaine sobriété qui est de la raideur et de la sécheresse,
quand on l'imite en peinture. Ce dernier art, qui a la couleur, l'effet qui se rapproche
davantage de l'imitation immédiate, admet des détails pluspalpitants, moins conventionnels.»
N'
1^1 ^1
728 : L'Envie
vfT-^ .-a .-3.-j^ --^î^A-^^ '° Croquis à la mine de plomb.
#^4'^'l^'^-- H. o-iq, L. 0-2.S. - Non cataloi;
trm^^r'^ par M.-
par M. Moreau.
2° Croquis à la plume et à la mine de
plomb. — H. 0^28, L. 0^37. — Re-
produit en fac-similé à deux tons
par A. Robaut, dans les mêmes di-
mensions. — Vente posthume à
M. Sensier. — Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix a beaucoup travaillé ce motif allégorique de l'Envie, où il montre, sous l'image de
Dante, dans le second croquis « le mérite arrivant à la renommée, malgré les mauvais
génies. » Assurément, pendant que sa main traçait les lignes de cette allégorie, il avait au cœur
l'amertume des injustices dont il devait re'ster l'objet jusqu'à sa mort, et qui lui firent
écrire les quelques pages intitulées : « Des critiques en matière d'arts, » où nous lisons ceci :
<( Les arts sont un vaste domaine dont ils ont tous la clef dans leur poche, et où ils
n'admettent personne ; seulement ils disposent des lunettes au travers desquelles on se fait,
si l'on peut, une idée sommaire de ce qui s'y passe. Ces dragons vigilants sont là pour vous
avertir, vous, public, comment vous devez jouir ; vous, musiciens, peintres et poètes, pour
vous diriger sur la scène au moyen de fils dont ils tiennent le bout, et pour encourager vos
efforts, s'il y a lieu. Ne perdez pas trop courage si, au milieu du plus doux accès de vanité
et quand vous vous croyez assuré du triomphe, vous vous sentez tiré rudement par votre
chaîne. C'est pour vous avertir que vous allez trop loin, que vous perdez le respect, ou que
vous manquez de grâce. Baisez la main de ces vizirs du public, gardiens de l'honneur del art.»
iq6
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1840
N°® 729, 7JO : Études de nu
1° Torse d'homme vu de protiL — Croquis aux deux
crayons. — H. 0^27, L. o"22. — Daté : « 3o décembre
1840. » — Non catalogué par M. Moreau.
2° Torse de jeune homme vu de face. — Croquis aux
deux crayons. ■ — H. o"'3o, L. o"'26. — Daté du 22
aoiàt 1840. — Non catalogué par M. Moreau.
« Le beau ne se transmet ni ne se concède comme l'héritage
est le fruit d'une inspiration persévérante, qui n'est qu'une suite de
labeurs opiniâtres; il sort des entrailles avec des douleurs et des déchirements, comme tout
ce qui est destiné h vivre ; il fait le charme et la consohition des hommes, et ne peut être
le fruit d'une appHcation passagère ou d'une banale tradition. Des palmes vulgaires peuvent
couronner de vulgaires efforts; un assentiment passager peut accompagner, pendant la
durée de leur succès, des ouvrages enfantés par le caprice du moment; mais la poursuite
de la gloire commande d'autres tentatives; il faut une lutte obstinée pour arracher un de
ses sourires. » (Eugène Delacroix, Questions sur te beau.)
d'une ferme ;
N°73i : Études d'hommes nus
Croquis à la plume. — H. o'"20, L. o™3i. — Daté au bas:
«25 décembre 1840. » — Publié en fac-similé par A. Robaut,
n" 5j, dans les dimensions de: H. o'"2o, L. o^Bi. — Vente
posthume. — Cat. A. Moreau, p. i36.
Ce sont là de ces notes prises sur le vif, que Delacroix multipliait
dans ses cartons, et qu'il consultait ensuite, pour la mise en oeuvre
de ses compositions. Je ne sais, en effet, si j'ai dit que jamais il ne faisait poser le modèle
quand il exécutait un tableau. « Le modèle, avait-il coutume de dire, n'entre jamais dans
le mouvement que vous avez vu avec l'œil de votre imagination; loin de se passionner,
d'accuser le geste avec énergie, il se fatigue et devient de plus en plus glacial. D'un autre
côté, la nature a une telle puissance, un tel attrait, que si elle pose devant vous quand vous
tenez le pinceau, vous ne pouvez résister au charme de la copier. Vous faites peut-être une
série de belles études, mais vous rtnissez, à coup sûr, par produire un détestable tableau. »
N°''7p,7}} : Études de lions
H. o^iS, L. o"2;
1° Lion tenant un lièvre dans ses pattes. —
Croquis à la plume. — H. o'"2 10, L. 0^340.
— Publié en fac-similé par A. Robaut,
dans les mêmes dimensions. — Vente pos-
thume n° 475 : 280 fr., à M. le baron de
Laage. — Non catalogué par M. Moreau.
2" Lion emportant une femme. — Croquis à la plume. —
— Publié en fac-similé par A. Robaut, dans les mêmes di-
mensions. — Vente posthume à M. Dutilieux. — Non catalogué par M. Moreau.
I84I
L'ŒUVRE DE DELACROIX
f97
Année 184
N° 734 : Prise de Constantinople par les Croisés
Toile. — H. 4"'i3, L. 5'"oo. — Daté au bas. —
Lithographie par Jorel et par Lassalle, dans les
dimensions de : H. o"'i76, L. o'"2i5, et de :
H. o"'i63, L. o'"2oi. — Gravé au burin par Frilley,
en deux dimensions, pour les « galeries de Ver-
sailles « : i" H. 0^234, L. o'"28o; 2" H. o'-'ogg,
L. o™i2i. — Reproduit à l'aquatinte, par Desniâ-
dryl, dans les dimensions de : H. o'"i64, L- o"'2oo.
— Gravé sur bois pour le Magasin pittoresque
dans les dimensions de : H. o'"i3o, L. o"'i5o,
et, pour le Monde illustré, dansles dimensions de:
H. 0^224, L. o'"32o. — ■ Salon de 1S41. — ■ Voira
Tannée i852. — Appartient au Musée de \'er-
sailles. — Cat. A. Moreau, p. 75, 90, 179, 2o5, 258.
Le ministère des Beaux-Arts a commandé une copie de ce tableau à AL Charles de
Serres, avec l'intention de la substituer à l'oeuvre originale qui viendrait au Louvre.
N°73) : Épisode de l'entrée des Croisés
Dessin. — H. o'"i2o, L. o"'i 55. — Signé en bas à droite. — Gravé
sur bois pour le Magasin pittoresque (1841I, dans les dimensions
de : H. o™i2o, L. o"M5 5 — Photolithographié par Arosa, et re-
produit en fac-similé inédit par A. Robaut, dans les mêmes dimen-
sions. — Cat. A. Moreau, p. 75.
C'est le beau groupe des deux femmes qui occupent le premier plan
à droite de la composition, aux pieds du cheval de Baudouin. Le dos de la jeune femme
blonde, échevelée, à demi-nue, accroupie sur le sol, rappelle, par la splendeur nacrée de la
carnation, celui de la femme debout dans la Mort de Sardanapale.
N° 736 : Les miracles de saint Benoit. — D'après Rubens
Toile. — H. i'"3o, L. i^'gS. — N° 162 de la Vente posthume : 6,5oo fr. à M. Emile
Péreire. — Vente Péreire, 6 mars i852 : 18,000 fr. à M. Brame. — Collection particu-
lière du roi des Belges. — Cat. A. Moreau, p. 3ig.
Delacroix, à ce que i;ipporte M. Tencé, avait fait cette copie chez M. George, expert, en
1841, rue de la Fontiiine-Moliére. Cette copie est très librement faite, l'artiste ne s'est pas
attaché à être exact autrement que d'aspect et d'impression.
198
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1841
N° ']')']'■ Suzanne au hain. — Esquisse d'après Rubens
Toile. — H. o'"27, L. o'"35. — Lithographie à la plume par
A. Robaut, dans les dimensions de : H. o"'o85, L. o"Mi3, et
cliché pour le catalogue de la vente C. Dutilleux. — Vente
Duiilleux, mars 1874 • 4°° fr. à M. Michel Cerf. — Non cata-
logué par M. Moreau.
Cette esquisse a été faite de souvenir d'après une des plus énergiques
compositions de Rubens, au retour d'un voyage en Belgique et avec
l'aide d'une ancienne gravure sur bois de Christoffel legher. Le grand caractère de cette
composition avait dû séduire Delacroix. C'est qu'ici Suzanne se défend sérieusement, alors que
dans la plupart des compositions faites sur ce sujet, elle a l'air d'une victime complaisante.
N" 7)8 : Cavaliers marocains au bord du fleuve Sebou
Panneau de carton. — H. o'^ab, L. o"'33. — Appartient à
M de Courval-Piron. — Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix avait offert ce petit paysage, œuvre d'une délicatesse
exquise, à mademoiselle Piron, fille aînée de l'exécuteur testamen-
taire du maître. Celle-ci plus tard étant entrée en religion, le donna
i son beau-frère, M. de Courval. — Une haute montagne éclairée
par le soleil couchant jette sa grande ombre sur de vastes terrains
qui descendent par degrés jusqu'au bord du fleuve, où une troupe
de cavaliers pénétre pour faire baigner les chevaux à la fin d'une journée chaude.
N°
)9
Cavalier arabe se chauffiint
Toile. — H. o'"34, L. o'^sg. — Signé à droite, non daté. — Vente D.,
23 janvier 1 85o : 38o fr. à M. Soultzener. — Cat. A. Moreau, p. 267.
M. Moreau catalogue ce tableau sous le titre de : «Arabe et son coursier «,
titre qui rappelle trop les romances et le roman sentimental de la
Restauration, Malek-Adel et consorts, avec lesquels l'esprit de Eugène
r/.;oïv \.' /;,(■/; BT Delacroix n'a rien de commun. — Ici le cavalier descendu de son cheval
f^ ^^^j^J*. '^ bai brun est assis, tenant son fusil entre les jambes, et se chauffe à un feu
de broussailles. Dans sa description, M. Moreau dit que l'homme tient le
cheval par la bride. C'est une erreur, une très légère erreur à rectifier.
W y^o : Chevaux au piquet
Toile. —Vente Binant, 6 février 1844 : 35o fr. à M. Meffre. —Vente Durand-Ruel
28 janvier 1845 : 460 fr. à M. Tedesco. — Cat. A. Moreau, p. 266.
« Des Arabes tiennent leurs chevaux par la bride ; l'un d'eux plante un piquet en terre.
.84.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
199
N"'" 741, 742,743 : Sainte Victoire et saint Jean
i°et 2°Toile_s. — H. S^Sj, L.o"'87. — Cartons camaïeu pour des
vitraux destinés à l'église paroissiale d'Eu. — Gravé sur zinc
d'après un dessin au trait de A. Robaut, pour l'Art, dans les
dimensions de : H.o"'268, L.o"'6o3. — Appartenant à la manu-
facture de Sèvres. — Cat. A. Moreau, p. 223.
Derrière chacun de ces deux cartons, on a collé deux étiquettes.
On lit sur l'une : « Sainte Victoire, par M. Eugène Delacroix. —
Pour les fenêtres latérales du portail de l'Eglise d'Eu 1841 . .>
On lit sur l'autre : « Manufacture royale de porcelaine de Sèvres. —
I™ division, i'" classe, i^'' ordre. — Section D. § 11. An 1841, 11» 6.»
Pour le saint Jean, il n'y a de différence que dans le numéro qui est
coté « n° .^. B. » Tous les deux portent la date de 1841, époque h
laquelle le maître les a faits. — Les cartons sont peints à l'huile en
camaïeu et sont légèrement rehaussés de couleurs dans les ornements
du haut et du bas. L'exécution en verre ne rend que d'une façon bien
insuffisante le grand caractère sculptural de ces deux figures.
3° Nous avons vu chez M. le comte Doria, à Orrouy (Oise), un croquis de ces deux figures,
première pensée de ce double sujet qui faisait partie du n" 34^ de la Vente posthume.
N'"" 744, 745 : Études de fauves
,g0j^/^^^ 1° Une lionne qui se lèche. — Sépia au trait. —
^i^^M^'V^m^ • H. G'"! 5, L. o'"2i. — Reproduit en fac-similé inédit
s^^t ''"spsé^^^'ÊC^ '^ par Emile Vernier, en 1 864, dans les dimensions
"*-'" de : H. o'^iSo, L. o'"2io. — Cat. A. Moreau, p. 92.
2° Un jaguar. — Dessin au crayon. — H. o"'i26, L. o'"200. — Partie du n° 196 de
la Vente posthume. — Reproduit en une photolithographie inédite par Arosa, dans
les mêmes dimensions. ■ — Non catalogué par M. Moreau.
Delacroix a conservé jusqu'à sa dernière heure l'amour des grands félins. Il n'est pas d'année
où il n'en ait reproduit quelqu'un. Un de ses derniers tableaux représentera une panthère.
N"'' 746^ 747 : Musicien juif de Tanger
1° Dessin à la plume. — H. o'"i i5, L. o'"i5o. — Signé à gauche
en bas. — Gravé sur bois pour le Magasin pittoresque (1842),
dans les dimensions de : H. o"'i i5, L. o'"i5o. — Cat. A. Moreau,
P- 75-
2° Aquarelle. ■ — In-quano. — Vente Baroilhet, 12 avril 1862:
355 fr. — Appartient à M. Choquet. — Cat. A. Moreau, p. 290.
Assis à terre, les jambes croisées, le musicien promène l'archet sur une sorte de violon à
deux cordes. Un tambour de basque est posé près de lui. On reconnaît là une des figures du
tableau de la Noce juive. ( Voir plus haut, n" 687. )
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1842
Année 1842
N° 748 : Bataille de Taillebourg. — Carton de vitrail
Toile camaïeu. — H. 3"55, L. i'"8o. — Reproduit au trait
par A. Robaut pour VAft (1879). — Voir le tableau et une
variante à l'année iS?-. — Appartient aux collections de la
manufacture de Sèvres. — • Non catalogué par M. Moreau.
La disposition en hauteur a conduit l'artiste h modifier sensiblement
la composition primitive de ce motif telle que nous l'avons vue à
l'année iSSy. — On lit derrière la toile : » Section D, § Il — I —
1842 n'^ 2.— Bataille de Taillebourg, par M.Eugène Delacroix;
pour un vitrail de la chapelle sépulcrale de Dreux. » Ce carton a,
paraît-il, été dessiné par M. Lassalle-Bordes. d'après un croquis de
Delacroix. M. Lassalle-Bordes, qui cite ce fait dans les notes qu'il
a communiquées à M. Burty, pour la seconde édition des Lettres,
désigne sans doute sous le mot de croquis l'une des aquarelles dont
nous parlerons tout à l'heure. Nous n'aurions donc pas reproduit ici
ce carton, qui n'est pas de la main de Delacroix, s'il ne donnait
une idée approximative de l'aquarelle. En modifiant la première
composition, le maître en fait une œuvre toute nouvelle. A Ver-
sailles, le pont est parallèle à la bordure; la bataille est montrée
de profil. A Sèvres, la mêlée, ardente, furieuse, se présente de face;
elle descend à pic et comme une avalanche, de l'arête du pont en
dos d'âne, dont les arches gothiques allongent leurs hautes ogives
dans la profondeur du tableau. On se bat corps à corps, visière contre visière, s'épiant du
regard, le fer croisé, attendant un faux mouvement. Des hommes d'armes tombent lourde-
ment, les bras en avant, avec leurs montures qui s'abattent. D'autres, soutenus par un
écuyer, veulent mourir debout à côté de l'ennemi gisant affaissé, renversé sur le sol,
immobilisé à jamais. Là on s'assemble par groupes, et, de la pointe des piques, on rejette
dans le fleuve les guerriers culbutés avec leurs chevaux par-dessus les parapets de pierre,
en essayant de reprendre pied sur la rive. L'un d'eux y a réussi. Il fait quelques pas en
remontant vers le centre de l'action. Un coup de talon ferre porté de haut en bas lui écrase
la face comme une grenade et l'arrête court. Autour du roi saint Louis, h l'ombre d'une forêt
de lances, la mêlée redouble de fureur. Tout l'effort du combat se concentre dans le rayon de
sa formidable épée. Du haut de son cheval blanc superbement caparaçonné, il domine la
bataille, menacé, frappé, rendant blessure pour blessure. D'un coup de lance, ^l'un de ses
barons le débarrasse du plus proche de ses adversaires. Un jeune page, glissant à travers les
combattants, empoigne les rênes de la monture royale, déjà saisie à la nuque par l'effroyable
coup de dents d'un cheval enivré. A droite, à gauche, c'est un pêle-mêle sanglant d'hommes
frappant et criant, de chevaux hennissant et se cabrant. Au loin, le paysage verdoyant et
doux s'étend vers les montagnes, embrassant les silhouettes grises des forteresses. Dans le
ciel d'un bleu d'azur, de grandes nuées blanches, mollement balancées, nagent, opposant
leurs formes claires h l'intensité vigoureuse des flammes et des pennons qui flottent au vent.
Le vitrail proprement dit, tel qu'il a été exécuté à la manufacture de Sèvres et tel qu'on peut
le voir dans la chapelle de Dreux, est une assez triste interprétation de l'œuvre de Delacroix;
par la disposition et la crudité des teintes, les groupes sont divisés et manquent de cette
solidité dans les masses, de cette harmonie générale dont le maître s'est toujours montré si
ardemment préoccupé. ( Voir, sur la préparation de ce carton, les n"^ suivants.)
1 842
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N"*" 749, ")0 \ Bataille de Taillebourg. — Projet de vitrail
1° Aquarelle. — H. o'"44o, L.
maie. — Voir le carton 11° 705.
527.— Vente Villot, i865
Cat. A. Moreau, p. 227.
3,100 fr. au duc d'Au-
2° Outre l'aquarelle du duc d'Aumale, il y en avait une autre que l'on pouvait encore voir en
i852 au musée de Sèvres, celle d'aprcs laquelle le carton fut dessiné par le praticien de De-
lacroix. Elle n'y était plus exposée en i863. Depuis elle a tout à fait disparu des collections
de Sèvres, et l'un des derniers directeurs, consulté à ce sujet, dit que ce dessin est du nombre
de ceux qu'on n'a plus retrouvés à la manufacture après l'occupation prussienne. La perte est
d'autant plus regrettable que cette aquarelle devait présenter une légère variante. Le combat-
tant qui reçoit un coup de talon dans le visage ne se voit pas dans le carton.
N° 751 : Turc écrivant
Toile peinte à la cire. — H. o'"28, L. o'"35. — Vente Villot,
i865 : 170 fr. — Cat. A. Moreau, p. 273.
Il est assis à terre, vu de profil, la tête tournée à droite, écrivant sur
ses genoux ou plutôt calligraphiant quelques versets du Coran. Le
mouvement de tranquille attention exprimé par la jolie inclinaison
de la tête est tout à fait charmant et l'ensemble du dessin très pur.
N" 7 5 2 : L'éducation de la Vierge
Toile. — H.o'"93, L. i™2i. — Gravé à Peau-forte par Hédouin
pour V Artiste, dans les dimensions de : H. o'"i27, L. o'^ibS.
— Refusé au Salon de 1845. — Voir réduction variante à i852.
— Vente George Sand, 23 avril 1864, retiré à 2,200 fr. —
Vente Edouard Rodrigues, 8 octobre 1878, retiré à 4,200 fr. —
Cat. A. Moreau, pp. 98, 264.
George Sand a retiré de sa vente ce tableau qu'elle a offert en 1866 à
M. Edouard Rodrigues, qui en racontait volontiers ce qui suit et
que nous empruntons textuellement aux no'tes de M. A. Robaut : « Delacroix, au retour d'une
promenade dans Nohant, dit à George Sand, dont il était l'hôte : « Je viens de voir en ren-
trant, dans le parc, un motif de tableau superbe, une scène qui m'a beaucoup touché. C'était
votre fermière avec sa petite fille. J'ai pu les regarder tout à mon aise derrière un buisson où
elles ne me voyaient pas. Toutes deux étaient assises sur un tronc d'arbre. La vieille avait
une main posée sur l'épaule de l'enfant qui prenait attentivement une leçon de lecture. Si
j'avais une toile, je peindrais ce sujet. — Mais je n'ai pas de toile ici, lui répondit George
Sand. » Sur quoi, Delacroix, avisant un paquet dans un coin du vestibule, y trouva du
coutil à l'usage des tabliers de cuisine, et sur le champ il se mit à l'œuvre, qui ne seressent
que trop du manque de préparation de la toile, car l'aspect général est un peu sale et froid, et
on remarque aussi par endroits des parties embues h côté d'autres très brillantes d'empâ-
tement, la couleur s'étant accrochée inégalement... — Quelques amateurs nomment aussi ce
tableau « la petite Fadette. » Il suffit, pour les détromper, de les renvoyer aux Lettres publiées
par M. Burty et aux Lettres inédites publiées, dans VArt, par M. J.-J. Guiffrey.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1842
N"75} : Une filandière à Nohant
Croquis j la plume. — H. o'"22, L.o'"i9. — Appartient à M. Doll-
fus. — Non catalogué par M. Moreau.
Au mois de juin 1842, Delacroix était chez madame George Sand à Nohant,
d'où il écrit à son ami l'ierret : « Madame Sand souffre fréquemment de
violents maux de tète et d'yeux qu'elle prend sur elle de surmonter le
V plus possible et avec beaucoup de force pour ne pas nous fatiguer de ce
qu'elle souffre. Le plus grand événement de mon séjour a été un bal de
>- paysans sur la pelouse du château, avec le cornemuseux en réputation de
~ l'endroit. Les gens de ce pays offrent un type remarquable de douceur et
de bonhomie; la laideur y est rare, sans que la beauté y saute aux yeux fréquemment; mais
il n'y a pas cette espèce de fièvre qui se dénote dans les pavsans des environs de Paris. Les
femmes ont toutes l'air de ces figures douces qu'on ne voit que dans les tableaux des vieux
maîtres. Ce sont toutes des sainte Anne. » C'est ce qui inspira à Delacroix l'idée de peindre
0 l'Éducation de la 'Vierge. » ( Voir le n" précédent. )
N" 754 : Vue générale des environs de Champrosay
Toile. — H. o'"4t, L. o'"72. — Lithographie à la plume par
A. Robaut pour le catalogue de la vente C. Dutilleux, dans
les dimensions de : H. o'^oji, L. o"'i28. — Vente posthume,
n° 2i5 : 910 fr. à M. Piron, qui Fa offert à Jenny Le Guillou.
— Légué par Jennv Le Guillou à C. Dutilleux. — Vente après
décès de C. Dutilleux, en 1874: i,55o fr. à M. Brame. — Vente
Carvalho, 1876 : 710 fr. — Vente novembre 1878 : 1,000 fr. à M. le baron de
Beurnonville. — Non catalogué par M. Moreau.
N''75^ : Hamlet et Laertes
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"29, L. o™2i. — Reproduit en
fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimensions. — Vente
posthume, n° 405 : 2o5 fr. à M. A. Robaut. — Voir la lithographie
à Tannée 1834, n" 55o. — Non catalogué par M. Moreau.
Il y a peu de variantes avec la lithographie originale, qui est retournée. —
Dans ce croquis, on remarque plus de simplicité et plus d'expression à la
fois, partant aussi plus de grandeur; car l'absence d'effet ou de coloratiorl
produit presque toujours ce résultat. Il est à remarquer, d'ailleurs, que
Delacroix se plaisait a calquer plusieurs fois ses compositions, et plus il
avançait, plus il simplifiait, s'efforçant de rendre en dix coups de crayon,
au lieu de cent, ce qu'il avait d'abord exprimé. On ne saurait trop insister sur ce point ignoré
au moment de la vente, ce qui fit que les plus beaux dessins du maître furent la plupart du
temps délaissés aux enchères, parce qu'ils étaient sur papier calque. Les artistes seuls ne s'y
laissaient pas prendre. — Nous rappelons que la scène représentée ici est la première du
cinquième acte : 0 Je t'en prie, retire tes doigts de ma gorge, car bien que je ne sois pas
emporté et prompt dans ma colère, j'ai pourtant en moi quelque chose de dangereux. »
i842
L'ŒUVRE DE DELACROIX
20'3
N° -j^d: Hamlet. — Mort d'Hamlet et de Laertes
['ijl iV'^" Croquis à la mine de plomb. — H. o'^ag, L. o'"2i. — Reproduit
lllî ' Wl ' ' en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimensions. — Vente
posthume, n" 406 : 280 fr. à M. Eug. Détriment. — Appartient
à M. Feydeau. — Non catalogué par M. Moreau.
^,W5 Les observations que nous avons faites au sujet du pre'ce'Jent numéro
portent également sur celui-ci. Nous n'avons de remarques spéciales à
faire que sur la composition du sujet. Nous n'assistons pas ici, comme on
pourrait le croire, à la fin du duel d'Hamlet et de Laertes, dans lequel les
combattants succombent tour à tour, frappés par le même fleuret démou-
cheté et empoisonné, qu'ils ont échangé dans la chaleur du combat.
Delacroix a reproduit le dernier tableau du drame. — La scène est jonchée de cadavres. La
reine est morte, le roi est mort, mort Laertes, mort Hamlet; le jeune Fortinbras, prince
de Suède, a pénétré au bruit des fanfares et des tambours et s'est éloigné en donnant cet
ordre qu'on exécute et qui clôt le drame : « Que quatre capitaines portent Hamlet sur
l'estrade, comme on fait pour les soldats; car il est vraisemblable que si le destin l'eût mis à
l'épreuve, il se fût montré un très grand roi. Que la musique guerrière et les marques de
respect militaire l'accompagnent sur son passage. Enlevez les corps; un spectacle pareil orne
un champ de bataille, mais offre ici un aspect lugubre. Allez ordonner aux soldats de faire
une décharge de mousqueterie. " Marche funèbre. Ils sortent emportant les corps, après
quoi on entend une décharge d'artillerie.
H. o"'09, L.
dimensions. —
N°*7^7, 7)8 : Études de lionnes
1° Lionnescouchées. — Croquisàla plume. — H.o^ij,
L. o'"25. — Reproduit en fac-similé par A. Robaut
dans les mêmes dimensions. — Vente posthume,
n° 472 : 23o fr. à M. le baron de Laage. — Non
-_ catalogué par M. Moreau.
2° Lionne déchirant une proie. — Croquis à la plume. —
o'"i4. — Reproduit en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes
Vente posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
N°*759, 760 : Fantasias arabes
1° Cavalier arabe sabrant. — Croquis à la plume. —
H. o™2o, L. o™i8. — Reproduit en fac-similé par
A. Robaut, dans les mêmes dimensions. — Vente pos-
thume, à M. Gauvin-Seiter. — Non catalogué par
M. Moreau.
2° Cavalier arabe chargeant. — H. o"M7, L. o'"i8. —
Reproduit en fac-similé par A. Robaut, dans les mêmes dimensions. — Vente
posthume. — Appartient à M. Le Gentil d'Arras. — Non catalogué par M, Moreau.
>04
L'ŒUVRE DR DELACROIX
I 843
N*"" 761, 762 : Chevaux attaqués
i" Cheval attaqué par un tigre. —
Toile. — H. o-»23, L. o'"3i. —
Gravé à Teau-forte par Saint-Marcel,
Tannée suivante (1843), dans les
dimensions de : H. o'"245, L. o"'3o5.
Vente posthume. — N" 80 de la
Vente Beurnonville, avril 1880 :
;oo tr — Cat A Moreau, p. io3.
Che\al attaque par une panthère. — Aquarelle. —
H o'"io3, L o MSo — Varnnte du n° pieeedent. — Non catalogué par M. Moreau.
En ces œuvres se retrouve 1 idée permanente du drame qui hantait l'âme de l'artiste.
Hommes, chevaux, lions et panthères, c'est toujours et partout le vertige de l'action et de la
destruction exprimé avec une décision dans les plans et une fermeté" dans le modelé qui
donnent à toutes ces compositions la grande allure de groupes sculptés.
Année 1848
N"^ y6j , jô^ : Lionne reposant sur le corps d'un Arabe
1° loile. — H. o'"2o, L. o'"3o. —
\ppartient à M. Lamhert-Sainte-
( ioi\ — Non catalogué par M. Mo-
iL tu
- Peinture sur bois. — H. o"'24,
1 o™35. — Non catalogué par
M Moreau.
A quelques variantes près, faciles à
saisir par le rapprochement, c'est, en apparence, le même tableau. Malheureusement, le
second est, au point de vue de l'exécution, bien au-dessous du premier, tellement au-dessous,
que la facture lourde et glaireuse éveille en nous quelque doute sur l'authenticité de
l'œuvre. — Voir à l'année 184g une gravure originale du même sujet.
N° 76^ : Hamlet hésitant à tuer le roi
Toile. — H. o'"26, L. o'"iq. — Appartient à M. Paul Meurice. — Voir la lithogra-
phie à Tannée 1834. — Non catalogué par M. Moreau.
Ce tableau rend à peu de chose près, Taspeet de la lithographie du maître; seulement le fond
étant très sombre, les deux personnages, et surtout le roi, se détachent en clair. De plus,
l'expression de la tète d'Hamlet, qui est vue un peu plus de face, est plus jeune.
1843
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" 766 : Hamlet tuant Poionius
Toile. — H. o'"27, L. o'"20. — Voir la lithographie à Tannée 1834. — Vente Diaz,
janvier 1877 : 2,700 fr. à M. Perreau. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 767 : Pietà — Première pensée
Dessin. — H. o"3io, L. o"'435. — Gravé sur bois
par A. Pothey, pour V Illustration, août i863, dans
les dimensions de: H. o'"3io, L. o"'435. — Çat.
A. Moreau, p. 80.
La lettre du troisième état de cette gravure porte :
0 Dernier dessin sur bois d'Eugène Delacroix. —
(Esquisse originale du tableau la Pietà, peint par lui
dans une chapelle de l'église Saint-Denis-du-Saint-
Sacrement.) » Dans cette première pensée, le maitre
avait introduit l'apparat de draperies suspendues de
chaque coté et soutenues par deux anges. La compo-
sition définitive gagne en grandeur à la suppression de
ces accessoires pompeux, dans le goût de notre dix-huitieme siècle. (Voir le n" suivant.)
Le geste de la Mère qui se renverse en étendant les bras en croix est une idée de génie. Les
affres de la passion tout entière sont contenues dans ce mouvement d'une énergie et d'une
grandeur terrifiantes. Les attitudes des apôtres, des saintes femmes; la tète tombante, la pose
du corps privé de vie, qui s'affaisse les jambes replovées: l'obscurité crépusculaire qui
enveloppe la scène, le cavalier qui s'éloigne à gauche; à droite les personnages qui hâtent le
pas vers le groupe immobile, la ligne d'horizon sauvage et abrupte, le ciel qu'on entrevoit
à peine, les lourdes draperies flottant au souffle de la nuit, tout cela plonge l'âme dans un
recueillement dont on s'arrache avec peine. Rien n'a échappé au penseur, rien de la sombre
poésie de ce drame lugubre et douloureux.
N" 768 : Pietà
Peinture murale à la cire. — H. 3™55, L. 4"'75. — Signé
à droite en bas et daté 1843, — Gravé à l'eau-forte par
Hédouin pour l'Artiste, dans les dimensions de :
H. o'"i45, L. o"'202. — Appartient à l'église Saint-
Denis-du-Saint-Sacrement, à Paris — Cat. A. Moreau,
pp. 80, 96, 222 (notel.
« Cette œuvre relativement considérable, dit M. Moreau, fut
exécutée par Delacroix en dix -sept jours; nous tenons ce
détail de l'auteur lui-même, qui pour se rendre un compte
exact du temps employé par lui, faisait, h la fin de chaque
journée de travail, un trait sur le mur où il travaillait. >> — Quant h la date, M. Moreau, qui
donne 1S41, se trompe certainement, car Delacroix, en juin 1843, demande à M. Lasalle-
Bordcs de n se mettre à l'église. » La chapelle fut découverte en novembre de la même année,
croyons-nous; peut-être même en novembre 1844.
206
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1843
N"^ 769, 770, 771 : Pietà. — Réductions et variantes
1° Toile. H. 0^37^ L. o"'45. — Gravé à l'eau-forte par Massard
pour le catalogue Laurent- Richard ( 1878 I, dans les dimensions
de : H. o"'ioq, L. o'"i32. — Cat. A. Moreau, p. 96.
2" Toile. — H. o"285, L. o'"4io. — Appartient à M. Georges
Rodrigues. — Cat. A. Moreau, p. 96.
3° Toile. — H. o'"2o, L. o'"42. — N° 7 de la vente posthume :
1,120 fr. à M. Lambert. — Cat. A. Moreau, p. 3o8.
Dans notre n" i, les variantes sont sensibles par la disposition du fond de paysage, des roches
et par la suppression des deux petites figures du fond. Notre croquis présente la composition
en sens contraire. — Le n" 1 est une simple réduction. — Le n° 3 est, s'il nous en souvient,
disposé comme le n» 767 que nous venons de décrire.
N° 772 : La fiancée d'Ahydos
Toile. — H. o™35, L. o"'2 5. — Gravé à Teau-forte par Greux pour
l\4r/, 3i janvier 1875, dans les dimensions de : H. o™25i,
L. o"M89. — Vente du 28 avril 1874 : 32,o5o fr. — Appartient à
M. Th. Melot. — Voir la varianteen largeur au numéro suivant et
la variante en hauteur à Tannée i85i. — Non catalogué par
M. Moreau.
Au bord d'une caverne ouvrant sur la mer, Selim va se séparer de Zuleika
^ qui se traîne à ses genoux et cherche à l'empêcher de donner le signal d'appel
— à ses camarades. Selim la maintient d'un bras, et, tourné vers les profon-
grotte, hèle de la voix en agitant son cimeterre. — Le motif est celui de la
I. dans le chant II de la Fiancée d' Ahydos, par lord Byron.
N° 77J : La fiancée d'Abydos
variante, 1
La grotte
on voit à
Selim qui
Toile. — H. o'"32, L. o"'40. — Lithographie par Charles
Hue pour la publication intitulée: « Souvenirs d'artistes »,
dans les dimensions de : H. o'"i 76, L. o"2i8. — Voiries
variantes en hauteur. Tune au numéro précédent, Fautre
à l'année i85i. — Non catalogué par M. Moreau.
Si M. Moreau n'a pas catalogué ce tableau important, il a pris
soin néanmoins de cataloguer la lithographie de Ch. Hue, mais
avec une erreur assez grave, car il la donne comme exécutée
d'après un tableau dont il rapporte exactement les dimensions,
qui sont celles de la variante de i83i. — Dans la présente
e groupe de Selim et de Zuleika est autrement composé que dans notre n" 772.
est plus large, l'ouverture sur la mer plus grande. Le signal d'appel est donné, car
gauche les profondeurs de la caverne éclairées par les torches des compagnons de
se rapprochent en courant.
1843
L'ŒUVRE DE DELACROIX
207
N° 774 : Tête de lion vue de profil
Aquarelle.— H. o™i7, L. o'»i8. — Photographié par Braun
dans les mêmes dimensions. — Phototypographié pour les Dessins
du Louvre, Baschet, i883. — N° 469 de la Vente posthume :
410 fr. — Appartient au musée du Louvre, n° lyi'i du catalogue
des dessins par M. de Tauzia. — Non catalogué par M. Moreau.
o Le lion est le roi des animaux », a dit M. de Buffon. Ce n'est pas
impossible, mais ce qui est certain, c'est qu'avec le cheval il domme
tout le règne animal dans l'œuvre de Eugène Delacroix. Cette prédi-
lection très marquée pour les grands fauves, qui ne s'explique par
aucun détail connu de sa biographie anecdotique, appartient au domaine de sa biographie
morale. Il est curieux, en effet, de voir cet esprit sobre, lettré et de goûts littéraires clas-
siques, j'ai presque dit académiques, rechercher de préférence comme motifs pittoresques le
mouvement, le drame, la passion, les scènes de pillage, d'incendie, de massacre, la destruction
sous toutes ses formes, et le lion est l'agent de destruction par excellence : une mâchoire
montée sur quatre pattes, comme l'a défini M. H. Taine.
N°'' yy^, 776 : Bouquets de fleurs
i" Aquarelle. — H. o'"22, L. o'"22. — Cliché sur verre
(inédit) par A. Robaut, dans les dimensions de H. o'"i 18,
L. o'"io8. — Partie du n° 625 de la Vente posthume :
220 fr. à M. A. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Aquarelle. — H. o™2o5, L. o"'26o. — • Lithographie
par A. Robaut pour le catalogue de la vente C. Dutilleux, dans les
dimensions de : H. o"'oqo, L. o"'i i5. — Partie du n" 625 de la Vente posthume :
200 fr. — Vente C. Dutilleux, 26 mars 1874 : 400 fr. à M. Bruyas. — Appartient, par
suite du legs Bruyas, au musée de Montpellier. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 777 : Personnage en costume allemand du seizième siècle
Sépia et croquis divers. — H. o"'i85, L. o"'i40. — Photolitho-
graphié, en 1868, par Arosa, dans les mêmes dimensions. —
Vente posthume, à M. Philippe Burty. — Cat. A. Moreau, p. i3o.
Nous conservons la désignation donnée par M. Adolphe Moreau.
Cependant, il est bien évident que ce dessin est le portrait bien connu,
mais librement interprété, d'Albert Durer. C'est également dans le
sentiment de cet admirable maître que sont traces les croquis de
figures qui occupent à droite et à gauche les marges du dessin.
Delacroix, au moment de reprendre les motifs de 0 Gœtz de Berlichin-
gen I) pour les dessiner en vue de la gravure sur bois, avait voulu
consulter, étudier l'œuvre du grand artiste allemand et se familiariser
avec le caractère simple, fort et profond de son style. On sait comment
y a réussi. — Voir à l'année i836, les numéros 634 à 646, et ci-après les n<" 778 h 781.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1843
N" 778 : Frère Martin et Gœtz de Berlichingen
Dessin sur bois. — H. o"^2ij, L. o'"i45. — Gravé pour le Magasin
pittoresque. — Voir la lithographie à l'année i836, n" 640. — Cat. A.
Moreau, p. 76.
On voit en bas, signé sur le dessin à gauche : « Eugène Delacroix »; à droite,
n 1S43 », et au-dessous de cette date, les initiales adossées des graveurs, « A.
B.L., H. R »; dans la marge, au bas, « Gœtz de Berlichingen, drame par
Goethe. Acte 1°''. Gœtz de Berlichingen et frère Martin. — Dessin d'Eugène
Delacroix. » Le même bois a paru dans l'ouvrage de Henry de la Madelène :
(' Eugène Delacroix h l'exposition du boulevard des Italiens ». On connaît
la scène : Frère Martin serre la main de fer de Gœtz de Berlichingen. Si l'on
compare ce bois à la lithographie, on remarquera quelques variantes; l'escalier, ainsi que la
faux accrochée au mur, sont remplacés ici par une petite fenêtre quadrillée de plomb où
s'enchâssent des verres bombés en cul de bouteille.
N" 779 : Gœtz de Berlichingen écrivant ses mémoires
celui que
de chasse
occupent
Dessin sur bois. — H. o'"2i9, L. o'"i47. — Gravé pour le Magasin
pittoresque. — Voir le tableau à Farinée 1845. — Voir la lithogra-
phie à l'année i836, n° 648. — Cat. A. Moreau, p. 76.
En bas à gauche, signé sur le dessin : «Eugène Delacroix»; à droite, les
initiales des graveurs, A. B. L., H. R.; dans la marge du bas : « Acte IV.
(iœtz de Berlichingen écrivant ses mémoires; Elisabeth sa femme. —
Dessin d'Eugène Delacroix. » Le même bois a paru dans l'ouvrage de Henry
de la Madelène, après la mort de Delacroix : « Eugène Delacroix à l'expo-
sition du boulevard des Italiens. » — Le costume d'Elisabeth diffère ici de
l'artiste lui a donné dans la lithographie. Delacroix a en outre ajouté un trophée
composé d'un bucrane de cerf, d'une arbalète, d'une corne et d'une gourde, qui
h gauche le vide de la muraille.
N"" 780 : Gœtz de Berlichingen blessé
figures qui,
là grâce et
Dessin sur bois. — H. o"'2i6, L. o"'i46. — Grave pour le Magasin
pittoresque. — Voir la lithographie à l'année i836, n° 644. — Vente
Pierret ( cak]ue du dessin original), mai 1879: 5o t'r. — Cat.
A. Moreau, p. 77.
Signé en haut, sur le dessin, dans le ciel : « Eugène Delacroix », et au-des-
sous : « 1842 ». — En bas à droite, les monogrammes des graveurs A. B.
L., H. R.; dans la marge, en bas ; « Gœtz de Berlichingen. Acte V. Gœtz
de Berlichingen blessé est secouru parles bohémiens. — DessindeM. Eugène
Delacroix. » Le même bois a paru dans l'ouvrage de Henry de la Madelène.
— Une figure de petite bohémienne déguenillée remplace ici les grandes
la lithographie, se tiennent derrière le cheval de Gœtz, et ajoute, oppose ici
rire de l'enfance à la rude physionomie des gens de guerre.
iX42
L'ŒUVRE DE DELACROIX
2oq
N" 781 : Mort de Gœtz de Berlichingen
146. — Gravé pour le Magasin
Dessin sur bois. — H. o'"2i6, L.
pittoresque. — Cat. A. Moreau, p. 77.
Signé sur le dessin, en bas à droite : 0 Eug. Delacroix»; en bas à gauche,
les monogrammes des graveurs A. B. L., 'H. R.; sur la marge:» Gœtz de
Bcrlichingen. Acte V. Mort de Gœtz. Dessin de M. Eugène Delacroix. » Le
même bois a paru dans l'ouvrage de H. de La Madelène. Delacroix n'avait point
traité ce motif dans la série des lithographies. C'est la dernière scène du
drame. Le bon gardien de la tour où Gœtz est prisonnier a permis que le
vieillard respirât dans son petit jardin. Elisabeth, sa femme, Marie, sa
sœur et Lerse, un de ses fidèles cavaliers, l'entourent de leurs soins et il
setemt en miirmurant ce mot : Liberté! liberté! ~ Je ne sais à quel sentiment Delacroix a
obéi en substituant une troisième figure de femme à celle de Lerse.
N°782
Portrait de François Clouet
Dessin sur bois. — H. o'"55, L. o"45. — Gravure inédite. — Sans aucune
lettre, signature ni date. — Cat. A. Moreau, p. 76.
Sur le bois même, on lit autour de la tête_, en petites capitales du temps : « François
CLOUET DIT j.\NET, PEINTRE DU ROI CH.^RLES IX. » — M. Morcau a dit qu'il ne
connaissait qu'une seule épreuve de cette gravure. Qu'est devenu le bois? Par
qui avait-il été gravé? A l'exemple de ses amis Frédéric Villot et Pierret, Eugène
Delacroix se serait-il essayé à manier lui-même l'outil du graveur? Autant de
questions auxquelles nous ne pouvons répondre et pour lesquelles nous faisons appel à la
sollicitude et à la bienveillance des curieux plus heureux que nous.
N° 78} : L'amoureuse au piano
Croquis à la sépia. — H. o'"22, L. o'"i7. — Vente posthume. — Non
catalogué par M. Moreau.
A voir l'immense quantité d'œuvres de toute sorte que Delacroix a accomplies
malgré l'incertitude de sa santé si chétive, il est évident que personne n'a
pratiqué plus étroitement le précepte du sage : « NuUa dies sine linea » ; et il
se reprochait sévèrement les heures de farniente auxquelles il lui arrivait
parfois de s'abandonner. En 1843 précisément, il écrit de Saint-Leu-Taverny
à son ami Pierret : n Je n'ai pu encore me mettre à quoi que ce soit et je
suis un peu mécontent de moi. C'est un sentiment qui me gâte toujours un
peu tout le reste. Il me semble qu'il faut avoir fait sa tâche pour )ouir en conscience des
biens que la nature nous présente.... Je lis, mais ce n'est pas un travail. Malgré l'attrait que
j'y trt)uve, je ne suis pas pleinement satisfait quand j'ai passé mon temps de la sorte. Il n'y
a que le cigare, quand il est bon, qui me fasse un peu oublier le tort que j'ai de me laisser
aller à la paresse; car c'est tout uniment paresse. Je ne puis commencer. J'ai la certitude
que la première demi-heure passée, je trouverais au travail le plus grand plaisir, et je ne puis
malgré cela surmonter ce moment de dégoût. Le cigare est décidément un instrument de
relâchement et de corruption... Quand il est fini, l'illusion cesse, et je me fais des reproches. "
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1843
N" 784 : Études de mouvements
Croquis à la mine de plomb. — H. o"'i9, L. o"'25. — Non
catalogué par M. Moreau.
C'est une source d'intérêt inépuisa'cle que de rapprocher et de
^\!^i>\ comparer, fût-ce au hasard, deux croquis de Delacroix. Le hasard,
#
en effet, place ici au-dessous l'un de l'autre deux dessins : « l'Amou-
reuse au piano» et les « Études de mouvements»; l'un tout imprégné
de sentiment moderne, de grâce exquise, des voluptés de l'abandon
h l'inspiration musicale: l'autre, au contraire, animé par le souftle
des grandes compositions héroïques. Si Delacroix ne pouvait parler sans ironie des critiques
routiniers, apologistes de « ce fameux beau ». que les uns voient dans la ligne serpentme,
les autres dans laligne droite, et qu'ils s'obstinent tous à ne voir que dans les lignes; il
suffit pourtant d'un dessin comme celui-ci pour prouver qu'il possédait, lui aussi, le sens
et la magie de la ligne. — Ces études ont été faites pour le tableau S.imson et DjHU .
N° 785 : Études de chats
Dessin au cravon. — H. o'"2i, L. o'"32. — Daté au bas à
gauche : « 5 x*"'''^ 1843. » — Reproduit en fac-similé pour VArt,
février 1876, dans les mêmes dimensions. — ^ N° 5o8 de la Vente
posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
Les chats de Eugène Delacroix, écrivait Théophile Silvestre pendant
l'exposition de la'vente posthume, n ces chats taits en quelques coups
de crayon sur un chiffon de papier, ont dans les yeux des secrets indéfinissables. » Et il citait
le célèbre sonnet des chats de Charles Baudelaire.
N°' 786, 787, 788 : Études de têtes
îr 1° Tète du cardinal Hippolyte de Médicis. — Copie
^ d'après le Titien. — Toile de vingt-cinq à trente. — Gravé
■^^ sur bois n,Tr F. Villot.
^^sur bois par F. Villot.
2° Tête de Turc. — Dessin à la plume. — En bas, à gauche,
la signature : « Eug. Delacroix ». — • Gravé sur bois de poirier, au
couteau, par F. 'Villot et Pierret, dans les dimensions de :
H. o'"i3o, L. o'^ogo. — Cat. A. Moreau, p. 76.
3° Toile. H. o'"40, L. o'"32. — Exposition universelle de i855. —
Gravé sur bois de poirier, au couteau, par F. Villot, dans les
dimensions de: H. o'"ii7, L. o'"o95. — Gravé à l'eau-forie par
Saint-Marcel, dans les dimensions de : H. o'"202, L. o'"i62. — Lithographie par
A. Robaut, dans les dimensions de: H. o™202, L. o'"i62. — Vente posthume,
n° 73 : 835 fr. à M. Haro. — Cat. A. Moreau, pp. 76, i3i, i53, 192, 3i3.
Les gravures faites par M. Villot d'après ces trois études de tètes sont inédites; il n'en a été
tiré que quelques épreuves d'essai. D'abord, en premier état, sur une même feuille, la tète
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
de Turc et le portrait de vieille femme, tirés à vingt épreuves. Ensuite, en deuxième état,
sur une feuille plus grande, on a réuni à la tête de Turc et au portrait de vieille femme le
pour_i4 francs, à M. Lelogeais, marchand d'estampes, rue de Seine. — Nous reproduisons
une épreuve du deuxième état, avec la disposition même qu'elle a reçue au tirage. La tète du
cardinal y étant peu lisible, nous en donnons le détail.
Année 1844
N" 789 : Bacchante endormie
Toile. — H. o'"33, L. o'"45. — N° i23 de la Vente pos-
thume, 320 fr. à M. Haro. — Non catalogué par M. Moreau.
En cette année 1844, où Delacroix travaillait à la grande déco-
ration de la bibliothèque de la Chambre des députés, il se sentait
plus tendrement épris que jamais pour les grands maîtres français
qui furent ses prédécesseurs. Un jour qu'il était allé h Versailles,
sans doute pour revoir les peintures décoratives de Le Brun , il
aperçut l'admirable groupe du Persée et Andromède, de Puget,
abandonné dans le parc à toutes les intempéries des saisons. Il en
revint indigné, écrivit lettre sur lettre et même un article dans les Beaux-Arts, édités par Cur-
mer, pour protester contre ce vandalisme. Et quelques jours après, il adressait à Curmer
également le billet que voici : « Je ne m'attendais pas à voir si tôt confirmées mes tristes pré-
visions au sujet de l'Andromède : j'apprends qu'un des derniers orages a rompu précisément '
au-dessus du groupe une grosse branche d'arbre qui a brisé dans sa chute l'une des mains de
l'Andromède et une partie du bouclier du Persée. Je vous transmets sans commentaires cette
nouvelle affligeante. Il va sans dire qu'on a aussitôt que possible restauré et fait disparaître
les traces du dégât; mais cette restauration elle-même n'est qu'un outrage de plus. Les amis
des arts doivent-ils désespérer encore de voir arracher à une destruction totale un des ou-
vrages les plus capitaux du plus grand sculpteur français? » Déjà en lySS, Piganiol delà Force
demandait que le Milon et l'Andromède fussent placés dans le château. Un siècle après
seulement, ils sont entrés au Louvre, dans les salles de la sculpture française.
N" 790 : La mort d'Ophelia
Toile. — H. o™22, L. 0^29. — Signé à droite, non daté. — Voir la lithographie à
Tannée 1834 et les tableaux aux années i838 et iSSg. — A M. John Saulnier. — Cat.
A. Moreau, p. 25 i (note).
Le tableau est très terminé. C'est la même composition que celle des deux autres. La seule
différence qu'il y ait avec la lithographie originale, c'est que le paysage a. été agrandi. Dela-
croix se sera servi, pour exécuter ce tableau, du dessin qu'il avait employé pour sa lithogra-
phie. C'est pourquoi la lithographie est en sens contraire.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
T844
N" 791 : La mort de Sardanapale
Toile. — H. o'"74, L. o™93. — Appartient à M. Bellino. — Cat. A. Moreau, p. 170.
E. Delacroix avait légué à M. Legrand, avoué, son exécuteur testamentaire, ce tableau,
qui n'est qu'une traduction sans variante du tableau peint en 1827 ( voir n" 198). Après
la mort de celui-ci, il passa aux mains de M. Crabbe, de Bruxelles, et depuis dans celles de
M. Bellino. — F. Villot en avait fait une copie dans l'atelier du maître ; derrière le châssis se
trouvent des taches et des notes de couleurs employées dans l'œuvre originale.
N°^ 792, 79^ : Cavalier marocain
i" Aquarelle. — H. o""! i, L. o™o8. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Dessin à la mine de plomb. — H. o^i 10, L. o^oSo. — Signé E. D.
en bas, à gauche. — Gravé sur bois pour V Illustration, dans les mêmes
dimensions. — Cat. A. Moreau, p. 79.
Monté sur un cheval lancé au galop, il tire un coup de fusil. — Dans YIlliis-
tration, la gravure accompagnait un article traitant des relations entre la France
et le Maroc (voir tome iii, p. 341). Elle a paru aussi dans l'ouvrage de M. H. de la Madelène.
'T,'mtwii&
N°^ 794, 795 : Costumes maures
positions
qui fait
1° Aquarelle. — H. o'"i3o, L. o^iaS. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Dessin à la mine de plomb. — H. o"'i 3o, L. o"i 25. Signé E. D.
en bas, à gauche. — Gravé sur bois pour Ylllustration, dans les
mêmes dimensions. — Cat. A. Moreau, p. 7g.
La gravure a paru également dans l'ouvrage de M. H. de la Madelène. —
Ces aquarelles et dessins, comme quelques-uns des numéros qui vont
suivre, étaient autant d'études et de préparations pour l'admirable tableau
du Salon de 1845. Toutes ces études n'ont pas trouvé place dans les com-
définitives; Delacroix se remettait le Maroc entre les doigts, comme un musicien
des gammes et des exercices avant d'exécuter un morceau brillant.
N°®796, 797 : Soldats de la garde noire de l'empereur du Maroc
1° Aquarelle. — H. o'"i20, L. o^oSo. — Non catalogué par M. Moreau.
2 i essin à la mine de plomb. — Signé E. D. en bas, à gauche. — ■
H.o'"i20, L. o™o8o. — ■ Gravé sur bois pour V Illustration, dans les
mêmes dimensions. — Cat. A. Moreau, p. 78.
C'est une étude pour l'homme à pied qui marche à la tète du cheval de l'em"
pereur Muley-abd-er-Rahman. Ici, il est debout, appuyé sur son fusil, une
cartouchière à la ceinture, le , sabre suspendu en bandoulière et un burnous sur les épaules.
— La gravure a paru également dans l'ouvrage de H. de la Madelène.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
•2i3
N'
798, 799 : L'empereur Miiley-abd-er-Rahman
1° Dessin à la mine de plomb. — H. o"'25o, L. o'"i6o. —
Verne posthume à M. A. Robaut. — Gravé sur bois pour
V Illustration, septembre 1844, ^^^^ l^s dimensions de :
H. o'"2o5, L. o'"i2o. — • Reproduit en fac-similé, par
A. Robaut, dans les dimensions de : H. o'"25o, L. o'"i6o.
— Voir à l'année 1845. — Cat. A. Moreau, p. 78.
2° Aquarelle. — H. o"'2o5 , L. o"'i2o. — Non cata-
logué par M. Moreau.
Le dessin est accompagné de deux lignes autographes sur la
composition de quelques tons; il représente exactement le groupe central du tableau peint
en 1845, et qui appartient aujourd'hui au musée de Toulouse. La gravure porte en bas, à
gauche, les initiales adossées des graveurs R. H. B. L., Régnier, Hotelin, Best, Leloir. Elle
a paru aussi dans la brochure de Henry de la Madelène déjà citée. C'est d'après celte gra-
vure que nous avons reproduit notre première vignette, qui se trouve dans le sens inverse
de l'original. — Quant à l'aquarelle, elle est la reproduction presque sans variante de celle
que nous avons cataloguée sous le n" bob. La seconde vignette en donne les traits généraux.
N"" 800, 801, 802, 803 : Vues du Maroc
i" Vue de Méquinez. — Aquarelle.
— H. o'"i25, L. 0^140. — Non ca-
talogué par M. Moreau.
2° Même vue de Méquinez sans va-
riante.— Dessin à la mine de plomb.
— H. 0^125, L. o'"i40. — • Signé
E. D. à droite en bas. — Gravé sur
bois pour V Illustration, sur le dessin
du maître, dans les mêmes dimen-
sions.— Reproduit dans la brochure de H. de la Madelène. — Cat. A. Moreau, p. 79.
3° Vue d'Alkassar-el-Kebir. — Aquarelle. — H. o™ii, L. o"'2i. — Voir ralbum
du comte de Mornay (i833). — Non catalogué par M. Moreau.
4° Même vue d'Alkassar. — Dessin à la mine de plomb. — H. o"'i i, L. o™2i. — Signé
E. D. en bas, à gauche. — Gravé sur bois pour V Illustration, dans les mêmes dimen-
sions. — Reproduit dans la brochure de la Madelène. — Cat. A. Moreau, p. -q.
N" 804 : Lion dévorant un cheval
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"i20, L. o'"235. — Photographié par Braun.
N° 478 de la Vente posthume : 36o fr., au Musée du Louvre. — Phototypographié
pour les Dessins du Louvre (Baschet, i883). — Non catalogué par M. Moreau.
C'est le dessin qui a précédé la lithographie originale du maître; la lithographie est bien
plus souple d'exécution. (Voir le n" suivant.)
214
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
N° 80^ : Lion dévonint un cheval
Lithographie pour les Artistes conieinpnrains. — H. o"M 20,
L. o"'238. — Vente De La Combe (premier état) : 5o fr.;
vente Parguez (troisième état): 2 fr. ; vente Dubois (deuxième
état) : 6 fr.; vente Galichon (cinquième état) : 10 fr. ; vente
Villot (troisième état): 3 fr. — Cat. A. Moreau, p. 5o.
Premier état. Sans aucune lettre, sauf sur la planche, la signature
et la date de 1844 en dessous.
Deuxième état. En bas, au milieu : 0 Groupe d'Animaux » , à
droite : « Imp. Bertauts «.
Troisième état. En haut, à droite « n» 17 »; en bas, à gauche « Eug. Delacroix, pinx. et
lith. .), à droite: « Imp. Bertauts», au milieu : « Lion dévorant un cheval «, et le timbre sec :
(( Les Artistes contemporains ». La date 1844 sous la signature effacée.
Quatrième état. Le nom de Bertauts, effacé, mais avec le timbre sec de la publication.
Cinquième état. La date de 1844 transparaît, bien qu'elle ait été effacée sur la pierre.
Il y a encore au moins un autre état non cité par M. Moreau.
N° 806 : Lion dévorant un cheval
Toile. — H. o'"33, L. o'"4i. — Signé à gauche, non daté. — Vente Cachardy, 12 fé-
vrier i853 : 545 fr. ; vente M. W., i i décembre 1857 : 960 fr., à M. John Saulnier.
— Cat. A. Moreau, p. 277.
BIBLIOTHÈQ.UE DU PALAIS BOURBON — PROJETS
Nous cataloguons ici un certain nombre de projets relevés dans les notes de Dela-
croix, et dont plusieurs ont été dessinés ou peints. Il s'en trouve qui ont également
occupé l'esprit du maître, quand il entreprit la décoration de la Bibliothèque du
Luxembourg, car il a mené les deux œuvres de front, de 1845 à 1847.
N"^ 807, 808, 809 : Orphée, Tyrtée
^^^\d'Sj
1° Orphée et les Euménides. — Indication
à la mine de plomb. — Non exécuté.
2° Orphée et Eurydice. — Non exécuté.
3° Tyrtée entraînant les Lacédémoniens à la
victoire. — Indication à la mine de plomb.
Nous donnons la reproduction du premier cro-
quis, « Orphée et les Euménides » et celle du troi-
sième. (1 Tyrtée entraînant les Lacédémoniens, »
sans nous dissimuler qu'ils ne sont pas exempts d'une certaine confusion.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N°' 8io, 8ii : Jeunes filles de Sparte
i" Jeunes filles de Sparte s'exerçant à la lutte. — Dessin à la
mine de plomb. — H. o'"22, L. o'"26. — Reproduit en fac-
similé par A. Robaut. — Partie du n° 290 de la Vente posthume:
210 fr. à M. P. Tesse. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Même sujet. — Dessin à la mine de plomb. .— H. o"'22,
L. o"'26. — Héliogravé pour les Dessins de décoration, édités
par A. Quantin, dans les mêmes dimensions. — Vente pos-
thume : 280 fr.à M. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
Notre vignette représente le premier de ces deux dessins. Il n'y a d'ailleurs pas de variante.
N° 812 : Pythagore consultant les prêtres égyptiens
Simple indication au trait avec une note autographe. — Non exécuté.
Note que le maître a écrite sous ce dessin : « Pour le Pythagore, faire à peu près la composition
d'Hérodote... Les vieux mages. — Le grand prêtre montre la statue d'Isis voilée. — Le néo-
phyte de Pythagore tremblant, introduit par des présentateurs ou acolytes. — Ne pas exa-
gérer le style égyptien ; voir celui des lithographies anglaises pour la Bible de Engelmann. »
N°^8i}, 814, 81^ : Socrate, Diogène, Platon
1° Socrate devant ses juges. — Croquis
mine de plomb. — H.o"M6, L. o"'20.
— Non catalogué par M. Moreau.
2" Diogène à l'Académie, ou les Jar-
dins d'Académus. — Indication à
la mine de plomb. — Note écrite par
Delacroix sur ce dessin : « Mettre au
fond Diogène qui s'en va tenant son
bagage. « — Non exécuté.
3° Platon. Banquet. — Non exécuté.
Nos vignettes reproduisent le n Socrate devant ses juges » et le « Diogène à l'Académie. «
N""" 816, 817, 818, 819, 820 : Sujets tirés des Testaments
1° Moïse, en présence de Pharaon, confond les magistrats égyptiens. — Non exécuté.
2° Moïse donnant la loi au peuple. — Non exécuté.
3° Jésus au milieu des docteurs. — Non exécuté.
4° Le Christ prêchant de la barque. — Mine de plomb. — Note de Delacroix : « En
disant à saint Pierre de le suivre. Simple morale qui s'adresse à tous les simples. »
5° Le repas chez Simon le pharisien. — Non exécuté.
2l6
L'ŒUVRE DE DELACROIX
.844
N''^82i, 822, 823 : Saint Paul
1° Saint Paul ren-
versé sur la route
de Damas. — Indi-
cation à la mine
de plomb. — H .
o'"i25 , L. o^igo.
— Reproduit en
fac-similé inédit
par Ch. Desavary, dans les mêmes dimensions, et en fac-similé agrandi, par
A. Robaut, dans les dimensions de: H.o^iq, L. o'"3i. — Vente posthume, à
M. Robaut. — Cat. A. Moreau, p. i35.
2° Même sujet. — Croquis à la mine de plomb. — Vente posthume, à M. Chenavard.
— Non catalogué par M. Moreau.
3° Même sujet. —Croquis aquarelle. — H. o"2i5, L. o'"25o. — Vente posthume,—
Vente Chambry, 1881 : 5i fr. — Non catalogué par M. Moreau.
N°' 824, 825, 826, 827, 828, 829 : Tite-Live, Virgile,
Antoine, Marc-Aurèle, Dante, Le Tasse
1° Tite-Live présentant son histoire à Auguste. —
Non exécuté.
2° Virgile voulant faire brûler VEnéide. — Non
exécuté.
3° Discours d'Antoine sur le corps de César. — Non
exécuté.
4° Marc-Aurèle chez le stoïcien. — Non exécuté.
5° Dante (dernier chant de la Divine Comédie). —
Croquis à la plume. — H. o™2i, L. o""! i. — Repro-
duit en fac-similé inédit par Lefman dans les mêmes
dimensions. — Appartient à M. Etienne Arago. — Non catalogué par M. Moreau.
6° Le Tasse. — Plusieurs croquis. — Non exécuté.
Nos vignettes représentent les deux dernier.*: motifs : « Dante » et « Le Tasse. »
B1BL10THÈQ.UE DU PALAIS BOURBON — ÉTUDES
N° 8}o : Hémicycle d'Orphée — Ensemble de la composition
Toile. — Esquisse de forme semi-hémisphérique. — H. o'"36, L. 0^93. — N" 12 de
la Vente posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 8)1 : Orphée — Groupe central
Aquarelle. — H. o'"48, L. o™6i. — Lithographie à la plume
par A. Robaut, dans les dimensions de : H. Qu'agi, L. o'"i2i.'
— Légué par Eugène Delacroix à Constant Dutilleux. — Vente
Constant Dutilleux, mars 1874 : 1,700 fr. à M. A. Robaut. —
N° 170, Exposition Durand-Ruel, 1878. — Non catalogué par
M. Moreau.
On se rappelle que Constant Dutilleux était un des sept amis chargés de classer les dessins du
maître en vue de la Vente posthume.
N" 832 : Orphée — Groupe central
Dessin. — Grand in-folio. — N° 265 de la Vente posthume. — Non catalogué par
M. Moreau.
N*" 8^^ : Composition de l'Orphée
Dix feuilles de croquis divers,
par M. Moreau.
N" 266 de la Vente posthume. — Non catalogué
N° 8^4 : Hémicycle d'Attila — Ensemble de la composition
Toile esquisse de forme semi-hémi-.
sphérique. — H. o™36, L. o^gS. —
N° 1 3 delà Vente posthume : i,o5o fr.
— Non catalogué par M. Moreau.
Cette esquisse, que Delacroix avait faite
en forme de cul de four, a depuis la Vente
posthume été mise à plat. — c< J'ai obtenu
qu'on m'ôte les principales planches de
l'échafaud des deux hémicycles de la
Chambre des Députés. L'Orphée est,
comme je le craignais, trop en l'air; mais avec quelques détails sur le devant, j'en tirerai parti
tel qu'il est... L'autre tableau est fort bien, nous n'y ferons pas de changements. » (Lettre
du 12 septembre 1847 a M. Lassalle-Bordes.)
^.-i
N° 855 : Attila — Groupe central
Aquarelle. — In-folio. — N° 267 de la Vente posthume : 5 10 fr. à M. Dauzats.
Cat. A. Moreau, p. 322.
2l8
L'ŒUVRE DE DELACROIX
,844
N° 836 : Attila. — Femmes et vieillards fuyant les barbares
Dessins. — N" 268 de la Vente posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 8^7 : Composition de TAttila
Onze feuilles de croquis divers. — N" 269 de la Vente posthume. — Non catalogué
par M. Moreau.
N" 838 : Alexandre et les poèmes d'Homère
Aquarelle. — N° 278 de la Vente posthume : 320 fr. à M. Claburn. — Voir le même
sujet à la Bibliothèque du Luxembourg (1845). — Non catalogué par M. Moreau.
N" 8^9 : Alexandre et les poèmes d'Homère
21, L. o"'25. — Vente posthume. — Non cata-
Dessin à la mine de plomb. — H
logué par M." Moreau.
N" 840 : L'éducation d'Achille
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"23, L. o"'3o. — Reproduit
/' ( y^=^^ -> en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimensions, en noir
7~HinÊy^^ ,.'-- \ et à la sanguine. — Photographié par Braun. — N" 277 de la Vente
'- ^ posthume : 2,5oo fr. à M. de Laage. — Appartient au Musée du
Louvre. — Non catalogué par M. Moreau.
Eugène Delacroix attachait beaucoup d'importance à cette admirable
composition. On sait qu'une de ses dispositions testamentaires recommandait expressément
que le dessin fût livré aux enchères après sa mort. Il atteignit alors le prix de 2,5oo francs.
— Voir les n»' 841, 842, 843, 844 et 899.
N" 841 : L'éducation d'Achille
Pastel. — H. o'"29, L. 0^41. — Vente George Sand, 1864; vente Khalil-bcy, 1868 :
3,000 fr. — Cat. A. Moreau, p. 323.
M. Moreau a commis une erreur en disant que ce dessin a passé h la Vente posthume.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
IQ
N° 842 : L'éducation d'Achille. — Esquisse
Toile. — H. o'"23, L. 0^29. — N° 25 de la Vente posthume : 1,000 fr. à M. Berrver.
— ^'ente Laurent Richard, 1878. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 84^ : L'éducation d'Achille. — Esquisse
Toile. — H. 0^246, L. o™3oo. — Exposition d'Alsace-Lorraine, juillet 1874. — Litho-
graphie à la plume par A. Robaut dans les dimensions de : H. o"'o85, L. o'"ii2.
— Gravé à l'eau-forte par M. Berthault dans les dimensions de : H. o^iSo, L.o'"i6i.
— Photographié par Braun. — Vente Constant Dutilleux, 1874 : 3,5oo fr. à
M. Hoschedc. — Vente H..., avril 1875 : 3,o5o fr. à M. Bazile, de Montpellier. —
Non catalogué par M. Moreau.
N" 844 : L'éducation d'Achille — variante
Croquis à la plume. — H. o"'i2, L. o"'ii. — Note de Delacroix :
.gW-v^^j; '< Mettre une nymphe qui regarde. » — Non catalogué par M. Moreau.
ti^»\-",T~, Voici le passage du testament de Eugène Delacroix que nous avons rappelé
.'.Mi^^X au sujet du beau dessin (n» 840) : « J'entends expressément qu'on comprenne
i;?" ^dans la vente un grand cadre brun représentant des fleurs comme posées au
^^l hasard sur un fond gris et un Centaure h la mine de plomb. i> — Le présent
dessin est une première. pensée qui n'a pu être réalisée; mais déjà l'on y voit
l'impétueux élan du Centaure, qui est l'idée génératrice de ce chef-d'œuvre.
Seulement, au lieu de le présenter de face, Delacroix l'a jeté dans la direction opposée, ce
qui lui a fourni le grand et beau geste du bras droit. — \'oirà l'année 1S62.
N"^ 845, 846: Ovide chez les barbares
.'S^ 1° Croquis à la mine de plomb. —
É|j H. oi^ogo, L. o^i^o. — Voir la com-
£i^ position rectangulaire aux années iSSg
f^>'^ et 1862.— App'artient à M. A. Robaut.
^\\W ~ ■'^°" catalogué par M. Moreau.
t^7 2" Dessin à la mine de plomb. — H.o"'2 3,
L. o"3o.— Reproduit en fac-similé et
publié, par A. Robaut, dans les mêmes
dimensions. — Appartient également
à M. A. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
Le second dessin n'apporte d'autre variante au pendentif qu'une simplification des mouve-
ments de terrain à gauche, et, par suite, un exhaussement de la chaumière. Le premier,
au contraire, présente une composition entièrement différente. — Voir h l'année 1859.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
N" 847 : Ovide chez les barbares
Toile. — H. o'"24, L. o"'3o. — N° 24 de la Vente posthume : 1,020 fr. à M. Thoré.
— Voir le n" 900. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 848 : Hésiode et la Muse
Toile. — H. o"'24, L. o'"3o. — N° 19 de la Vente posthume : 1,980 fr. à M. Piron.
— -Voir le n° 901. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 849 : Hésiode et la Muse
Pastel. — N° 281 de la Vente posthume : ^So t'r. à M. Piron. — Non catalogué par
M. Moreau.
N""" 850, 8^1 : Hésiode et la Muse. — Variante
1° Aquarelle. — H. o"^23, L. o"'29. — Legs de Eugène
Delacroix à M. Dauzats. • — Vente Dauzats : 5oo fr. —
Appartient à M. Christophe. — Voir le n° 901. — Non ca-
talogué par M. Moreau.
2°Dessin à lamine deplomb. — N°27i delaVente posthume:
440 fr. à M. Dauzats. — Non catalogué par M. Moreau.
Le groupe des deux figures qui occupent le côte' gauche de la
composition n'a pas été introduit dans le pendentif, où le mou-
vement des terrains conduisant à l'horizon est aussi plus compli-
qué. La peinture de la bibliothèque de la Chambre des députés
ne perd rien à cette suppression. L'isolement ajoute plutôt de la majesté au groupe formé
par la belle Muse, same, vigoureuse, aérienne cependant, qui suspend sa grâce exquise
au-dessus du poète endormi dont elle caresse le front d'une main divinement légère. Mais
les petites figures épisodiques, qui eussent pu diminuer le caractère d'une peinture de
grandes dimensions, sont parfaitement à leur place dans le cadre restreint d'un dessin ou d'un
tableau de chevalet. — Notre cliché reproduit l'aquarelle.
N" 852 : Adam et Eve
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"22, L. o™26. — N" 270 de la Vente posthume :
245 fr. à M. Ch. Desavary. — Reproduit en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes
dimensions. — Voir le n° 902. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est la même composition que dans l'esquisse suivante.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N" 8^3 : Adam et Eve
propre à exécuter
Toile hexagonale. — H. o'"2i, L. o'"25. — Signé à gauche. —
Appartient à M. de Joly. — Non catalogué par M. Moreau.
Sans changenient. — Le nom de M. Andrieu, que nous citerons tout à
l'heure parmi les jeunes gens qui fréquentaient l'atelier de Eugène
Delacroix, rue Neuve-Guillemin, paraît pour la première fois dans
les Lettres en 1844, le 12 août. Le maître le recommande à M. de
l'Espinasse, qui était député de la Haute-Garonne. « Monsieur, le jeune
Andrieu, qui m'a remis cette lettre que vous voulez bien m'adresser,
mérite tout à fait l'intérêt que vous voulez bien lui porter. Il est un
des élèves les plus assidus de mon atelier, et je le crois tout à fait
convenablement une copie pour le Ministère. »
N° 854 : Adam et Eve. — Ébauche en hauteur
Toile de quarante, de forme rectangulaire. — Appartient à
M. Gérard. — Non catalogué par M. Moreau.
Sans variante. — A cette époque, Delacroix avait un atelier d'élèves
qu'il avait ouvert en 1 838, rue Neuve-Guillemin, et qui fut, en 1846,
transféré rue Neuve-Bréda. La rue Neuve-Guillemin a disparu dans le
percement de la rue de Rennes, au passage de la rue du Vieux-Colombier.
Parmi les élèves qui fréquentaient cet atelier se trouvaient MM. Joly-
Grangedor, qui, plus tard, se consacra lui-même à l'enseignement, Saint-
Marcel, Niel, Eugène Lambert, le peintre des chats, Bida, qu'il suffit de
nommer, Bauderon de Vermeron, qui ouvrit plustard un coursmondain
d'histoire de l'art, A. de Taverne, qui dirige.a \e Journal des Demoiselles,
Th. Véron, Maurice Sand, Andrieu, Lassalle-Bordes, de Ferrussac,
de Serres, Valmore, Gautheron, Garipuy, E. Leygue, etc., qui ont eu dans l'art des fortunes
inégales. D'après ce que nous en dit M. Bida, l'eftort principal de l'enseignement de Eugène
Delacroix portait sur l'ordonnance de la composition.
N" 85^ : Adam et Eve
Indication à la mine de plomb. — H. 0^24, L. 0^19. — Vente
posthume. — Non catalogué par M. Moreau.
La composition définitive n'a plus rien de commun avec cette première
pensée qui, bien que tracée d'une main puissante et dramatique, ne
• >y sort point cependant des prévisions faciles. C'est un bien beau mouve-
y''i ment pourtant, et profondément tragique, que celui du premier
\ homme, avançant, d'un pas hâté par le fouet du glaive de l'archange,
les bras tombants, prêt à serrer encore d'une étreinte de pardon et
d'amour, la main de la coupable. Et son attitude, h elle aussi, est singu-
-^- lièremeut émouvante, en sa confusion qui détourne ses regards de ceux
de l'époux, en sa pudeur qui ramène sa droite vers son sein pour le voiler. Cela touche
notre humanité jusqu'à l'àme.
N" 856 : La captivité a Babylone
Aquarelle. — N" 279 de la Vente posthume : 640 fr. à M. Piron. — Voir le n° goS.
— Non catalogué par M. Moreau.
C'est la même composition que dans le dessin suivant.
N° 857 : La captivité il Babylone
h^S^^'-
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"22, L. o"26. — Repro-
duit en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimensions.
— Appartient à M. Philippe Burty. — Cat. A. Moreau,
p. 323.
s. '^/iCC^-^-fc^K^.X--/' Les différences entre le pendentif et le dessin sont insignifiantes.
x^ (S!3-S~) // / L'arbre est moins robuste, étend moins loin ses rameaux; la harpe
des filles de Sion n'y est pas encore suspendue; l'enfant nu qui se
presse contre sa mère n'est point posé dans la même attitude, qui,
vj.^'-uc»-' plus allongée ici par le mouvement du bras et de la jambe, a plus
^. •' de grandeur. A étudier ces dessins à la mine de plomb d'une si noble
simplicité, il me paraît évident qu'ils sont postérieurs à l'exécution des pendentifs et qu'ils
nous en donnent la svnthèsc épurée. J'y veux voir, h quelques détails près, la formule
suprême, méditée,, corrigée, de ces grandes pensées décoratives.
N° 8^8 : La mort de saint Jean- Baptiste. — Variante
Toile de forme rectangulaire. — H. o'"56, L. o'"46. — Photo-
graphié par Braun. — Exposition d'Alsace- Lorraine, 1874. —
Appartient à M. Lambert Sainte-Croix. — Voir le n" 904. —
Non catalogué par M. Moreau.
La variante, ici, est tellement importante, que l'on peut considérer
l'œuvré comme entièrement nouvelle. La scène, au lieu de se passer
dans une basse-fosse d'un caractère vague, s'encadre dans l'architec-
ture sévère d'une prison, percée au fond d'un soupirail cintré, garni
de barreaux, où apparaissent des tètes de curieux. La figure d'Héro-
diade, avec quelque ressouvenir de mademoiselle Rachel, est beau-
coup plus élégante et légère que dans le pendentif, où elle affecte une
certaine raideur sous sa lourde coiffure à la Livie. Il n'y a guère que
le bourreau que je trouve d'un moindre style dans le tableau. Il a perdu, à être présenté de
face, la tournure et le grand style héroïque que l'artiste lui avait donnés dans le pendentif par
la belle flexion du haut du corps d'avant en arrière. Le pendentif, pourtant, montrait un
bien joli détail de réalité dans la façon toute simple et naïve dont le bourreau a jeté sur la
barrière de la basse-fosse le manteau qui pouvait le gêner dans l'accomplissement de son
œuvre sinistre. Ce pendentif et quelques autres auraient été peints d'après des croquis ou
des esquisses par le praticien. Dans son étrange lettre h M. P. Burty, M. Lassalle-Bordes
donne comme de sa main : Mort de Pline, Hérodote, Bergers chaldéens, Sénèque, Numa et
Egérie, Mort de saint Jean-Baptiste, Adam et Eve, Captivité à Babylone, Ovide, Hésiode.
i844
l.ŒL"\RE DE DELACROIX
223
N""" 8)9, 860, 861 : L:i mort de saint Jean-Baptiste
>0
1 JA
1° Croquis à la mine
de plomb. — H.o"'28,
■ •f&yrTfi ■' j^\ ^- °"'- ' • — Vente pos-
\V'\ '«(W Ir-W^''^""""^- ~ ^°n catalo-
il4-^_^'M^^^" gué par M. Moreau.
viÉ^ù" 2° Dessin à la mine de
plomb. — Format in-
M| \-is^ quarto. — N" 273 de la Vente posthume:
220 fr. à M. Bornot. — Appartient à M. Por-
lier-Bornot. — Non catalogué par M. Moreau.
3° Dessin à la mine de plomb. — A M. Chenavard. —Non catalogué par M. Moreau.
Les deux derniers dessins ne sont que des recherches qui conduisent à la composition qui
nous est maintenant connue. Le premier, au contraire, est absolument nouveau et superbe
en ces quelques traits d'une élégance florentine.
N° 862 : La drachme du tribut
Toile. — H. o'"24, L. o'"3o. — N° 23 de la Vente posthume : j5o fr. à M. Philippe
Rousseau. — Voir le n° qoS. — Non catalogué par M. Moreau.
N°^ 863,864: La drachme du tribut
■mÉ&>$iM
1° Dessin à la mine de plomb. — H. o"'24,
L. o™3o. — Reproduit en fac-similé par
A. Robaut dans les mêmes dimensions.
— N° 274 de la Vente posthume : iSofr.
à M. Robaut. — Cat. A. Moreau, p. i36.
2° Dessin à la mine de plomb. — Partie
du n° 286 de la Vente posthume (deux
feuilles) : à M. J. Léman. — Vente
J. Léman. — Appartient à M. le comte Doria. — Non catalogué par M. Moreau.
Dans le premier dessin, d'un si beau trait, la variante est à peine sensible; il n'y a qu'un peu
plus d'écartement entre les deux personnages de droite, et le dessin y gagne. Dans le second,
au contraire, il y a une addition, que le maître n'a d'ailleurs pas conservée dans le pendentif,
celle de l'enfant nu, vu de dos, au premier plan et qui regarde avec un geste d'admiration si naïf.
N'' 86) : Numa et Égérie
Toile. — H. o™2 6.
— Voir le n'' 906.
L. o">3o. — N° 26 de la Vente posthume: 540 fr. a M. Normand.
— Non catalogué par M. Moreau.
224
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
N" 866 : Numa et Egérie
Toile grisaille. — H. o"'24, L. o"'28. — N° 276 de la Vente posthume : 900 fr. à
M. Haro. — Vente Carlin, 29 avril 1872 :4,ioo fr. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 867 : Numa et Égérie
Dessin à la mine de plomb. — H. o"*24, L. o"'3o. — N° 276 de la Vente posthume :
240 fr. à M. de Plaignes. — Vente J. Léman. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 868 : Lycurgue
Toile. — H. o™2_i., L. o"^3o. — N° 20 de la Vente posthume : 820 tr. — Appartient
à sir Frederik Leighton. — Voir le n° 907. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 869 : Lycurgue
Toile rectangulaire. — H. o"32, L. o"'39. — Signé au
milieu en bas. — Appartient a M. Donatis. — Non cata-
logué par M. Moreau.
Le motif est repris sans variante. La transformation de l'hexagone
en rectangle a seulement imposé quelques additions sans impor-
tance, telles que le prolongement du trépied, deux vases placés
au bas du siège élevé où trône la Pythie et une légère différence
dans le mouvement des jambes de Lvcurgue, qui gravit ici la
marche du petit autel des sacrifices devant lequel, dans le pen-
dentif, il se tient immobile. — Ce sujet fut peint en 1842, ainsi
otfert à Th. Thoré pour la Société des gens de lettres.
N° 870
Lycurgue
Pastel,
lettres.
Offert, en 1842, à Th. Thoré, pour un album de la Société des gens de
Non catalogué par M. Moreau.
N" 871 : Démosthènes
Toile. — H. o"'24, L. o'"3o. — N" 22 de la Vente posthume : 5oo fr.
— Voir le n" 908. — Non catalogué par M. Moreau.
M. Petit.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
225
N° 872 : Démosthènes
Toile quadrangulaire. — H. 0^46, L. o'"36. — N" 62 de la Vente
posthume : i , i 20 fr. à M. Lecesne. — Voir à Tannée iSSg. — Non
catalogué par M. Moreau.
Nous nous trouvons en présence d'une variante complète du « Démos-
thènes ». Les falaises, les quartiers de grosses roches et les petites
figures qui occupent le côté gauche du pendentif ont disparu et fait
place h une ligne de côtes très abaissées et que dépasse la haute stature
de Démosthènes. Si celui-ci marche sur le rivage à peu près du même
pas et est vêtu à peu près de même, — quoique ici la draperie monte
plus haut sur la poitrine nue, — le mouvement du bras est tout
différent. C'est le bras gauche, au lieu du droit, qui est levé, et celui-ci
retient une autre draperie flottant à l'air, fouettée par le vent de mer, sous un ciel parcouru
par de grandes nuées. Delacroix, en cette variante, a adopté la disposition en hauteur, tandis
que, pour la variante de i85q, il adopta la disposition en largeur. Dans l'un et l'autre cas, la
base de la composition étant plus vaste, le maître a pu donner plus d'étendue à la mer qui
déferle à longs plis sur la grève et ajoute plus d'ampleur à la scène.
N" 873 : Cicéron
Toile. — H. o'"24, L. o™3o. — N° 21 de la Vente posthume : 1,540 fr. à M. Stevens.
— Voir le n° 909. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 874 : Cicéron
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"22, L. o"'26. — Repro-
duction en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimen-
sions. — Appartient à M. Burty. — Non catalogué par
M. Moreau.
Le dessin ne diffère en rien du pendentif, qui est de ceux que Dela-
croix peignit entièrement de sa main. Le 5 novembre 1842, il écrit
à l'un de ses praticiens : a J'ai presque terminé mes figures pour la
Chambre des députés; mais vous ne serez pas inutile pour y mettre
surplace quelques touches. » De ce passage, il faut conclure que les
pendentifs furent peints à l'atelier. 11 ajoute : « Je serai, je crois, aussi obligé de faire moi-
même les masques, attendu que Delestre ne m'en paraît pas assez capable. » Nous publions
plus loin quatre de ces masques.
N" 87^ : Cicéron
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"2;
3oo fr. — Appartient à M. Christophe.
L. o"'26. — N" 272 de la Vente posthume:
- Non catalogué par M. Moreau.
22b
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
N° 876 : Hérodote
Dessin à la mine de plomb. —
— Appartient à M. Choquet.
H. o'"2i, L. 0^24. — Vente posthume; vente Forget.
— Voir le n° 910. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 877 : Hérodote
Pastel. — H. ©'"ai, L. o'"26. — N° 285 de la Vente posthume : 3iofr. àM. Lauvech.
— Non catalogué par M. Moreau.
N" 878
Les bergers chaldéens
Dessin à la mine de plomb. — H. o"'2i, L. o'"26. — Appartenait
à M. Riesener. — Voirlen^gii. — Non catalogué par M. Moreau.
En ce projet, d'un si beau dessin, très épuré, les deux figures princi-
pales sont plus rapprochées l'une de l'autre que dans la composition
définitive. La forme des collines qui limitent l'horizon est très diffé-
rente. En les supprimant, ou tout au moins en les abaissant beaucoup,
et en les rejetant à droite et h gauche, l'artiste a donné plus de gran-
deur et de profondeur à l'œuvre. C'est en vue du même résultat qu'il
a fait disparaître aussi le joli groupe de figures que l'on voit ici à un plan éloigné. Si char-
mant qu'il fût, il avait l'inconvénient de distraire l'attention du sujet principal, qui prend
dans son isolement un caractère en quelque sorte religieux d'adoration solennelle.
N° 879
Les bergers chaldéens. — Ébauche
Toile quadrangulaire. — H. 0^45, L. o'"38. — N° 120 de la Vente
posthume : 100 fr. à M. Arosa. — Vente Arosa, 1878 : j5 fr. —
Non catalogué par M. Moreau.
Lorsque Eugène Delacroix a repris les compositions des pendentifs pour
leur donner la forme rectangulaire des tableaux de chevalet, il a indifTé-
remment adopté tantôt la disposition en hauteur, tantôt la disposition en
largeur. Cette dernière est cependant beaucoup plus fréquente. — Il n'y
a de variante essentielle que dans l'attitude de l'homme couché. Le pen-
dentif le montre allongé à plat ventre, le menton soutenu par le poing ; ici
dans une attitude pénible qui convient mal aux longues contemplations.
N° 880 : Les bergers chaldéens
Toile. — H.o'"24, L. o"'3o. — N" 17 de la Vente posthume : 1.14 fr.
Non catalogué par M. Moreau.
à M. Piron. —
■844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
227
N° 881 : Les bergers chaldéens
PasteL — H. o'"2i, L. o'"26. — N° 280 de la Vente posthume
Louvancourt. — Non catalogué par M. Moreau.
610 fr. à M. de
N°^ 882, 883 : Sénèque. — Esquisse
i°Toile. — H. 0^27, L. o™2o. — Photolithographié par Arosa
dans les dimensions de: H. o"M2o, L. o'"og7. — Vente G. Arosa,
1878 : 6o5 fr. à M. Breysse. — Non catalogué par M. Moreau.
La disposition en hauteur, en ce motif, était tout indiquée. Il suffit de
tracer deux verticales à la limite des figures qui sont debout pour
retrouver le groupe essentiel. Les personnages qui se lamentent, dans la
partie latérale à droite du pendentif, n'ajoutent au caractère tragique
de l'œuvre qu'un intérêt de second ordre qui a sa valeur, sans doute,
une valeur pittoresque, il est vrai, plutôt que morale, mais, au point
de vue pittoresque, absolument nécessaire, ainsi que la draperie sus-
pendue pour remplir le vide de la composition en ce lieu. Eugène Dela-
croix, d qui la li-uondite était si facile, n'a jamais reculé devant de tels sacrifices.
2° Pour la noble figure du Sénèque, Delacroix s'est beaucoup inspiré de la statue en marbre
de l'esclave noir qui est au Louvre, et dont le maître a fait un dessin in-folio vivement senti.
Ce dessin, provenant de la Vente posthume, appartient à M. A. Robaut. ■ — Voir le n° 912.
N° 884 : Sénèque. — Fragment
Toile. — H. o"'47, L. o"6o. — Vente Arosa, février 1878 :
60 fr. à M. Hazard. — Non catalogué par M. Moreau.
C'est un simple trait nu bistre avec quelques hachures, une étude pour
l'agencement des bras droits de Sénèque et de l'esclave qui vient de
lui ouvrir la veine. Si l'on prenait au pied de la lettre les Notes com-
muniquées à M. Philippe Burtv par M. Lassalle-Bordes pour la seconde
édition des Lettres, il semblerait qu'à l'exception de cinq des penden-
tifs, toute la décoration des bibliothèques du Luxembourg et de la
Chambre des députés a été peinte par Pierre, Paul, Jacques, Jean, et tels autres praticiens
non moins illustres, et surtout par M. Lassalle-Bordes, fort occupé, paraît-il, à réparer les
maladresses du maître. Le 0 Sénèque » serait l'œuvre d'un « peintre amateur, M. Planet, de
Toulouse ». On prête à M. Lassalle-Bordes des forfanteries de parole que ne dément pas,
malheureusement, le ton de ses notes. Il n'est donc pas sans intérêt de publier une étude qui
permet de croire que Delacroix est bien pour quelque chose dans le « Sénèque ».
N° 885 : Sénèque. — Esquisse
Toile. — H.
de Laage. —
Voir
L. ,
le n'
)"'27. — N" 18 de la Vente posthume : 700 fr. à M. le baron
912. — Non catalogué par M. Moreau.
îiS
L'ŒUVRE DE DELACROIX
.844
N° 886 : Sénèque. — Esquisse
Croquis divers à la mine de plomb. — Vente posthume, à M. Robaut. — Voir le
n° 912. — Non catalogué par M. Moreau.
N'' 887 : Socrate
Pastel. — H. 0^24, L. o™3o. — N° 283 de la Vente posthume : 210 fr. à M. Vau-
zelard. — Voir le n" gi3. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 888 : Mort de Pline l'ancien
Toile. — H. o"24, L. o^So. — N° i5 de la Vente posthume : 740 fr. à M. Aubry.
— Voir le n° 914. — Non catalogué par M. Moreau.
N'' 889 : Aristote
Toile. — H. o™24, L. o™3o. — N° 14 de la Vente posthume : 725 fr. à M. Tesse.
Voir le n° 91 5. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 890 : Aristote
ment. Délai
outre, il a
Dessin à la mine de plomb. — H. o"'2i, L. o"'26. — Vente
posthume, partie du n° 290 : 85 fr. à M. A. Robaut. — Repro-
duit en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimensions.
— Il existe un autre fac-similé inédit par Charles Desavary. —
Voir le n° 90. — Cat. A. Moreau, p. i36.
En se reportant h la composition définitive, on remarquera que la
principale variante consiste dans la disposition des figures accessoires
qui occupent h droite l'angle du pendentif. Dans le dessin, il y en a
trois au lieu de deux, et, par cela même, elles se groupent diflérem-
roix a éliminé celle qui se trouve coupée en hauteur à la limite du dessin; en
vêtu l'homme vu de dos, dont le profil pouvait d'ailleurs prêter à la critique.
N" 891 : Hippocrate
Toile. — H. o'"24, L. o^So. — N" 16 de la Vente posthume : 400 fr. à M. Normand.
— Voirie n° 916. — Non catalogué par M. Moreau.
iS44
L'ŒUVRE DE DELACROIX
22q
N*" 892, 893, 894, 89^ : Quatre mascarons
1° Tète d'hommcgravc barbu. — Dessina la scpia et à l'huile.
— H. o'"45, L. o'"35. — Appartient, ainsi que les trois autres,
à M. Fabius Brest. — Non catalogué par M. Moreau.
2" Tète de jeune femme. — Même procédé, mêmes di-
mensions. — Reproduit en photogravure pour les Dessins
de décoration édités par A. Quantin, dans les dimensions
de : H. o™225, L. o"'2o5.
3° Tête de jeune faune riant. — Mêmes dimensions.
4° Tête de vieux silène barbu. — Mêmes dimensions.
Ces dessins, sur papier contre-colle' sur carton, ont été recueillis
par M. Fabius Brest dans les débris de l'atelier du maître, qui
furent vendus rue de Furstenberg, n" 6, après la Vente posthume.
"" Le procédé est d'une simplicité extrême : le ton chaud du papier
goudron fournit une demi-teinte puissante; les ombres sont obtenues par un lavis de sépia
rehaussé d'huile. Les hachures, largement tracées, accentuent le caractère de la forme et lui
donnent un relief saisissant. Les ligures sont éclairées par dessous. Tous ces types ont été
inspirés au maître non par des documents tout faits, mais contrairement à cette pratique
commode, il les a cherchés sur nature parmi des paysans de Frépillon et de Champrosay.
BIBLIOTHÈQUE DU PALAIS BOURBON
Peintures décoratives exécutées au Palais Bourbon,
.1 Paris. — Le catalogue A. Moreau contient, aux
pages 212 et 21 3, la simple nomenclature des vingt-
lIcux sujets.
La décoration de cette bibliothèque, commencée en i83S,
tut terminée en 1847. Nous en réunissons ici tous les
motifs. Elle se compose de deux hémicycles et de cinq
coupoles divisées chacune en quatre pendentifs.
Les hémicycles sont peints sur le mur enduit d'une pré-
paration h la cire. Dans le principe, ils devaient être peints
sur toile et marouflés ensuite; le premier sujet, l'Orphée,
fut exécuté ainsi, mais des tassements s'étant produits dans
la maçonnerie, la toile se rompit et Delacroix dut re-
commencerson travail. Ils représententdeuxdates extrêmes
de la civilisation : i" Orphée apportant la civilisation
à la Grèce; 2° Attila ramenant la barbarie sur l'Italie
ravagée. Comme ils semblent symboliser, par ces deux
grands faits de l'histoire, l'éternelle lutte du bien et du
mal, de la paix et de la guerre, on leur a donné le nom
d'hémicycle de la Paix et d'hémicycle de la Guerre.
Les coupoles sont peintes à l'huile sur toile marouflée sur enduit. Chaque coupole se com-
pose de quatre pendentifs et comprend par conséquent quatre sujets, que le maître a choisis
dans un même ordre d'idées : i" la Poésie; 2" ta T/iéologie ; 3" la Législation ; 4" la Phi-
losophie; 5" les Sciences. Les pendentifs sont reliés entre eux par une bande d'ornements
et séparés par des cartouches décorés de mascarons tous différents. Il y a vingt mascarons.
On en a vu plus haut quelques-uns que nous reproduisons d'après les dessins du maître.
23o L'ŒUVRE DE DELACROIX
En février iSSi, le bureau de la Chambre des députes nommait une commission « chargée
d'étudier les mesures qu'il pourrait y avoir lieu de prendre pour préserver les peintures
de Eugène Delacroix des dégradations qui paraissent les menacer «.Cette commission était com-
posée de MM. de Mahy, Madier de Montjau et Margaine, questeurs ; Turquet, Noël Parfait,
Lockroy et Antonin Proust, députés ; Ballu, Bœswilwald, Charles Garnier, de Joly et Vau-
dremer, architectes ; Pierre Andrieu, Etienne Arago, Barbet de Jouy, Philippe Burty,
Galland et Charles Blanc. Après avoir examiné l'état général de la décoration dans les hémi-
cycles et les pendentifs delà bibliothèque, elle a prié MM. Ballu, Bœswilwald, Garnier et Vau-
dremer, auxquels était naturellement adjoint l'architecte du monument, M. de Joly, de
rechercher les causes des dégradations dont les peintures de Eugène Delacroix semblaient
menacées, et d'indiquer les moyens de remédier au mal ou, tout au moins, d'en arrêter les
progrès. La commission a chargé en même temps MAL Andrieu, Etienne Arago, Barbet de
Jouy, Burty, Galland et Charles Blanc, de constater tous les dommages qu'auraient pu
éprouver les peintures de Eugène Delacroix. Les rapports des deux sous-commissions ont été
faits, l'un par M. Charles Garnier, l'autre par M. Burty. Le premier, parlant au nom des
architectes, a signalé comme étant les causes des lézardes remarquées dans les hémicycles,
le tassement des maçonneries et le jeu des constructions en fer, dont les armatures ont
repoussé l'enduit en s'oxydant, ou bien déterminé une rupture dans ces enduits, en fléchis-
sant sous le poids de la voûte. Après avoir proposé les moyens pratiques de s'opposer aux
tassements et aux fléchissements ultérieurs, M. Garnier se montre assez peu effrayé des alté-
rations qu'a subies la peinture du maître et des fissures qu'elle présente en plusieurs
endroits. Ces accidents, si on les empêche de s'aggraver, lui paraissent même donner parfois
un certain charme et un certain caractère à la décoration murale, et il cite Michel-Ange
comme ayant pris plaisir à feindre des crevasses dans le plafond de la chapelle Sixtine. 11
pense que les peintures exécutées sur toiles et marouflées sur les voûtes n'ont rien à craindre
des légers tassements qui pourraient encore se produire », et il ajoute que « les préoccupa-
tions que l'on a pu concevoir à leur égard n'ont pas de raison d'être ». L'honorable rap-
porteur conclut que, pour ce qui est des fissures, « bien que cet effet soit fâcheux, il ne doit
rien être tenté ni pour y remédier au présent, ni même pour l'arrêter à l'avenir. Il faut donc
se résigner et laisser les coupoles en l'état actuel ». Le rapport de M. Burty ne témoigne
pas de la même sérénité. Les termes en sont beaucoup moins rassurants. La sous-commission
a regardé de très près aux demi-coupoles auxquelles on accède par une galerie ; elle a ensuite
examiné, lorgnettes en main, les dégradations des pendentifs, dont la plupart d'ailleurs sont
visibles du sol même, et elle a constaté les fentes qui se sont produites dans les murs con-
caves des hémicycles, les écailles qui s'en sont détachées et qui, en laissant reparaître l'en-
duit, forment des taches blanches, les boursouflures qui se manifestent dans les toiles marou-
flées sur les pendentifs, les chancis qui appellent un nettoyage, les retraits de la toile qui
demandent un léger raccord. Toutes ces détériorations ont été soigneusement décrites dans
le rapport très bien motivé de M. Philippe Burty, qui conclut ainsi : « A l'unanimité des
membres présents dans la sous-commission de peinture, dit M. Philippe Burty, nous
croyons que les graves altérations qui avaient évefllé l'attention du bureau de la Chambre
sont de nature à légitimer l'inquiétude, à provoquer de prompts secours. Le travail de Eugène
Delacroix, entrepris en 1844, terminé en 1847, honore au plus haut degré la France du
xix" siècle. Il témoigne de lectures considérables et bien coordonnées, d'un goût supérieur
dans le choix et la variété des épisodes, d'une originalité magistrale dans les moyens d'exé-
cution, d'un instinct des ressources picturales dans la décoration, qui placent notre école au
pair de ce que le passé avait produit de plus distingué. L'ensemble de ces peintures, qui por-
tent en elles le charme de l'enseignement, est comme un dépôt sacré sur lequel la France
doit veiller jalousement. Il n'est point de sacrifices qu'il ne faudrait faire pour le transmettre
intact aux générations qui vont suivre, et qui acclameront le mouvement intellectuel et
artistique de ce siècle. » La commission, après avoir entendu la lecture des deux rapports, a
décidé que les travaux de réparation demandés par M. Garnier pour le bâtiment architec-
tural seraient effectués ; elle a donné en même temps satisfaction au rapport de M. Philippe
Burty, en ce qui concerne les mesures à prendre pour la conservation des peintures. —
La vue d'ensemble de la Bibliothèque reproduit un dessin de M. Fichot [Illustration, 1847).
■ 844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
N"" 896 : Hémicycle de la Paix
Orphée vient enseigner aux Grecs les arts de la Paix
Peinture à la cire. — Dimension au développement du grand cintre, lo^gS; dia-
mètre, 7™35. — Cat. A. Moreau, pp. 212, 3o8.
,::^^
L'idée qui a présidé aux décorations du Palais Législatif offre l'intérêt d'une large concep-
tion historique, qui se résume par les termes opposés dans les deux hémicycles, représentant,
l'un « le Berceau ■>, l'autre, « le Tombeau de la civilisation antique ». Ces deux compositions
ont été choisies par le peintre avec un art consommé, s'il a voulu prouver la souplesse, la va-
riété et rétendue de son propre talent, interprétateur et pittoresque. Le premier hémicycle
montre Orphée venant policer les Grecs encore barbares et leur enseigner les arts de la paix.
Dans l'éther d'un ciel élyséen, inondant la nature de clartés ravonnantes, Minerve et Cérès,
les chastes divinités, mères de l'Abondance et des Arts, planent d'un légervol sur un groupe
de pâtres à demi-nus, de chasseurs ployant sous le gibier, de centaures haletants de leurs
courses aux collines prochaines, de femmes, d'enfants, de nymphes encore humides de la
molle étreinte des fleuves, d'animaux eux-mêmes qui se pressent, avides d'entendre le verbe
du chantre inspiré qu'ils couvrent de leurs regards. Ses paroles coulent douces comme le
miel sur les lèvres du divin poète, leur chaleur pénétrante gonfle ces cœurs grossiers, leur
sève parfumée fait éclore déjà sur le front dur des nomades les jeunes fleurs de l'intelligence.
Aux abords de ce groupe, les premiers essais d'agriculture sont tentés, les génisses courbent
sous le joug leur nuque docile, et prêtent aux mains des femmes leur pis gonflé de lait.
D'un autre côté, quelques hommes, se répétant les leçons du maître, cherchent à lire, dans
les entrailles fumantes des victimes, l'immédiat avenir de la tribu dont Orphée chante la
gloire lointaine sur sa lyre aux accents ineffables. — Voir les n<" 83o, 83i, 832, 833.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1,^44
N" 89- : Hémicycle de la Guerre
Attila et les barbares foulant aux pieds l'Italie et les Arts
Peinture à la. cire. — Dimensions au développement ciu grand cintre : io'"ç
diamètre : j"''35. — Cat. A. Moreau, pp. 212, 3o8, 322.
'î'- ^0.
Par flots, par torrents, par trombes, au galop furieux Je leurs chevaux sauvages, aux lueurs
des incendies et des éclairs, les Huns descendent du haut des Alpes, massacrant, pillant, brûlant,
poussant devant eux, comme un troupeau, les vieillards, les femmes et les enfants échappés
au carnage. Eperdus, les fuyards hâtent le pas vers la mer, qui étend à perte de vue son impla-
cable azur; ils fléchissent sous le poids des dieux domestiques, des débris de l'art, des ma-
lades, arrachés aux flèches ou à la hache des envahisseurs. Attila, féroce sur son cheval aux
crins incultes, à l'œil curieux, et qui lui-même prend part à la furie de l'action sous le cava-
lier aux veux de flamme. — Attila domine toute l'action avec une brutale et superbe violence.
Magnifique sous sa peau de loup, c'est la sublime image du roi barbare. Orphée — le calme,
les parfums agrestes, la douceur lactée; Attila — l'ivresse du sang, l'horreur et l'épouvante!
— Le rayon et la foudre! Entre ces motifs, le contraste est tellement grand, qu'une glorieuse
coquetterie d'artiste ne me paraît pas étrangère à ce hardi rapprochement; coquetterie légi-
time, s'il en est, noble ambition, d'ailleurs, que celle qui consiste à se poser à soi-même de
tels problèmes, où le cerveau joue un rôle puissant, où la main doit être si ferme et en même
temps si souple, qu'elle sache renoncer à ses prestigieux caprices, et suivre, traduire fidèlement
les plus fines nuances de la pensée maîtresse. — Voir les n"^ 834, 835, 836, 837.
Nous avons omis de dire que la restauration des peintures de la Bibliothèque fut confiée à
M. AnJrieu, qui l'exécuta avec le plus grand soin.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
233
N°- 898, 899, 900, 901 : Première coupole. La Poésie
Peintures à l'huile sur toile marouflée. — Dimensions, en diamètre vertical : 2^21 ;
en diamètre horizontal : 2"'9i; en diagonale oblique : i"^6-j . Les côtés, dans Tordre
des dimensions, mesurent : i™82, i^'^-jb^ i"o6,o"65. — Cat. A. Moreau, pp. 2i3,3o9.
1" Premier pendentif. — Alexandre et les poèmes d'Homère. —
L'hommage rendu par un héros au génie d'un poète. «Alexandre,
après la bataille d'Arbelles , faisant enfermer dans une cassette
d'or les poèmes d'Homère «, inspirera de nouveau Delacroix; il
fera de ce sujet le motif d'une des voussures de la croisée de la
bibliothèque du Luxembourg (voir à l'année iSqS). — n Chose
extraordinaire, tant de tableaux, si variés d'aspect, si divers par
les sentiments qu'ils manifestent, par des figures appartenant aux
races les plus diflerentes et à des époques fort éloignées l'une de
l'autre, tant de tableaux ne forment pas, comme on pourrait s'y
attendre, une bigarrure. Tous les ensembles séparés ne composent
qu'un seul et indissoluble ensemble. L'imagination la plus abondante, la plus fiévreuse qui
fut jamais, s'est enchaînée pour se soumettre à un ordre régulier, à une secrète pondéra-
tion. L'enthousiasme du peintre a été contenu, refréné par la sagesse du poète recueilli. Rien
ne détonne, tout se tient à merveille, et pourtant quel intervalle à franchir entre les pen-
dentifs de la Poésie, et le dernier hémicycle correspondant à celui où les arts de la paix sont
apportés à la Grèce, au son de la lyre, par Orphée ! » (Ch. Blanc.) — Voir les n"' 838, 839.
2" Deuxième pendentif. — L'Education d'Achille. — d L' Education
-fpçax d'Achille est un des morceaux les plus attachants de cette magni-
", '\ fique décoration, de laquelle on a tant de peine à détacher ses
■ N^ regards. Le centaure Chiron, chargé de l'éducation d'Achille, lui
",, y> enseigne à tirer de l'arc et lui montre du doigt la proie qu'il doit
', ,,/ viser. Le jeune héros, monté en croupe sur le centaure, et vu de
dos comme lui, lance une flèche et développe dans son action des
formes juvéniles d'une beauté charmante, qui seraient dignes du
marbre si elles étaient transposées de la peinture dans la statuaire.
Je connais et j'ai bien souvent regardé le dessin au crayon fait
par Delacroix du centaure Chiron et de son élève, et je puis affir-
mer que ce dessin est excellent; qu'd est ferme avec souplesse et qu'il est savant sans
pédantisme. Bien que dénué de son grand moyen d'expression, qui est la palette, Delacroix
nous a prouvé , dans cette première pensée, qu'il n'était pas, comme dessinateur, ce que
l'on croit généralement et ce que nous avions cru nous-même. On voit seulement , en
regardant bien l'esquisse dont je parle, que le peintre l'a crayonnée en projetant de plonger
ses formes dans l'air ambiant. » — Voiries n"' 840, 841, 842, 843, 844, et à l'année 1862.
3" Troisième pendentif. — Ovide che:( les barbares. — Cette œuvre
si mélancolique, où la tristesse et toutes les charités de l'exil sont
si noblement exprimées, remet en mémoire les réflexions d'Eudore
dans les Martyrs de Chateaubriand : 0 Un jour, ayant passé l'Ister
j\ vers son embouchure et étant un peu écarté de la troupe des chas-
" seurs, je me trouvai h la vue des flots du Pont-Euxin. Je découvris
un tombeau de pierre, sur lequel croissait un laurier. J'arrachai les
herbes qui couvraient quelques lettres latines et bientôt je parvins
à lire ce premier vers des élégies d'un poète infortuné. — Mon livre,
vous irez à Rome, et vous irez h Rome sans moi. — Je ne saurais vous
peindre ce que j'éprouvai en retrouvant, au fond de ce désert, le
tombeau d'Ovide. Quelles tristes réflexions ne fis-je point sur les peines de l'exil, qui étaient
les miennes, et sur l'inutilité des talents pour le. bonheur! Rome, qui jouit aujourd'hui des
UH
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
tableaux du plus ingénieux de ses poètes, Rome a vu couler d'un œil sec les larmes d'Ovide.
Ah ! moins ingrat que les peuples d'Ausonie, les sauvages habitants des bords de l'Ister se
souviennent encore de l'Orphée qui parut dans leurs forêts ! Ils viennent danser autour
de ses cendres; ils ont même retenu quelque chose de son langage , tant leur est douce la
mémoire de ce Romain qui s'accusait d'être le barbare, parce qu'il n'était pas entendu du
Sarmate! » (Charles Blanc.) —Voir les n°' 845, 846, 847 et aux années iSSg, 1862.
4" Quatrième pendentif. — Hésiode et la Muse. — Ce pendentif
'^ÎK a été reproduit en héliogravure inédite, d'après un dessin de M. A.
^^A^ Robaut, dans les dimensions de 0™i2i suro'"i45. «Quelle distance
^ ^ morale entre la Muse d'Hésiode et la grande peinture d'Attila qui
"^ ferme le cycle de la décoration ! Le poète desTravaux et des Jours
est endormi, la tête renversée, sa houlette entre ses jambes ; son
troupeau est épars dans la vallée, au-dessus de lui plane sa Muse,
enveloppée dans une draperie que soulèvent avec grâce les souffles
de l'air. Le spectateur reçoit ici une sensation de plaisir et de fraî-
cheur, de félicité et de repos. Là, au contraire, toutes les horreurs
que peut rendre la peinture par les couleurs exaltées du prisme,
sont rendues avec une vibration qui en redouble la violence. » Et Charles Blanc termine sa
remarquable étude par ces lignes : a Oui,, on peut le dire avec résolution, il est bien peu
d'ouvrages qui fassent plus d'honneur à l'École française que les peintures de Eugène Dela-
croix, dans la Bibliothèque des députés, au Palais Bourbon, et rien ne pouvait venir plus à
propos, au point où en sont notre littérature et notre art, qu'un témoignage de sollicitude,
publiquement donné par le bureau de la Chambre, au sujet de ces nobles peintures , dans
lesquelles un artiste, dont l'esprit avait des ailes, a su montrer, non pas cette petite
vérité, prétendue réelle, qui est la prose, mais cette grande vérité d'au delà, qui est la
poésie. » (Charles Blanc.) — Voir les n°^ 848, 849, 85o, 85 i .
N°''902, 903, 904, 905 : Deuxième coupole. La Théologie
Peintures à l'huile sur toile marouflée. — Dimensions, en diamètre vertical : 2'"2i ;
en diamètre horizontal : 2'"9i ; en diagonale oblique : 2'"6j. Les côtés, dans l'ordre
des dimensions, mesurent: i^^Sa, i^jô, i"'o6, o'"65.— Cat. A. Moreau, pp. 213,309.
1» Premier pendentif. — Adam et Ère. — N'est-ce pas un perpétuel
émerveillement que de voir avec quelle ingénieuse variété Dela-
croix fait se mouvoir son dessin dans la monotone géométrie de
ce cadre baroque des pendentifs sans base, assis sur une pointe.
Mais la difficulté n'est-elle pas le meilleur éperon des talents
c-ènéreux? Nous aurons à appeler l'attention du lecteur sur la com-
position en forme de T du n Numa et Egérie » au premier pen-
dentif de la troisième coupole. Dans 1' u Adam et Eve « le maître
superpose trois figures dans une perpendicularité ondoyante en
forme d'S avec la grâce d'un serpent ondulant debout sur^ sa
queue. Je ne voudrais pas affirmer que la pensée de rappeler ainsi
l'image du tentateur s'est formulée avec précision dans l'esprit de Delacroix, peut-être sa main
a-t-elle exprimé le mouvement d'une inconsciente association d'idées errantes en son
cerveau. En tout cas, le rapprochement méritait d'être signalé. Ce qui est également bien
digne de remarque, c'est que le peintre ait réussi h remplir, avec cette perpendiculaire, le
champ d'une toile en largeur. Le secret de cette victoire n'est autre que celui des magies de
sa palette. D'un rayonnement de couleur il emplit et anime l'espace. Posez un tel problème
à l'un de ces peintres qui s'attribuent le privilège exclusif d'être des dessinateurs, il est ab-
solument impossible qu'il en sorte à son honneur. — Voir les n»' 852, 853, 854. 855
2» Deuxième pendentif. — La Captivité à Bahylone. — Ce pen-
dentif a été gravé sur bois en forme hexagonale pour la Gar;ette
des Beaux-Arts du i^'' février 1864, dans les dimensions de o'"o85
sur o"Mo2. Cette gravure a paru encore dans les Beaux-Arts
illustrés du 28 août 1876, et dans les Artistes de mon temps, de
Charles Blanc. — 0 Une famille juive, le père, la mère et un
enfant sont assis dans l'attitude de l'abandon et du désespoir, sur
les bords de l'Euphrate, à l'ombre d'un saule auquel est suspendue
une harpe (super Jlumina Babylonisj. Plus loin, une jeune femme,
couchée sur le ventre, jette un regard fixe vers l'horizon lumineux
où l'on aperçoit la ville de Sémiramis que dévore le sok-il. C'est
encore par le jeu des couleurs, par le contraste des complémentaires que le peintre s'est
procuré les tons incandescents de la lumière lointaine. Il éveille en nous un sentiment de
tristesse par des moyens inattendus, c'est-à-dire en employant les teintes les plus brillantes.
Le soleil est beau, la nature est belle, semblent dire les captifs, mais cette nature et ce soleil
ne sont pas la nature et le soleil de notre patrie. L'effet est à la fois splendide et triste ; il est
mélancolique en pleine lumière ! » (Charles Blanc.) — Voir les n»^ 856, 857.
3" Troisième pendentif. — La mort de saint Jean-Baptiste. — a Si
les pendentifs des cinq coupoles oftVent tous des beautés d'un ordre
supérieur, il en est qui sont plus admirables que les autres ou qui
attirent plus fortement l'attention : la Captivité des juifs a Baby-
lone, par exemple, et la mort de saint Jean-Baptiste. Ici, le précur-
seur gît décapité sur les marches du palais d'Hérode, et une jeune
fille, d'une élégance farouche, vient demander la tète coupée du
saint que lui livre le bourreau, appuyé sur une épée rouge de sang;
le jeu de deux couleurs complémentaires, le jaune et le violet,
engendre une aigreur et comme qui dirait une dissonance mer-
veilleusement sauvée. Une draperie que la danseuse a posée sur la
rampe de l'escalier vient former, par sa teinte violacée, une opposition vive au jaune sali des
murailles de la prison; l'eflèt est sinistre. » Ajoutons à ce qu'en dit Charles Blanc, qu'en cette
toile l'intensité du ton puissamment montée n'est comparable qu'à l'audace de certains rappro-
chements de couleurs, le bleu, le blanc et le rouge du costume du bourreau, par exemple,
qui sont exactement le bleu, le blanc et le rouge de notre uniforme militaire au temps des
buffleteries blanches. Et l'on sait avec quelle unanimité les peintres ont toujours déclaré que
cette combinaison tricolore était anti-pittoresque. Voilà donc la déclaration mise à néant du
coup par le pantalon rouge du bourreau. Que de prétendus principes le génie coloriste du
maître a mis ainsi et glorieusement h néant! C'est toujours l'histoire des quintes successives
reprochées à Beethoven. « Eh bien, moi, je les permets. » — Voir les n"= 858, SSg, 860, 861.
4" Quatrième pendentif. — La Drachme du tribut. — Saint Pierre
trouvant dans un poisson la drachme pour payer le tribut, complète
par un sujet du Nouveau Testament la série des compositions
bibliques personnifiant la Théologie. « Sur toutes ces compositions
plane le génie d'un incomparable coloriste : le dessin, le choix
,^ des formes et des draperies, l'intervention des accessoires, la place
que chaque objet devra occuper sur le théâtre du tableau, tout cela
est subordonné au triomphe de la couleur. Le peintre se ménage
des espaces pour celle qui doit dominer, et il se prépare des pré-
textes pour les échos qui doivent rappeler le ton dominant. Il
obéit, dans la disposition de ses figures, tantôt à la nécessité de
juxtaposer les contraires, tantôt à la convenance de rapprocher les semblables. Mais comme,
après tout, la couleur est, chez Delacroix, son instrument favori pour manifester les sentiments
qu'il éprouve et ceux qu'il veut nous faire éprouver, il se trouve que les sacrifices commandés
par la couleur sont amplement rachetés par l'émotion communiquée à l'âme, au moyen de
l'effet produit sur les yeux. » (Charles Blanc.) — Voir les n«s 862, 863, 864.
236
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
N""" 906, 907, 908, 909 : Troisième coupole. La Législation
Peintures à l'huile sur toile marouflée. — Dimensions, en diamètre vertical: 2"'2r,
en diamètre horizontal : 2"'gi ; en diagonale oblique : l'^Sj. Les côtés, dans l'ordre
des dimensions, mesurent : i"'82, i^jô, i"^o6, o'"65. — Cat. A. Moreau,pp. 2i3, 309.
1° Premier pendentif. — Niima et Egérie. — Ce pendentif a été gravé
à Tcau-forte par L. Flameng, dans les dimensions de o™i46 sur
o"Mq5. — 0 Les choses et les personnes que l'esprit voit surnager
sur la mer des histoires, ont, pour le poète et pour le philosophe,
des dates secrètes qui sont tout aussi justes à leur manière que les
dates véritables, inscrites dans le calendrier des annalistes. En
pensant à la législation antique et aux plus illustres orateurs de
la Grèce et de Rome, le peintre s'est rappelé naturellement Numa
Pompilius et Lycurgue, Démosthènes et Cicéron. Le législateur
de l'ancienne Rome, couché sur la mousse dans un bocage, recueille
les paroles de la nymphe Egérie quia quitté sa grotte et quia
encore un de ses pieds dans l'eau. » Ajoutons à ces" quelques paroles de M. Ch. Blanc,
qu'il y a, même dans l'œuvre du maître, peu de compositions si hardies, une ligne hori-
zontale sur une verticale, un T. La souplesse du modelé intérieur en ces deux figures est telle
qu'elle suffit à masquer la savante rigidité de cette disposition si rare et d'une audace si
singulière. — Voir les n»s 865, 866, 867.
2" Deuxième pendentif. — Lycurgue consulte la Pythie. —
Lycurgue, voulant consulter la Pythie, s'avance vers elle en tenant
une branche de laurier et montrant l'agneau qu'il vient de
déposer sur l'autel. A distance comme de près , l'impression est
saisissante. On peut répéter du « Lycurgue » ce que Ch. Blanc dit du
« Sénèque et du Pline « : « Sans rien savoir encore delà signification ■
du tableau, de la pantomime des figures, de leur rôle , on est pré-
venu de l'émotion qu'on ressentira, de telle façon que le tableau
renversé, la décoration vue à l'envers, produirait déjà l'impres-
sion voulue, ou du moins, frapperait sur l'âme les premiers coups,
comme font ces préludes qui nous préparent à écouter une
mélodie grave ou légère, mélancolique ou superbe, une symphonie funèbre ou un air de
bravoure. » — Voir les n"' 868, 869, 870.
3» Troisième pendentif. — Démosthènes harangue les flots de la
mer. — 0 Démosthènes, s'exerçant aux luttes de la tribune, se
promène sur le rivage de la mer, et il harangue les flots, en
faisant le geste d'un tribun qui apostrophe la foule. La figure de
l'orateur est encadrée dans un petit golfe formé par deux promon-
toires qui laissent voir le ciel de l'Attique. Des Athéniens l'ob-
servent du haut d'un rocher.» On trouvera un peu plus haut, et aussi
à l'année iSSg, les vignettes de variantes où ce très beau motif a
été repris et renouvelé par Delacroix avec cette passion du mieux
qu'il poursuivait sans relâche et sans fatigue dans les sujets qui
avaient une fois fixé sa prédilection. — Dans le dernier pendentif
de cette coupole, le maître a représenté Cicéron dénonçant Verres et montrant au peuple,
qui s'agite sous les portiques du Forum, les vases précieux volés par le proconsul. Nous
donnons cette indication ici, afin de nous réserver au numéro suivant la place nécessaire pour
reproduire les très remarquables observations de Ch. Blanc sur l'ensemble de la deuxième
et de la troisième coupole. Elles sont détachées d'une étude sur les peintures de la Biblio-
thèque du Palais Bourbon, publiée dans le journal le Temps, par Ch. Blanc au moment de
la restauration de cet œuvre. — Voir les n<» 871, 872, et a l'année i85g.
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
237
4" Quatrième pendentif. — Cicéroii accuse Verres. — « Tels sont
les sujets que représentent les pendentifs de la seconde et de la
troisième coupole. A la variété de ces tableaux, correspond -une
prodigieuse variété dans le coloris. Supérieur, si on le considère
seulement comme coloriste, aux grands maîtres qui l'ont précédé,
même aux plus illustres, même h Véronèse, même à Rubens,
Eugène Delacroix, semblable à un chanteur qui posséderait tous
les registres de la voix humaine, monte aux notes les plus aiguës
et descend aux notes les plus profondes. Tandis que Rubens de-
meure toujours lumineux, frais et rose, même lorsqu'il peint les
plus horritsles scènes, celle, par exemple, des damnés précipités en
enfer, Delacroix dispose d'une palette plus riche, plus variée, plus vibrante aussi, plus presti-
gieuse et surtout plus expressive. — Voiries n»' 873, 874,875.
N""'' 910, 91 1, 912, 91 ^ : Quatrième coupole. La Philosophie
Peintures à l'huile sur toile marouflée. — Dimensions, en diamètre vertical : 2'"2i;
en diamètre horizontal : 2^91 ; en diagonale oblique : 2"'67. Les côtés mesurent :
i'"82, i"'76, i'"o6,o'"65. — Cat. A. Moreau, pp. 2i3, 3o8, Sog.
I'' Premier pendentif. — Hérodote interroge les traditions des
Mages. — Voulant écrire le récit des guerres médiques, Hérodote
entreprit de parcourir les contrées où s'étaient accomplis ces grands
événements dont il avait été le témoin. On suppose que l'Egypte
fut le premier objet de ses recherches. Quoique ce pays fût presque
neuf pour les Grecs et que Hérodote y eût tout à découvrir, il vit
tout avec une si merveilleuse perspicacité, le décrivit avec tant
d'exactitude, que les eflforts de la science moderne n'ont eu d'autre
résultat que de constater la justesse de ses observations. Delacroix
nous le montre debout, respectueux, plein cependant d'une noble
assurance, au seuil du temple de Memphis, où l'accueillent les
prêtres égvptiens, dépositaires des traditions de la civilisation la plus reculée. En cet
immenseVravail de décoration, « où chaque image est une pensée, où chaque figure personnifie
un monde», comme le dit excellemment Charles Blanc, Delacroix ne s'est pas outre mesure
embarrassé de couleur locale, de restitution archaïque. Son génie plane au-dessus de ces
douteuses vérités d'archéologue et s'en tient à l'éternelle vérité humaine. — Voir les n»^ 876, 877.
2" Deuxième pendentif. — Les bergers chaldéens inventeurs de
l'astronomie. — C'est en de telles révélations que se manifeste le
génie d'un grand artiste. Sans doute, comme l'a très bien dit
Charles Blanc, le seul énoncé d'un tel ensemble, tel que Delacroix
'm ^ se l'est tracé à lui-même, est « comme un tableau à grandes lignes
Ç*,^_ y?i> de l'histoire universelle, un index du grand livre de l'humanité,
un abrégé encore plus laconique, mais non moins fier que celui de
Bossuet » ; mais ce qui nous frappe le plus en cette conception,
c'est la constante élévation de la pensée. La grandeur morale en
cette invention de l'astronomie, le trait de génie, c'est d'avoir affirmé
si nettement que la science humaine « l'invention » prenait sa
source dans l'admiration des choses créées, dans l'adoration du Créateur. Dans le vaste espace
des grands pâturages, dans le recueillement de la nuit, dans l'universel silence, ces pâtres
tombent prosternes devant l'admirable spectacle du monde stellaire. Ils adorent, ils savent.
<i Os homini sublime dédit, cœlumque tueri jussit. » C'est une incomparable réalisation
pittoresque des paroles du poète latin. — Voir les n°^ 878, 879, 880, 881.
238
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1844
3" Troisième pendentif. — Sénèque se fait ouvrir les veines. —
Etrange différence des hommes et des temps ! Deux princes sont
élevés par deux philosophes, Alexandre par Aristote, Néron par
Sénèque. Le prince grec reste l'ami de son précepteur, s'intéresse
toujours à ses travaux, les encourage, les facilite ; le prince romain
impose maintes bassesses au sien, en fait un très misérable cour-
tisan, et, après l'avoir autant que possible avili, lui envoie l'ordre
de mourir. Sénèque, aussi rhéteur, quoique philosophe, que son
homonvme « le rhéteur », dicte avant de mourir un pompeux
discours à ses secrétaires, puis en stoïcien, tend son bras à l'esclave
qui va lui ouvrir les veines. A mesure que le sang s'écoule de ses
artères, la sérénité, semble-t-il, rentre en son âme, dont les défaillances ne peuvent cepen-
dant faire oublier les mouvements généreux. Il est vieux, veut mourir debout, craint la
défaite de la chair, et à cet effet se fait soutenir. — Voir les n"^ 882, 883, 884, 885, 886.
4° Quatrième pendentif. — Socrate et son démon. — Ce motif a
"X' - ; --"5*^' inspiré à Charles Blanc une de ses meilleures pages : « La tran-
quille méditation du philosophe, le calme qui règne dans son esprit
:::y
-, , 4^,, f^ , -^ -^ ^.s,j sont exprimes, comme 11s le seraient ciie^ Kemuranai, par une
''^^*^ ^''"'►Ji^i ~{f^ peinture en quelque sorte silencieuse. L'artiste nous a transportés
"^ ^^ ' ' *''"»'*»' au bord de l'Ilissus, au milieu d'un bocage plein de mystère, sous
sont exprimés, comme ils le seraient chez Rembrandt, par une
les ombrages oia le maître se plaisait à disputer avec Phèdre sur
l'essence du beau. Socrate est enveloppé d'une robe, dont le ton
rouge est grandement rompu par les ombres transparentes et mul-
tipliées que forme la souplesse des plis. A ne voir que son masque
écrasé, faunesque et vulgaire, cette figure de Socrate serait sans
intérêt, sans dignité aucune, sans noblesse ; mais le peintre l'a représenté accompagné de son
génie, et, comme la peinture est un art qui doit donner un corps à toutes ses conceptions, il
est personnifié, ce génie, entourant d'une auréole de lumière le front du philosophe, dont il
semble faire éclore les pensées, comme un oiseau divin, sous la protection de ses ailes étendues.
La douce lumière qui émane de cet ange encore païen est une lumière surnaturelle, purement
idéale et qui vient de l'esprit, car le bocage est fermé aux rayons du soleil, le mystère en
creuse les ombres et les tranquillise. Cependant le tableau conserve une intensité sourde
par le contraste d'une masse verdoyante avec la robe rouge de Socrate. — Voir le n" 887.
N°''9i4, 9I), 916, 917 : Cinquième coupole. Les Sciences
Peintures à l'huile sur toile marouflée. — Dimensions, en diamètre vertical :
2'"2i; en diamètre horizontal : 2'"gi; en diagonale oblique : 2'"6y. — Les côtés
mesurent : i"'82, i'"76, i^oô, o'"65. — Cat. A. Moreau, p. 212.
1» Premier pendentif. — Mon de Pline l'Ancien. — Pline l'Ancien
Ltudie l'éruption du Vésuve sous une pluie de cendres et dicte ses
obser\ations à son secrétaire, pendant qu'un esclave accourt effaré
et leur annonce le désastre. — La surface des pendentifs présente la
configuration la plus ingrate, celle d'un hexagone irrégulier, plus
lirge que haut, posé comme un écu sur la pointe, et circonscrit en
ptrtie par des lignes courbes, n Incarcéré dans cette inexorable
.;cometrie — a dit Charles Blanc — le peintre n'en a pas moins
de\eloppé une à une les phases de son poème historique en se
i.onformant aux divisions de l'architecture. Pour concevoir une
pareille décoration, il fallait un esprit très élevé, très orné, une vaste compréhension de
l'histoire et de la civilisation antique, un sentiment original de toutes les légendes, un poète,
i844
L'ŒUVRE DE DELACROIX
239
et pour donner à cet ensemble tant de dignité, tant de tenue et tout l'éclat dont il resplendit,
il fallait un virtuose profondément instruit des lois de la couleur, initié à tous les secrets
de son art, il fallait un peintre supérieur, un coloriste de la plus haute volée. » Et certes,
Eugène Delacroix réunissait tous les dons heureux et toutes les savantes acquisitions que
signale Charles Blanc. — Voir le n" 888.
2» Deuxième pendentif. — Arislote décrit les animaux que lui
envoie Alexandre. — Assis sur un siège élevé, le philosophe grec
étudie et décrit les animaux inconnus'qu'Alexandre lui envoie des
pays d'Asie, qu'il parcourt en conquérant. Un esclave lui présente,
en l'amenant par les cornes, un bouc qui se cabre, un autre esclave
apporte dans ses bras une gazelle ; derrière eux, casque en tète,
attend un officier, le chef de la mission, qui lui aura apporté
quelque message de son royal élève. A la droite d'Aristote, un
bucrane est accroché au mur, et au-dessous se voient de grands
feuillages exotiques. — Nous continuerons h emprunter, lorsqu'il
y aura lieu, au ties remarquable article de Ch. Blanc, publié dans le journal le Temps
(6 mai iSIm), Ils réflexions que lui inspire la décoration de la bibliothèque de la Chambre
des députés, dont il a eu le courage, malheureusement tardif, de dire que « il n'a rien été fait
dans l'Ecole française de plus magnifique en peinture murale. » La conversion de l'auteur de
l'Histoire des peintres et de la Grammaire des Arts du dessin au génie de Delacroix a été
longtemps arrêtée par son culte pour l'art pur académique. — Voir les n"* 8S9 et 890.
3" Troisième pendentif. — Hippocrate refuse les présents du roi
de Perse. — Les satrapes envoyés par Artaxercès offrent au
médecin de Cos des vases précieux et des coffres d'or pour le
déterminer à venir en Perse pour y faire cesser une peste qui la
ravage. Hippocrate refuse avec dédain ces présents, ne voulant
pas aller porter des secours aux ennemis de sa patrie. — La sim-
plicité, la réalité, j'ai presque dit le « réalisme » du geste dans les
figures de Delacroix est pour nous une source toujours nouvelle
d'étonnement et d'admiration. Nul n'a eu un sentiment plus haut
des personnages historiques et ne les a mis en scène avec plus de
vraie noblesse ; nul cependant n'est arrivé h de tels résultats par
des moyens d observation plus exacts, plus près de la vie commune. L'Aristote que nous
venons de voir, par exemple, est posé dans l'attitude toute naturelle d'un expert à qui l'on
présente des tableaux pour les inventorier. Ici le geste du refus est le plus ordinaire, c'est-à-dire
le plus naturel aussi qu'on puisse imaginer. C'est par cette simplicité même qu'il réalise
l'expression la plus auguste. — Voir le n" 8yi.
4» Quatrième pendentif. — Archimède tué par le soldat. — Quand
les Romains prirent Syracuse après un siège de trois ans, leur
général, Marcellus, pénétré d'admiration pour le génie d'Archi-
mède, avait ordonne qu'on l'épargnât ; cependant il fut tué par
, un soldat qui lui avait ordonné de le suivre et auquel il ne se
pressait pas d'obéir. Sourd aux bruits du dehors, absorbé dans sa
méditation, l'illustre géomètre poursuit la solution de quelqu'un
de ces terribles problèmes qui ont permis de prolonger si longtemps
la résistance de cette ville, comme d'enlever les vaisseaux de la
flotte à l'aide de puissants leviers armés de crampons, et de les
briser contre des rochers ou de les briller à l'aide de miroirs
ardents. — Ce que nous disions tout h l'heure du réalisme du geste dans les figures composées
par Eugène Delacroix se vérifie ici de nouveau. Tous les artistes originaux procèdent de
même. J'étais en compagnie du statuaire Carpeaux, quand il fit sur un carnet de poche un
croquis d'après un ouvrier maçon couché sur un banc du boulevard de Courcelles; il me dit :
<c Ce sera une des figures du pavillon de Flore. » C'est en effet celle de l'homme au bœuf. —
Voir une variante à l'année 1854.
240
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1845
Année 1846
N° 918 : La Sibylle au rameau d'or
Toile. — H. i™90, L. i"3o. — Signé, non daté. — Salon de
1845. — Exposition universelle de i855. — N" 60 de la Vente
posthume: 3, 35o fr. à M. Haro. — Cat. A. Moreau, pp. 180, 3i2.
(' La pensée de gloire qui rayonnait dans le cerveau de Delacroix à
l'aube de sa vie », a dit en termes excellents M. Philippe Burty, n fut
traduite par lui en peintre, plus de vingt-cinq ans après. Il envoya au
Salon de 1845 : « la Sibylle montrant, au sommet de la foret téné-
breuse, le rameau d'or, conquête des grands cœurs et des favoris des
dieux. 1) Cette Sibylle (elle ne trouva un acquéreur qu'à la vente pos-
thume de l'atelier! ) avait les yeux ardents, la bouche hautaine, le
geste noble, la souple allure de mademoiselle Rachel, que Delacroix
admirait passionnément, » et — pouvons-nous ajouter — qui venait
souvent alors dans son atelier. Le poète Ch. Baudelaire, bien jeune encore, disait du même
tableau, en son <i Salon de 1845 » : « C'est d'une belle et originale couleur. — La tète rappelle
un peu l'indécision charmante des dessins sur Hamlet. — Comme modelé et comme pose,
c'est incomparable; l'épaule nue vaut un Corrège. »
N° 919 : Gœtz de Berlichingen écrivant ses mémoires
Toile. — H. 0^27, L.
née i836 et à Tannée
0"2o. — Voir la lithographie et la gravure sur bois, à Tan-
1843. — Cat. A. Moreau, pp. 35, 76.
N" 920 : Madeleine en prière
Toile. — H. o'"3i, L. o"'23. — Voir la tête d'étude n° 921. — Ap-
partient à M. Alexandre Dumas. — Non catalogué parM. Moreau.
Nous allons citer quelques mots de Baudelaire au sujet de la tête de la
Madeleine. « Elle est peinte», ajoute-t-il, « presque par hachures, comme
beaucoup de peintures de M. Delacroix j les tons, loin d'être éclatants ou
intenses, sont très doux et très modères; l'aspect est presque gris, mais
d'une harmonie parfaite. Ce tableau démontre une vérité soupçonnée
depuis longtemps et plus claire encore dans un autre tableau dont nous
parlerons tout h l'heure (le Marc-Aurèle), c'est que M. Delacroix est plus
'amais, et dans une voie sans cesse renaissante, c'est-à-dire qu'il
lort que )a
est plus harmoniste que jamais. » Dans un paragraphe d'introduction,
Baudelaire disait encore : « M. Delacroix est décidément le peintre le
plus original des temps anciens et des temps modernes... Il restera toujours un peu contesté,
juste autant qu'il faut pour ajouter quelques éclairs à son auréole. Et tant mieux! Il a le
droit d'être toujours jeune, car il ne nous a pas trompés, lui, il ne nous a pas menti comme
quelques idoles ingrates que nous avons portées dans nos panthéons. »
8a5
i<M
L'ŒUVRE DE DELACROIX
241
N" 92 1 : La Madeleine dans le désert
Toile.— Salon de 1845.— Exposition universelle de i855.— Cat. A. Moreau, p. 179.
C'est une tète de femme de grandeur nature, renverse'e dans un cadre très étroit. A droite,
dans le haut, un pan de ciel bleu. Les yeux de la Madeleine sont fermés, la bouche est noble
et languissante, les cheveux épars. Delacroix y attachait quelque importance, puisqu'il l'en-
voyait à l'Exposition universelle de i855 après l'avoir déjà fait figurer au Salon de 1S45.
« Nul, à moins de la voir, dit Baudelaire, ne peut imaginer ce que l'artiste a mis de poésie
intime, mystérieuse et romantique dans cette simple tête, u
N''92 2 : Christine à Fontainebleau
Toile. —Dimensions inconnues. — Gravé à l'eau-forte par Fré-
déric Villot, dans les dimensions de : H. o'"i92, L. o'"242.
Js — Avait appartenu à Alexandre Dumas. — Cat. A. Moreau,
" p. 87.
La scène est empruntée au célèbre drame en vers qu'Alexandre
Dumas fit représenter à l'Odéon en i83o sous le titre: « Stoc-
kholm, Fontainebleau et Rome, ou Christine de Suède » après
le succès éclatant de « Henri 111 et sa cour », joué l'année précé-
dente au Théâtre-Français. La reine couchée et dont le visage est
fortement éclairé par la lumière placée à la tète de son lit, se soulève vivement en entendant
les pas du moine qui s'approche en courant. Nous ne savons pas si c'est à la sollicitation de
Dumas que Delacroix fit ce tableau, mais cela ne paraît pas impossible quand on se reporte
à la lettre que l'artiste écrivit au romancier vers 1840 et où il s'excuse d'avoir vainement
tenté de faire une vignette pour un de ses livres, n Mettez-moi à l'épreuve », ajoute-t-il,
<( pour un des produits de mon industrie..., et ne m'en croyez pas moins bien votre ami
pour les objets de grande dimension. » — Nous ne savons ce qu'est devenu ce tableau.
N° 92^ : Marc-Aurèle mourant. — Esquisse
Toile. — H. o"'26, L. o"'32. — N° 5q de la Vente posthume: 1,000 fr. à M. Porzio.
— Non catalogué par M. Moreau.
N° 924 : Marc-Aurèle mourant
Toile. — H. 3'"oo, L. 3'"70. — Salon de 1845. — Exposition universelle de i855. —
Gravé sur bois pour Y Illustration dans les dimensions de : H. o™i37, L. o"'202. —
Appartient au musée de Lyon. — Cat. A. Moreau, pp. 180, 204.
La ville de Lyon acheta ce tableau à Delacroix en i858 seulement, et le paya 4,000 francs.
— Voici l'argument fourni par le livret: n L'empereur recommande la jeunesse de son fils
à quelques amis philosophes et stoïciens comme lui... » — <i Tableau splendide, magnifique,
sublime, incompris ! 1) s'écrie Baudelaire. — Les n"'' 925,926, présentent la même composition.
242
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1845
N" 92 5 : Marc-Aurèle mourant
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"22o, L. o"'2go. — Lithographie à la plume par
A. Rohaut, dans les dimensions de : H. o'"oq5, L. o"M25. — Vente posthume,
n" 346 bis. — • Vente Constant Dutilleux : 180 fr. à M. Detrimont. — Non catalogué
par M. Moreau.
N° 926 : Marc-Aurèle mourant
Dessin à la mine de plomb. — H. o'"2 2, L. o'^ag. — Partie du
n° 346 de la Vente posthume : 60 fr. à M. Arosa. — Reproduit
en fac-similé par A. Robaut dans les mêmes dimensions. —
A appartenu à feu G. Arosa, qui Ta reproduit en phototypie.
— Cat. A. Moreau, pp. i36, 296.
Delacroix travaillait alors à la décoration de la bibliothèque du
Luxembourg. Il avait donc l'esprit très occupé du monde antique.
Marc-Aurèle est un des personnages illustres qui figurent dans cette décoration. Il y a lieu
de penser que l'artiste avait primitivement choisi h cet effet le sujet qui nous arrête en ce mo-
ment, puis il y aura renoncé et l'aura exécuté sous forme de tableau.
N''927 : Le sultan du Maroc entouré de sa garde
Toile. — H. 3'"77, L. 3'"40. — Signé à gauche en bas et daté
1845. — Salon de 1845. — Voir dessins et variante aux années
1 844 et 1 862. — Au musée de Toulouse. — Cat. A. Moreau,
pp. 78, i36, 201.
Ce tableau fut acheté par l'État pour le prix de 4,000 francs et
donné au musée de Toulouse. — L'effet du parasol vert sur le
bleu du ciel est une des notes de couleur les plus audacieuses
qu'un peintre ait jamais tentées. Voyons ce qu'en dit Baudelaire :
(( Voilà le tableau dont nous voulions parler tout à l'heure quand
nous affirmions que M. Delacroix avait progressé dans la science
de l'harmonie. — En efi'et, déploya-t-on jamais, en aucun temps,
une pareille coquetterie musicale ? Véronèse fut-il jamais plus fée-
rique? Vit-on jamais chanter sur une toile de plus capricieuses
mélodies ? Un plus prodigieux accord de tons nouveaux, inconnus, délicats, charmants?
Nous en appelons à la bonne foi de quiconque connaît son vieux Louvre; — qu'on cite un
tableau de grand coloriste, où la couleur ait autant d'esprit que dans celui de M. Delacroix.
— Nous savons que nous serons compris d'un petit nombre, mais cela nous suffit. — Ce
tableau est si harmonieux, malgré la splendeur des tons, qu'il en est gris, gris comme la
nature — gris comme l'atmosphère de l'été, quand le soleil étend comme un crépuscule de
poussière 'tremblante sur chaque objet. — Aussi, ne l'aperçoit-on pas du premier coup ;
ses voisins l'assomment. — La composition est excellente; — elle a quelque chose d'inattendu
parce qu'elle est vraie et naturelle P. S. On dit qu'il y a des éloges qui compromettent,
et que mieux vaut un sage ennemi..., etc. Nous ne croyons pas, nous, qu'on puisse compro-
mettre le génie en l'expliquant. »
1^45
L'ŒUVRE DE DELACROIX
243
N^'^çiS, 929,930, 95 1,932,9)3,934,9} ')-,C}}6: Sultan du Maroc
.■^'^
Neuf croquis à la plume
et au crayon. — Réunis en
un lot à la Vente posthume.
— Appartiennent à M. A.
Robaut. — Noncatalogue's
par M. Morcau.
Nous reproduisons trois de ces croquis, qui ont été faits en vue du grand tableau du musée
de Toulouse. En ces premières recherches, Delacroix disposait le sujet en largeur et espaçait
davantage la composition. — Dans la seconde de nos trois vignettes il est" facile de recon-
naître le consul de France, qu'un interprète présente au sultan Muley-abd-er-Rahman.
N°^937, 938 : Le consul de France au Maroc
//^~î^ 1° Croquis rehaussé d'aquarelle. — H. o'"2i, L. o^oô. —
fc (vOi, Vente posthume. — Appartient à M. Armand Dumarescq.
r^iî-^ — ^'-'" catalogué par M. Moreau.
X^V~\^ 2° Dessin à la mine de plomb. — Vente posthume.
/^' ' A tient à M. A. Robaut.
Appar-
Non catalogué par M. Moreau.
Le premier de ces dessins est une recherche d'attitude pour la figure de M. de
"^ Mornay; il est debout, revêtu de l'uniforme officiel, le chapeau sous le bras et
'^ portant un sabre arabe en guise d'épée. C'est ainsi qu'on le voit dans un croquis
JT de l'article précédent. — Le second dessin est le portrait du consul. Delacroix
avait l'intention de mettre en scène la présentation de ce dernier à l'empe-
y renonça, et fit, du tableau de Toulouse, une œuvre purement pittoresque.
N"^ 939, 940 : Les adieux de Roméo et de Juliette
i" Toile. — H. o™62, L. o'"49. — Signé
à gauche et daté 1845. — Salon de 1846.
— Exposition universelle de i855. —
Appartient à madame Gabriel Delessert.
— Cat. A. Moreau, pp. 181, 191.
2° Croquis ii la sépia. — In-octavo. —
Etude pour le numéro précédent. —
Vente Riesener. — Non catalogué par
M. Moreau.
B Roméo et Juliette, sur le balcon, dans les
froides clartés du matin, se tiennent religieu-
sement embrassés par le milieu du corps. Dans cette étreinte vio-
lente de l'adieu, Juliette, les mains posées sur les épaules de son amant, rejette la tête en
arrière, comme pour respirer, ou par un mouvement d'orgueil et de passion joyeuse... Les
vapeurs violacées du crépuscule enveloppent cette scène. » (Th. Gautier.)
244
L'ŒUVRE nr. DE LACROIX
1845
N" 941 : Hercule
Lithographie. — H. o'"i?7, L. 0^090. — Sans trait carré. — Sans
lettre ni signature. ■ — Vente posthume : 5 t'r. — Cat. A. Moreau, p. ?4.
Evidemment Delacroix n'aura fait cette étude qu'en songeant au person-
nage de Commode pour son Marc-Aurèle mourant. Il voulait se rendre
familières les formes massives de l'hercule romain au moment de peindre
le César delà décadence. Parlant du oMarc-Aureleu Théophile Gautier avait
donc exactement pénétré la pensée de Eugène Delacroix : « L'empereur,
dit-il, est couché sur son lit de mort, grave, tranquille comme un chrétien
'qui a bien vécu, entouré de ses amis, dont les rudes visages ne laissent
pas transparaître la douleur. Le jeune Commode écoute d'un air ennuyé et
contraint les austères conseils de son père. Il a le front bas, les joues carrées,
un cou de taureau, une poitrine à vastes méplats, et fait déjà pressentir le belluaire, le gladia-
teur, l'infâme débauché, le fou furieux qu'il sera sous la conduite de Percnnis et de Cléandre. »
N" 942 : Odalisque
Toile. — H. o"'32, L. o'"40. — ■ Salon de 1847. — Lithogra-
phie par Debacq, dans les dimensions de: H. o'"i54, L. o"M88.
— Lithographie par Anastasi (essai inédit). — Appartient à
M. Dreux. — Cat. A. Moreau, pp. i25, 182.
La femme que nous qualifions Odalisque — sans autre raison que
de maintenir le titre donné par l'euphémisme du maître à ce tableau
— est couchée sur un lit recouvert d'une peau de tigre. Le corps
est entièrement nu, elle est accoudée sur un coussin. La tête repose
sur la main gauche. La main droite tient un coftVet d'où s'échappe un collier de perles. A
la tête du lit il y a un tabouret portant un verre et une carafe. Au-dessus, un rideau levé
laisse voir une serviette posée sur une tablette. Va pour Odalisque.
Il a passé une copie de ce tableau à la vente Martin-Coster, en mai 1880. Elle est signée
au bas, à droite, du nom du maître, et n'est pas de sa main. Elle mesure : H. o'"25, L. o"'40.
N"94) : Hamlet devant le corps de Polonius
h deux pas
le roi. A la
Toile. — • H. o"58, L. o"'48. ■ — Signé à droite, non daté. —
Exposition d'Alsace-Lorraine, juillet 1874. — Photographié par
Braun. — Voir la lithographie originale à l'année i8?4. — Vente
Edwards, 7 mai 1870 : 16,700 fr. à M. G. de Candamo; vente
Carlin, 29 avril 1872 : 17,000 fr. à M. Febvre. — Appartient à
XL Fanien. — Cat. A. Moreau, p. 1 52.
Delacroix était pénétré de « la nécessité qu'il y a à mûrir une idée
et à la retourner de plusieurs manières. » (Ces mots sont de lui.) Ce
tableau est un précieux exemple de retour sur l'œuvre de premier jet.
On se rappelle que la scène de violence entre Hamlet et sa mère se passe
du cadavre de Polonius, qu'il a frappé au travers de la tapisserie, croyant frapper
fin de la scène, la reine s'enfuit. Resté seul en proie à une surexcitation nerveuse
1843
L'ŒUVRE DE DELACROIX
24D
poussée au dernier degré, Hamlet soulève la tapisserie et jette k la dépouille du vieux fou tué
par méprise, une dernière in]ure. Dans un des croquis que nous avons reproduits,' Hamlet
debout en lace du cadavre, regarde sa victime avec une sorte d'étonnement mêlé de remords'
Avec quelle allure de triomphe, au contraire, avec quel sourire et quel écrasant dédain!
Hamlet ici soutient a tenture, le poing haut, et laisse tomber sur cette guenille de vieillard
qu U pousse du pied, son regard h demi-égaré et ces paroles méprisantes : « Vraiment ce
conseiller est maintenant bien tranquille, bien discret, bien grave, lui qui, vivant était' un
drôle si mais et SI bavard ». o 1 m , , l ui.
N*'" 944, 945 : Montagnards des Eaux-Bonnes
1" Croquis à la mine de plomb. — H. o'"3o, L. o"'2o.
— Vente posthume.— Non catalogué par M. Moreau.
2" Croquis à la mine de plomb. — H. o"'3i, L. o°Mq.
Vente posthume. — Non catalogué par M. Moreaû.
^Au mois de juillet 1845, Delacroix alla passer une courte
saison aux Eaux-Bonnes, dans les Pyrénées, où il se ren-
contra avec Paul Huet et Camille Roqueplan. Dans ses
lettres, il se plaint amèrement des bals, des raouts, des
pianos, des élégants, des conversations oiseuses. Il écrit à
F. Villot : « Ce qui vaut mieux que les habitants étrangers,
ce sont les naturels, hommes et femmes, dont le costume est
charmant, les femmes surtout. Le pays est magnifique. C'est la montagne dans toute sa majesté.
Il y a vraiment à chaque pas, à chaque détour de sentier, des sites ravissants ; ayez avec
cela les pieds d'une chèvre pour escalader les montées, et vous avez la jouissance complète
du pays. Je vous garde le plus intéressant pour le dernier. Je veux parler de Goya. Je
m'étais muni à Paris de renseignements et de lettres de M. Dauzats pour différentes per-
sonnes à ce sujet. J'ai perdu en route un carton où il y avait des dessins, ces lettres et vos
renseignements. C'est ce que je regrette le plus. » {Lettres de E. Delacroix, édition Burty.)
N° 946 : Lessiveuses des Pyrénées
Croquis à l'aquarelle. — In-quarto. — Vente F'orget. — Non
catalogué par M. Moreau.
Le 26 juillet, Delacroix écrit à M. Pierret : « C'est de la mon-
tagne pour tout de bon, et quoique je n'aie pas vu les parties les
plus remarquables, je m'en tiens satisfait. Le costume des indigènes
i.st aussi très joli : celui des femmes est plein de caractère et très
inspirateur. On n'entend de tous côtés que chutes d'eau qui vous
(ont croire qu'il pleut à chaque instant...» La veille, il écrivait à
M. Riesener : oJusqu'ici je n'ai fait que me promener sur les routes,
excepté quatre ou cinq jours que j'ai passés avec mon frère, qui a
loue une petite campagne sur les bords de la mer, près Bordeaux, et je ne suis pas du tout
remis de cette fatigue. La nature est ici très belle; on est jusqu'au cou dans les montagnes et
les effets en sont magnifiques. Ce qui m'a plus étonné encore que leur beauté, c'est l'indiffé-
rence avec laquelle tout le monde les regarde, y compris les artistes, y compris Roqueplan
et Huet, que j'ai trouvés tous deux ici : le premier va très bien, le second n'a pas pu se
faire aux eaux et lésa suspendues. » [Lettres, édition Burty.)
246
LŒUVRE DE DELACROIX
1845
N'"" 947, 948 : Lions de La Fontaine
I" Le Lion makide et le Renard. — Dessin à Li plume. — In-octavo.
— Collection de M. Feuillet de Conches. — Exposition d'Alsace-
Lorraine, 1874. — Non catalogué par M. Moreau.
2° Le Lion et le Moucheron. — Dessin à la plume. — In-octavo.
— Appartient à M. Feuillet de Conches. — Non catalogué par
M. Moreau.
Il faut avoir très présent à l'esprit le sujet de ces deux fables de La Fon-
taine pour le retrouver au moins dans le premier dessin, « le Lion malade
et le Renard », où le renard est bien peu visible. Mais, si comme l'imagine
'" ~ ' M. Feuillet de Conches, tel est, en effet, le motif du dessin, il en faut con-
clure que Delacroix n'y a vu qu'un prétexte h mettre en mouvement ses animaux favoris.
N"*" 949, 950 : Croquis divers
J^^l^
HJ
i" Croquis à la plume. — In-folio. — Reproduit
en fac-similé phototypographique pour le journal
L'Art, n° du 14 novembre 1875, clans les dimen-
sions de : H. o™ig2, L. o'"2go. — Non catalogué
par M. Moreau.
2° « Il Pensiero. » — Croquis à la plume. —
L. o^ioy. — Gravé sur bois par Froment pour le
H.u'"iio,
journal Z,'.4r^, n°du 14 novembre 1875, dans les mêmes dimen-
sions. — Non catalogué par M. Moreau.
Ces deux feuilles de croquis appartiennent à M. Philippe Burty ; elles sont chargées de
notes manuscrites et de pensées du maître. Leur publication dans l'Art accompagnait un
très intéressant article de M. Maurice Tourneux, intitulé : « Prosper Mérimée, ami de
Delacroix, ses dessins et ses aquarelles. »
N" 9^ I : Deux Indiens lowais
Croquis à la mine de plomb. — H. o'"26, L. 0^17. — On lit au
bas : « Odi ji be wais. » En haut : « Donné à Jennv Le Guillou.
Eugène Delacroix. » — Non catalogué par M. Moreai^i.
Eugène Delacroix avait un plaisir extrême à voir les Indiens lowais
amenés à Paris par Catlin en 184?, et il faisait, d'après ces sauvages, des
. croquis de souvenir au lavis, au crayon et à la plume. La plupart de ces
naïves images sont enlevées au pinceau d'aquarelle. Il comparait quelques-
uns de ces sauvages aux sculptures antiques.
% Le chef brandissant sa lance, c'est Ajax défiant les dieux. Dans la danse du
scalp, les femmes sautent sur les orteils avec une allure si noble, si mysté-
a lance avec le scalp au bout, qu'elles rappellent les vierges des Panathé-
(Soiivcnirs de M. de Planet.]
1843
L'ŒUVRE DE DELACROIX
247
ÉTUDES ET PROJETS POUR LA
BIBLIOTHEQ.UE DU PALAIS DU LUXEMBOURG
N° 9^2 : Études pour l:i coupole
Soixante-dix feuilles de dessins et croquis.
Non catalogue" par M. Moreau.
Numéro 256 de la Vente posthume.
N° 955 : Pyrrhus et Annibal
Dessin mine de plomb. — H. o"'258, L. o'"i40. — Reproduit en
fac-similé par A. Robaut dans les dimensions de : H. o'"258, L. o"M4o.
— N''259 de la Vente posthume, gS fr. à M. A. Robaut. — Non catalogué
par M, Moreau.
On remarquera toujours chez Delacroix la grande signification de l'idée. 0 II
-i détestait les vagues conceptions d'Ary Schener, si étrangement surnommé par
M. Guizot « le peintre des âmes ». Un élève allait commencer un tableau :
Saint Augustin assis avec son ami sous un figuier et tourmenté par le doute.
« Il est difficile au spectateur, » dit Delacroix, « de comprendre en peinture un pareil sujet : »
La peinture, la musique, cependant, peuvent rendre un état d'âme nettement caractérisé ;
mais de telles subtilités ou des paroles, non pas.
N" 9^'4: Groupe des Grecs illustres
Dessin mine de plomb. — H. o"'22, L. o'"2q. — Exposition
Durand-Ruel, 1878. — Lithographie à la plume et cliché par
M. A. Robaut dans les dimensions de : H. o"'o68, L. o"%t 17. —
N" 260 de la Vente posthume. — Vente C. Dutilleux, mars 1874 ■
5o5 fr. à M. A. Robaut. — Non catalogué par M. Moreau.
L'élève de Eugène Delacroix dont nous parlions au numéro précédent'
était resté frappé de la lecture des Confessions. Delacroix ajouta :
« Alors c'est différent. Etre frappé est, pour faire un tableau, la chose essentielle. Ce qu'un
homme ne voit pas en peinture, un autre peut l'y trouver. »
N" 95 5 : Figures de Sages et de Muses — Études
Quinze feuilles de dessins et croquis. — N° 263 de la Vente posthume,
catalogué par M. Moreau.
Non
248
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1845
N° 956 : Alexandre et les poèmes d'Homère
nouvelle
laquelle
preuve,
il faisait
Croquis à la mine de plomb, de forme cintrée du haut et
elliptique à la base. — H. o"'i42, L. o"'2i5. — Vente pos-
thume, partie du n° 262. — N°7gdela vente Marmontel, i883
sous le titre : « Dessin d'éventail ») : 60 francs. — Non
catalogué par M. Moreau.
Ce projet re'sume héroïquement, en sept figures, la composition
adoptée détinitivcment pour décorer la voussure de la croisée à la
bibliothèque du Luxembourg. Cette composition nous fournit une
énorme travail que Delacroix s'est imposé, et de la facilité avec
oir ses personnages en un champ de forme quelconque.
N^p^- : Appelles peignant Alexandre
Dessin mine de plomb. — In-quarto. — N" 2 5 de la Vente posthume : 90 fr. à
M. Bornot. — Non catalogué par M. Moreau.
N° 958 : Groupe d'Homère
Toile grisaille. — H. o'"45, L. o'"58. — N°8 de la Vente posthume, 295 fr. à M. Etienne
Arago. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 9^9 : Composition de l'hémicycle
Dessin. — In-folio. — N" 261 de la Vente posthume : i i 3 fr. à M. Marmontel. —
Non catalogué par M. Moreau.
N° 960 : Composition de rhémicycle
Esquisse peinte de forme semi-hémisphérique. — N° 9 de la Vente posthume :
jSo fr. à M. Plot. — Non catalogué par M. Moreau.
N" 961 : La Muse d'Orphée
Toile hexagonale. — H. o'"25, L. o'"27. — N" i 1 de la Vente posthume : 3oo fr. à sir
F. Leighton. — Non catalogué par M. Moreau.
'^'^4-^ L'ŒUVRE DE DELACROIX
■-!49
N° 962 : La Muse d'Orphée
Toile hexagonale. — H. o"M5, L. o'"i5. — N" 10 de Ui Vente posthume. — Non
catalogué par M. Moreau.
N° 96^ : La Muse d'Aristote
Toile hexagonale. — H. o"M5, L. o"M5. — N" 10 de la Vente posthume. — Non
catalogué par M. Moreau.
Toutes ces réductions des pendentifs sont peintes en imitation de vieux lironze sur tond d'or.
N° 964 : Saint Jérôme — sans changement
Toile hexagonale. — H. o"'25, L. 0,27. — Signé à droite en haut. — Vente Théophile
Gautier, 1873 : 1,000 fr. à M. Sichel. — Cat. A. Moreau, p. 265.
N" 96^ : Saint Jérôme
Toile hexagonale. — H. o'"i5, l.. o'"i5. — N° 10 de la Vente posthume (les quatre
pendentifs) : 820 fr. à M. Haro. —Cat. A. Moreau, p. 265, 3o8.
N° 966 : Cicéron
Toile hexagonale. — H. o"'i5, L. o'"i5. — N° 10 de la Vente posthume. — Non
catalogué par M. Moreau.
BIBLIOTHÈQ.UE DU PALAIS DU LUXEMBOURG
Peintures décoratives exécutées au palais du Luxembourg, à Paris. La décoration de
la bibliothèque, commencée en 1845, fut terminée en 1847. Elle se compose
d'un hémicycle, d'une coupole et de quatre figures d'angles en pendentifs. Toutes ces
peintures sont exécutées sur toile marouflée. En cette œuvre, Delacroix a voulu
traduire, non pas tant la pensée même de Dante, forcément circonscrite aux données
du catholicisme, que celle que suggère à un homme de notre temps la lecture du
quatrième chant de VEn/er, c'est-à-dire la glorification du génie humain. — Le
dimanche 7 décembre 1879, la bibliothèque faillit brûler à quatre heures du soir;
avec elle aurait disparu l'une des œuvres les plus glorieuses de notre siècle.
L'ŒUVRE DE DELACROIX
1843
N" 967 : Hémicycle
Toile. — Diamètre 6"'8o, Développement io'"20. — Cat. A. Moreau, p. 2i3
Le sujet est tir<J de l'histoire littéraire de la Grèce. Alexandre, après la bataille dWrbelles, fait
enfermer les œuvres d'Homère dans une cassette d'or abandonnée par l'ennemi.
A la lisière d'un bois de palmiers et devant un immense trophée de dépouilles. Alexandre est
assis sur le magnifique trône du vaincu, et, d'un geste noble, il fait renfermer le précieux
trésor, tandis que ses soldats en foule apportent les étendards conquis. La Renommée vient
offrir au conquérant la couronne et la palme. Toutes les figures des divers groupes mérite-
raient une profonde analvse, car il n'y a pas une négligence dans cet ensemble épique qui,
tout bien considéré, est peut-être le chef-d'œuvre des compositions de Delacroix. Nulle part,
d'ailleurs, il n'a exprime le moindre regret à son sujet, comme il l'a fait, par exemple, pour
les hémicvcles de la bibliothèque du Palais Bourbon. — Aux pieds d'Alexandre arrive la
suite si touchante de Darius, touchante surtout par une idée aussi bien exprimée que pensée.
Il n'en est peut-être pas de plus poignante dans aucune création d'art des temps anciens et
modernes. Les deux malheureux fils du vaincu sont accompagnés d'une suivante qui, pen-
chée sur eux. les console amicalement. Elle-même est vêtue à la façon d'une pleureuse; sa
draperie ne fait qu'un long pli — une larme qui coule jusqu'à terre. — L'aine des enfants,
enveloppé d'une simple étoffe, baisse légèrement la tête, et semble hésiter à offrir au vain-
queur, pour le fléchir, cette fleur qu'il tient en main. Mais c'est son jeune frère, nu comme
1 humble vérité, qui déchire le cœur. N'envoie-t-il pas, l'innocent, un baiser de paix à celui
qui cause la ruine des siens! Plus âgé, il aurait peut-être le sentiment de son action et
pourrait en rougir... Cet ordre, il ne l'exécute d'ailleurs que sous l'empire d'une seconde
mère, dont la tâche est de sauver ces frêles existences. Devant lui, une femme à genoux pré-
lude à l'émotion de ce groupe désolé. Par derrière, une vieille femme, en proie h de tristes
remords, se crispe les mains. Assise à terre, elle lève les yeux vers une grande et fière créa-
ture, qui s'abandonne à sa destinée, le front ceint du diadème, les bras pendants. Tout au-
tour les généraux sont forcés de déposer les armes. — Au côté opposé et au delà du groupe
qui s'intéresse aux poèmes d'Homère, on aperçoit les fuyards en déroute renversés par les
chevaux éperdus ou traînés par les chars brisés.
1845 L'ŒUVRE DE DELACROIX 25l
N" 968 : Coupole
Toile. — Diamètre 6'"8o, Développement 20™4o. — Cat. A. Moreau,pp. 213-214.
La composition forme quatre parties ou groupes principaux, mais sans solution de continuité.
Au premier groupe, Dante est présenté par Virgile à Homère, qu'entourent les plus illustres
poètes. Ce groupe iait face à la fenêtre. Le second groupe est celui des Grecs illustres; on y
voit un génie ailé décernant la palme à Socrate. Au troisième groupe, Orphée par les sons
de sa lyre charme les humains et apprivoise les bêtes. Le quatrième groupe est celui des
Romains illustres; il réunit Porcia, Marc-Aurèle, César, Cicéron, Trajan.
E. Delacroix a l'audace réfléchie de ses convictions et de ses intuitions (car il devine beau-
coup). Le premier, il a osé retirer aux héros du paganisme et de la Fable leur masque de
marbre. C est dans ses peintures décoratives du Luxembourg et de la Chambre des députés
qu'il faut étudier l'interprétation moderne et pittoresque de l'antiquité historique. J'indique
tout d'abord, a lin de n'y plus revenir, la double difficulté que l'artiste avait h vaincre et
qu'il a vaincue dans la décoration de la bibliothèque du Luxembourg. L'une pouvait em-
barrasser le praticien, l'autre l'artiste, c'est-à-dire l'inventeur, le créateur. La surface que
E. Delacroix devait couvrir a la forme d'une coupole éclairée seulement par une fenêtre
placée en contre-bas, au niveau du parquet et dans une retraite profonde pratiquée dans
l'une des parois latérales de la bibliothèque. L'eft'et de cette disposition architecturale est
facile à concevoir; la lumière n'arrivant que d'un seul côté, de bas en haut et d'un point
assez éloigné, un grand tiers de la coupole reste plongé dans une pénombre inévitable,
même pendant les plus beaux jours, dans une ombre complète, lorsque le ciel est couvert.
C'est dans de semblables circonstances que se manifeste ouvertement l'incomparable science
de E. Delacroix, sa merveilleuse entente de l'art de peindre, son éclatante supériorité sur les
artistes de l'école française. Toute composition était destinée en cet endroit h rester en
partie noyée dans une impénétrable obscurité, si, par un suprême effort de la couleur, l'ar-
tiste ne réussissait à trouver pour la zone de l'ombre les tons les plus légers, les plus clairs,
les plus propres à réfléchir chaque parcelle de lumière, sans néanmoins retirer rien de leur
valeur normale aux sujets de la zone éclairée. Un peintre bien intentionné, mais moins
savant, moins coloriste, puisqu'il faut nommer cette aptitude particulière à E. Delacroix,
qu'on lui a tant reprochée en la comprenant si peu. un peintre moins coloriste, désireux
d'obvier à cet inconvénient, n'y fût arrivé qu'à l'aide de violents contrastes, d'oppositions
heurtées et systématiques. C'est par une série de dégradations successives, mathématiquement
exactes, quoique conçues d'instinct, que Delacroix a réussi à neutraliser les dispositions
défavorables de l'architecture, et à réaliser une œuvre d'une parfaite unité de ton et d'aspect.
Je n'ajoute que pour mémoire qu'à l'égal des maîtres italiens, il a fait se dresser et seniou-
voir les figures de sa coupole selon les lois de l'équilibre vertical, malgré la courbe sphérique
de la surface peinte. Ceci est bon à rappeler aux personnes qui croiraient trop tacilement,
pour l'avoir entendu dire, que E. Delacroix ne sait pas dessiner. La seconde difficulté contre
laquelle l'artiste avait à se défendre est toute morale. Un homme qui a quelque hauteur
d'esprit n'accepte pas volontiers l'héritage de la banalité. Or, la décoration d'une biblio-
thèque exige une série de motifs tellement prévus et si souvent reproduits, qu'il est rnalaisé
d'échapper au danger des redites, ou seulement des réminiscences. Comment varier cet
inévitable sujet ? Grouper dans un espace donné le plus grand nombre de personnages illus-
tres dans les lettres ou les arts: Homère, Socrate, Platon, Virgile, Ovide, etc., les noms
arrivent en foule et ont été l'objet de mille compositions antérieures. Plus d'un peintre —
même de mérite — eût échoué contre ce thème usé comme un lieu commun. La difficulté
se compliquait pour E. Delacroix d'une contrainte toute nouvelle, imposée à la nature même
de son talent, qui ne s'était révélé jusque-là que dans la turbulence de la passion et la
fièvre du mouvement. J'ai dit comment le praticien avait triomphé d'un obstacle purement
matériel, la fausse distribution delà lumière; voyons maintenant comment l'artiste a triomphé
de ces obstacles d'une autre nature. C'est à un poète que le peintre a emprunté le sujet de
sa composition. Au seuil de l'enfer, Dante a entendu se moduler les soupirs pénétrants et
L'ŒUVRE DE DELACROIX
■84:
résignés des hommes purs, des poètes, des guerriers célèbres qui, avant la naissance du
Christ, emplirent le monde de leur nom. C'est par l'Elysée des Sages qu'il entre dans
l'abîme. E. Delacroix a paraphrasé mot à mot, et même en y ajoutant quelques détails, ce
quatrième chant de YEnfer. Il a divisé sa composition en quatre grandes parties. Le groupe
principal, qui reçoit la lumière, est dominé par l'imposante image d'Homère, vers qui
s'avance, le genou à demi ployé, le poète de la Divine Comédie, guidé par le chantre de
l'Enéide. Autour du sublime aveugle se pressent Horace. le satirique; Ovide, l'auteur des
Tristes: Lucain, tenant au poing le clairon de la Pharsale. Leurs yeux s'ouvrent d'une
sereine et bienveillante curiosité sur leur jeune frère qui, vivant, est descendu dans les
limbes, d'où, par la faveur des dieux, il ressortira vivant. La plus touchante figure de ce
groupe, à mon sens, celle par où E. Delacroix a rendu la plus grande somme de vie inté-
rieure au monde antique, c'est la figure d'Ovide, sur laquelle il est revenu à plusieurs
reprises. L'une des coupoles de la Chambre des députés représente Ovide che^ les Scythes,
et il a traité le même sujet dans les dimensions d'un tableau de chevalet. Le poète qui écrivit
les Amours, tes Héroides, l'Art d'Aimer, les Fastes, exerce une séduction visible sur l'âme
du peintre. Mais ce n'est pas dans l'heureuse fortune qu'il le préfère, ce n'est pas au moment
de la faveur du prince, aux heures frivoles et légères; c'est dans la douleur de l'exil. L'artiste
a pénétré et rendu, avec une puissance d'analyse morale très vigoureuse, cette fine et douce
phvsionomie élégante et voluptueuse, un peu molle, mais digne et charmante. Au groupe
d'Homère, il est intéressant de comparer celui d'Orphée qui lui fait face. Le poète des
temps héro'iques y est représenté recevant ses tablettes des mains de Sapho, et dictant à
Hésiode, sous l'inspiration de la Muse, les tradi